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CEDH, Arrêt Minelli c/ Suisse du 25 mars 1983, requête n°8660/79
La prescription de l’infraction n’enlève pas nécessairement l’atteinte à la présomption d’innocence

Publié le mardi 19 juillet 2016 | https://banpublic.org/la-prescription-de-l-infraction-n/

Même en l’absence de constat formel, la présomption d’innocence se trouve méconnue si une motivation donne à penser que le juge considère l’intéressé comme coupable.

Le requérant est journaliste et le 27 janvier 1972, il a publié un article accusant une société et son administrateur d’escroquerie. Ce dernier l’a ensuite accusé d’atteinte à l’honneur, débouchant sur une procédure judiciaire.

Le requérant se prétend victime d’une violation de l’article 6 § 2 de la Convention qui résulterait de la décision, du 12 mai 1976, par laquelle la chambre de la Cour d’assises du canton de Zurich, tout en clôturant les poursuites pour cause de prescription, a mis à sa charge une partie des frais de la procédure et lui a enjoint de payer à la société et à l’administrateur une indemnité de dépens.

"Requérant et Gouvernement s’accordent pour estimer que l’affaire soulève une question de principe : la présomption d’innocence s’accommode-t-elle de la solution consistant à imposer la charge de frais de procédure et d’une indemnité de dépens à une personne qui a bénéficié d’un classement, d’un non-lieu, d’un acquittement ou, comme ici, de la prescription ?"

En effet, selon le Gouvernement, le requérant ne pouvait jouir de la garantie de la présomption d’innocence, au plus jusqu’à la date de survenance de la prescription. (Après quoi, la Cour d’Assises s’est bornée à enregistrer les effets juridiques de celle-ci et à répartir les frais conformément aux lois internes).

La Cour EDH, se rangeant à l’avis de la Commission avant elle, explique qu’ “une procédure judiciaire peut prendre formellement fin en plusieurs étapes plutôt qu’en une fois.” Or, en estimant que "l’accusé" devait supporter deux tiers des frais et payer à chaque plaignant une indemnité de dépens, la Cour d’Assises, de part les termes employés, le tenait clairement encore comme accusé d’une infraction.

En conclusion, la Cour EDH a estimé que la Cour d’Assises se livrait à des appréciations incompatibles avec le respect de la présomption d’innocence et qu’il y avait bien eu violation de l’article 6 de la Convention.

 
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• CEDH-Minelli-8660-79, (PDF - 390.9 kio)