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> Edito

Sur la violence en prison : la faillite d’un système

Mise en ligne : 18 février 2010

Dernière modification : 18 février 2010

Texte de l'article :
Dimanche 25 janvier, 8h30, centre de détention de Montmédy (Meuse)
Alors qu’il est dans sa cellule, seul, à un étage soi-disant surveillé, Michel SERCEAU-FILIPPIDU est sauvagement agressé par 3 individus cagoulés. Il est roué de coups de poings avec tailladé avec des lames de rasoir. Le visage tuméfié, en sang, il arrive à s’extraire de la cellule et à prévenir les surveillants et les co-détenus de l’étage.
Personne n’a rien vu, rien entendu.
Transporté aux urgences, Michel SERCEAU-FILIPPIDU souffre de nombreuses contusions, de deux doigts cassés, de marques de strangulations et de coupures profondes proches des yeux, qui nécessiteront plus de 13 points de suture.
Depuis, il a été transféré, et directement placé à l’isolement.
 
Au-delà des raisons qui ont pu pousser ces hommes et des poursuites qui ne manqueront pas d’être engagées par le Parquet de Verdun, les questions soulevées par cette agression sont multiples :
 
- Comment des prisonniers peuvent-ils être agressés, parfois même tués alors qu’ils sont en détention ?
- Comment une telle agression a-t-elle pu être possible alors que Michel SERCEAU-FILIPPIDDU n’était pas seul à l’étage, ni dans un endroit isolé du centre de détention ?
- Pourquoi l’administration pénitentiaire ne parvient-elle pas à maintenir la sécurité des personnes qu’elle a sous sa garde ?
 
Pourtant, le code de procédure pénale dispose :
 
En son article D188 :
 
« Le service public pénitentiaire a pour fonction d’assurer la mise à exécution des décisions judiciaires prononçant une peine privative de liberté ou ordonnant une incarcération provisoire, et d’assurer la garde et l’entretien des personnes qui, dans les cas déterminés par la loi, doivent être placées ou maintenues en détention en vertu ou à la suite de décisions de justice. »
 
En son article D189 :
 
« A l’égard de toutes les personnes qui lui sont confiées par l’autorité judiciaire, à quelque titre que ce soit, le service public pénitentiaire assure le respect de la dignité inhérente à la personne humaine et prend toutes les mesures destinées à faciliter leur réinsertion sociale. »
 
Si cela n’était pas suffisant, l’article 44 de la loi pénitentiaire du 24 novembre 2009 précise que :

« L’administration pénitentiaire doit assurer à chaque personne détenue une protection effective de son intégrité physique en tous lieux collectifs et individuels.[…].
Toute personne détenue victime d’un acte de violence caractérisé commis par un ou plusieurs codétenus fait l’objet d’une surveillance et d’un régime de détention particuliers. Elle bénéficie prioritairement d’un encellulement individuel.[…] »
 
 
Si l’administration pénitentiaire a la garde des personnes qui lui sont confiées, si elle doit s’assurer de leur sécurité et doit respecter leur dignité, si le législateur a précisé que le prisonnier victime d’un acte de violence doit faire l’objet d’une surveillance et d’un régime de détention particuliers : comment expliquer que la seule réponse qu’apporte l’administration pénitentiaire aux violences subies par Michel SERCEAU-FILIPPIDU soit un placement à l’isolement d’office ?
 
Le placement à l’isolement, décision administrative restrictive de liberté, peut-être prononcé si un prisonnier le réclame pour sa protection. Il peut être ordonné d’office, sans le consentement du prisonnier, uniquement lorsque ce dernier présente un risque pour la sécurité de l’établissement.
Dans ce cas, il porte une telle atteinte aux libertés fondamentales qu’il peut faire l’objet d’un recours pour excès de pouvoir ou d’un référé-liberté. Ce n’est donc pas une mesure anodine pouvant pallier la carence de sécurité que doit assurer l’administration pénitentiaire pour protéger les personnes incarcérées.
 
Comme précisé par l’article 44 de la loi pénitentiaire, le prisonnier qui subit des violences commises par un ou plusieurs codétenus doit faire l’objet d’un régime de détention spécifique. Ce régime protecteur implique avant tout une surveillance particulière et un encellulement individuel, en aucun cas le placement à l’isolement d’office ne peut s’y substituer !
 
 
BAN PUBLIC exige que :
 
 ? La sécurité de Michel SERCEAU FILIPPIDU et celle de toutes les personnes incarcérées, soit assurée à l’intérieur de chaque établissement pénitentiaire ;
 
 ? Le placement à l’isolement d’office ne soit pas utilisé en tant que mesure de protection des personnes incarcérées ;
 
 ? Toute personne incarcérée puisse revendiquer sans censure le droit à la sûreté, tel que prévu par le bloc de constitutionnalité.
 
 
 
Contact presse : Benoît David / 06 63 08 17 39