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Proposition sur la lib ?ration conditionnelle

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Date : 17-07-2008

(2008-04) Proposition sur la libération conditionnelle

Mise en ligne : 5 avril 2008

Dernière modification : 17 juillet 2008

Dans le cadre du collectif octobre 2001, des organisations ont mené une réflexion sur la libération conditionnelle. Les organisations signataires recommandent la mise en place d’un système mixte, discrétionnaire et d’office.

Texte de l'article :

PROPOSITION D’ORGANISATIONS ISSUES DU COLLECTIF OCTOBRE 2001
SUR LA LIBERATION CONDITIONNELLE

Les organisations signataires recommandent la mise en place d’un système mixte, discrétionnaire et d’office, avec l’effectivité de l’examen de la libération conditionnelle à mi-peine et la mise en œuvre automatique de celle-ci, au plus tard aux 2/3 de la peine. Ce serait ainsi contribuer à une véritable politique d’individualisation des peines et répondre au double objectif de la peine : sanctionner et réintégrer.

En préambule, nous rappelons les termes du dernier texte d’orientation du collectif Octobre 2001, "Sanctionner le crime dans le respect des droits de l’Homme". Le collectif s’inspire des recommandations du Conseil de l’Europe et, notamment, de la Recommandation "sur le surpeuplement des prisons et l’inflation carcérale", adoptée le 30 septembre 1999 et la Recommandation "sur la libération conditionnelle" adoptée le 24 septembre 2003. Il demande l’application effective des Règles Pénitentiaires Européennes.

Dans cet esprit, le collectif s’est prononcé pour l’abolition de la peine de réclusion à perpétuité, pour la révision à la baisse de l’échelle des peines, et pour l’exécution effective, en milieu ouvert, de toutes les peines d’emprisonnement prononcées pour moins d’1 an (1).

Alors qu’un projet de loi pénitentiaire devrait être prochainement en débat devant le Parlement, il apparaît indispensable que la France se dote d’une culture de la peine qui ne privilégie plus l’enfermement et qui affirme clairement que la peine d’emprisonnement se purge à la fois en milieu fermé et en milieu ouvert. 

Plusieurs organisations du collectif octobre 2001 (7 à ce jour) sont favorables à l’introduction, dans le droit français, d’une libération conditionnelle d’office, dispositif à même de lutter efficacement contre la récidive et de recentrer la prison sur sa mission de préparation au retour dans la société de la personne condamnée.

Le rapport "Warsmann" en 2002, le rapport du Conseil Economique et Social en 2006, et l’avis de la commission nationale consultative des droits de l’Homme (CNCDH) du 14 décembre 2006 recommandent tous le recours à la libération conditionnelle. La CNCDH préconise l’introduction en droit français du système de libération conditionnelle d’office.

Il est paradoxal, alors que la loi du 15 juin 2000 voulait favoriser l’aménagement des peines, que les libérations conditionnelles soient en déclin permanent. Elles représentaient 13,1% en 2001 et sont tombées à moins de 10%. Elles sont supérieures à 50% dans 14 pays d’Europe (2) .

Le rapport du Comité d’Orientation Restreint de la future loi pénitentiaire préconise de "donner une nouvelle impulsion à la libération conditionnelle instrument incontestable de la lutte contre la récidive" .

Nous, organisations du collectif Octobre 2001 mentionnées ci-dessous, proposons, dans le respect du principe de l’individualisation de la peine, une refonte complète de la libération conditionnelle. Nous recommandons la mise en place d’un système mixte, discrétionnaire et d’office, avec l’effectivité de l’examen de la libération conditionnelle à mi-peine et la mise en œuvre automatique de celle-ci, au plus tard aux 2/3 de la peine. Il ne pourrait être dérogé à l’automaticité de la libération conditionnelle que de manière exceptionnelle et motivée, sans que cette dérogation ne puisse être fondée sur l’absence de projet de la personne condamnée et sur le comportement en détention. Ce serait ainsi contribuer à une véritable politique d’individualisation des peines et répondre au double objectif de la peine : sanctionner et réintégrer.

1- Une proposition respectueuse du principe d’individualisation des peines :

Fondement du droit pénal moderne, le principe d’individualisation des peines doit être réaffirmé avec force. Sans individualisation suffisante et réfléchie, la sanction ne peut être juste, comprise et correctement exécutée.

L’introduction d’un système de libération conditionnelle d’office ne contrarie en rien ce principe.

D’une part les possibilités pour les magistrats d’individualiser la peine demeurent à chaque étape de la procédure : prononcé de la peine, octroi d’une mesure d’aménagement en cours d’exécution de la peine et détermination des obligations, révocation d’une mesure d’aménagement.

D’autre part, il est possible de considérer que l’introduction d’un système de libération conditionnelle d’office ne constitue pas une atteinte au principe d’individualisation de la peine. Cela revient à dire que toute peine privative de liberté s’exécute pour partie en milieu fermé et pour partie dans la communauté. Il s’agit de supprimer la sortie sèche.

Enfin, l’introduction d’un tel dispositif ne saurait être envisagée sans une réflexion sur la suppression de mesures telles que les crédits de réductions de peine ou les décrets de grâces collectives, dispositions attentatoires au principe d’individualisation de la peine.

2- Une proposition qui ne saurait être taxée de laxisme

Dans son principe, une libération conditionnelle ne signifie pas une "réduction" de la peine. Elle en demeure constitutive. Son exécution se fait en milieu ouvert, de manière à accompagner la réintégration dans la communauté.

Cela suppose donc qu’elle peut être envisagée le plus tôt possible après le prononcé de la peine. L’aménagement de son exécution doit être envisagé de manière pragmatique et évolutive. La libération conditionnelle demeure l’exécution d’une peine en milieu libre. Il faut abandonner la fausse idée que la libération conditionnelle serait une "faveur", accordée aux personnes incarcérées particulièrement "méritantes".

La libération conditionnelle n’est pas la fin de la peine, elle est assortie de multiples interdictions et obligations qui font l’objet d’un contrôle rigoureux. Et le non-respect de ces obligations peut amener le condamné à être à nouveau incarcéré.
Ces obligations et interdictions sont à même de garantir le respect des intérêts de la victime (interdiction de résidence dans certaines zones, interdiction d’entrer en relation avec la victime, obligation d’indemnisation...) et de favoriser l’insertion sociale de la personne (obligation de soins, de travail...).
La mesure de libération conditionnelle est d’ailleurs suffisamment contraignante pour être parfois rejetée par la personne détenue elle-même, qui en a le droit et doit le conserver.

En terme de durée de détention, il est également intéressant de remarquer qu’une peine dont le dernier tiers s’exécute en libération conditionnelle et une peine amputée de réductions de peine et décret(s) de grâce sont de durée sensiblement équivalente.

De toutes les manières, nous estimons significatif de rappeler que toute personne incarcérée est amenée à sortir un jour de prison, et que la libération conditionnelle contribue à réduire le risque de récidive. L’exécution de la peine doit donc favoriser l’intégration ou la réintégration des personnes condamnées, ainsi que la prévention de la récidive.

3- Un formidable levier pour faire changer la prison

L’intérêt de ce dispositif en terme de prévention de la récidive et de réinsertion sociale des personnes sortantes de prisons est évident. Mais la conséquence la plus spectaculaire de l’introduction d’un système de libération conditionnelle d’office sera celle qui viendra profondément modifier l’organisation et le fonctionnement des établissements pénitentiaires. L’espoir de voir changer le système carcéral français justifie à lui seul la consécration législative de ce projet. En effet, cette innovation nous parait de nature à constituer un levier, extrêmement puissant, à même de permettre à l’administration pénitentiaire de dépasser la mission de garde pour placer au cœur de son fonctionnement la mission de préparation à la sortie et de réinsertion sociale.
La libération conditionnelle d’office crée une obligation de préparation à la sortie pour l’administration comme pour le condamné.
Ne tenons-nous pas, par ce biais, une occasion inespérée de voir enfin la prison organisée différemment ? De voir enfin posée la question du contenu de l’incarcération ?
La peine d’emprisonnement n’a de sens que si elle prépare à une sortie soigneusement encadrée, dans un dispositif d’accompagnement professionnalisé. Le maintien des liens avec l’extérieur demeure une priorité. C’est en effet la protection de ces liens qui facilitera le retour à une activité professionnelle, à un hébergement, et plus globalement, permettra une réintégration pleine et entière dans la communauté.

Pour engager les personnes incarcérées dans un processus actif de réintégration, l’Etat doit assurer la mise en place de moyens humains et budgétaires, notamment, l’augmentation importante du nombre des JAP (juge de l’application des peines) et des personnels des SPIP (service pénitentiaire d’insertion et de probation). L’accès aux outils de communication modernes doit être garanti aux personnes incarcérées pour leur permettre, entre autres, l’accès aux offres d’emploi et de formation. Pour cela, la concertation des collectivités territoriales et des ministères est nécessaire. La politique générale de réintégration concerne non seulement le ministère de la justice et de la santé, mais aussi les ministères du budget et du logement, et tous les ministères qui concourent à l’insertion d’un homme dans la communauté (travail, sport, éducation, art).

Introduire le système de la libération conditionnelle d’office ce serait donné du sens à toute l’exécution de la peine depuis le premier jour d’écrou.

(1) Depuis le Collectif rejoint la préconisation du Comité d’Orientation Restreint de la future loi pénitentiaire d’élargir l’exécution en milieu ouvert des peines égales ou inférieures à 2 ans.

(2) Le taux d’octroi des libérations conditionnelles est : 70% en Albanie, 75% en Belgique,55% en Croatie, 72% en Tchèquie, 93% au Danemark, 74% en Estonie, 99% en Finlande, 55% en Islande, 84% en Lettonie, 61% au Luxembourg, 83% en Slovaquie, 86% en Roumanie, 100% à Malte, 100% en Suède (excepté les condamnés à perpétuité ). Ces données figurent dans une étude sur la libération conditionnelle dans les Etats membres du Conseil de l’Europe menée dans le cadre du Projet de Recommandation Rec(2003)XX, concernant la libération conditionnelle, Rapport final d’activités,cdpc/docs2003/cdpc (2003)09. http://www.ikusbide.net/new-file-storage/download/908-014

 

Organisations signataires :

Action des Chrétiens pour l’Abolition de la Torture (ACAT) Organisation interconfessionnelle pour l’abolition de la peine de mort et de la torture dans le monde entier ACAT France 7 rue Georges Lardennois 75019 Paris Tel : 01 40 40 42 43
Site web www.acatfrance.fr Contact acat@acatfrance.fr

Association Française de Criminologie (AFC)
Association travaillant sur phénomène criminel, et à la manière dont il est défini et contrôlé.
AFC 12 rue Charles Fourier 75013 Paris 
Site web www.afc-assoc.org Contact mail@afc-assoc.org

Association Nationale des Visiteurs de Prisons (ANVP)
Association oeuvrant à aider moralement et matériellement les personnes incarcérées et leurs familles
ANVP 1 bis rue de Paradis 75010 Paris Tel : 01 55 33 51 25
Site web www.anvp.org Contact anvpparis@free.fr

Ban Public
Association pour la communication sur les prisons et l’incarcération en Europe
Ban Public (adresse postale) 12 villa Laugier 75017 Paris Tel : 06 62 85 62 97
Site web www.prison.eu.org Contact redaction@banpublic.org

Fédération des Associations de Réflexion Action Prison Et Justice (FARAPEJ)
Fédération oeuvrant en faveur des liens sociaux et familiaux des personnes détenues ou libérées et de leurs familles
FARAPEJ 68 rue de la Folie Régnault 75011 Paris Tel : 01 55 25 23 75
Site web www.farapej.fr Contact farapej@farapej.fr 
 
Parti Communiste Français (PCF)
PCF 2 place du Colonel Fabien 75019 Paris Tel : 01 40 40 12 12
Site web www.pcf.fr Contact justice@pcf.fr

Secours catholique - Caritas France
Promotion de la place et la parole des pauvres dans la dignité, la solidarité et le partage.
Secours Catholique 106 rue du Bac 75007 Paris Tel : 01.45.49.73.00
Site web www.secours-catholique.asso.fr

Syndicat de la magistrature (SM)
12-14 rue Charles Fourier 75013 Paris
Tel : 01 48 05 47 88
Site web www.syndicat-magistrature.org Contact syndicat.magistrature@wanadoo.fr

Syndicat National de l’Ensemble des Personnels de l’Administration Pénitentiaire (SNEPAP-FSU)
SNEPAP-FSU 12-14 rue Charles Fourier 75013 PARIS Tel : 01.40.21.76.60
Site web www.snepap-fsu.org Contact snepap@club-internet.fr

Union des syndicats pénitentiaires de la Confédération générale du travail (UGSP-CGT)
UGSP-CGT case 542 263 av. de Paris 93514 Montreuil cedex Tel : 01.48.18.82.42
Site web : www.ugsp-cgt.org Contact ugsp@cgt.fr