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Sébastien : Justice ? ? ?

Mise en ligne : 16 septembre 2003

Dernière modification : 15 mai 2005

Texte de l'article :

« C’est lorsque l’on est dedans que l’on se rend compte à quel point la Prison est injuste. Avant d’y être moi-même confronté, cela ne m’avait même pas effleuré. Comme chacun, je pensais qu’il fallait bien quelques barrières pour que la société puisse se défendre de ses mauvais éléments. Aujourd’hui si je n’ai pas de solution (que faire de quelqu’un de véritablement dangereux, récidiviste en puissance ?), je sais expérience à l’appui que la prison n’est pas une solution. On ne soigne pas le "Mal" par le " Pire".
Ici, l’homme n’est plus qu’un numéro. Son crime, son délit lui tient lieu d’identité. Dix mètres carrés pour vivre, survive, quelques minutes de sortie par jour, une télé... La possibilité d’écrire sachant que tout courrier sera ouvert et lu. Lettres privées, lettres d’amour... Ma vie ne m’appartient plus. Je n’existe plus ou si peu... »

« Le créneau de mon existence est infiniment réduit. Moi qui déjà le trouvait trop étroit ; j’étouffe. Seuls mes rêves m’évadent de temps à autre de cet enfer. Je crie, je pleure mais personne n’entend... Personne n’écoute... Si quelques-uns sont attentifs, ils ne peuvent comprendre. L’isolement par définition ne se partage pas. Seul mon stylo m’aide à survivre, il m’aspire à l’évasion, à l’ailleurs imaginaire ; le seul que je puisse atteindre dès lors. Les détails infimes de ma captivité prennent des proportions que nul ne peut imaginer, s’il n’en a lui-même fait l’expérience. Ici tout se distord. Tout est disproportion. L’exemple devrait nous aider à nourrir nos faiblesses, la chaleur humaine à rectifier nos erreurs . Il n’en est rien. Ici, l’intolérance est de mise. La haine, la colère, la rancune, l’absence de compassion sont l’ordinaire des jours. L’ennui omniprésent se nourrit sans arrêt d’histoires scandaleuses. Il me gonfle le ventre. La saveur est amère. Une justice qui punit, ce n’est pas la Justice. Certains ici, respirent l’honnêteté, quand d’autres dehors, sentent le mensonge à plein nez. L’hypocrisie administrative, elle même est une injure. Personne ne mérite cela. »

« Alors, que dois-je faire ? Attendre me dit-on. Demain sera meilleur. La vie recommence dans quelques mois. Quand tu auras payé, plus léger tu seras. Mais je sais maintenant, le boulet détaché, les marques resteront. »

Sébastien

Extrait du mémoire "Ecrire pour survivre" d’Anne-Julie Auvert