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Discours de Pascal Clément : installation de la « Commission d’analyse et de suivi de la récidive »

Publié le mercredi 7 décembre 2005 | https://banpublic.org/discours-de-pascal-clement/

Combattre la récidive est une nécessité ressentie par toute société qui souhaite d’une part faire durablement baisser la délinquance et d’autre part protéger ses membres contres les délinquants les plus dangereux

Discours de Pascal Clément : INSTALLATION DE LA « COMMISSION D’ANALYSE ET DE SUIVI DE LA RÉCIDIVE »

Communiqué reçu le 06/12/05 à 12:33
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Le texte ci-dessous est un communiqué officiel diffusé par
le service News Press. Il n’engage en rien La Tribune.

Ministère de la Justice - Discours de Pascal Clément : INSTALLATION DE LA « COMMISSION D’ANALYSE ET DE SUIVI DE LA RÉCIDIVE », ce mardi 6 décembre à 9h30

Emetteur : Ministère de la Justice

Monsieur le Président, messieurs

Combattre la récidive est une nécessité ressentie par toute société qui souhaite d’une part faire durablement baisser la délinquance et d’autre part protéger ses membres contres les délinquants les plus dangereux.

Cette conviction, je me la suis forgée depuis de nombreuses années, particulièrement quand j’ai présidé la Commission des lois de l’Assemblée nationale, et que j’ai décidé de proposer la création de la mission d’information sur le traitement de la récidive.

Vous le savez, les résultats de cette commission ont été utiles, puisqu’elles ont jeté la base des principales dispositions de la proposition de loi relative au traitement de la récidive que j’ai eu l’honneur de porter, en ma qualité de Garde des Sceaux devant le Parlement, et qui a été adoptée les 22 et 24 novembre derniers.
Nos textes actuels étaient, en effet, insuffisants pour lutter contre cette forme de délinquance particulièrement grave. Il convenait à la fois d’instaurer des sanctions plus dissuasives pour les délinquants qui recommencent, passant outre les premiers avertissements de la justice, et de renforcer les mesures de suivi des criminels dangereux.

Mais au-delà de cette réforme législative nécessaire, je souhaite mieux prévenir la récidive en améliorant notre connaissance en la matière. Car contrairement à ce qui existe chez les anglo-saxon, ou chez nos amis Québécois, notre approche scientifique de la récidive est insuffisante.

Nous ne savons pas en effet la mesurer de manière précise, faute d’outils statistiques pertinents. Nous ignorons également les conditions du nouveau passage à l’acte, chez les majeurs comme chez les mineurs.

De même, la récidive de certaines infractions particulièrement graves, notamment les infractions sexuelles, et les moyens de les prévenir devrait en faire l’objet d’études spécifiques.

Nous devons donc combler ce déficit de connaissances si nous voulons lutter efficacement contre la récidive et trouver les outils pertinents pour renforcer les mesures d’alerte et de suivi en la matière.

C’est pourquoi j’ai décidé de créer la « Commission d’analyse et de suivi de la récidive ».

J’ai voulu réunir en son sein des praticiens de terrain, de disciplines différentes, pour que l’analyse soit aussi complète que possible, qu’aucun aspect du sujet ne soit laissé et que les propositions qui émergeront des échanges puissent être mises en oeuvre aisément.

Il s’agit de rechercher pragmatisme et efficacité.

Monsieur le Professeur Jacques-Henri ROBERT, je vous confie la présidence de cette Commission et vous remercie d’avoir accepté cette responsabilité qui démontre, une nouvelle fois, votre sens aigu du service public.

C’est bien évidemment au regard de l’éminence de vos travaux et de vos compétences professionnelles que je vous ai choisi. Professeur agrégé de droit privé et de sciences criminelles, vos activités d’enseignement sont très vastes, allant du droit pénal général à la procédure pénale.

Vous dirigez aussi l’Institut de criminologie de Paris II, où vous avez créé plusieurs unités de recherche, dont le DESS de Science pénitentiaire. Ce cursus remarquable vous prédispose amplement à présider cette Commission.

Vous allez accomplir cette mission avec l’aide d’une équipe pluridisciplinaire de spécialistes, dont les regards croisés seront un gage de qualité des préconisations que vous formulerez.

Ainsi, Monsieur Roland COUTANCEAU, Médecin Psychiatre, Directeur du centre médico psychologique pour adultes de la Garenne-Colombes. Vos travaux au sein de la ligue française de la santé mentale que vous présidez, votre grande connaissance des condamnés acquise au Centre national d’observation de Fresnes et votre expérience reconnue d’ expert seront une source d’enrichissement pour la commission.

Il en est de même pour Monsieur Sebastian ROCHÉ. Directeur de recherches du CNRS de Paris et Directeur du Pôle « Sécurité et Société » au CNRS / Institut d’Etudes Politiques de Grenoble, vous enseignez dans plusieurs grandes Ecoles et votre expertise de sociologue est souvent sollicitée. Parmi vos diverses activités, il importe de souligner que vous êtes membre du Haut Conseil à l’Intégration.

Monsieur Yves JACOB, magistrat judiciaire, votre expérience comme président des Cours d’assises est tout à fait exemplaire.
Depuis plus de quinze ans, vous avez connu une grande diversité des affaires de droit commun, et vous avez su aussi vous spécialiser dans la matière difficile du terrorisme. Tant vos qualités humaines qu’une autorité naturelle vous désignent comme l’un des meilleurs présidents d’assises.

La commission a besoin du regard technique et acéré d’un magistrat du parquet. J’ai choisi Monsieur Vincent LESCLOUS, Procureur de la République près le Tribunal de Grande Instance de Valenciennes, après avoir été le Procureur de la République de Reims.

Vous saurez faire partager votre belle expérience d’une grande carrière de parquetier.
Monsieur Michaël JANAS, en tant que Juge de l’Application des Peines et de Président de l’Association Nationale des Juges de l’Application des Peines, vous saurez apporter la réflexion et le savoir faire du magistrat de terrain. Vous êtes le benjamin de l’équipe, mais déjà votre expérience de juge de l’application des peines est solide.Vous porterez ici l’analyse de vos pairs.

Maître Stéphane MAITRE, vous avez été Premier secrétaire de la Conférence du stage des avocats à la Cour de Paris, ce qui démontrait déjà un avenir prometteur. Vous aurez en charge de faire valoir les intérêts de la défense, dans le respect du principe du contradictoire. Votre expérience de conseil des parties civiles contribuera à donner à la victime toute sa place dans ces débats sur la récidive qui la concerne au premier chef.

Monsieur François THIERRY, après avoir dirigé la division criminelle du SRPJ Antilles - Guyane, vous êtes Commissaire Principal, chef de la section opérationnelle de l’Office Central pour la Répression du Trafic Illicite de Stupéfiants. A ce titre, vous êtes confronté à la récidive particulièrement importante de cette délinquance et votre expérience en sera d’autant plus précieuse pour la Commission.

A l’autre bout de la chaîne pénale, nous trouvons la détention.

Monsieur Martin PARKOUDA, la richesse de votre parcours professionnel est à souligner. D’abord diplomate, vous avez intégré l’Administration pénitentiaire en exerçant vos compétences à l’administration centrale et dans des établissements pénitentiaires. Vous avez ainsi dirigé la maison d’arrêt de Saint Etienne et le centre pénitentiaire de Guyane. Docteur en droit, vous avez également intégré les services centraux de la DACG et de la DAP pendant plusieurs années .

Actuellement directeur du Centre pénitentiaire de Moulins Yzeure, vous prenez en charge les récidivistes les plus ancrés dans la délinquance. Nul doute que cette expérience de terrain sera particulièrement utile à la Commission.

Monsieur Jean-Pierre BAILLY, vous avez, vous aussi, un parcours professionnel tout à fait éminent, puisque vous avez gravi l’ensemble des échelons des services d’insertion et de probation. Vous dirigez aujourd’hui le Service Pénitentiaire d’Insertion et de Probation (SPIP) des Yvelines, qui est l’un des plus importants de France, après avoir été à la tête de celui du département du Nord.
Vous participez à la mise en oeuvre de la réinsertion des condamnés tant en milieu ouvert qu’en détention.

L’ensemble de ces personnalités reconnues laisse présager, au sein de la Commission, des échanges d’une grande richesse et une force de propositions indéniable.

La complexité du sujet implique que cette Commission présente un caractère pérenne. Je souhaite, en effet, que la Commission s’inscrive dans la durée, afin qu’au-delà de la photographie actuelle de la récidive qu’elle apportera, elle puisse analyser aussi l’évolution du phénomène afin de proposer des pistes de réflexions et d’améliorations.

Vous aurez donc la charge d’établir un rapport annuel que vous me remettrez durant le deuxième trimestre de chaque année, et qui fera l’objet d’une publication officielle.

Je vous demande de me communiquer un premier rapport d’étape le 15 février 2006.

Vous avez, bien sûr, toute liberté pour organiser la méthodologie de vos travaux et il vous appartiendra de réunir toutes les données juridiques, statistiques et pénitentiaires que vous jugerez utiles. Vous procèderez aux auditions et visites nécessaires et recueillerez les avis des experts reconnus en France, mais aussi à l’étranger.

Bien évidemment, vous pourrez vous appuyer sur l’expertise de l’ensemble des directions et des services concernés du ministère pour mener à bien votre mission.

Vous déterminerez ainsi des outils fiables de mesure de la récidive, vous analyserez l’évolution de ce phénomène et proposerez toutes les mesures qui vous sembleront les plus pertinentes pour prévenir le renouvellement des infractions.

A côté de ces attributions principales, je souhaite enfin pouvoir saisir la Commission, de manière ponctuelle, au fil de l’actualité, afin d’obtenir un avis sur des questions diverses mettant en jeu la problématique de la récidive. Il m’apparaît, en effet, essentiel de ne pas me priver de ce creuset d’expériences et de réflexions sur ce sujet difficile et douloureux.

Monsieur le Président, Messieurs vous avez là, une grande tâche à accomplir mais je connais votre sens de l’engagement et je sais combien vous savez mobiliser les énergies et optimiser les échanges.

J’attends avec impatience mais avec une totale confiance, le résultat de vos travaux qui seront fructueux, je n’en doute pas et permettront ainsi à ce que les décisions que nous serions amenées à prendre pour réduire encore la récidive repose sur le meilleure expertise qu’il soit.

News Press 2005