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N°12 - La prison dans la prison

Publié le jeudi 9 janvier 2003 | https://banpublic.org/no12-la-prison-dans-la-prison/

Pour améliorer les conditions de détention des transgenres, le Pastt (Prévention, action, santé, travail pour les transgenres) a élaboré un programme « Prisons », l’objectif étant de rompre leur isolement et de favoriser l’échange avec l’extérieur.

« Dans notre cadre d’action de santé communautaire, nous avons constaté que les transgenres incarcérés vivaient dans des conditions abominables, car les structures pénitentiaires n’étaient pas adaptées à leur spécificité », explique Camille Cabral, directrice du Pastt. Ne pouvant être enfermés avec les hommes, car ils risqueraient d’être harcelés sexuellement ou violés, les transgenres ne peuvent pas non plus l’être avec les femmes, puisque n’étant pas opérés pour la plupart, ils pourraient avoir avec elles des rapports sexuels et engendrer des enfants, ce que redoute l’administration pénitentiaire. Résultat : ils se retrouvent en quartier d’isolement, n’ont pas accès aux activités rémunérées ni, généralement, à celles éducatives ou de loisirs et ne bénéficient que d’une promenade quotidienne de deux heures dans une petite cour grillagée. Pour rompre cette solitude et améliorer leur condition, la coordinatrice du programme « Prisons » leur rend visite à Fleury-Mérogis, où beaucoup d’entre eux sont regroupés. « En plus de cet isolement, ils se plaignent de ne pas pouvoir vivre leur féminité, puisque le système carcéral n’admet pas qu’ils s’habillent en femmes, se maquillent... Dès lors qu’ils vivent socialement comme des femmes, s’insurge Camille Cabral, on devrait les respecter en prison en tant que telles. »

Un lien pour la santé. Plus largement, le programme a pour but « d’assurer une information en milieu carcéral sur la problématique de l’identité de genre et de ses demandes spécifiques : hormonothérapie, silicone, suivi psychologique... », « sur les traitements médicaux et, en priorité, ceux qui sont liés aux pathologies VIH », mais aussi « sur les traitements de substitution à la drogue et à l’alcool. » Assurant le lien avec l’extérieur, la coordinatrice multiplie les démarches auprès des services médicaux ou sociaux. « Quand une personne a besoin de poursuivre certains traitements, je me mets en relation avec l’UCSA et lui remets les dossiers, sous pli fermé », témoigne Maïre Tuahiva. Laquelle, en tant qu’agent de prévention, peut « diffuser et relayer des messages de réduction des risques », rappelle Camille Cabral.
En outre, le programme prévoit l’envoi de mandats aux détenus démunis pour cantiner des produits de base, un soutien en vue d’obtenir une libération conditionnelle et un suivi postcarcéral : prise en charge dès la sortie, paiement de nuitées d’hôtel, aide à la réinsertion, etc. Enfin, Maïre Tuahiva a organisé diverses réunions d’information afin de sensibiliser les personnels aux spécificités des transgenres. Et combattre toute tentation discriminatoire.

F. R.