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(2000) NOR MENE0002452C Organisation de l’enseignement en milieu pénitentiaire

NOR MENE0002452C Circulaire du 5 octobre 2000

ORGANISATION DES ENSEIGNEMENTS
Organisation de l’enseignement en milieu pénitentiaire

Réf. : art. D 450 à D 456 du Code de procédure pénale ; convention du 19-1-1995 (direction de l’administration pénitentiaire - éducation nationale créant les unités pédagogiques régionales) ; convention du 26-10-1998 (direction de l’administration pénitentiaire - CNED) ; C. du 27-4-1995 (direction de l’administration pénitentiaire - éducation nationale sur les orientations pédagogiques et administratives relatives à l’enseignement en milieu pénitentiaire)
Texte adressé aux rectrices et recteurs d’académie ; aux inspectrices et inspecteurs d’académie, directrices et directeurs des services départementaux de l’éducation nationale ; aux inspectrices et inspecteurs d’académie, inspectrices et inspecteurs pédagogiques régionaux ; aux inspectrices et inspecteurs de l’éducation nationale ; aux responsables d’unité pédagogique régionale

PRÉAMBULE
La convention du 19 janvier 1995 a fixé le cadre de la coopération entre les ministères de l’éducation nationale et de la justice afin d’assurer l’enseignement en milieu pénitentiaire.
Afin de structurer cet enseignement, elle a créé dans chaque région pénitentiaire une unité pédagogique régionale (UPR) et placé à la tête de cette unité un responsable nommé par le ministre de l’éducation nationale. Ce responsable reçoit ses missions conjointement, pour l’éducation nationale, du recteur du siège de la direction régionale et, pour l’administration pénitentiaire, du directeur régional des services pénitentiaires.
Cette convention a déterminé une nouvelle répartition des responsabilités et des charges entre les deux ministères et leur a confié conjointement un rôle d’impulsion, de suivi et de régulation du dispositif.
Postérieurement à cette convention, deux circulaires ont précisé, l’une du 27 avril 1995, les orientations relatives à l’enseignement dans les établissements pénitentiaires, l’autre du 25 mai 1998, les spécificités de l’enseignement aux jeunes détenus.
Cette rénovation du cadre dans lequel est dispensé l’enseignement en milieu pénitentiaire se devait d’être complétée par une clarification du régime indemnitaire des personnels enseignants affectés sur ces postes, ainsi que des exigences particulières qui leur sont afférentes.
Le décret n° 71-685 du 18 août 1971 modifié par le décret n° 2000-876 du 6 septembre 2000 (voir dans ce B.O. page 1887) détermine le régime indemnitaire applicable aux personnels affectés à temps plein ou à mi-temps sur un poste d’enseignant en milieu carcéral, au prorata du temps de service effectué et à l’exclusion des vacataires. L’indemnité d’enseignement en milieu pénitentiaire a pour objet de compenser les sujétions particulières liées aux conditions d’exercice de l’enseignement en milieu pénitentiaire, ainsi que la rémunération des tâches demandées aux personnels, en complément de l’enseignement proprement dit.
Le présent texte a pour objet de préciser les conditions de nomination et d’exercice des personnels enseignants, ainsi que les tâches spécifiques qui leur incombent en complément de leur service d’enseignement. Il précise en outre les modalités du suivi administratif et pédagogique auxquels ils sont soumis.

1 - Les conditions de nomination des personnels enseignants

Les emplois d’enseignants du premier degré en milieu pénitentiaire sont prioritairement pourvus par des enseignants titulaires du CAPSAIS option F, ou par des enseignants ayant une expérience professionnelle en classe relais ou en formation continue d’adultes. L’expérience en formation continue d’adultes constitue également un point fort pour les enseignants du second degré candidats à ces emplois.
Les personnels enseignants du premier et du second degrés, candidats à un emploi à temps plein ou à mi-temps en milieu pénitentiaire sont reçus en entretien individuel par une commission dont les membres sont désignés conjointement par le recteur ou l’inspecteur d’académie, directeur des services départementaux de l’éducation nationale (IA-DSDEN) concerné et le directeur régional des services pénitentiaires. L’entretien a un double objet : d’une part, donner au candidat une information complète et précise sur les conditions d’exercice de la fonction et les sujétions particulières qu’elle implique, d’autre part, lui permettre d’exprimer ses motivations pour la fonction.
La commission comprend obligatoirement au minimum un représentant de l’IA-DSDEN, le directeur d’établissement pénitentiaire, le responsable de l’unité pédagogique régionale (UPR), l’IEN-AIS chargé d’inspection en milieu pénitentiaire, le responsable local de l’enseignement, un enseignant en exercice en milieu carcéral.
La commission est une instance strictement consultative, sans préjudice des prérogatives de l’autorité investie du pouvoir de nomination.
La commission émet, sur chaque candidature, un avis qui est transmis à la commission administrative paritaire compétente, selon les cas par l’IA-DSDEN ou le recteur qui procède à l’affectation provisoire sur le poste.
Au cours de leur première année d’exercice en milieu pénitentiaire, les personnels restent titulaires de leur poste précédent. À l’issue de cette première année, les personnels peuvent, s’ils le souhaitent, retrouver leur affectation sur ce poste. Dans le cas contraire, l’IA-DSDEN ou le recteur confirme leur affectation, après consultation de la commission administrative paritaire compétente.
Les enseignants nommés pour la première fois sur un poste en milieu pénitentiaire doivent obligatoirement suivre l’intégralité des sessions de formation organisées conjointement par les ministères de l’éducation nationale et de la justice.
Afin de favoriser une gestion plus claire des emplois affectés à l’enseignement en milieu pénitentiaire, il appartient au recteur du siège de la direction régionale de l’administration pénitentiaire, siège de l’UPR, de veiller, en concertation avec les recteurs et les IA-DSDEN concernés, à ce que, dans des délais raisonnables, tous les emplois affectés à l’enseignement pénitentiaire dans le ressort de l’UPR soient clairement identifiés.
Lors de la publication des postes aux mouvements départemental (pour le 1er degré), intra-académique (pour le 2nd degré), tous ces emplois sont caractérisés comme postes à compétences particulières, en raison des contraintes qui leur sont liées.

2 - Les conditions d’exercice de l’enseignement en milieu pénitentiaire

L’organisation du service d’enseignement vise à assurer une action pédagogique efficace prenant en compte les spécificités du milieu pénitentiaire.

2.1 L’organisation du service
Elle prend en compte la nécessité :
- d’aménager les horaires hebdomadaire et journalier d’enseignement, de façon à permettre la scolarisation des détenus qui ont des activités rémunérées ;
- de répartir le volume annuel d’heures d’enseignement attribué à chaque unité locale d’enseignement (ULE) afin d’assurer une plus grande continuité auprès des détenus en réduisant les coupures liées aux vacances scolaires en cours d’année.
Dans tous les cas de figure, l’organisation annuelle du service d’enseignement tient compte du projet pédagogique de l’établissement, élaboré par l’équipe pédagogique sous la responsabilité du RLE. Elle est soumise, pour approbation, au responsable de l’UPR.

2.2 Le service d’enseignement
L’enseignement est intégré à chacune des étapes du parcours de la détention, depuis l’accueil, où un bilan des acquis est proposé aux détenus qui le souhaitent, jusqu’à la préparation de la sortie, dans une perspective systématique de validation des acquis, par des certifications reconnues ou par la tenue d’un livret d’attestation des parcours de formation.
L’enseignement s’inscrit dans une perspective de poursuite ou de reprise d’un cursus de formation et de préparation d’un diplôme. Il se définit comme une formation pour des mineurs ou des adultes qui poursuit trois objectifs fondamentaux :
- un objectif éducatif de soutien à la personne ;
- un objectif de qualification et de validation des acquis ;
- un objectif d’ouverture aux différentes formes d’accès aux savoirs.
Cet enseignement suppose une démarche personnalisée (incluant un bilan pédagogique précis) et une organisation en modules bien définis dans le temps, adaptés aux besoins des détenus et à la durée de leur peine, afin de rythmer le temps d’apprentissage.
Les activités pédagogiques peuvent s’appuyer sur divers supports motivants pour des mineurs ou des adultes incarcérés dès lors qu’elles gardent pour objectif l’acquisition de compétences nouvelles et la perspective de validation des acquis : on peut, dans ce sens, recourir aux technologies de l’information et de la communication, ateliers d’écriture, journaux de détenus, théâtre, code de la route, etc.
Pour satisfaire à ces obligations, les services des personnels enseignants du premier et du second degré comprennent, d’une part, les heures d’enseignement proprement dit qui comprennent toutes les activités en présence des détenus, d’autre part, les tâches de coordination et concertation entre enseignants et avec leurs différents partenaires.

2.2.1 Les heures d’enseignement proprement dit
Les heures d’enseignement proprement dit sont conformes à celles prévues par les décrets statutaires des corps auxquelles appartiennent les enseignants. Toutefois les enseignants du premier degré bénéficient d’un régime particulier (équivalent à 21 heures hebdomadaires sur 36 semaines annuelles), pour tenir compte de la spécificité des publics - personnes adultes en rupture scolaire prolongée, présentant un taux élevé d’illettrisme - auxquels ils s’adressent en priorité.
Afin d’assurer une plus grande continuité auprès des détenus, l’organisation du service d’enseignement est assurée partout où cela est possible sur 40 semaines, dans le respect des obligations de service des enseignants, calculées sur 36 semaines, et avec l’accord formel des intéressés ; cette organisation peut s’effectuer par roulements de service, péréquation des horaires hebdomadaires, utilisation des moyens prévus dans la dotation de l’unité locale d’enseignement.
Les modalités de cette organisation sont arrêtées localement, après concertation de l’ensemble des personnels. Elles tiennent compte des priorités retenues et du nombre d’enseignants exerçant sur le site. Elles sont soumises pour approbation au responsable de l’UPR.
L’organisation du service d’enseignement peut éventuellement, lorsque le nombre d’enseignants le permet, et avec l’accord formel des intéressés, être assurée au-delà de 40 semaines.

2.2.2 Les tâches de coordination et de concertation
En complément des heures d’enseignement proprement dit, les enseignants effectuent un certain nombre de tâches afin de répondre aux besoins particuliers de la population des détenus :
- tenue de documents destinés aux services pénitentiaires (PLISE, GIDE), contribution au suivi par les services pénitentiaires d’insertion et de probation, participation au projet d’exécution de peine, ...
- actualisation de la composition des groupes scolarisés, tenue de livrets d’attestation.

3 - Le responsable local de l’enseignement
Le responsable local de l’enseignement (RLE) assure la mise en œuvre et le suivi du projet pédagogique de l’établissement. Une lettre du responsable de l’UPR précise chaque année le contexte et l’orientation de ses missions. À ce titre, il peut se voir attribuer, par le responsable de l’UPR, des heures de décharge, au prorata du nombre d’emplois (équivalents temps plein) attribués à l’établissement. Cette décharge est en principe d’une heure par équivalent temps plein, avec un minimum de trois heures par semaine. Elle peut faire l’objet d’un ajustement par le responsable de l’UPR dans le cas où une autre fonction lui est demandée (par exemple, conseiller technique de lutte contre l’illettrisme). Cette décharge ne peut, en aucun cas, être supérieure à la moitié des obligations de service d’enseignement.
Cette décharge horaire doit lui permettre de faire face aux missions propres d’organisation et de concertation qui lui incombent : organisation de l’information, de l’accueil et de l’orientation des détenus, inscriptions aux examens ou au CNED, organisation des groupes ainsi que des services d’enseignement, animation et coordination de l’équipe enseignante, relations avec les personnels chargés de l’action socio-éducative, culturelle et de la formation professionnelle, ainsi qu’avec le responsable de l’établissement pénitentiaire.
Dans l’hypothèse où un seul enseignant est affecté dans l’établissement, le responsable de l’UPR lui confie, de fait, la fonction de responsable local. Dans ce cas, et comme il est prévu au dernier alinéa du paragraphe 1.2 du IV de la circulaire du 27 avril 1995 relative à l’enseignement dans les établissements pénitentiaires, toute autre fonction qui pourrait lui être demandée ne peut entraîner une réduction totale de son horaire supérieure à un quart de temps.

4 - Les modalités du suivi administratif et pédagogique
Il appartient au responsable de l’UPR, en liaison avec le RLE, de s’assurer régulièrement du bon fonctionnement du service d’enseignement dans chacune des ULE.
Le responsable de l’UPR assure la notation administrative des enseignants du second degré exerçant à temps plein ou à mi-temps, en concertation pour ces derniers avec le principal ou le proviseur de l’établissement où ils exercent leur autre mi-temps.
L’évaluation pédagogique des enseignants est assurée par les corps d’inspection compétents selon le corps auquel appartiennent les intéressés. Dans le but d’éviter l’isolement qui marque parfois la spécificité des conditions d’exercice de l’enseignement dans les prisons et de demander des aides éventuellement nécessaires, les enseignants peuvent de droit solliciter un entretien avec leur supérieur hiérarchique. Il appartient à ce dernier de mettre en œuvre toutes mesures utiles pour que le travail de l’enseignant puisse s’effectuer dans des conditions satisfaisantes.
Les enseignants bénéficient, au minimum tous les trois ans, d’une inspection pédagogique. L’entretien qui fait suite à l’inspection doit permettre à l’enseignant de faire le point sur l’exercice de ses fonctions en milieu pénitentiaire et les difficultés qu’il rencontre éventuellement. Il appartient à l’autorité hiérarchique d’aider l’enseignant à résoudre ces difficultés, en relation avec le responsable de l’UPR. Le cas échéant, si l’enseignant en éprouve le besoin, les autorités académiques s’efforcent de faciliter son retour sur un emploi conforme à ses compétences.
Il est souhaitable que, chaque fois que cela est possible, l’inspection individuelle des personnels soit complétée par une procédure d’évaluation du projet pédagogique mis en œuvre dans l’établissement, associant les différents corps d’inspection concernés et le responsable de l’UPR, afin de proposer les régulations souhaitables dans une perspective plus globale.

Pour le ministre de l’éducation nationale
et par délégation,
Le directeur du Cabinet
Christian FORESTIER