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Ban Public : Embuches à la réinsertion...

Publié le vendredi 29 janvier 2010 | https://banpublic.org/ban-public-embuches-a-la/

Communiqué de presse de Ban Public

Il a 45 ans, condamné à 7 années de réclusion criminelle.

Il est très gravement malade, détenu dans des conditions indignes des prisons de la République.

Toute sa détention s’est déroulée sans problème particulier. Il est même présenté comme un détenu modèle par l’administration pénitentiaire : aucun rapport d’incident, un réel souci de réadaptation sociale à sa sortie de détention.

Seulement, plus sa fin de peine approche, plus sa situation carcérale devient kafkaïenne.

L’administration pénitentiaire en cause ? On serait tenté de dire « pas plus que d’habitude ». Mais, non, cette fois c’est l’autorité judiciaire prise en la personne du Parquet et de la Chambre de l’application des peines (Cour d’appel en matière d’application des peines).

L’autorité judiciaire n’est-elle pas garante des libertés individuelles ? Ne doit-elle pas être « aveugle » aux considérations médiatiques notamment ?

Non, trois fois non, il ne semble pas dans le cas de Didier Robert.

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La nouvelle loi pénitentiaire indique expressément dans son article 1 que « le régime d’exécution de la peine de privation de liberté concilie la protection de la société la sanction du condamné et les intérêts de la victime avec la nécessité de préparer l’insertion ou la réinsertion de la personne détenue afin de lui permettre de mener une vie responsable et de prévenir la commission de nouvelles infractions. »

La loi est claire : préparer la réinsertion et permettre à la personne détenue de mener une vie responsable et de prévenir la commission de nouvelles infractions.

Seulement, cette intention de bonne volonté n’est pas appliquée dans le cas de Didier Robert.

Didier Robert avait demandé une semi liberté probatoire : accepter par le juge d’application des peines mais l’appel suspensif du Parquet a empêché l’exécution de cette mesure, au motif que l’une des victimes avait peur de le recroiser un jour... Dans une agglomération de 10 millions d’habitants, argument plus que sujet à caution…

Tant les experts psychiatres, que le Service Pénitentiaire d’Insertion et de Probation, l’administration du centre de détention et le Juge d’Application des Peines avaient émis un avis différent : parfaitement réadaptable, il ne présentait aucune dangerosité pour la société.

Qui plus est, Didier Robert disposait de toutes les garanties nécessaires : un logement et un travail. Une vie de famille également, puisque il va s’établir avec sa compagne.

Plus étrange encore était que Didier Robert avait bénéficié de permissions de sortie, sans jamais que le Parquet n’en est fait appel.

On était en septembre 2009 et depuis on a le sentiment le Parquet s’acharne, dont les réquisitions sont constamment suivies par les Chambre de l’application des peines.

Cette dernière est saisie de ce dossier.

Elle infirme l’ordonnance du JAP.

Didier Robert est effondré, ne comprenant plus pourquoi on lui accorde certaines mesures et que plus sa date de libération définitive approche, plus il semble faire l’objet d’un acharnement judiciaire. Pourtant, il doit préparer sa sortie, non ?

Est-ce dû aux actualités du moment en matière de politique carcérale ? Un fait divers devient-il source de jurisprudence ? Dès qu’un « récidiviste » commet une nouvelle infraction alors il scelle le sort de ses coreligionnaires de détention….

C’est ce que tout porte à croire dans le cas de Didier Robert.

Mais il ne se laisse pas abattre. Il est soutenu par ses proches. Il essaie de ne plus trop y penser.

Une permission de sortie lui a été accordée après ce refus de semi-liberté probatoire.

Paradoxalement, si l’avis de la victime est pris en compte en ce qui concerne sa semi-liberté, il n’en est rien en ce qui concerne une permission de sortie de 10 jours….de toute évidence, le risque de réitération des faits délictueux n’est pas possible en 10 jours…sans doute est-ce une disposition écrite dans le Code de procédure pénale.

Didier est souffrant, bien souffrant et ce ne sont pas les médecins de l’administration pénitentiaire, par manque de moyens humains, qui peuvent l’aider.

Il demande une nouvelle permission de sortie pour 5 jours entre le 15 et le 20 janvier pour se faire soigner notamment.

Le JAP l’accorde. Les arguments et attestations fournis sont valables. L’administration pénitentiaire donne encore un avis favorable. Le SPIP également. Le Parquet n’émet que des réserves.

Hors de la salle d’audience, ce dernier relève à nouveau appel.

La chambre de l’application des peines rend alors en urgence une ordonnance infirmant celle du JAP, procédure d’urgence prise pendant la période des fêtes sans que Didier Robert et son conseil aient pu présenter leurs observations !

Pour son Conseil, tout semble fait sans prendre en compte la réalité de la situation de Didier Robert et sans application du principe d’individualisation des peines, comme prévu par le législateur…

Aucun élément du dossier de Didier ne semble analysé.

Un pourvoi devant la Chambre criminelle ? Certes. Mais concrètement, ca lui servira à quoi. A reconnaitre seulement qu’il avait raison, que la décision est fondée sur une erreur de droit ? Et… ?

Alors, ce qui devait être un des éléments fondamental de la politique carcérale, la réinsertion du détenu pour lui permettre de mener une vie « responsable » devient un acharnement et un sujet d’incompréhension.
Comme dit Didier Robert : « ils veulent que je pête les plombs ? Pourquoi me fait-on confiance un jour et pas le lendemain ? » Didier Robert pourrait sortir en conditionnelle pour raison médicale. Mais il ne veut pas : « si je sors c’est parce qu’on a confiance en moi, et non en faisant jouer mon état de santé ».

Si le législateur veut forger une société composée de citoyens « responsables », cela ne peut se faire que par la confiance dans l’autorité judicaire, « gardienne des libertés individuelles ».
Plus un homme est méfiant à l’égard de cette autorité, moins il risque d’avoir confiance dans la société dans laquelle il vit, ce qui n’est pas un gage de réinsertion sociale….

Contact Presse :
Benoît David
Tél : 06 63 08 17 39