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Un détenu de Liancourt (Oise) privé d’examens médicaux et expulsé sans son dossier médical

Mise en ligne : 25 mars 2008

Texte de l'article :

Un détenu de Liancourt (Oise) privé d’examens médicaux et expulsé sans son dossier médical.

La section française de l’OIP informe des faits suivants :

Libéré du centre pénitentiaire de Liancourt (Oise) le 27 décembre 2007 sans son dossier médical et reconduit en Égypte dès le lendemain, T.K., âgé de 60 ans, s’est vu empêché de poursuivre une fois libre des examens médicaux pour une tumeur à la gorge, qu’il n’avait pu avoir pendant son incarcération.

Présentant un problème de perte de voix au mois de novembre 2006, T.K. se voit prescrire par le médecin du centre pénitentiaire de Liancourt une consultation spécialisée en O.R.L. (oto-rhino-laryngologie) au centre hospitalier Laennec de Creil. Un premier rendez-vous prévu au mois de décembre 2006 est annulé, puis reporté au 4 janvier 2007. L’extraction médicale ainsi que la consultation se déroulent dans des conditions traumatisantes : T.K. est menotté, entravé et examiné en présence des surveillants. T.K. s’en plaint auprès de l’hôpital, puis de la Commission nationale de déontologie de la sécurité (CNDS) qui émet un avis sévère à ce sujet le 26 novembre 2007.

Malgré ses demandes, T.K. se voit refuser la communication des résultats de l’examen. Pour toute réponse, un transfert vers l’hôpital pénitentiaire de Fresnes lui est proposé. N’ayant pas connaissance des résultats de la fibroscopie effectuée, il refuse. Il lui est alors signifié qu’aucun autre examen ne lui sera proposé. Ce n’est qu’un mois plus tard que lui sont transmises quelques notes griffonnées par le spécialiste au bas du courrier de la première demande de rendez-vous : la fibroscopie effectuée semble indiquer la présence d’une tumeur au niveau des cordes vocales.

T.K. doit attendre une permission de sortir suffisamment longue, accordée en septembre 2007, pour consulter à ses frais un médecin généraliste dans un centre médical parisien. Sa fin de peine étant prévue en fin d’année, le praticien lui organise un rendez-vous le 15 janvier 2007 au service O.R.L. de l’hôpital Beaujon à Clichy (Hauts-de-Seine), et demande à l’hôpital de Creil la communication du compte-rendu de la fibroscopie réalisée en janvier, afin de le joindre à la lettre de recommandation adressée au spécialiste. Ce compte-rendu ne lui a jamais été communiqué.

Dès qu’il a connaissance de sa date exacte de libération, prévue pour le 27 décembre, T.K. demande au service médical du centre pénitentiaire la communication de son dossier médical en vue des examens prévus en janvier. Une demande qui est restée également sans réponse. 

Faisant l’objet d’une interdiction du territoire français, T.K. signale à la Préfecture de l’Oise, après la notification de sa reconduite à la frontière, qu’il entend demander conformément à la réglementation un report de son expulsion afin de terminer les examens médicaux nécessaires prévus au mois de janvier à l’hôpital Beaujon.

T.K. n’a pas l’occasion de présenter sa demande au magistrat : le 27 décembre, à sa sortie du centre pénitentiaire de Liancourt, il est directement conduit par la gendarmerie au centre de rétention du Mesnil-Amelot (Seine-et-Marne), puis placé le lendemain, toujours sans son dossier médical, dans un avion pour Le Caire, où il n’a pas vécu depuis trente ans.

L’OIP rappelle :

- La loi du 18 janvier 1994 « relative à la prise en charge sanitaire des personnes détenues » qui prévoit « une qualité et une continuité de soins équivalents à ceux offerts à l’ensemble de la population ».

- L’article L.1111-7-1er alinéa du Code de la santé publique, qui prévoit que « toute personne a accès à l’ensemble des informations concernant sa santé, détenues par des professionnels et des établissements de santé ».

- Le guide méthodologique relatif à la prise en charge sanitaire des personnes détenues, qui précise que « la continuité des soins et des traitements doit être assurée en toutes circonstances : à l’entrée en détention, à l’occasion d’un transfèrement et en vue de la libération » et également que « la prise en charge médicale des personnes détenues prend tout son sens si elle s’inscrit dans la durée, c’est à dire au-delà du séjour en prison ».