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Suisse : Transmission du VIH, punissable ?

Publié le samedi 26 août 2006 | https://banpublic.org/suisse-transmission-du-vih/

Depuis les années 90, des personnes séropositives ont été régulièrement condamnées pour avoir contaminé d’autres personnes. Les peines s’étendaient de quelques mois à plusieurs années. Il faut distinguer entre les dispositions pénales, qui ont pour but de protéger la collectivité, et les articles visant à protéger l’individu.

« Propagation d’une maladie de l’homme dangereuse »,
art. 231 du Code pénal suisse (CP)

Conformément à l’art. 231 CP, est punissable « celui qui, intentionnellement, aura propagé une maladie de l’homme dangereuse et transmissible ». L’accord de la personne contaminée (p. ex. d’avoir des rapports sexuels non protégés) ne supprime pas le délit, car l’art. 231 CP ne protège pas la personne contaminée, mais la collectivité. Il s’agit d’un délit poursuivi d’office, qui ne requiert pas le dépôt d’une plainte par la personne contaminée : la police engage la procédure d’office.

Au regard de la jurisprudence suisse récente, on peut supposer que l’infection à VIH remplit les conditions d’une « maladie de l’homme dangereuse et transmissible ».

En outre, selon le CP, la maladie (le virus) doit avoir été « propagée ». La transmission du VIH à une seule personne répond d’ores et déjà à cet état de fait. Toutefois, il faut prouver que la maladie a bien été transmise par la personne accusée à la personne contaminée, et non par quelqu’un d’autre. Il est très difficile de fournir cette preuve. Cependant, les juges peuvent se satisfaire d’un faisceau de présomptions s’il est impossible d’apporter une preuve sûre et directe.

Pour que l’article 231 al. 1 CP soit applicable, la propagation doit avoir été « intentionnelle », c’est-à-dire que la personne séropositive doit avoir commis le délit en connaissance de cause et volontairement. Pourtant une forme affaiblie, que l’on appelle le dol éventuel, est permise : Agit selon le dol éventuel quiconque suppose fortement que le délit pourrait avoir un effet (dans ce cas la transmission du VIH) et accepte cette possibilité. Cette supposition a cours lors de la transmission du VIH par rapports sexuels non protégés.

La faute simple suffit à l’application de l’article 231 al. 2 CP. Commet une faute simple quiconque ne fait pas preuve de la prudence commandée par les circonstances et par sa situation personnelle (dans ce cas l’emploi d’un préservatif) et agit sans réfléchir ni tenir compte des conséquences de son attitude.

Même s’il n’y a pas eu transmission du virus VIH, le comportement de la personne séropositive est punissable. Il s’agit dans ce cas d’une tentative de propagation d’une maladie de l’homme dangereuse.

L’art. 231 CP part du principe que l’on peut combattre des épidémies par la répression.

« « Lésions corporelles » ou « tentative d’homicide »,
art. 122, 123, 111 ou 112 CP

Ces dispositions visent à protéger l’individu. Conformément à un arrêt du Tribunal fédéral rendu en janvier 2000, recours n’est plus guère fait aux articles relatifs à l’homicide et à l’assassinat, car grâce aux thérapies actuelles, la transmission du VIH ne peut plus être directement liée au décès de la personne contaminée. La tentative d’homicide et d’assassinat ne s’appliquent plus qu’aux « desperados », qui transmettent intentionnellement le VIH dans le but de tuer la personne contaminée.

Dans les autres cas, la personne séropositive doit tout de même escompter une condamnation pour lésions corporelles graves. En effet, le Tribunal fédéral a décrété que la transmission du VIH représentait une lésion corporelle, parce que la présence du virus dans le corps de la personne contaminée constitue une détérioration de son état de santé. L’apparition ultérieure des symptômes de la maladie ne revêt aucune importance juridique.

Source : aids.ch