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La France exerce toujours la peine de mort

L’ex-militante d’Action directe Nathalie Ménigon devait savoir le 26 mars si elle pouvait bénéficier d’une suspension de peine pour raisons de santé. La réponse fut négative.

Cette mesure accordée en 2002 à Maurice Papon, incarcéré pour complicité de crimes contre l’humanité, ne sera pas appliquée à une prisonnière politique qui a payé pour ses actes mais qui a le malheur d’incarner des idées honnies par l’État.

Cela fait 17 ans que Nathalie Ménigon, ancienne militante d’Action directe, est sous les verrous. Incarcérée à Bapaume , dans le
Pas-de-Calais, elle a été condamnée en 1994, par une cour d’assises spéciale, à la réclusion à perpétuité assortie d’une peine de sûreté de 18 ans, pour les assassinats du général René Audran, inspecteur général de l’armement et du patron de Renault, Georges Besse.

Brisée physiquement et psychologiquement par des années d’isolement et des conditions de détention les plus rudes qui soient que de longues périodes de grèves de la faim n’ont pas réussi à assouplir, Nathalie Ménigon, 47 ans, est aujourd’hui partiellement hémiplégique après deux accidents vasculaires cérébraux.

Comme le prévoit la loi Kouchner de mars 2002, elle a déposé une demande de suspension de peine qui sera examinée le 26 mars. En 2003, une requête similaire avait été refusée par le ministère public qui avait évoqué « un hypothétique trouble à l’ordre public » et conclu que l’état de santé de Nathalie Ménigon était « compatible avec son maintien en détention ».

Paradoxalement cette possibilité refusée à Nathalie Ménigon a été offerte en 2002 à Maurice Papon. Condamné pour complicité de crimes contre l’humanité, l’ancien haut fonctionnaire de Vichy n’a effectué au total que deux années d’emprisonnement sur les 10 auxquelles il avait été condamné. Et ce dans des conditions de détention à mille lieues de celles vécues par les membres d’Action directe. Présenté à l’époque comme étant à l’article de la mort, le fringant vieillard Papon, est toujours droit dans ses bottes de criminel et réclame même aujourd’hui la révision de son procès !

Le principe d’humanité qui a prévalu pour Maurice Papon doit prévaloir pour Nathalie Ménigon qui, d’un point de vue moral, a payé pour ses actes. « Maurice Papon, faut pas déconner, il a été protégé toute sa vie depuis la Seconde Guerre mondiale. Il a eu au moins un enfant, il a eu une fille, il a eu une vie, une vie sociale, une vie amoureuse, bon il a vécu ce mec. Lui, il bénéficie d’une suspension de peine alors qu’il a fait un peu plus de deux ans de prison, même pas », s’indignait Nathalie Ménigon dans une conversation téléphonique diffusée par France 3.

Aujourd’hui, Nathalie Ménigon qui a fait une tentative de suicide est au bout du rouleau et doute sérieusement de ses chances d’être libérée. « Je peux plus rester comme ça (...) J’ai tellement de trucs à soigner qu’ils ne savent pas par où commencer. Je suis migraineuse. Je ne supporte pas la lumière, j’ai très mal à la tête, je vomis. Le seul truc, c’est de me libérer (...) Mais ils ne veulent pas me libérer. »

Car aujourd’hui, si l’État ne veut pas libérer Nathalie Ménigon, ce n’est pas parce qu’elle représente un danger potentiel pour la société mais plutôt parce qu’elle incarne des idées communistes et révolutionnaires dont il a une sainte horreur.

Un point parfaitement analysé par Jean-Marc Rouillan, ex-membre fondateur d’AD, dans une interview donnée à la Dépêche du Midi en 2002. « La libération de Maurice Papon pour raison de santé a confirmé la nature éternelle de la justice dans ce pays. " Suivant que vous serez puissant ou misérable, les jugements de cour vous rendront blanc ou noir... " Les magistrats se plient aux raisons humanitaires quand il s’agit d’un criminel de guerre, un grand commis de l’État, mais non quand il en va de la vie du petit voleur et du simple détenu. Et que dire quand il s’agit d’un prisonnier révolutionnaire, un opposant ! Dans nos dossiers, les commissions d’application de peine refusent jusqu’à libérer les détenus ayant accompli leur peine, alors... imaginez l’un des quatre d’Action directe sur qui ils ont cristallisé jusqu’au paroxysme leur haine des combattants révolutionnaires... »

Cette haine, en 1989, alors que les prisonniers d’AD entamaient leurs quatre-vingt dixième jours de grève de la faim, était bien perceptible dans les propos du RPR Robert Pandraud, ministre chargé de la Sécurité : « faire la grève de la faim, c’est leur droit. On peut toujours faire des régimes amaigrissants ». Les années passent, les visages changent, mais pas la haine comme le montre si bien depuis trois ans une UMP avide de défendre les intérêts d’une caste politico financière.