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COR : Rapport 2007 Orientations et préconisations

Publié le mardi 20 novembre 2007 | https://banpublic.org/cor-rapport-2007-orientations-et/

COMITE D’ ORIENTATION
RESTREINT DE LA LOI PENITENTIAIRE 

 
 ORIENTATIONS ET PRECONISATIONS
 
 Novembre 2007

Le 11 juillet 2007, Madame la Ministre de la Justice a procédé à l’installation d’un Comité d’Orientation Restreint, en charge de contribuer à l’orientation des travaux « d’élaboration du projet d’une grande loi pénitentiaire ».

Ce comité d’orientation restreint (COR), composé de 27 membres (magistrats, personnels pénitentiaires, représentants du milieu associatif, avocats, universitaires et personnalités de la société civile) a débuté ses travaux dès le 23 juillet 2007, au centre pénitentiaire de Meaux- Chauconin, pour définir une méthodologie et dresser l’inventaire des questions à aborder autour des quatre thématiques fixées par la Ministre :

1) Les missions du service public pénitentiaire et de ses personnels

2) Les droits et devoirs des personnes détenues

3) Les aménagements de peine

4) Les régimes de détention

 Le comité s’est réuni successivement les 3, 10, 17 et 24 septembre, 1er, 3, 8, 9, 15, 16, 22 et 29 octobre 2007, en séance plénière ou en sous-groupe. La fixation à début novembre 2007 de la date de dépôt de ses conclusions l’a contraint à limiter le nombre d’auditions de personnalités extérieures et à renoncer à tout autre déplacement sur le terrain, comme encore à procéder à une étude en profondeur des expériences étrangères.

 Il a, en outre, constaté son incapacité de procéder à l’élaboration d’un rapport général d’orientation de la future loi pénitentiaire, inenvisageable dans le délai imparti, sauf à produire un document encourant la critique de la superficialité et de la non exhaustivité.

 Conduisant sa réflexion par référence aux 108 recommandations du Conseil de l’Europe dites « règles pénitentiaires européennes » (RPE), adoptées le 11 janvier 2006, par le Comité des ministres des 46 pays européens et s’appuyant sur le substantiel travail de fond conduit par les rédacteurs du rapport accompagnant l’avant-projet de loi de 2002, sur la peine et le service public pénitentiaire, le COR s’est borné à mettre en évidence les principaux questionnements autour des quatre thématiques proposées et à formuler des préconisations concrètes, sans distinguer si celles-ci devaient relever du domaine législatif ou de la sphère réglementaire.

Celles-ci sont le fruit d’échanges confrontant des positions parfois différentes qui illustrent la diversité des positionnements institutionnels et sensibilités des membres du comité. Elles ne sont donc pas le reflet de l’opinion unanime de ses membres, mais se veulent la résultante d’une position majoritaire de plus ou moins grande amplitude dégagée entre eux.

Elles s’articulent autour de sept idées force :

1- Faire de la peine privative de liberté l’ultime recours

2- Donner un sens à l’exécution de la peine privative de liberté

3- Rendre le détenu acteur de son temps d’enfermement et accompagner son parcours d’exécution de peine

4- Diversifier et revisiter les régimes de détention

5- Garantir au détenu les droits ordinaires du citoyen et affirmer les devoirs qui en sont le corollaire

6- Mettre en oeuvre l’exécution de la peine privative de liberté en l’individualisant et en l’aménageant

7- Offrir les voies et moyens nécessaires, par la promotion d’un grand service public pénitentiaire et en favorisant les indispensables synergies entre acteurs de l’enfermement et de la réinsertion

 Le comité d’orientation a, par ailleurs, pris le parti de s’abstenir de formuler des préconisations visant l’incarcération des mineurs. Cette abstention, loin de manifester un moindre intérêt pour une population pénale exigeant au contraire soin et attention accrue, résulte de deux considérations : la trop récente ouverture (été 2007) d’établissements pénitentiaires pour mineurs (EPM), plaçant l’éducatif au centre de la détention, qui ne permet pas encore de tirer un bilan et de dresser des perspectives ; l’intervention, les 9 et 11 mai 2007, de trois décrets (n°2007-748 ; 2007-749 et 2007-814) relatifs à la détention des mineurs et au régime disciplinaire des mineurs détenus dont on ne peut encore mesurer l’impact.
 
 Le comité d’orientation tient enfin à souligner qu’il ne prétend pas avoir embrassé l’ensemble des problématiques posées par la condition pénitentiaire en France, conscient de la nécessité d’approfondir et compléter sa réflexion sur les évolutions ou enjeux que plusieurs des préconisations retenues sous-tendent.

Liste des membres du Comité d’Orientation Restreint de la loi pénitentiaire
Président :  
Monsieur Jean-Olivier VIOUT, Procureur Général près la cour d’appel de Lyon

- Membres :
- Madame Paola BERGS, CFDT Justice
- Monsieur Olivier BOUDIER, Secrétaire général SNEPAP,
- Monsieur Alain BOULAY, Président de l’Association Aide aux Parents d’Enfants Victimes (APEV),
- Madame Bénédicte BRUNELLE, Directrice de la maison d’arrêt de Strasbourg,
- Monsieur Jean-Louis DAUMAS, Directeur général CNFEPJJ-Vaucresson,
- Monsieur Gilles DUCASSE, représentant du président d’Emmaüs France,
- Monsieur Jean FAVARD, Conseiller honoraire à la Cour de Cassation,
- Monsieur Jean-François FORGET, Secrétaire général UFAP,
- Madame Nadège GRILLE, Directrice de l’Etablissement Pénitentiaire pour Mineurs de Lavaur,
- Monsieur Mickaël JANAS, Juge de l’application des peines au tribunal de grande instance de Draguignan, Président de l’Association Nationale des Juges de l’Application des Peines,
- Monsieur Alexandre JARDIN, Ecrivain,
- Monsieur Alexandre JAUBERT, Lieutenant pénitentiaire à la maison d’arrêt de Villefranche sur Saône,
- Monsieur Pierre LAMOTHE, Psychiatre, chef du SMPR de Lyon,
- Madame Isabelle Le BOURGEOIS, Aumônier à la maison d’arrêt de Fleury Mérogis,
- Monsieur Ivan LEVAÏ, Journaliste,
- Monsieur Christophe MARQUES, Secrétaire général FO
- Monsieur Pierre MEHEUST, Président du Groupement Etudiant National d’Enseignement aux Personnes Incarcérées (GENEPI),
- Monsieur Michel PERETTI, Directeur du service pénitentiaire d’insertion et de probation du Val d’Oise,
- Madame Pierrette PONCELA, Professeure à l’Université Paris X - Nanterre,
- Monsieur Xavier RONSIN, Avocat général près la cour d’appel de Rennes, membre du Comité européen pour la prévention de la torture et des peines ou traitements inhumains ou dégradants (CPT)
- Monsieur Gilles STRAEHLI, Conseiller à la Cour de cassation,
- Maître Gérard TCHOLAKIAN, Avocat, membre du conseil national des barreaux,
- Madame Céline VERZELETTI, Secrétaire général CGT- Pénitentiaire,
- Monsieur Jean-Philippe VICENTINI, Procureur de la République près le tribunal de grande instance de Cambrai,
- Monsieur Pascal VION, représentant du secrétaire général FO- Direction

Personnalités auditionnées :
- Monsieur Bernard BOLZE, Association Trop c’est trop,
- Maître Danielle MERIAN, collectif octobre 2001,
- Messieurs Franck NATALI et Alain GUIHOUX, conférence nationale des bâtonniers,
- Monsieur Ange LEGEARD et Madame Marie PATIN, représentant la Fédération des Associations de Réflexion Action Prison et Justice (FARAPEJ),
- Monsieur Jean-Louis REYMONDIER, Aumônier catholique des prisons,
- Messieurs Thierry LEBEHOT, Denis L’HOUR, Christian FOURNIER et Yves LECHOPIER représentant la Fédération Citoyens et Justice,
- Messieurs Jean-Marc DUPEUX et Jean VOLFF, représentant la Fédération Protestante de France (FPF),
- Monsieur Alain BLANC, Magistrat, Conseiller à la Cour d’Appel de Paris, Président de l’Association Française de Criminologie (AFC),
- Madame Nicole MAESTRACCI, Présidente du Tribunal de Grande Instance de Melun, Présidente de la Fédération Nationale des Associations de Réinsertion Sociale (FNARS),
- Monsieur Pierre V TOURNIER, Directeur de recherche au CNRS, Centre d’histoire sociale du XXème siècle,
- Madame PETON-KLEIN, Médecin, Direction de l’Hospitalisation et de l’Organisation des Soins (DHOS) au ministère de la Santé de la Jeunesse et des Sports,
- Monsieur Michel JOUANNOT, Secrétaire National de l’Association Nationale des Visiteurs de Prison (ANVP)
- Monsieur Michel HUNAULT, Député, membre du Conseil de l’Europe, rapporteur pour la commission juridique du conseil de l’Europe du projet de charte pénitentiaire européenne,
- Mesdames Corinne CREVOT, Delphine CROUZET et Monsieur Pierre LE DOUARON, Délégation générale à l’Emploi et à la Formation Professionnelle (DGEFP),
- Messieurs Patrick MAREST, Jean BERARD et Hugues de SUREMAN, membres de la section française de l’Observatoire International des Prisons (OIP)
- Madame Sonja SNACKEN, Présidente du Conseil de Coopération Pénologique au Conseil de l’Europe,
- Madame Emmanuelle PERREUX, Monsieur David DE PAS, Présidente et membre du Syndicat de la magistrature,
- Madame Catherine PAULET, Monsieur Gérard LAURENCIN, Association des Secteurs de Psychiatrie en Milieu Pénitentiaire (ASPMP) et Madame Valérie KANOUI Association des Professionnels de Santé Exerçant en Prison (APSEP) (associations de psychiatres)
- Monsieur Joël THORAVAL, président de la commission nationale consultative des droits de l’homme
- Monsieur Jean-Yves MONTFORT, président du tribunal de grande instance de Versailles, membre de la commission nationale consultative des droits de l’homme

Chapitre I : Faire de la peine privative de liberté l’ultime recours

 Il importe plus que jamais que, dans l’échelle des peines, la privation de liberté soit considérée comme la sanction extrême et ne soit envisagée qu’en fonction de l’impossibilité de trouver dans une peine d’une autre nature la réponse pénale adaptée tant à la personnalité de l’auteur de l’infraction qu’aux intérêts de la société et de la victime.

Dans cet esprit, pourrait être inséré, dans le code pénal, un article énonçant que « la privation de liberté doit être considérée comme une sanction de dernier recours, lorsque la gravité de l’infraction et la personnalité de son auteur rendent toute autre sanction manifestement inadéquate »

Faisant référence aux dispositions de l’article 132-24 du code pénal rappelant que « la nature, le quantum et le régime des peines prononcées sont fixés de manière à concilier la protection effective de la société, la sanction du condamné et les intérêts de la victime avec la nécessité de favoriser l’insertion ou la réinsertion du condamné et de prévenir la commission de nouvelles infractions », le COR estime nécessaire de préconiser divers aménagements du code pénal et du procédure pénale propres à favoriser un recours accru aux mesures alternatives à l’incarcération.

A) Faciliter le recours aux peines alternatives à l’incarcération

1) Création d’une nouvelle peine alternative à l’emprisonnement : l’assignation à résidence (dite aussi arrêt domiciliaire) sous placement sous surveillance électronique

Actuellement, le recours au placement sous surveillance électronique n’est possible que dans le cadre d’une procédure de comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité ou de l’aménagement d’une peine d’emprisonnement ferme, soit décidé ab initio par la juridiction de jugement, soit ultérieurement dans le cadre de l’application de la peine.

Est préconisée la création d’une peine d’assignation à résidence (ou d’arrêt domiciliaire) avec placement sous surveillance électronique prononcée par la juridiction de jugement qui fixerait, outre sa durée, le quantum de la peine encourue en cas de non respect de la mesure (cf. dispositif du jour amende).

Sa faisabilité pourrait être vérifiée, même en cas de déférement en procédure de comparution immédiate, dans le cadre de « l’enquête pour favoriser l’insertion sociale » ordonnée par le procureur de la république (art. 41 du CPP).

2) Possibilité de prononcer des peines de travail d’intérêt général, dans une fourchette de 20 à 400 heures

La fixation à 40 heures de la durée minimum du travail d’intérêt général parait parfois inadaptée, notamment au regard de la durée légale hebdomadaire du travail. La possibilité de prononcer des peines de travail d’intérêt général à partir d’un seuil de 20 heures permettrait de sanctionner de petits délits (infractions les moins graves au code de la route par exemple) commis par des prévenus désargentés et éviterait le recours à l’emprisonnement avec sursis souvent dépourvu de signification.

Inversement le maximum de 210 heures apparaît dans quelques cas (certes limités) insuffisant vis-à-vis de prévenus qui pourraient, à l’occasion d’un travail d’intérêt général, être insérés dans une formation qualifiante.

Le COR propose donc une modification de l’article 131-8 du code pénal par le remplacement de l’actuelle fourchette de 40 à 210 heures par une fourchette de 20 à 400 heures.

3) Création pour les communes et communautés de communes d’une certaine importance, les départements, les régions et les établissements publics d’une obligation de mise à disposition de poste de travail d’intérêt général

Dans certains ressorts, la pénurie de postes de travail disponibles retarde durant de nombreux mois la mise en œuvre des peines de travail d’intérêt général. Certaines juridictions se privent parfois de la possibilité de prononcer cette peine compte tenu de la longueur des délais de mise à exécution.

Est proposée l’introduction dans le code de procédure pénale d’une disposition imposant aux communes et communautés de communes d’une certaine importance, ainsi qu’aux régions, aux départements et aux établissements publics, l’obligation de mise à disposition de postes de travail destinés aux condamnés à une peine de travail d’intérêt général.

Cette obligation (sans incidence sur le marché de l’emploi, eu égard à l’absence de rémunération du condamné) se rapprocherait de celle visant le quota de logements sociaux imposé aux communes (loi SRU) et se déclinerait différemment en fonction de la taille de la collectivité locale ou de l’établissement public. Sa non observation donnerait lieu à une sanction financière.
 
B) Réduire la détention provisoire, notamment dans sa durée, par un recours accru au contrôle judiciaire

L’extension du recours au contrôle judiciaire, notamment socio éducatif, en amont de l’audience de jugement doit être intensifié. Il offre à la juridiction de jugement une meilleure appréciation de la volonté du prévenu de se réinsérer et de réparer le préjudice causé à la victime. Le contrôle judiciaire ne doit plus connaître comme champ privilégié d’application la seule procédure d’information judiciaire mais doit être développé, dans le cadre des procédures de citation directe, convocation par OPJ ou par greffier.

Une extension du champ d’application des dispositions de l’article 394 du code de procédure pénale devrait permettre au procureur de la république, en cas de citation directe, de convocation par officier de police judiciaire ou par greffier (art. 390-1 du CPP) de soumettre le prévenu à une ou plusieurs mesures de contrôle judiciaire.

Après obtention de l’accord du prévenu, recueilli le cas échéant en présence de son avocat, le procureur de la république saisirait, pour homologation sur dossier dans les 48 heures, le juge des libertés et de la détention puis confierait au service pénitentiaire d’insertion et de probation ou une association habilitée, la mise en œuvre immédiate de cette mesure.

En cas de désaccord, le procureur de la république ferait procéder à un déférement ouvrant droit à la procédure de placement sous contrôle judiciaire par le juge des libertés et de la détention, déclinée à l’article 394 du CPP.

Préconisations :

1) Adjoindre à l’article 132-24 du code pénal un troisième paragraphe énonçant que « la privation de liberté doit être considérée comme une sanction de dernier recours, lorsque la gravité de l’infraction et la personnalité de son auteur rendent toute autre sanction manifestement inadéquate »

2) Créer une nouvelle peine alternative à l’emprisonnement : l’assignation à résidence (dite aussi arrêt domiciliaire) sous placement sous surveillance électronique

3) Rendre possible le prononcé des peines de travail d’intérêt général, dans une fourchette de 20 à 400 heures

4) Créer pour les communes et communautés de communes importantes, les départements, les régions et les établissements publics une obligation de mise à disposition de postes de travail d’intérêt général

5)Etendre le champ d’application des dispositions de l’article 394 du code de procédure pénale sur le contrôle judiciaire aux procédures initiées par citation directe, convocation par officier ou agent de police judiciaire ou par greffier (art. 390-1 du CPP)

Chapitre II : Donner un sens à l’exécution de la peine privative de liberté

La peine ne peut être exclusivement conçue en terme de punition ou d’expiation. Elle doit s’inscrire tout autant dans la perspective de réinsertion qu’impose sa finalité tant individuelle que sociale. C’est pourquoi elle doit revêtir une signification pour le condamné, notamment lorsqu’elle entraîne une privation de liberté. D’où la nécessité d’inscrire l’enfermement dans une dynamique en forme de « parcours » adapté au profil de chaque détenu.

Deux préconisations paraissent répondre à cette nécessité :

1) L’élaboration d’un bilan de personnalité à l’entrée en détention

Tout détenu entrant en détention doit être accueilli dans un quartier dédié de l’établissement pénitentiaire où il devra demeurer, plusieurs jours durant, pour faire l’objet d’un véritable bilan de personnalité diligenté par un personnel pénitentiaire, médical et social, spécialement formé à cette fin.

Seront recueillies à cette occasion toutes informations utiles sur sa santé physique et mentale, (notamment au niveau de sa fragilité psychologique et des risques de passage à l’acte suicidaire), sur son niveau scolaire et culturel, ses aptitudes professionnelles, sa situation familiale et sociale etc. Ces renseignements feront l’objet d’un bilan élaboré en commun par les divers intervenants, en vue de la rédaction d’un document de synthèse permettant une appréhension complète du profil du détenu.

2) La contractualisation d’un « parcours de mobilisation »

Au vu du bilan de personnalité réalisé à l’entrée en détention, devra être élaboré un parcours de mobilisation répondant à un véritable projet d’exécution de peine inscrit dans une stratégie de préparation à la sortie, quel que soit l’éloignement de cette perspective.

Ce parcours ne saurait être imposé au condamné ; il doit au contraire faire l’objet de son adhésion après la mise en oeuvre d’une pédagogie tendant à faire comprendre sa logique et son bien-fondé. D’où la nécessité de lui donner une forme contractualisée par l’élaboration d’un document écrit co-signé par le détenu, le directeur de l’établissement pénitentiaire et le directeur du service d’insertion et de probation.

La limitation de son échéance à une année renouvelable parait s’imposer, en raison de l’évolution des personnalités et comportements en détention, comme de la nécessité de dresser annuellement un bilan et de définir avec le détenu les perspectives à maintenir ou à infléchir.

Désormais vécu comme un passage et non comme un état, l’enfermement devrait ainsi cesser d’être perçu comme une soumission passive.

Pour être crédible et bénéficier des réorientations qui peuvent être rendues nécessaires, le parcours de mobilisation exigera enfin un suivi permanent et individualisé dans lequel tous les intervenants devront être impliqués. D’où une troisième préconisation tendant à la mise en place dans chaque établissement d’une équipe pluridisciplinaire incluant le personnel de surveillance en charge d’assurer le croisement des informations indispensables à ce suivi.

Préconisations :

6) Mettre en place dans chaque établissement une structure d’accueil des nouveaux arrivants, en vue de la réalisation d’un bilan complet de personnalité

7) Contractualiser avec le détenu un « parcours de mobilisation » (ou parcours d’exécution de peines) à échéance annuelle, renouvelable

8) Constituer au sein de chaque établissement une équipe pluridisciplinaire incluant le personnel de surveillance, en charge du suivi du parcours de chaque détenu

Chapitre III : Rendre le détenu acteur de son temps d’enfermement et accompagner son parcours d’exécution de peine

La privation de liberté ne saurait être un temps d’indolence, de vacuité intellectuelle, et d’irresponsabilité. Le détenu ne doit pas être mais exister à travers une activité quotidienne inscrite dans son parcours de mobilisation. Plusieurs facteurs peuvent y contribuer :

1) Valoriser le travail en détention

Bien que répondant à des spécificités inhérentes aux conditions de son exécution, le travail en détention doit recevoir un cadre juridique exprimant clairement l’adhésion du détenu à un lien contractuel.

Sans contester les considérations fondant l’article 717-3 du code de procédure pénale qui dispose que « les relations de travail des personnes incarcérées ne font pas l’objet d’un contrat de travail », le comité d’orientation estime nécessaire l’instauration d’un contrat de travail aménagé ou contrat d’engagement professionnel formalisant les conditions d’embauche du détenu, la durée du contrat, le période d’essai, la rémunération, les conditions de suspension ou de rupture etc.

Afin de lever toute ambiguïté, ce contrat signé par le détenu et l’administration pénitentiaire, avec contreseing de l’entreprise concessionnaire indiquerait clairement que tout contentieux se rapportant à son exécution serait de la compétence de la juridiction administrative.

Cette reconnaissance, par un acte d’engagement de nature contractuelle, du travail en détention participerait à la valorisation de celui-ci.

2) Reconnaître en le rémunérant l’investissement du détenu pour sa réinsertion

Le détenu dépourvu de toute ressource (indigent, en fin d’allocation du RMI) est souvent réduit à abandonner tout projet de suivi d’un enseignement ou d’une formation professionnelle, au profit d’un travail en détention même non formateur, afin de disposer de quelques fonds.

Il convient donc de lever cet obstacle et d’encourager l’investissement du détenu dans le suivi d’un enseignement, d’une formation professionnelle ou d’une démarche d’insertion en prévoyant la mise en place d’une allocation d’insertion correspondant à une fraction du SMIC et indexée sur lui. Celle-ci serait versée à tout détenu ne percevant pas le RMI, en contrepartie du suivi de toute activité à plein temps concourant à un projet individualisé d’insertion.

3) Optimiser le financement des actions de formation en faveur des personnes détenues

Le financement de la formation professionnelle des personnes détenues est actuellement assuré, d’une part, par le ministère chargé de l’emploi et, d’autre part, par le fond social européen.

L’administration pénitentiaire exprimant ses craintes de réduction de ces deux modes de financement (-27% de baisse du FSE en 2007) préconise le transfert aux régions du financement des actions de formation en faveur des personnes détenues.

Elle fait observer que, depuis 1982, celles-ci se sont vues transférer la prise en charge du financement des actions de formation professionnelle de droit commun. Confier aux régions la gestion et le pilotage des actions de formation professionnelle des personnes détenues permettrait de mener une véritable politique de proximité en facilitant le dialogue local et l’organisation de réseaux institutionnels d’acteurs de terrain.

Cette perspective ne doit toutefois pas masquer le risque d’une grande disparité entre régions en fonction de la plus ou moins grande implication de chacune d’elles dans le soutien aux actions de formation professionnelle en faveur de la population pénale.

C’est pourquoi le COR préconise une expérimentation temporaire dans un certain nombre de régions du transfert de compétence préconisé. Il appartiendra, à terme, à l’administration pénitentiaire d’apprécier si budgétairement cette expérimentation s’avère décevante et doit être abandonnée ou si, au contraire, elle se doit d’être généralisée et pérennisée sur l’ensemble du territoire.

3) Accompagner la préparation à la sortie

A l’effort de réinsertion suscité de la part du détenu durant le temps d’exécution de sa peine doit répondre la mise en œuvre de tous dispositifs sociaux permettant d’accompagner sa préparation à la sortie. Deux préconisations peuvent aller à l’appui de cet accompagnement :

a) Permettre l’élection de domicile du détenu à l’établissement pénitentiaire ou au centre d’action sociale de la commune où il est implanté

Cette domiciliation est destinée à permettre d’engager avant la sortie l’instruction de tous dossiers de demande d’aide sociale, notamment en vue de l’allocation du RMI pour ceux qui n’en bénéficiaient pas avant leur incarcération

b) Systématiser le règlement d’avance sur droits supposés afin de permettre au libéré de percevoir un premier mois d’allocation du RMI, dès sa libération

Cette disposition parait essentielle en considération de l’important facteur de récidive que constitue l’indigence conjuguée à l’isolement social durant les premiers jours de retour du détenu à la liberté.

Préconisations :

9) Instaurer un contrat de travail aménagé (ou contrat d’engagement professionnel) signé entre le détenu et l’administration pénitentiaire, avec contreseing de l’entreprise concessionnaire.

10) Mettre en place une allocation d’insertion pour les détenus ne percevant pas le RMI, en contrepartie du suivi d’un enseignement, d’une formation professionnelle ou de toute autre activité concourant à un projet individualisé d’insertion.

11 ) Expérimenter un transfert aux régions du financement des actions de formation en faveur des personnes détenues

12) Permettre l’élection de domicile du détenu à l’établissement pénitentiaire ou au centre d’action sociale de la commune où il est implanté

13) Systématiser le règlement d’avance sur droits supposés afin de permettre au libéré de percevoir un premier mois d’allocation du RMI, dès sa libération

Chapitre IV : Diversifier et revisiter les régimes de détention

1) Instauration d’un régime de détention identique entre prévenus et condamnés

Le comité d’orientation estime urgent de mettre fin à la dichotomie de traitement existant entre les prévenus et condamnés maintenus en maison d’arrêt et les condamnés affectés en établissement pour peines. Celle-ci conduit à voir les détenus présumés innocents faire l’objet d’un régime de détention moins favorable que celui octroyé à certains détenus condamnés. Cette dichotomie est d’autant plus choquante :

- d’une part, à raison de la coexistence, dans de nombreux établissements, de ces deux populations pénales qu’induit la longueur des délais d’attente imposés aux condamnés avant leur transfèrement en établissement pour peines.

- d’autre part à raison de l’impossibilité pour les condamnés maintenus en maisons d’arrêt de bénéficier du régime et des conditions de détention des condamnés affectés en établissements pour peines.

Doit donc être affirmé le principe général que toute personne incarcérée doit bénéficier du même régime de détention, la restriction de certains droits imposée aux prévenus ne pouvant résulter que d’une décision de l’autorité judiciaire compétente.

2) Prise en compte des dispositions de l’article 716 du code de procédure pénale sur l’encellulement individuel des mis en examen, prévenus et accusés

L’article 716 du code de procédure pénale dispose que « les personnes mises en examens, prévenus et accusés soumis à la détention provisoire sont placés au régime de l’emprisonnement individuel de jour et de nuit ».

La règle pénitentiaire européenne 18-5 stipule que « chaque détenu doit en principe être logé pendant la nuit dans une cellule individuelle, sauf lorsqu’il est considéré comme préférable pour lui qu’il cohabite avec d’autres détenus ».

Le COR préconise donc la mise en œuvre de toutes mesures propres à rendre effective, dans le délai le plus rapproché possible et sans nouveau moratoire, l’application du principe posé par l’article 716 du code de procédure pénale.

La mise en application d’un certain nombre de préconisations sur l’aménagement des peines (cf. infra) devrait contribuer, par la réduction de la surpopulation carcérale, à la réalisation de cet objectif.

En tout état de cause, le détenu doit pouvoir choisir, avant d’y être contraint, de partager une cellule. En outre, celle-ci ne doit être partagée que dans la mesure où elle est adaptée à un usage collectif. Elle doit, enfin, n’accueillir que des détenus reconnus aptes à cohabiter (règles pénitentiaires européennes 18-6 et 18-7).

3) Extension de 1 à 2 ans de la possibilité de maintien de condamnés en maison d’arrêt, si toutefois leur séparation d’avec les prévenus est effective et création d’un droit à affectation en établissement pour peine dans les six mois du jour où la condamnation est devenue définitive.

Si l’état d’encombrement des établissements d’exécution de peine ne leur permet pas d’accueillir tous les condamnés dont le reliquat de peine à subir est supérieure à 1 an, le maintien de ces derniers en maison d’arrêt peut être admissible jusqu’à 2 ans, lorsque des conditions tenant à la préparation de leur libération, leur situation familiale ou leur personnalité le justifient. En outre, leur séparation avec les prévenus devra être effective et leurs observations préalables recueillies par le chef d’établissement.

Doit en revanche être affirmé un droit pour tout condamné, détenu en maison d’arrêt, auquel il reste à subir une peine supérieure à deux ans, à bénéficier d’un transfèrement en établissement d’exécution de peine dans un délai maximum de 6 mois, à compter du jour où sa condamnation est devenue définitive.

En tout état de cause, les condamnés maintenus en maison d’arrêt doivent bénéficier des mêmes droits et des mêmes aménagements de peine que ceux exécutant leur peine dans un établissement pour peine.

4) Sur la base du volontariat, autoriser l’organisation d’activités communes entre détenus des deux sexes, si un encadrement suffisant le permet

Le faible nombre de prévenues et condamnées dans certains « quartiers femmes » de maisons d’arrêt ou centres pénitentiaires, ne permet pas l’organisation d’activités spécifiques, créant ainsi une disparité avec « les quartiers hommes » bénéficiant de telles activités.

Sur la base du volontariat, des activités communes entre hommes et femmes doivent pouvoir être organisées (cf : règle pénitentiaire européenne 18-9) d’abord à titre expérimental et si un encadrement suffisant le permet, ainsi qu’il est déjà pratiqué dans les établissements pénitentiaires pour mineurs.

5) Objectivation des critères d’affectation de certains condamnés dans des établissements à sécurité renforcée, par référence aux règles pénitentiaires européennes. Réexamen annuel de la pertinence du maintien du condamné dans ce type d’établissement

Les règles pénitentiaires européennes 51-3, 51-4 et 51-5 disposent que chaque détenu, aussi rapidement que possible après son admission, doit être évalué « afin de déterminer le risque qu’il ferait peser sur la collectivité en cas d’évasion (et) la probabilité qu’il tente de s’évader seul ou avec l’aide de complices extérieurs ».

Chaque détenu doit être ensuite soumis « à un régime de sécurité correspondant au niveau de risque identifié », ledit niveau nécessaire devant être « réévalué régulièrement ».

Le COR ne remet pas en cause l’existence d’établissements de sécurité renforcée mais propose de conditionner l’affectation d’un condamné dans ces établissements à l’observation des critères déclinés par les règles pénitentiaires susvisées.
L’opportunité du maintien du condamné dans un tel type d’établissement, au regard de ces critères, devra être réexaminée périodiquement et au moins chaque année.

6) Réduction de l’incidence du critère de la longueur de la peine pour le choix de l’établissement d’exécution. Prise en compte accrue, dans l’affectation géographique, du maintien des liens familiaux

Le nécessaire maintien des liens familiaux impose la prise en compte de la situation familiale de chaque détenu au moment du choix de l’établissement où il exécutera sa peine. Ce choix ne pourra donc plus faire prévaloir le critère de la longueur de la peine et devra prendre en compte l’éloignement géographique, notamment en présence d’enfants mineurs bénéficiant d’un droit de visite au détenu.

7) Création, au sein des centres pénitentiaires et des maisons d’arrêt les plus importantes, d’unités regroupant des profils de détenus exigeant une prise en charge différenciée ou une protection particulière (toxicomanes, délinquants sexuels, etc)

Cette disposition répond à la nécessité d’assurer une prise en charge spécifique de certains détenus (toxicomanes, auteurs de conduites adictives, délinquants sexuels, etc)

8) Mise en place, dans certains établissements, de programmes de prise en charge à finalité thérapeutique ou non, à destination de certains publics, accessibles sur la base du volontariat

Est préconisée la mise en oeuvre dans certains établissements dotés d’un personnel spécialement formé, de programmes spécifiques, médicaux ou non, destinés à la prise en charge temporaire de publics particuliers. Toute thérapie de nature médicale exigera l’accord du condamné. D’une manière générale l’admission d’un détenu à un programme, quelle que soit sa nature, devra reposer sur le volontariat.

Préconisations

14) Affirmer et mettre en application le principe général que toute personne incarcérée doit bénéficier du même régime de détention, la restriction de certains droits imposée aux prévenus ne pouvant résulter que d’une décision de l’autorité judiciaire compétente

15) Permettre aux condamnés exécutant leur peine en maison d’arrêt de bénéficier des mêmes
droits et des mêmes aménagements de peine que ceux dont bénéficient les condamnés incarcérés dans des établissements pour peine.

16) Mettre en œuvre dans le délai le plus rapproché possible les dispositions de l’article 716 du code de procédure pénale sur l’encellulement individuel des mis en examen, prévenus et accusés

17) Affirmer et assurer l’effectivité d’un droit pour tout condamné, détenu en maison d’arrêt, auquel il reste à subir une peine supérieure à deux ans, à bénéficier d’un transfèrement en établissement d’exécution de peine dans un délai maximum de 6 mois, à compter du jour où sa condamnation est devenue définitive

18) Autoriser, sur la base du volontariat, l’organisation d’activités communes entre détenus des deux sexes, si un encadrement suffisant le permet

19) Objectiver les critères d’affectation de certains condamnés dans des établissements à sécurité renforcée, par référence aux règles pénitentiaires européennes. Réexaminer périodiquement et au moins annuellement la pertinence du maintien du condamné dans ce type d’établissement

20) Réduire l’incidence du critère de la longueur de la peine pour le choix de l’établissement d’exécution et accroître la prise en compte, dans l’affectation géographique, du maintien des liens familiaux

21) Créer, au sein des centres pénitentiaires et des maisons d’arrêt les plus importantes, d’unités regroupant des profils de détenus exigeant une prise en charge différenciée ou une protection particulière (toxicomanes, délinquants sexuels etc)

22) Mettre en place, dans certains établissements, des programmes de prise en charge à finalité thérapeutique ou non, à destination de certains publics, accessibles sur la base du volontariat.

Chapitre V : Garantir au détenu les droits ordinaires du citoyen et assurer le respect des devoirs qui en sont le corollaire

A) Garantir au détenu les droits ordinaires du citoyen

L’emprisonnement ne devant être que la seule privation de liberté, la réduction de tout autre droit reconnu au citoyen ordinaire ne saurait être admise.

1) Droit au maintien des liens familiaux

Par référence à l’article 24-1 des règles pénitentiaires européennes, doit être reconnu un droit pour la personne détenue à communiquer aussi fréquemment que possible avec sa famille. Cette nécessité de maintien des liens familiaux destiné à limiter les effets de la sanction pénale au seul individu objet de la privation de sa liberté et à ne point nuire à sa réinsertion, induit plusieurs conséquences :

a) Accès au téléphone

 Rendu possible par l’installation de postes téléphoniques fixes dans les quartiers de détention, cet accès à la téléphonie au demeurant facilement contrôlable et propre à juguler les communications clandestines par portables introduits illicitement, doit être généralisé.

 Il conviendra, certes, d’exiger que le numéro d’appel du poste téléphonique appelé ait été préalablement décliné et contrôlé et ait fait l’objet d’un accord de son titulaire pour recevoir les communications du détenu.

 Cet accès serait ouvert tant aux condamnés qu’aux prévenus, sous réserve pour ces derniers d’une absence d’opposition de l’autorité judiciaire compétente.

b) Droit aux visites de parents et de proches

Sous réserve de l’accord de l’autorité judiciaire compétente en ce qui concerne les prévenus, tout détenu quel que soit son régime de détention doit, au minimum, bénéficier effectivement d’un parloir hebdomadaire, dont la durée pourra être étendue en considération d’éléments particuliers (éloignement de la famille, fragilité du détenu au niveau du risque suicidaire, prescription médicale etc).

Cet accès au parloir hebdomadaire devra être maintenu pour les détenus subissant une sanction de cellule disciplinaire (sauf à imposer, durant le temps d’encellulement disciplinaire, un parloir à hygiaphone si la faute disciplinaire est en relation avec l’exercice du droit de visite).

c) Extension des unités de vie familiale

Les retours d’expérience éminemment positifs, enregistrés dans les premiers établissements disposant d’unités de vie familiale conduisent à préconiser leur généralisation, notamment à la faveur des nouveaux programmes immobiliers en cours ou à venir. Tous les détenus quel que soit leur statut y seraient éligibles, au-delà du sixième mois de détention provisoire sauf, pour ces derniers, opposition motivée de l’autorité judiciaire.

2) Droit à la sécurité

L’univers carcéral ne peut être un lieu d’insécurité. L’administration pénitentiaire doit inscrire comme devoir premier celui d’assurer la protection de l’intégrité physique des personnes qui lui sont confiées et de prémunir celles-ci de toute pression morale, en tous lieux collectifs comme individuels et à toutes heures du jour comme de la nuit.

La détection des populations les plus vulnérables (que facilitera désormais le bilan de personnalité établi à l’arrivée du détenu) et leur prise en charge spécifique devront être inscrites au rang des priorités. Elles se traduiront par l’aménagement de quartiers spéciaux ou, à défaut, par l’organisation d’activités communes propres. Un même soin sera apporté pour le choix du ou des détenus avec lesquels l’individu en situation de vulnérabilité pourra être conduit à co-habiter.

Outre les informations sur le profil particulier de l’individu qu’elle se doit de fournir au chef d’établissement, l’autorité judiciaire prescrivant une incarcération devra attirer l’attention de celui-ci sur la nature de l’infraction reprochée et sa résonance médiatique, dès lors que l’une ou l’autre pourrait être de nature à entraîner des réactions d’hostilité de la part de la population pénale. Il en sera de même pour toute incarcération d’une personne pouvant, par l’exercice présent ou passé d’une profession ou d’une fonction particulière, donner lieu à de semblables réactions.

Possibilité doit enfin être donnée à chaque détenu dont la sécurité est mise en danger d’alerter, à toute heure du jour et de la nuit, le personnel pénitentiaire d’astreinte afin de provoquer son intervention sans délai qu’exige cette urgence.

Cette possibilité doit conduire à la généralisation de l’interphonie dans tous les lieux d’encellulement individuels et collectifs, quels que soient la catégorie d’établissement et le régime de détention. Cet équipement contribue, en outre, à la réduction des délais de traitement de l’urgence médicale.

3) Droit à la santé

 La reconnaissance à toute personne détenue d’un droit à la protection de sa santé, en tous points identique à celle consentie à tout citoyen, constitue une évidence qu’il convient de rappeler. Ce droit mérite de recevoir des déclinaisons précises.

a) Priorité et place du soin dans la vie pénitentiaire

Les soins ne sauraient être exclusifs du travail en détention ou de l’accès à un programme de réinsertion, de formation ou de divertissement. A fortiori, les soins ne peuvent faire différer ou écarter une mesure d’aménagement de peine.

b) Choix du médecin

Le détenu ne peut exercer un libre choix de son médecin traitant mais est fondé à demander que soit pris contact et avis de son médecin traitant sur la continuité des soins en cours, à son entrée en détention. Il peut solliciter un deuxième avis extérieur à la détention lors d’un choix thérapeutique majeur, en particulier lorsque est envisagée une intervention chirurgicale. En cas d’urgence, la prise en charge hospitalière permet la pratique éthique de décision collégiale.

c) Poursuite d’un soin commencé à l’extérieur 

Sauf exception motivée par le médecin de l’unité de consultations et de soins ambulatoire (UCSA) et susceptible de recours, les soins ou actes médicaux entamés à l’extérieur sont poursuivis en détention. Si une procédure de don d’organe a été initiée à l’extérieur, elle est poursuivie en détention, suivant les procédures et garanties ordinaires.

d) Droit à l’interruption volontaire de grossesse

Le droit à l’interruption volontaire de grossesse, dès lors qu’elle s’inscrit dans les délais légaux, est reconnu à toute détenue, comme à toute citoyenne ordinaire

e) Soins de confort ou d’esthétique

Si un soin réclamé par le détenu lui est refusé au motif que, bien qu’indiqué, il n’apparaît pas absolument nécessaire au maintien de sa santé, celui-ci doit être avisé de la faculté qui lui est offerte de faire appel devant une commission d’évaluation ad hoc instaurée par l’établissement hospitalier de rattachement, avec la participation d’un psychiatre et d’un médecin conseil de l’assurance maladie.

f) Soins assumés financièrement par le patient détenu

Les soins dentaires prothétiques ou conservatoires qui relèveraient en milieu libre d’un choix financier du détenu peuvent être effectués et facturés selon les règles et tarifs hospitaliers, sans préjudice des nécessités de service de l’UCSA et des soins dentaires ordinaires.

g) Mission du médecin inspecteur de santé publique

Le médecin inspecteur de santé publique en charge de l’établissement pénitentiaire et/ ou de l’établissement de santé de rattachement de l’UCSA ou du SMPR doit effectivement assurer, outre sa mission de contrôle de l’organisation des soins, une mission d’interlocuteur du détenu.
 Il doit être saisi pour l’instruction de toute revendication d’un détenu portant sur le caractère nuisible ou inadapté de ses conditions de détention.
Il doit alors provoquer les expertises prévues par la loi pour l’appréciation de la compatibilité de l’état de santé du détenu avec la détention.

h) Soins sans consentement

Les soins sans consentement en détention sont implicitement légitimés par l’article D 362 du code de procédure pénale, dès lors qu’ils sont dispensés au bénéfice immédiat et exclusif du détenu et dans l’hypothèse où le détenu n’est pas en état de consentir à un acte de soin ou de diagnostic qui lui est nécessaire.

Il doit être créé une voie de recours accessible tant au médecin en milieu pénitentiaire qu’au détenu permettant de confirmer ou d’infirmer cette incapacité et cette nécessité. Un soin sans consentement doit être répertorié et donner lieu à un compte-rendu de son indication et de ses modalités adressé au médecin inspecteur de santé publique.

i) Handicap et séjour pénitentiaire

Le handicap d’un détenu doit être pris en compte par l’administration pénitentiaire qui devra prendre toutes dispositions utiles en vue de son affectation en établissement adapté ou procéder aux aménagements de sa cellule et de son régime de détention rendus indispensables.

Si le handicap permanent ou transitoire d’un détenu nécessite l’assistance permanente ou intermittente d’une tierce personne, l’administration pénitentiaire sera tenue de placer celui-ci dans une structure où il pourra en bénéficier ou faire assurer sa prise en charge, suivant les modalités et procédures ordinaires (financement du conseil général, etc)

j) Information du corps médical

Le corps médical intervenant auprès du détenu doit recevoir communication systématique de la décision de justice relatant les faits à l’origine de son incarcération ainsi que de l’intégralité des expertises psychiatriques, psychologiques ou médico- psychlogiques dont celui-ci a pu faire l’objet, lors de la procédure judiciaire.

Il incombera au ministère public près la juridiction ayant prononcé la condamnation définitive d’adresser au greffe de l’établissement pénitentiaire l’ensemble de ces pièces, en charge pour celui-ci de les transmettre au médecin chef de l’UCSA.

k) Secret médical

Les membres de l’administration pénitentiaire et les médecins sont chacun comptables de leur propre secret professionnel. Cet assujettissement au secret s’étend à l’ensemble des intervenants pouvant être conduits à avoir connaissance d’informations sur le détenu touchant au domaine médical.

Toutefois, il doit être possible pour le médecin traitant en milieu pénitentiaire de communiquer des éléments cliniques à un expert, s’ils sont utiles aux droits du détenu ou à l’administration pénitentiaire, s’ils sont nécessaires à une gestion opportune de ses conditions de détention, dès lors que ce dernier y consent.
Il ne peut être passé outre à cette nécessité de consentement, qu’en présence d’un détenu manifestement inapte à appréhender la défense de ses intérêts.

En outre, en cas de danger imminent pour les personnels pénitentiaires ou de nécessité pour ces personnels de tenir compte dans leur attitude et dans leur mission de l’état physique ou psychique d’un détenu, une information strictement réduite à cette finalité peut être fournie par le médecin à l’administration pénitentiaire, à charge pour celui-ci d’en avertir le détenu.

l) Accès au dossier médical

L’accès au dossier médical conservé dans les locaux de l’UCSA ou du SMPR est garanti et protégé dans les mêmes conditions qu’un dossier hospitalier ordinaire. Toutefois l’accès au dossier médical par une des personnes autorisées par la loi, sera limité aux seules pièces constituant stricto sensu le dossier médical. Toute pièce de nature judiciaire, autre que celles visées au paragraphe k, pouvant figurer dans le dossier, devra être soustraite à la consultation.

m) examen expertal annuel de l’état physique et mental des détenus de plus de 75 ans, au regard des dispositions de l’article 720-1-1 du code de procédure pénale sur la suspension de peine pour cause médicale.

 Sauf persistance d’un risque grave de renouvellement de l’infraction, l’article 720-1-1 du code de procédure pénale autorise la suspension de peine pour les condamnés atteints d’une pathologie engageant le pronostic vital ou dont l’état de santé est durablement incompatible avec le maintien en détention. La réalité de cette pathologie ou de cet état de santé doit être constatée par deux expertises médicales concordantes.

La compatibilité avec le maintien en détention devant être posée pour les détenus âgés de plus de 75 ans, est préconisé pour chacun de ceux-ci un examen expertal annuel destiné à établir si son état physique ou mental justifie ou non la mise en œuvre des dispositions de l’article 721-1-1 du code procédure pénale.

n) Alignement des conditions d’accès et de maintien des détenus en unités hospitalières spécialement aménagées (UHSA) sur celles d’accès et de maintien en unités hospitalières sécurisées interrégionales (UHSI)

Les Unités Hospitalières Spécialement Aménagées (UHSA) doivent être clairement identifiées comme des unités de soin et non d’exécution de peine pour détenus malades mentaux ou souffrant de troubles de la personnalité.

L’admission dans une UHSA doit résulter, comme pour l’admission en Unité Hospitalière Sécurisée Interrégionale (UHSI), d’une décision médicale et non d’une décision judiciaire ou administrative, prise en considération de l’absence de soins adaptés dans l’établissement d’origine, équivalents à l’offre de soins en milieu ouvert.

L’admission en UHSA pourra être décidée avec ou sans le consentement du détenu, soit au titre d’un placement d’office (article D398 du code de procédure pénale) soit sous le régime du placement libre.

Les UHSA ne sauraient avoir vocation à accueillir des condamnés non placés sous écrou ; elles ne peuvent donc être un lieu d’accueil dans le cadre d’un aménagement de peine se substituant à l’incarcération.

o) Prévention du risque suicidaire

Une politique volontariste de prévention du risque suicidaire, déjà largement engagée (préconisations du Pr. Terra) doit être poursuivie dans chaque établissement. Elle doit être déclinée et évaluée régulièrement par une équipe pluridisciplinaire dont le personnel médical doit être un élément moteur. Elle doit s’accompagner d’une formation des personnels aux risques suicidaires.

Chaque survenance d’un suicide doit faire l’objet d’un bilan et déboucher, si besoin, sur des préconisations nouvelles en terme d’anticipation, connaissance et analyse des signes avant-coureurs, dispositions préventives à prendre etc.

Est préconisée, en outre, l’affectation au sein des unités de consultations et de soins ambulatoires (UCSA) opérant dans les établissements, d’un ou plusieurs psychologues, en charge d’animer des groupes de paroles à destination des détenus les plus psychologiquement fragiles.

p) Mise en place d’une évaluation régulière par le ministère de la santé ou par une mission interministérielle de contrôle, des conditions de prise en charge psychiatrique des détenus

Cette préconisation résulte des conclusions de plusieurs auditions auxquelles le COR a procédées.

4) Prise en compte de l’indigence

a) Améliorer l’accès au RMI

A l’heure présente une personne percevant le RMI venant à être incarcérée continue à percevoir cette allocation durant 60 jours. Ses droits sont ensuite suspendus jusqu’au quatrième mois de détention. Au-delà du quatrième mois intervient sa radiation avec pour conséquence, si le détenu vivait en couple ou en famille, la non prise en compte dans le calcul du RMI de l’allocataire incarcéré.

Sont préconisées deux dispositions législatives qui permettraient, d’une part, de maintenir le versement du RMI durant les six premiers mois d’incarcération et, d’autre part, de maintenir au profit du conjoint ou de la famille le bénéfice d’ayant droit (afin de permettre à ces derniers d’assurer la fourniture et l’entretien du linge du détenu, de faire face aux frais générés par les visites rendues au détenu etc)

b) Assurer à l’indigent la gratuité d’accès à certains biens ou services

A l’expiration de la période de versement du RMI et dans la mesure où son profil, son état physique ou ses capacités ne permettent pas de lui proposer un travail rémunéré ou une activité d’insertion ouvrant droit à l’allocation d’insertion (cf supra) le détenu indigent doit bénéficier d’un accès minimum à certains biens ou services.

Est donc préconisé, dans ce cas de figure, l’accès gratuit à la télévision (qui doit cesser d’être réduite à un outil de divertissement mais considérée également comme moyen d’accès à la culture générale et de maintien du contact avec le monde extérieur). Il doit en être de même pour le réfrigérateur. Cette gratuité doit s’étendre à la fourniture des objets et produits nécessaires à une hygiène convenable ainsi qu’à la remise de papier à lettre et d’au moins une enveloppe timbrée par semaine destinée à permettre au détenu indigent d’entretenir une correspondance minimum.

5) Droit à la dignité et au respect de l’intimité

Toute mesure de contrôle imposée par les impératifs de sécurité doit être conduite dans un strict respect de la dignité et de l’intimité du détenu.

Le recours aux fouilles corporelles doit être strictement imposé par des impératifs de sécurité objectivables et les situations visées prévues dans le règlement intérieur. Sa mise à exécution doit répondre à des prescriptions déontologiques rigoureuses assurant le respect de la dignité et de l’intimité du détenu.

La fouille des effets personnels du détenu doit être conduite avec un constant soucis de ne point l’humilier ou de ne pas laisser accroire à un mépris du personnel pénitentiaire pour ses objets intimes (correspondances, photographies de famille, écrits personnels, etc).

L’article 54-8 des règles pénitentiaires européennes impose l’assistance du détenu à la fouille de ses effets personnels « à moins que les techniques de fouille ou le danger potentiel que cela représente pour le personnel ne l’interdise ».

A défaut de cette assistance, toute saisie d’objet devrait être opérée en présence d’une personne extérieure à l’administration pénitentiaire.

D’une manière générale, le détenu doit bénéficier d’un droit au respect du secret professionnel dont est débiteur le personnel pénitentiaire pour tout ce qu’il est amené à connaître ou constater dans l’exercice ou à l’occasion de l’exercice de ses fonctions (notamment le dossier pénal, lorsque celui-ci a été mis à la disposition du détenu ainsi que les diverses correspondances reçues ou adressées).

Ce droit à l’intimité doit s’étendre à la protection physique des objets les plus personnels du détenu laissés en sa possession ainsi que des pièces de justice qu’il peut être autorisé à conserver par devers lui. Afin de les protéger de toute velléité d’accaparement par des co-détenus, notamment à l’occasion des absences de l’intéressé, est préconisée l’installation dans chaque cellule et pour chaque personne incarcérée d’un casier individuel bénéficiant d’une fermeture (dont seul le personnel disposerait du double de la clef) où celle-ci pourrait conserver ses objets ou documents personnels.

6) Droit à l’information sur les règles applicables à la vie dans l’établissement

La connaissance par le détenu des règles précises régissant sa vie en détention impose la rédaction de règlements intérieurs harmonisés.

Est préconisée l’élaboration d’un règlement intérieur cadre applicable sur l’ensemble du territoire national à tous les établissements de même type. Seules des spécificités particulières à l’établissement, dûment explicitées, pourraient justifier l’édiction par celui-ci de dispositions spéciales.

Les extraits du règlement intérieur concernant la population pénale seraient portés à la connaissance de chaque entrant, à travers la remise d’un livret d’accueil rendu obligatoire dans tous les établissements qui collationnerait, en outre, l’ensemble des informations pratiques de toute nature pouvant être utiles à celui-ci.

Le souci de transparence doit également conduire à lever tout malentendu sur les tarifs d’accessibilité à certains services, l’amplitude de certains écarts enregistrés, entre établissements nourrissant actuellement suspicion et critiques.

Le montant de la redevance demandée à chaque détenu non indigent pour accéder à la télévision devrait ainsi être uniformisé sur l’ensemble du territoire. De même la fixation à l’échelon central d’une fourchette de prix pour les produits et denrées acquis à titre onéreux en cantine constituerait une initiative heureuse.

Dans un autre domaine, mais dans la même préoccupation de lever toute source de tension, est préconisé, en cas de transfert du détenu dans un autre établissement, l’établissement d’un inventaire de l’ensemble de ses objets et effets personnels.
Cet inventaire établi contradictoirement à son départ serait visé par le détenu à son arrivée dans le nouvel établissement. Cette formalité, certes pesante pour le personnel pénitentiaire, supprimerait les trop nombreuses réclamations enregistrées en ce domaine.

7) Droit à l’accès au droit

Tout détenu, quel que soit son régime de détention, doit pouvoir connaître ses droits et bénéficier, pour ce faire, d’un dispositif de consultations juridiques gratuites mis en place dans chaque établissement.

Est préconisée dans les missions des Conseils Départementaux de l’Accès au Droit (CDAD), la mise en place de points d’accès au droit dans chaque établissement pénitentiaire du département, sous forme de consultations juridiques assurées principalement par le barreau ou, en cas d’indisponibilité partielle ou totale de celui-ci, par des juristes d’associations de médiation pénale habilitées. La prise en charge de ces consultations serait intégrée dans le budget annuel de chaque CDAD.

Doit pareillement être étendue à tous les établissements, l’expérimentation engagée en 2005 de permanences de délégués du Médiateur de la République, dont le bilan s’averre éminemment positif.

8) Droit à la défense

L’exercice des droits de la défense ne saurait être péjoré à raison de l’incarcération du justiciable. Outre l’accès à l’assistance d’un avocat que doit faciliter la généralisation des points d’accès au droit, plusieurs dispositions pratiques doivent être préconisées.

a) Généralisation des rendez-vous pris par téléphone ou par courrier électronique pour les parloirs avocats

Dans le but d’assurer une meilleure gestion des mouvements pour le personnel pénitentiaire et éviter aux avocats des temps d’attente difficilement compatibles avec leurs contraintes professionnelles, est préconisée l’instauration d’une procédure de prise de rendez-vous préalable par voie téléphonique ou par courrier électronique. L’organisation des parloirs avocats ainsi rationalisée, permettrait l’intensification de leur fréquence et l’amélioration de la qualité de leur déroulement.

b) Accès au dossier pénal numérisé

La généralisation de la numérisation des procédures pénales à compter du 1er janvier 2008, impose l’équipement de chaque établissement en ordinateurs mis à la disposition des détenus en vue de la consultation de leur dossier pénal.

Obligation doit être faite aux greffes des juridictions pénales concernées d’adresser sur CD au greffe de l’établissement copie des pièces pénales dont la communication à son client est souhaitée par son avocat.

Le détenu mis en accusation doit, non seulement, pouvoir consulter sans restriction son dossier transmis sous forme numérique, mais aussi obtenir gracieusement, sous forme papier, les pièces limitativement énumérées par l’article 279 du code de procédure pénale qui dispose qu’ « il est délivré gratuitement à chacun des accusés et parties civiles, copie des procès-verbaux constatant l’infraction, des déclarations écrites des témoins et des rapports d’expertise ». Le coût de ces reproductions papier devra être pris en charge par le greffe de la juridiction criminelle, au titre des frais de justice.

c) Droit à un interprète

Le détenu ne possédant pas la compréhension de la langue française doit bénéficier de l’assistance d’un interprète lors de ses entretiens avec son avocat, pour la lecture de son dossier pénal ou encore pour sa comparution devant la commission de discipline de l’établissement ou devant les instances d’application des peines.

Cet interprète devant présenter toutes garanties de compétence, d’impartialité et de confidentialité, appel devra être fait aux traducteurs experts ou interprètes traducteurs figurant sur les listes ad hoc des cours et tribunaux. Ce n’est qu’en cas d’impossibilité absolue d’obtenir le concours de ceux-ci que l’administration pénitentiaire pourra recourir à une tierce personne.

 La rémunération de l’interprète devra être prise en charge par l’Etat, dès lors que le détenu sera bénéficiaire de l’aide juridictionnelle. Elle le sera, sans référence à l’aide juridictionnelle, pour l’assistance du détenu aux audiences disciplinaires ou d’application des peines.

9) Droit à l’exercice du droit de vote

La règle pénitentiaire européenne 24-11 dispose que « les autorités pénitentiaires doivent veiller à ce que les détenus puissent participer aux élections, aux référendums et autres aspects de la vie publique, à moins que l’exercice de ce droit par les intéressés ne soit limité en vertu du droit interne ».

La privation automatique des droits civiques ayant disparu avec l’entrée en vigueur du nouveau code pénal, il convient que le détenu qui ne fait pas l’objet d’une privation de ses droits expressément prononcée par une juridiction, puisse exercer sans difficulté l’intégralité de ceux-ci.

L’incitation du détenu à remplir son devoir civique entre dans une démarche de réinsertion.

On saluera, à ce propos, l’organisation par le Groupement Etudiant National d’Enseignement aux Personnes Incarcérées (GENEPI), d’ « ateliers citoyenneté » ou de campagnes d’information sur le vote. Ces initiatives méritent d’être généralisées.

Le COR préconise
- l’ouverture aux condamnés de la possibilité d’une inscription sur les listes électorales de la commune du lieu de situation de l’établissement pénitentiaire.
- l’ouverture d’un bureau de vote dans les établissements comptant plus de 200 détenus
- la mise en place dans chaque établissement, avant chaque scrutin, d’une campagne d’information sur le vote par procuration et l’organisation avec l’autorité compétente d’une procédure destinée à faciliter son exercice

10) Droit des étrangers

Outre la mise à disposition d’un interprète, dans le cadre de la défense pénale (cf. supra), l’étranger ne possédant pas la compréhension de la langue française doit être mis en mesure de posséder une parfaite connaissance de ses droits et de ses devoirs.

Est préconisée la généralisation de livrets d’accueil traduits dans les principales langues étrangères. On signalera, pour en souhaiter la diffusion dans tous les établissements, les « vocabulaires de base à l’usage des détenus » rédigés dans une vingtaine de langues par l’Association Nationale des Visiteurs de Prison (ANVP).

D’autre part, la mise en service d’un « écrivain public » dans chaque établissement, permettrait au détenu étranger de formuler ses demandes envers l’administration pénitentiaire, voire exprimer sa volonté d’exercer les voies de recours judiciaires qui lui sont ouvertes, tout au long du déroulement de sa procédure.

Par référence aux dispositions des règles pénitentiaires européennes 37-1 et 37-5, le détenu étranger doit, par ailleurs :

- Etre informé, dès son incarcération, de son droit à prendre contact avec les représentants diplomatiques ou consulaires de son pays et bénéficier des moyens permettant d’établir cette communication

- Etre informé des possibilités qui peuvent lui être ouvertes de solliciter son transfert vers un autre pays en vue de l’exécution de sa peine

11) Droit à l’accès au culte

Par référence aux dispositions du 2° alinéa de l’article 2 de la loi de séparation des églises et de l’Etat de 1905, les articles D432 à D435 du code de procédure pénale, complétés par plusieurs circulaires, définissent les conditions d’exercice des cultes en détention.

Il convient de regrouper ces textes autour d’un certain nombre d’obligations mises à la charge de l’administration pénitentiaire :

-information des personnes détenues, à leur arrivée dans l’établissement, sur les propositions des différents cultes
-formation de l’ensemble des personnels aux principes de la laïcité et aux pratiques cultuelles
-facilitation de la circulation des aumôniers en détention pour la rencontre avec les personnes détenues
-mise à disposition de locaux à usage cultuel adaptés, y compris pour les besoins du culte musulman, pour les entretiens individuels et les rencontres collectives

12) Droit à l’information et à l’écoute

Le comité a été attentif à la nécessité de prendre en compte les difficultés de communication liées à la langue, au niveau intellectuel, au stress...Doivent être repensées, au sein de chaque établissement, les règles et modalités du dialogue entre population pénale et administration.

Est préconisée, tout comme pour le détenu étranger, la mise à disposition d’un « écrivain public » en charge de l’écriture et de la lecture de tous documents liés à l’exercice des droits à l’information et à l’écoute, par le détenu souffrant d’illettrisme ou d’insuffisance intellectuelle.

13) Droit à l’expression collective sur les conditions générales de détention

La règle pénitentiaire européenne n° 50 recommande que « sous réserve des impératifs de bon ordre, de sûreté et de sécurité, les détenus doivent être autorisés à discuter de questions relatives à leurs conditions générales de détention et doivent être encouragés à communiquer avec les autorités pénitentiaires à ce sujet ». Doit donc être offerte aux détenus, sous les mêmes réserves et selon des modalités à définir, la possibilité de bénéficier d’un tel dialogue.

B) Respect des devoirs 

Parmi les devoirs devant être imposés au détenu, corollaire des droits qui lui sont reconnus, doivent être mis en avant trois obligations méritant d’être davantage affirmées.

Devoir de respect de l’intégrité physique d’autrui

Tout acte d’atteinte de l’intégrité physique d’autrui, personnels de l’administration pénitentiaire ou co-détenus, doit donner lieu à sanction.

Outre la suite disciplinaire appréciée par le chef d’établissement, tout acte de violence physique, quelles que soient sa nature, sa gravité ou ses conséquences doit donner lieu à l’établissement d’un certificat médical de constat et faire l’objet d’un compte-rendu adressé sans délai au procureur de la république territorialement compétent (avec copie au magistrat instructeur durant l’information judiciaire ou au ministère public près la juridiction de jugement saisie, lorsque la décision au fond n’est pas intervenue ou n’est pas encore définitive).

Le détenu portant une doléance d’agression émanant d’autrui doit immédiatement bénéficier de toutes mesures de protection (changement de cellule, de quartier, voire d’établissement, etc) propre à le soustraire à toute pression ou réaction négative.

Devoir d’indemnisation des victimes

L’obligation d’indemnisation de la victime s’impose à tout condamné, y compris à celui exécutant une peine privative de liberté, quelle que soit la faiblesse de sa rémunération. La prise en compte de l’effort d’indemnisation de la victime doit constituer l’un des éléments d’appréciation des gages de réinsertion, notamment au niveau des critères d’admission à un aménagement de peine.

Il convient d’autre part de faire du Fonds de Garantie l’interlocuteur unique pour l’indemnisation des victimes.

Est préconisée la mise à la charge du Fonds de Garantie de l’indemnisation de la victime/ partie- civile, au vu des dommages intérêts alloués par la juridiction de jugement. Il appartiendrait pour ledit Fonds de procéder au règlement de ces dommages intérêts puis de se retourner vers le condamné pour en obtenir le remboursement.

Devoir de respect du cadre de vie

Le détenu doit être fortement contraint à respecter le cadre de vie mis à sa disposition. La rapidité de dégradation de certains établissements modernes conduit à exprimer cette préconisation. Il est de même pour les atteintes à l’hygiène et à la propreté qui, faute de pouvoir être efficacement jugulées, finissent par paraître tolérées.

Est préconisée l’instauration d’un état des lieux et du matériel mis à la disposition du détenu, établi contradictoirement, lors de la prise de possession par le détenu de sa cellule et au départ de celle-ci.

 Toute atteinte, notamment à l’hygiène et à la propreté, pouvant être réparée par le détenu devrait, par ailleurs, donner lieu à une obligation de remise en état des lieux, préalablement à toute mesure d’affectation nouvelle ou de transfèrement dans un autre établissement, éventuellement à titre de sanction disciplinaire (possibilité déjà offerte par l’article D. 249-3-6° du CPP).

 La remise en état des lieux par un tiers, résultant d’un acte de malveillance du détenu, devrait pouvoir donner lieu à une retenue sur son pécule, à concurrence du débours supporté par l’administration.

Régime disciplinaire

Sans méconnaître la nécessité de donner une réponse disciplinaire adéquate aux infractions aux devoirs et obligations inhérents à la vie individuelle et collective dans un lieu privatif de liberté, le COR estime nécessaire d’adapter les dispositions actuelles régissant la discipline, en considération des standards européens. Il émet, à ce titre trois préconisations :

a) Extension des possibilités de recours aux sanctions alternatives à l’encellulement disciplinaire (fusion des articles D251 et D251-1 du code procédure pénale)

Les sanctions disciplinaires sont divisées en deux groupes :

. celles énumérées par l’article D251 du code procédure pénale (avertissement, interdiction de réception de subsides, privation d’accès aux achats en cantine, confinement, mise en cellule disciplinaire) pouvant être prononcées quelle que soit la faute disciplinaire.

. celles énumérées à l’article D 251-1 qui constituent autant d’alternatives à la mise en cellule disciplinaire mais qui ne peuvent être prononcées qu’en fonction des circonstances de la faute disciplinaire

Est donc préconisée une fusion des articles D 251 et D251-1 du code de procédure pénale, afin d’étendre la palette des sanctions pouvant être prononcées, quelles que soient la nature et les circonstances de la faute disciplinaire

b) Fixation à 7, 14 ou 21 jours de la durée maximum de placement en cellule disciplinaire suivant le degré de la faute sanctionnée

Dans la logique de la réduction du quantum maximum de la durée du placement en cellule disciplinaire encourue par les mineurs (de 15 à 7 jours pour les fautes les plus graves), opérée par le décret n° 2007-814 du 11 mai 2007, est proposée la fixation à 7, 14 ou 21 jours la durée maximum du placement en cellule disciplinaire encourue par les majeurs, selon le degré de la faute sanctionnée.

c) Maintien de l’exercice du pouvoir disciplinaire à la commission de discipline présidée par le chef d’établissement mais soumission de sa décision à une possibilité de recours hiérarchique devant donner lieu à une décision du directeur interrégional des services pénitentiaires dans un délai de 8 jours, elle-même attaquable devant la juridiction administrative par voie de référé.

Le comité d’orientation a estimé opportun de maintenir l’exercice du pouvoir disciplinaire entre les mains du chef d’établissement, es- qualité de président de la commission de discipline, mais à assurer l’effectivité des voies de recours, en réduisant les délais d’examen par l’instance hiérarchique ou juridictionnelle saisie.

Est donc proposée la réduction à 8 jours du délai donné au directeur interrégional des services pénitentiaires pour statuer sur recours hiérarchique, sa décision pouvant être aussitôt attaquée devant la juridiction administrative saisie par voie de référé.

Préconisations

Droit au maintien des liens familiaux

23) Rendre possible l’accès contrôlé au téléphone, tant aux condamnés qu’aux prévenus, sous réserve pour ces derniers d’une absence d’opposition de l’autorité judiciaire compétente

24)Assurer l’effectivité d’un parloir au moins hebdomadaire du détenu avec sa famille et ses proches, y compris pour celui subissant un encellulement disciplinaire, sous réserve de l’accord de l’autorité judiciaire compétente en ce qui concerne les prévenus

25) Généraliser les unités de vie familiale et leur égibilité à tous les détenus, y compris aux prévenus au-delà du sixième mois de détention provisoire, sauf opposition motivée de l’autorité judiciaire
Droit à la sécurité 

26) Assurer à chaque détenu une protection effective de son intégrité physique et le prémunir contre toute pression morale, en tous lieux collectifs comme individuels et à toutes heures du jour comme de la nuit.

27) Inscrire au rang des priorités de l’administration pénitentiaire la détection des populations les plus vulnérables et leur prise en charge spécifique. Aménager pour ce faire des quartiers spéciaux ou, à défaut des activités communes propres. Apporter un soin tout particulier au choix du ou des détenus avec lesquels l’individu en situation de vulnérabilité pourra être conduit à co-habiter.

29) Permettre à chaque détenu dont la sécurité est mise en danger d’alerter, à toute heure du jour et de la nuit, le personnel pénitentiaire d’astreinte afin de provoquer son intervention sans délai qu’exige cette urgence.
Généraliser l’interphonie dans tous les lieux d’encellulement individuels et collectifs, quels que soient la catégorie d’établissement et le régime de détention.
 
 Droit à la santé
 
30) Affirmer l’inopposabilité des contraintes ou dispositions d’organisation pénitentiaires à la nécessité des soins

31) Affirmer le droit pour le détenu à la poursuite des soins dont il faisait l’objet au moment de son incarcération

32) Affirmer le droit pour le détenu à demander le recueil de l’avis de son médecin traitant sur la continuité des soins en cours, à son incarcération ou sur l’opportunité d’un choix thérapeutique majeur

33) Affirmer l’application, en détention, des dispositions légales de droit commun sur l’interruption volontaire de grossesse

34) Informer le détenu de sa faculté de faire appel devant une commission médicale ad hoc du refus d’un soin de confort ou d’esthétique

35) Autoriser les soins dentaires prothétiques ou conservatoires qui relèveraient en milieu libre d’un choix financier, selon les règles et tarifs hospitaliers, sans préjudice des nécessités de service de l’UCSA.

36) Mettre explicitement à la charge du médecin inspecteur de santé publique territorialement compétent, l’examen des réclamations des personnes incarcérées visant le caractère nuisible ou inadapté de leurs conditions de détention, au regard de leur état de santé 

37) Créer une voie de recours relative à la prescription des soins sans consentement

38) Rappeler l’obligation pour l’administration pénitentiaire d’assurer une prise en charge effective du handicap

39) Mettre à la disposition du corps médical intervenant auprès d’un détenu la pièce de justice relatant les faits motivant son incarcération ainsi que l’intégralité des expertises psychiatriques, psychologiques et médico-psychologiques dont il a pu faire l’objet, dans le cadre de la procédure judiciaire

40) Réaffirmer l’assujettissement au secret de l’ensemble des intervenants pouvant être conduits à avoir connaissance d’informations sur le détenu touchant au domaine médical

41) Réaffirmer l’opposabilité du secret médical, mais donner possibilité au médecin traitant en milieu pénitentiaire de communiquer des éléments cliniques à un expert, dès lors qu’ils sont utiles aux droits du détenu ou à la direction de l’établissement, dès lors qu’ils sont indispensables à une adaptation des conditions de sa détention 

42) Donner la possibilité au médecin traitant en milieu pénitentiaire, en cas de danger imminent pour les personnels pénitentiaires ou de nécessité pour ceux-ci de tenir compte dans leur attitude ou dans leur mission de l’état physique ou psychique d’un détenu, de donner à la direction de l’établissement, une information médicale strictement réduite à cette finalité, à charge pour ledit médecin d’en avertir le détenu

 43) Instaurer un examen expertal annuel de l’état physique et mental des détenus de plus de 75 ans, au regard des dispositions de l’article 720-1-1 du code de procédure pénale sur la suspension de peine pour cause médicale

44) Aligner les conditions d’accès et de maintien des détenus en unités hospitalières spécialement aménagées (UHSA) sur celles d’accès et de maintien en unités hospitalières sécurisées interrégionales (UHSI)

45) Poursuivre et améliorer dans chaque établissement l’élaboration d’une politique de prévention du risque suicidaire fondée sur une analyse des causes de chaque survenance de suicide et des nouvelles préconisations qu’elle peut justifier

46) Affecter au sein des unités de consultations et de soins ambulatoires (UCSA) opérant dans les établissements, un ou plusieurs psychologues, en charge d’animer des groupes de paroles à destination des détenus les plus psychologiquement fragiles

47) Mettre en place une évaluation régulière par le ministère de la santé ou par une mission interministérielle de contrôle, des conditions de prise en charge psychiatrique des détenus

Prise en compte de l’indigence

48) Maintenir le versement du RMI durant les six premiers mois de détention et maintenir au profit du conjoint ou de la famille le bénéfice d’ayant droit

49) Assurer au détenu indigent la gratuité d’accès à certains biens ou services

 Droit à la dignité et au respect de l’intimité

50) Limiter le recours aux fouilles corporelles aux seules circonstances imposées par des impératifs de sécurité objectivables et prévues dans le règlement intérieur de l’établissement. Astreindre leur exécution à des prescriptions déontologiques rigoureuses assurant le respect de la dignité et de l’intimité du détenu

51) Imposer la présence d’un tiers lors de toute saisie d’objets ou d’effets personnels du détenu

52) Préciser l’étendue du secret professionnel assujettissant l’ensemble du personnel pénitentiaire pour tout ce qu’il est conduit à connaître ou constater sur le détenu, dans l’exercice ou à l’occasion de l’exercice de ses fonctions

53) Installer dans chaque cellule un casier individuel bénéficiant d’une fermeture destinée à contenir les documents et objets les plus personnels du détenu

Droit à l’information sur les règles applicables à la vie dans l’établissement

54) Elaborer un règlement intérieur -cadre applicable à tous les établissements de même type, chacun de ceux-ci pouvant, à raison de sa spécificité, y adjoindre des dispositions particulières

55) Porter à la connaissance du détenu les dispositions du règlement intérieur le concernant par leur insertion dans un livret d’accueil rendu obligatoire

56) Uniformiser pour l’ensemble des établissements le montant de la redevance d’accès à la télévision et fixer une fourchette des prix des produits et denrées pouvant être acquis en cantine

57) Mettre en place à l’occasion des transferts un inventaire de l’ensemble des objets et effets personnels des détenus

Droit à l’accès au droit

58) Intégrer dans les missions des conseils départementaux d’accès aux droits la mise en place de points d’accès au droit dans chaque établissement

59) Généraliser dans tous les établissements la tenue de permanences de délégués du Médiateur de la République

Droit à la défense

60) Généraliser la prise des rendez-vous par téléphone ou par courrier électronique pour les parloirs avocats

61) Mettre en place les dispositifs nécessaires à l’accès du détenu à son dossier pénal numérisé

62) Mettre à la disposition du détenu ne possédant pas la compréhension de la langue française l’assistance d’un interprète pour l’exercice des droits de la défense (y compris pour les entretiens avec son avocat)

Droit à l’exercice du droit de vote

63) Ouvrir aux condamnés la possibilité d’une inscription sur les listes électorales de la commune du lieu de situation de l’établissement pénitentiaire.

 64) Généraliser l’ouverture d’un bureau de vote dans les établissements comptant plus de deux cents détenus

65) Mettre en place dans chaque établissement, avant chaque scrutin, d’une campagne d’information sur le vote par procuration et l’organisation avec l’autorité compétente d’une procédure destinée à faciliter son exercice

Droit des étrangers

66) Généraliser la traduction des livrets d’accueil dans les principales langues étrangères

67) Mettre à disposition dans tous les établissements un « écrivain public » en charge d’assurer la formulation des demandes ou la lecture de tous documents, au profit des détenus ne possédant pas la compréhension de la langue française

68) Informer le détenu étranger, dès son incarcération, de son droit de prendre contact avec la représentation diplomatique ou consulaire de son pays

69) Informer le détenu étranger des possibilités qui peuvent lui être ouvertes de solliciter son transfert vers un autre pays pour l’exécution de sa peine

Droit à l’accès au culte

70) Informer les personnes détenues, à leur arrivée dans l’établissement, sur les propositions des différents cultes

71) Former l’ensemble des personnels aux principes de la laïcité et aux pratiques cultuelles

72) Faciliter la circulation des aumôniers en détention pour la rencontre avec les personnes détenues

73) Mettre à disposition des locaux à usage cultuel adaptés, y compris pour les besoins spécifiques du culte musulman, pour les entretiens individuels et les rencontres collectives

Droit à l’information et à l’écoute

74) Repenser au sein de chaque établissement, les règles et modalités du dialogue entre population pénale et administration

75) Mettre à disposition un « écrivain public » en charge de l’écriture et de la lecture de tous documents liés à l’exercice des droits à l’information et à l’écoute par le détenu souffrant d’illettrisme ou d’insuffisance intellectuelle

Droit à l’expression collective

76) Donner aux détenus la possibilité de dialoguer collectivement avec les autorités pénitentiaires de questions relatives à leurs conditions générales de détention

Devoirs

77) Systématiser pour tout acte de violence physique, quelles que soient sa nature, sa gravité ou ses conséquences, l’établissement d’un certificat médical de constat ainsi que d’un compte-rendu adressé sans délai au procureur de la république territorialement compétent (avec copie au magistrat instructeur durant l’information judiciaire ou au ministère public près la juridiction de jugement saisie, lorsque la décision au fond n’est pas intervenue ou n’est pas encore définitive).

78) Faire du Fonds de Garantie l’interlocuteur unique pour l’indemnisation des victimes en mettant à sa charge le règlement des dommages intérêts alloués par la juridiction de jugement, faculté lui étant donnée de se retourner vers le condamné pour en obtenir le remboursement

79) Instaurer un état des lieux et du matériel mis à la disposition du détenu, établi contradictoirement, lors de la prise de possession par le détenu de sa cellule et au départ de celle-ci.

80) Etendre les possibilités de recours aux sanctions alternatives à l’encellulement disciplinaire (fusion des articles D251 et D251-1 du code de procédure pénale)

81) Fixer à 7, 14 ou 21 jours la durée maximum de placement en cellule disciplinaire suivant le degré de la faute sanctionnée

82) Maintenir l’exercice du pouvoir disciplinaire à la commission de discipline présidée par le chef d’établissement mais soumettre sa décision à une possibilité de recours hiérarchique devant donner lieu à une décision du directeur interrégional des services pénitentiaires dans un délai de 8 jours, elle-même attaquable devant la juridiction administrative par voie de référé.

Chapitre VI : Mettre en oeuvre l’exécution de la peine privative de liberté en l’individualisant et en l’aménageant
 
L’individualisation et l’aménagement d’une peine privative de liberté ne doivent plus être perçus comme une édulcoration de la sanction pénale et un contournement de la décision rendue par la juridiction répressive.

Ils doivent être, au contraire, considérés comme une volonté de l’institution judiciaire et de l’administration pénitentiaire de lutter, d’une part, contre les effets nocifs des peines d’emprisonnement les plus courtes, mises à exécution sans considération de la situation familiale et sociale du condamné et, d’autre part, d’inscrire les peines de plus longue durée dans un parcours de réinsertion permettant une réelle préparation à la sortie.

Seul l’aménagement de peine -ab initio pour les peines de brève durée ou en seconde phase d’exécution pour les peines plus longues- est de nature à répondre au double objectif de réinsertion durable du condamné (facteur premier de lutte contre la récidive) et de réparation du dommage subi par la victime de l’infraction.

L’aménagement de peine qui contractualise avec le condamné les voies et moyens de l’exécution de sa peine exige donc une politique volontariste et crédible. Celle-ci doit s’appuyer, tout à la fois, sur la mobilisation des aides et structures sociales propres à répondre, en tant que de besoin, aux prises en charge qu’appelle sa situation individuelle, ainsi que sur une effectivité renforcée des contrôles de l’exécution des obligations assortissant l’aménagement de peine.

Doivent être envisagés tour à tour l’individualisation et l’aménagement des peines inférieures ou égales à deux ans puis les moyens à mettre en œuvre pour donner une nouvelle impulsion à la libération conditionnelle, instrument incontestable de lutte contre la récidive. Sera enfin évoqué l’aménagement de la fin de peine.

1) Elargissement aux peines égales ou inférieures à 2 ans du champ, de l’application de l’article 723-15 du Code de procédure pénale

La communication par le ministère public au juge de l’application des peines de tout extrait de décision portant condamnation à une peine d’emprisonnement égale ou inférieure à 1 an, en vue de déterminer les modalités de son application, imposée par l’article 723-15 du code de procédure pénale, serait généralisée pour toute peine d’emprisonnement égale ou inférieure à 2 ans (ou pour lesquelles la durée de détention restant à subir serait égale ou inférieure à 2 ans). L’accord du ministère public sur l’aménagement de peine proposé par le juge de l’application des peines dispenserait celui-ci de l’organisation du débat contradictoire prévu par ce texte.

Cet élargissement du champ d’application de l’article 723-15 du CPP serait complété par la mise en place d’une procédure d’individualisation et d’aménagement systématique et simplifiée, applicable aux prévenus libres condamnés à une peine d’emprisonnement égale ou inférieure à 1 an.

2) L’aménagement des peines égales ou inférieures à un an d’emprisonnement : un droit pour le condamné libre

La majorité des membres du COR a souhaité voir reconnaître à tout condamné libre devant exécuter une peine d’emprisonnement égale ou inférieure à un an, un droit à l’individualisation et à l’aménagement de sa peine.

L’affirmation d’un tel droit entraîne pour l’institution judiciaire et l’administration pénitentiaire l’obligation de mettre en œuvre, dès que la peine est devenue définitive, une procédure de proposition au condamné d’un aménagement de peine prenant en considération :

- la nécessité de garantir son insertion ou sa réinsertion,
- la réparation intégrale du dommage subi par la victime,
- le maintien de son activité professionnelle et de ses liens familiaux.

3) La mise en œuvre de l’aménagement des peines égales ou inférieures à un an : une attribution nouvelle conférée au Parquet et au service pénitentiaire d’insertion et de probation, sous le contrôle du juge de l’application des peines

La volonté du législateur, clairement exprimée à travers le rapport Warsmann, est d’affirmer l’intégration de l’exécution des peines dans la politique pénale dont le gouvernement doit répondre devant lui.

C’est ainsi que l’article 701-1 du code de procédure pénale confère au ministère public la mission de poursuivre l’exécution des dispositions pénales des décisions de justice. Depuis le 1er janvier 2005, le procureur de la République se voit, en outre, imposer la rédaction d’un rapport annuel sur l’état et les délais de l’exécution des peines qu’il doit rendre public avant le dernier jour ouvrable du mois de juin (article 709-2 du CPP).

Cette « responsabilisation » du parquet pour la mise en oeuvre de l’exécution des peines exige son implication dans la promotion de l’aménagement des peines considéré comme facteur de lutte contre la récidive. Cette implication est actuellement inexistante ou insuffisamment manifestée à raison même de la procédure de mise à exécution, à l’encontre des personnes non incarcérées, des peines égales ou inférieures à un an d’emprisonnement (ou pour lesquelles la durée de la détention restant à subir est inférieure ou égale à un an, ou, en cas de cumul de condamnations, si le total des peines prononcées ou restant à subir est inférieur ou égal à un an).

Les dispositions de l’article 723-15 du code de procédure pénale imposent, en effet, au ministère public d’adresser au juge de l’application des peines un extrait de la décision accompagné, le cas échéant, de toutes informations utiles.

Il appartient à ce magistrat, dans un délai de quatre mois, d’apprécier l’opportunité d’ordonner une mesure d’aménagement de peine. Passé ce délai et en l’absence de décision, le ministère public recouvre la faculté de faire procéder à l’incarcération du condamné.

La pratique révèle qu’hormis les deux hypothèses justifiant le « cas d’urgence » visé par l’article 723-16 du code de procédure pénale, le ministère public éprouve quelque scrupule a dessaisir « de facto » le juge de l’application des peines à l’issue du délai de quatre mois, un tel dessaisissement par le ministère public d’un magistrat du siège, pour cause d’inaction ou d’insuffisante diligence, pouvant être négativement perçu.

Dans la mesure où un droit à l’individualisation et à l’aménagement de sa peine, serait dorénavant reconnu à tout condamné à une peine d’emprisonnement inférieure ou égale à un an et afin de rendre le ministère public effectivement comptable de l’exécution de l’ensemble des sanctions pénales, au sens de l’article 701-1 du CPP, est proposée la substitution de la procédure actuelle par une procédure simplifiée, strictement encadrée, conduisant à rendre le service pénitentiaire d’insertion et de probation (SPIP) directement responsable, aux côtés du parquet, de la mise en œuvre de l’aménagement des courtes peines d’emprisonnement.

S’agissant de l’aménagement d’une peine privative de liberté, la nécessité d’un contrôle par le Juge de l’Application des Peines demeure indispensable. Il prendrait la forme d’un pouvoir d’évocation par ce magistrat de la proposition formulée par le SPIP et approuvée par le condamné et le parquet. En cas de non usage de ce pouvoir d’évocation dans un délai de 21 jours, la proposition serait réputée homologuée par le juge de l’application des peines et immédiatement mise à exécution.

Le schéma proposé serait alors le suivant :

En présence d’une condamnation, à l’encontre d’une personne non incarcérée, à une peine égale ou inférieure à un an ou en cas de cumul de condamnations, si le total des peines prononcées ou restant à subir est inférieur ou égal à un an, le ministère public (procureur de la république ou procureur général selon le degré de juridiction ayant prononcé la condamnation) adresse au SPIP un extrait de la décision à charge pour ce dernier de rechercher avec le condamné et de lui proposer la mesure d’individualisation et d’aménagement de sa peine paraissant la plus adéquate pour assurer :

- sa réinsertion,
- la réparation du préjudice subi par la victime,
- le maintien de son activité professionnelle et de ses liens familiaux.

Aussitôt après avoir été acceptée par le condamné, la proposition est transmise au ministère public qui dispose d’un délai de 21 jours pour donner son aval ou s’opposer à la proposition. Elle est alors adressée au juge de l’application des peines qui dispose à son tour d’un délai de 21 jours pour user de son pouvoir d’évocation destiné à lui permettre de lui substituer toute autre mesure ou fixer des modalités d’exécution différentes.

A l’expiration du délai, en l’absence d’exercice de cette faculté d’évocation, la mesure d’aménagement, alors réputée homologuée par le juge de l’application des peines, est mise à exécution. 
 
En l’absence de proposition d’aménagement de peine formulée par le SPIP, dans un délai de 3 mois, ou en cas de non acceptation pour le condamné de l’aménagement proposé ou de non validation par le ministère public, le juge de l’application des peines est saisi dans les 21 jours, selon la procédure et dans le champ d’application de l’article 712-6 du code de procédure pénale.

4) L’examen, dans les 2 jours ouvrables, de la situation de tout détenu devant exécuter une peine d’emprisonnement égale ou inférieure à 6 mois, assortie d’un placement sous mandat de dépôt, dans la perspective d’une requête en aménagement de peine

Est visée la condamnation à une peine d’emprisonnement égale ou inférieure à 6 mois, assortie d’un mandat de dépôt, prononcée dans le cadre d’une procédure de comparution immédiate. Dans une telle hypothèse, le COR préconise que le service pénitentiaire d’insertion et de probation ait l’obligation, dans les 2 jours ouvrables de son incarcération, d’établir avec le condamné un bilan de sa situation personnelle. Celui-ci pourra alors présenter une requête en aménagement de peine qui sera examinée au cours d’un débat contradictoire qui devra intervenir dans le mois du dépôt de la requête.

5) L’uniformisation de la période d’éligibilité à la libération conditionnelle

L’article 729 du Code de Procédure Pénale permet au condamné de bénéficier d’une mesure de libération conditionnelle, lorsque la durée de la peine accomplie est au moins égale à la durée de la peine restant à subir, sans préjudice de l’achèvement de la période de sûreté prononcée. Les condamnés en état de récidive ne peuvent prétendre à cette mesure qu’à l’issue de l’accomplissement des 2/3 de leur peine.

L’état de récidive étant déjà pris en compte au niveau du quantum de la peine prononcé par la juridiction de jugement, il ne parait plus devoir, en sus, justifier un report dans le temps de la mise en place d’une mesure de libération conditionnelle. Celle-ci devant être accordée au seul vu des efforts de réinsertion manifestés par le détenu et des gages qu’il offre, il semble pertinent d’inciter particulièrement les récidivistes à fournir ces efforts.

Le comité d’orientation préconise donc l’uniformisation à la mi-peine de la période d’éligibilité à la libération conditionnelle, sans considération de l’état de récidive dans lequel pouvait se trouver le condamné au moment de la commission de l’infraction.

 6) L’examen systématique de la situation des condamnés à mi-peine au regard des conditions d’admission à la libération conditionnelle

Est préconisé l’examen systématique par le SPIP, sous le contrôle du juge de l’application des peines, de la situation de tout condamné éligible à la libération conditionnelle, au regard des conditions d’admission à cette mesure (sas de sortie envisageable, hébergement, etc).
En cas d’impossibilité de mise en place de la mesure, cet examen « de faisabilité » devrait être reconduit au minimum une fois par an.

7) L’aménagement de fin de peine pour les condamnés à une peine égale ou inférieure à deux ans :

Le COR préconise comme principe la mise en place d’un aménagement de peine, directement destiné à assurer une préparation concrète à la sortie, pour les 3 derniers mois d’exécution des peines égales ou inférieures à 2 ans.

Pour l’exécution des trois derniers mois d’emprisonnement, le juge de l’application des peines devra être systématiquement saisi par le service pénitentiaire d’insertion et de probation d’un projet d’aménagement sur lequel il devra statuer dans un délai de 21 jours. En cas d’absence de réponse ou de refus du juge de l’application des peines, le condamné pourra saisir le président de la chambre de l’application des peines qui devra statuer dans un délai de 10 jours. A défaut, l’aménagement de peine sera considéré comme acquis et aussitôt mis en œuvre par le SPIP. 

Ce recours systématique à l’aménagement de la fin des peines non supérieures à 2 ans justifierait, pour certains membres du COR, la suppression de la nouvelle procédure d’aménagement de peine (NPAP), dite sas de sortie, instituée par la loi du 9 mars 2004 qui donne au SPIP la faculté de soumettre à l’homologation du juge de l’application des peines une proposition de semi-liberté, de placement à l’extérieur ou de placement sous surveillance électronique à l’égard des condamnés à une peine comprise entre 6 mois et 5 ans d’emprisonnement. A défaut de réponse du juge de l’application des peines dans un délai de 21 jours, le service pénitentiaire d’insertion et de probation peut mettre d’office à exécution l’aménagement de peine.

Il est fait observer, d’autre part, que ce dispositif opérationnel depuis le mois d’octobre 2004, n’a pas encore produit les résultats escomptés. Ses premiers résultats apparaissent, en effet, peu concluants. De novembre 2004 à mai 2006, l’Administration pénitentiaire indique ainsi que 1 474 requêtes concernant des personnes éligibles à la nouvelle procédure ont été transmises aux JAP sur l’ensemble du territoire. Sur ces 1 474 requêtes, 565 aménagements ont été accordés par le JAP et 200 ont été refusés. 53 aménagements ont été mis à exécution par le DSPIP en l’absence de réponse du JAP dans les délais. 4 aménagements ont été accordés par la Cour d’appel suite à un recours des condamnés concernés ou du Parquet.

 D’autres membres du COR portent, au contraire, une appréciation positive sur la NPAP et souhaitent son maintien, au moins pour les peines entre 2 et 5 ans qui échapperaient à la nouvelle procédure préconisée.

En l’état de cette divergence, le COR préconise qu’une évaluation précise de la NPAP pouvant conduire, en connaissance de cause, à sa suppression ou à son maintien, soit effectuée dans le cadre des travaux de la loi pénitentiaire.

8) La suppression de l’automaticité de la période de sûreté assortissant la réclusion criminelle à temps

La période de sûreté étant juridiquement un élément de la peine prononcée, elle doit être soumise à la règle du prononcé des peines énoncée à l’article 132-17 du code pénal : « aucune peine ne peut être appliquée si la juridiction ne l’a expressément prononcée ». Il convient, en outre, de donner à l’ensemble des juridictions pénales, y compris la cour d’assises, la faculté d’individualiser la peine dans toutes ses composantes.
Le COR préconise de substituer à l’automaticité de la fixation d’une période de sûreté assortissant les peines de réclusion criminelle à temps, une disposition du code de procédure pénale imposant à la cour d’assises, par une question spéciale posée à la cour et au jury, de statuer sur le principe et la durée de cette période de sûreté.

9) Création de la semi-liberté ou du placement extérieur « aux fins de recherche d’emploi »

Certains condamnés en fin de peine sont confrontés à la nécessité d’effectuer diverses démarches ou de subir divers tests, examens ou entretiens de pré-embauche, dans le cadre de la recherche d’un emploi. Ils ne peuvent toutefois bénéficier d’une mesure de semi-liberté ou de placement extérieur, les dispositions de l’article 132-26 du code pénal limitant le recours à ces mesures aux seules fins d’activité professionnelle, ou d’enseignement, de formation professionnelle, de stage, de participation à la vie familiale ou de traitement.

Le COR préconise donc une extension du champ d’application de l’article 132-26 à la « recherche d’emploi ».

10) Allègement des formalités administratives attachées au placement extérieur pour les très courtes peines d’emprisonnement

Le comité estime souhaitable, pour les peines d’emprisonnement inférieures ou égales à 1 mois, de pouvoir placer le condamné en chantier extérieur, sous le contrôle du SPIP, sans avoir recours à l’élaboration d’une convention type avec un partenaire extérieur, mais simplement par un acte de prise en charge simplifié, faisant référence aux dispositions de l’article D 136 du code de procédure pénale.

11) Favoriser les placements extérieurs par le développement de partenariats locaux avec engagement de co-financement

L’impulsion à donner au placement extérieur passe par la création d’un régime d’indemnisation clair et revalorisé. Il convient de développer des partenariats locaux avec des engagements de cofinancements (dans le cadre notamment de chantiers extérieurs impliquant des collectivités territoriales)

12) Promotion des placements extérieurs et autres mesures d’insertion par la mise en place de dispositifs de prise en charge, notamment en matière d’hébergement

La promotion des placements extérieurs et autres aménagements de peine passe par une mobilisation des partenariats, tant des administrations de l’Etat concernées que des collectivités locales, afin notamment de résoudre le récurent problème posé par l’hébergement. Des co-financements peuvent être envisagés. D’où la nécessité d’une véritable synergie entre les divers acteurs. A l’heure présente celle-ci est pour le moins balbutiante ou diversifiée selon les territoires.

Est préconisée l’extension des missions de la veille sociale départementale à la prise en charge des besoins d’hébergement immédiat des personnes placées sous main de justice ou venant de faire l’objet d’une incarcération.

L’article L 345-2 du code de l’action sociale et des familles impose de mettre en place dans chaque département « à l’initiative du représentant de l’Etat dans le département, un dispositif de veille sociale chargé d’informer et d’orienter les personnes en difficulté, fonctionnant tous les jours de l’année » avec mission d’évaluer l’urgence pour la personne en difficulté, de proposer une réponse immédiate en indiquant la structure pouvant l’accueillir et en « organisant sans délai la mise en œuvre effective de cette réponse ».

Est préconisé un ajout à ce texte étendant les missions de cette veille sociale départementale « à la prise en charge des besoins d’hébergement immédiat des personnes placées sous main de justice ou venant de faire l’objet d’une incarcération ».

Dispositions diverses aménageant et simplifiant les procédures d’application des peines

13) Caractère suspensif de l’appel du condamné, dans le cadre de la procédure de l’article 723-15 du Code de Procédure Pénale

Actuellement les décisions du Juge de l’Application des Peines étant exécutoires par provision, l’appel du condamné suite à un rejet de sa demande d’aménagement n’est pas suspensif. La peine d’emprisonnement peut être ramenée à exécution avant que la Cour ne statue.

Il est proposé de rendre suspensif l’appel du condamné, à charge pour la cour de statuer dans un délai de 2 mois.

14) Création d’une procédure d’urgence pour statuer sur les appels, à caractère suspensif formés par le ministère public contre les décisions du juge de l’application des peines

Afin de ne pas donner au caractère suspensif de l’appel formé par le ministère public des conséquences sans rapport avec l’esprit de la loi (incidence des délais d’audiencement), est préconisée la fixation à 21 jours du délai imparti à la chambre de l’application des peines pour statuer sur cet appel. A défaut de décision dans ce délai, la décision du juge de l’application des peines est considérée comme définitive.

Ce délai pourrait être réduit à 72 heures, pour les appels en matière de permission de sortie, par le biais d’une procédure de référé devant le président de la chambre de l’application des peines.

15) Suppression des interdictions ou incapacités professionnelles automatiques

Si les incapacités civique, civile ou de famille ainsi que l’incapacité commerciale résultant d’une condamnation pénale doivent dorénavant être expressément prononcées par la juridiction de jugement, il n’en est pas de même pour diverses incapacités professionnelles prévues le plus souvent dans des législations pénales annexes.
Demeurant automatiques, elles conduisent parfois à freiner des projets de réinsertion (est-il utile de conserver l’interdiction de plein droit de l’exercice de la profession de marin ou matelot (décret de 1967) à toute personne condamnée à une peine de 6 mois d’emprisonnement ?).

Est préconisée l’adoption d’une disposition générale posant le principe que toute déchéance ou incapacité pouvant résulter d’une condamnation pénale doit être expressément prononcée par la juridiction de jugement, en conformité avec l’esprit et la lettre de l’article 132-17 du code pénal.

16) Réduction à 6 mois du délai avant lequel le juge de l’application des peines ne peut déclarer non avenue une condamnation à une peine assortie du sursis avec mise à l’épreuve

Si le condamné satisfait aux mesures de contrôle et d’aide ainsi qu’aux obligations particulières mises à sa charge et si son reclassement paraît acquis, le juge de l’application des peines peut déclarer cette condamnation non avenue. Il ne peut toutefois prononcer cette décision qu’à l’expiration d’un délai d’un an à compter du jour où la condamnation est devenue définitive (article 744 du CPP).

Ce délai parait surdimensionné pour les sursis probatoires exclusivement prononcés en vue du dédommagement de la victime, lorsque le condamné s’est intégralement acquitté de cette obligation avant l’expiration du délai d’un an. Il en résulte pour les SPIP le maintien en portefeuille, jusqu’à échéance du délai, de dossiers d’exécution de sursis probatoires n’exigeant plus aucune diligence.

Est préconisée la réduction à 6 mois du délai avant lequel le juge de l’application des peines ne peut déclarer non avenue une condamnation à une peine assortie du sursis avec mise à l’épreuve.

17) Création de la faculté pour le juge de l’application des peines de renvoyer au tribunal de l’application des peines pour voir statuer en collégialité sur un dossier difficile

Le juge de l’application des peines statue à juge unique à l’égard des condamnés à des peines inférieures à 10 années ou, pour les peines supérieures, à l’égard de tous les condamnés ayant un reliquat de peine inférieur à 3 années.

Le juge peut parfois être confronté à des dossiers particulièrement difficiles en opportunité. Dans ces hypothèses il serait opportun de permettre au juge de renvoyer le dossier en collégialité. En ce cas la décision ne serait plus prise à juge unique, mais par trois magistrats réunis au sein du tribunal de l’application des peines.

18) Transfert de compétence, en matière de surveillance judiciaire, au Tribunal de l’Application des Peines

La surveillance judiciaire est une mesure de sûreté instaurée par le législateur par la loi nº 2005-1549 du 12 décembre 2005. Elle consiste en une liberté surveillée imposée au condamné dangereux après la fin de sa peine d’emprisonnement.

Sur le plan procédural, l’article 723-29 du code de procédure pénale prévoit qu’en principe c’est le juge de l’application des peines qui prononce cette mesure de sûreté.

 Les dispositions transitoires de la loi du 12 décembre 2005 prévoient toutefois que le prononcé de la surveillance judiciaire relève de la compétence du tribunal de l’application des peines pour tous les faits commis antérieurement à l’entrée en vigueur de la loi du 12 décembre 2005

Les dossiers de surveillance judiciaire sont toujours éminemment sensibles, tant en terme de risque de récidive qu’en terme d’évaluation de dangerosité. Il est indispensable de prévoir que cette mesure de sûreté relève systématiquement de la collégialité, en érigeant en principe les dispositions transitoires actuelles.

19) Clarification des dispositions qui autorisent le juge de l’application des peines à nommer le médecin coordonnateur en détention

 Par la loi du 10 août 2007, le législateur a manifesté sa volonté de systématiser l’injonction de soin à l’encontre des condamnés accessibles à un traitement. Lorsque cette obligation est prononcée, l’injonction de soins entraîne la désignation d’un médecin coordonnateur chargé de faire le lien entre le médecin traitant et le juge de l’application des peines. Le contenu et la qualité de ce suivi sont alors plus lisibles et plus efficaces.

En pratique cette injonction de peine ne commence réellement à s’appliquer qu’à l’issue de l’emprisonnement.

Les textes permettent pourtant de désigner le médecin coordonnateur pendant l’incarcération. L’article R. 3711-17 du code de la santé publique dispose ainsi que le médecin coordonnateur peut être désigné -et donc intervenir- avant la libération du condamné. Surtout le nouvel article 717-1 du CPP prévoit que les dispositions du code de la santé publique relatives au médecin coordonnateur sont « applicables au médecin traitant du condamné détenu ».

Il parait important de clarifier ces dispositions de manière à permettre effectivement la désignation des médecins coordonnateurs dés l’incarcération. L’intervention du médecin coordonnateur à ce stade de la peine permettrait d’une part de mieux connaître le condamné mais également de dynamiser les suivis au sein de la détention.
 Les informations ainsi recueillies seraient précieuses dans le cadre de l’examen des réductions supplémentaires de peines mais également dans la perspective de l’octroi des aménagements de peine futurs.

Le condamné, une fois libéré, parfaitement connu au niveau de son évolution et de son parcours pénitentiaire bénéficiera ainsi d’un suivi mieux individualisé.

Lorsque le médecin coordonnateur qui suivra le détenu en milieu ouvert après sa libération ne pourra être celui qui est intervenu en détention (cas du condamné domicilié dans un autre ressort), il appartiendra au premier médecin coordonnateur de transmettre à confrère son dossier d’observation.

20) Simplification des régimes juridiques en retenant un corpus UNIQUE des obligations

Chaque mesure d’aménagement de peine comprend un certain nombre d’obligations potentielles que le juge de l’application des peines peut imposer au condamné. Mais celles-ci peuvent varier suivant le type d’aménagement de peine. C’est ainsi que l’obligation d’indemniser la victime peut être imposée dans la quasi-totalité des aménagements de peine, mais est exclue dans le cadre de la surveillance judiciaire.

Est préconisé le regroupement en un corpus unique de l’ensemble des obligations que peut imposer au condamné le juge de l’application des peines, quelle que soit la nature de la mesure qui en est le support.

Préconisations :

 83) Elargir aux peines égales ou inférieures à 2 ans le champ d’application de l’article 723-15 du Code de procédure pénale

84) Eriger l’aménagement des peines égales ou inférieures à un an d’emprisonnement comme un droit en faveur du condamné libre

85) Aménager la procédure d’aménagement des peines égales ou inférieures à un an, en conférant une attribution nouvelle au Parquet et au service pénitentiaire d’insertion et de probation, sous le contrôle du juge de l’application des peines

86) Examiner dans les deux jours ouvrables la situation de tout détenu condamné en comparution immédiate à une peine d’emprisonnement égale ou inférieure à 6 mois, dans la perspective d’une requête en aménagement de peine

87) Unifier la période d’éligibilité à la libération conditionnelle

88) Examiner systématiquement la situation des condamnés à mi-peine au regard des conditions d’admission à la libération conditionnelle

89) Proposer systématiquement un aménagement des 3 derniers mois d’exécution des peines privatives de liberté égales ou inférieures à 2 ans

90) Procéder, dans le cadre des travaux de la loi pénitentiaire, à une évaluation précise de la nouvelle procédure d’aménagement de peine instituée par la loi du 9 mars 2004 en vue d’opter, en connaissance de cause, pour sa suppression ou son maintien

91) Supprimer l’automaticité de la période de sûreté assortissant la réclusion criminelle à temps

92) Instituer la semi-liberté ou le placement extérieur « aux fins de recherche d’emploi »

 93) Alléger les formalités administratives attachées au placement extérieur pour les très courtes peines d’emprisonnement

94) Favoriser les placements extérieurs par le développement de partenariats locaux avec engagement de co-financement

95) Promouvoir les placements extérieurs et autres mesures d’insertion par la mise en place de dispositifs de prise en charge, notamment par l’extension du périmètre des missions de la veille sociale départementale aux besoins d’hébergement immédiat des personnes placées sous main de justice ou venant de faire l’objet d’une incarcération

96) Donner un caractère suspensif à l’appel du condamné, dans le cadre de la procédure de l’article 723-15 du Code de Procédure Pénale

97) Créer une procédure d’urgence pour statuer sur les appels à caractère suspensif, formé par le ministère public contre les décisions du juge de l’application des peines

98) Supprimer les interdictions ou incapacités professionnelles automatiques

99) Réduire à 6 mois le délai avant lequel le juge de l’application des peines ne peut déclarer non avenue une condamnation à une peine assortie du sursis avec mise à l’épreuve

100) Donner la faculté au juge de l’application des peines de renvoyer en collégialité, au tribunal de l’application des peines, l’examen des dossiers difficiles

101) Transférer la compétence, en matière de surveillance judiciaire, au tribunal de l’application des peines

102) Clarifier les dispositions qui autorisent le juge de l’application des peines à nommer le médecin coordonnateur en détention

103) Instituer un corpus unique d’obligations pouvant assortir les aménagements de peine, laissé au libre choix du juge de l’application des peines

Chapitre VII : Promouvoir les voies et moyens nécessaires

Au bénéfice de cette « refondation » de la peine privative de liberté qu’appelle l’ensemble des préconisations du comité d’orientation restreint sur le sens et la portée du temps d’enfermement, doivent être énoncés les voies et moyens qu’exige une telle ambition.

Au premier rang de ceux-ci figure, à l’évidence, la poursuite d’une action volontariste visant à éradiquer la surpopulation pénale dont la nocivité est suffisamment évidente pour devoir être davantage explicitée.

Le comité d’orientation a salué l’effort important entrepris pour la réalisation d’un programme de construction de centres pénitentiaires et de centres de détention modernes permettant la désaffectation des établissements les plus vétustes. Il souhaite sa poursuite, non point pour favoriser une inflation des peines privatives de liberté mais pour assurer des conditions de détention répondant aux normes européennes.

L’état de surpopulation importante de nombre de maisons d’arrêt doit constituer une préoccupation, y compris pour l’autorité judiciaire prescriptrice de la privation de liberté. Le comité préconise à cette fin la mise en place d’une procédure « alerte surpopulation » permettant au chef d’établissement de sensibiliser non seulement l’échelon régional des services pénitentiaires mais encore les autorités judiciaires locales, principales productrices des flux de population pénale accueillie dans sa structure, sur le franchissement de seuils de surencombrement.

Il entrerait dans les missions du conseil d’établissement (ci-après préconisé) de définir les modalités de cette information en temps réel, propre à engager une réflexion commune sur les moyens propres à ramener le taux d’occupation à un seuil compatible avec des conditions de détention acceptables.

Exécutée dans le respect de la dignité de l’individu, individualisée puis aménagée, la peine privative de liberté pourra ainsi prétendre réaliser l’amendement et la réinsertion consubstantiels à son utilité.

Mais agir contre la surpopulation pénale n’est pas suffisant. Doit être promue, dans le même temps, l’idée d’un grand service public pénitentiaire en charge d’assurer la mise en œuvre de cette conception revisitée de la peine.

I) Pour un grand service public pénitentiaire :

Se voyant assigner une telle tâche dépassant la simple fonction sécuritaire qui lui a été longtemps assignée (même si celle-ci demeure essentielle), les missions du service public pénitentiaire se doivent d’être clairement rappelées :

1) Une définition claire des missions du service public pénitentiaire :

Le comité d’orientation propose la définition suivante :

« Le service public pénitentiaire assure l’exécution des mesures et sanctions pénales. Il contribue à la sécurité publique et favorise, dans le respect des intérêts de la société et des droits des victimes, l’insertion ou la réinsertion des personnes placées sous main de justice ainsi que la prévention de la récidive. Il inscrit son action dans l’ensemble des politiques publiques »

2) Une réaffirmation du rattachement du service public pénitentiaire au ministère de la Justice

Parce qu’il assure la prise en charge de personnes placées sous main de justice, en exécution de décisions judiciaires, le service pénitentiaire doit demeurer sous la tutelle du garde des Sceaux.

3) Une réaffirmation de l’impossibilité de délégation de certaines fonctions

Pour l’exécution des peines tant en milieu fermé qu’en milieu ouvert, les fonctions de direction, de greffe, de surveillance ou de contrôle en charge du service public pénitentiaire ne peuvent être déléguées.

 4) Une expression marquée de l’intégration du service public pénitentiaire dans le service public de la justice et d’une exigence éthique : la prestation de serment

Alors que de très nombreux agents chargés d’une mission de service public prêtent serment devant une juridiction de l’ordre judiciaire au moment de leur entrée en fonctions, qu’il en est de même pour les magistrats et greffiers, ainsi que pour l’ensemble des membres des professions judiciaires, les agents de l’administration pénitentiaire restent tenus à l’écart de cette symbolique, à connotation forte.

Les astreindre à un serment à leur entrée en fonctions, loin de constituer allégeance à l’institution judiciaire ou soumission à des sujétions nouvelles, consacrerait publiquement l’intégration de leur mission dans « l’acte de justice » avec les exigences éthiques qui en résultent.

Cette prestation de serment se déroulerait au siège de la cour d’appel du lieu d’implantation de l’établissement ou service de leur première affectation. Pourraient être ainsi regroupés, lors d’une ou deux audiences annuelles, l’ensemble des nouveaux personnels affectés dans le ressort de la cour. Seraient invités à assister à cette audience le directeur interrégional des services pénitentiaires ainsi que les chefs d’établissements et de services pénitentiaires dudit ressort.
Le comité d’orientation propose la formule de serment suivante :

« Je jure de loyalement remplir mes fonctions, d’observer en tout les devoirs qu’elles m’imposent et, dans leur exercice, de ne faire usage du pouvoir de contrainte qui m’est confié que pour l’exécution des lois et dans le respect des personnes »

Le comité d’orientation tient à souligner que l’existence de ce serment ne saurait induire pour les agents de l’administration pénitentiaire une quelconque prérogative en matière d’exercice de la police judiciaire.

5) Elaboration d’un code de déontologie du service public pénitentiaire

Bien que déjà comprise et respectée par le personnel pénitentiaire, l’exigence d’une déontologie mérite d’être précisée et actualisée par un texte, permettant notamment à tout nouvel agent de posséder une pleine connaissance de ses principes directeurs et de leurs déclinaisons pratiques. Est donc préconisée la mise en chantier d’un code de déontologie du service public pénitentiaire regroupant, pour chaque fonction, les comportements prohibés, les mises en garde utiles comme encore les bonnes pratiques à s’approprier.

6) Adaptation du statut spécial

Le comité d’orientation a estimé qu’à la faveur de l’évolution des droits reconnus aux divers agents des services publics de l’Etat, y compris dans l’exercice de ses pouvoirs régaliens, devaient être posés deux principes :

- Les conditions d’exercice des personnels de l’administration pénitentiaire doivent se rapprocher le plus possible de celles des autres personnels de la fonction publique de statut équivalent.

-Toute dérogation du statut des personnels de l’administration pénitentiaire au statut de la fonction publique doit être strictement justifiée par les nécessités du service public pénitentiaire.

Ces principes induisent trois conséquences :

a) Reconnaissance d’un droit d’expression et de manifestation

Il importe de consacrer dans un texte législatif, la reconnaissance aux personnels de l’administration pénitentiaire d’un droit d’expression et de manifestation. Le comité d’orientation, se référant à la formulation du projet de loi de 2002 en son article 39, préconise l’affirmation suivante : « Les droits d’expression et de manifestation sont reconnus aux fonctionnaires et stagiaires de l’administration pénitentiaire sous réserve des dispositions du statut général de la fonction publique et de leur statut spécial »

b) Limitation à l’interdiction de cessation concertée du service des dispositions du statut spécial

L’article 3 de l’ordonnance N° 58-696 du 6 août 1958 relative au statut spécial des fonctionnaires des services déconcentrés de l’administration pénitentiaire interdit à ceux-ci toute cessation concertée du service ainsi que tout acte collectif d’indiscipline caractérisée de la part des personnels des services extérieurs de l’administration pénitentiaire.

Il parait difficile de continuer à fournir une justification convaincante de la soumission des actes collectifs d’indiscipline des personnels de l’administration pénitentiaire, à un régime dérogatoire de celui des personnels d’autres services publics de l’Etat.

Le comité d’orientation ne préconise pas, par contre, l’abrogation de l’interdiction du droit de grève, compte-tenu de l’impossibilité de définir un périmètre précis de ce que pourrait être un service minimum tant au regard du contrôle et de la prise en charge des personnes placées sous main de justice qu’à celui des nécessités de la continuité du service public de la justice.

Il propose, en conséquence une nouvelle rédaction contractée de l’article 3 de l’ordonnance du 7 août 1958 :

« Toute cessation concertée du service de la part des personnels des services extérieurs de l’administration pénitentiaire est interdite »

c) Alignement des garanties disciplinaires sur celles des autres personnels de la fonction publique de statut équivalent

Le statut disciplinaire de droit commun, applicable aux autres personnels de la fonction publique de statut équivalent, parait suffire à faire face à la nécessité de sanction des manquements divers autres que la cessation concertée du service, notamment par le recours à la suspension provisoire qu’autorise l’urgence ou la gravité des faits imputés à l’agent.

L’intervention d’une commission de discipline en charge de statuer sur le fond parait désormais incontournable au regard des standards européens, au-delà même du simple cadre des règles pénitentiaires européennes.

Est donc posé le principe que les garanties des personnels de l’administration pénitentiaire doivent être identiques à celles offertes aux personnels de la fonction publique de statut équivalent et que toute dérogation du statut des personnels de cette administration au statut de la fonction publique doit être strictement justifiée par les nécessités du fonctionnement du service public pénitentiaire. Les dispositions de l’article 3 de l’ordonnance du 6 août 1958 prévoyant l’existence d’une sanction hors des garanties disciplinaires doivent, en conséquence, être abrogées.

7) Intensification et diversification de la formation des personnels pénitentiaires

L’indispensable implication de l’ensemble des personnels pénitentiaires dans la nouvelle approche de la peine impose une intensification de leur formation et l’ouverture de celle-ci à des disciplines nouvelles.

La formation initiale des personnels du service public pénitentiaire devrait prévoir tout d’abord un socle d’enseignement commun aux diverses catégories de personnel permettant notamment une découverte pratique des divers intervenants et de leur mission.

Elle devrait aussi inclure, en adaptant ses modules aux différentes fonctions, une approche plus approfondie des sciences humaines (pathologies mentales, conduites addictives, toxicomanies etc), du droit (procédure pénale, etc), de l’exposé écrit et de la synthèse, du sens et de la portée de l’éthique attachée aux fonctions pénitentiaires .

Doit être ensuite reconnu au profit de chaque agent un droit individuel à bénéficier, tout au long de sa carrière, d’activités de formation continue dans les mêmes conditions que celles consenties aux autres agents de la fonction publique.

Une formation d’adaptation obligatoire, incluant un stage pratique, devrait être mise en place à chaque changement de fonction ou d’affectation dans une structure dédiée à une population pénale spécifique (cf. RPE 81-2 et 81-3). Une attention particulière devrait être portée à la formation des personnels affectés même temporairement dans les greffes pénitentiaires.

Cette intensification de la formation pourrait être utilement complétée par la rédaction d’un « référentiel métiers » déclinant avec précision et pédagogie les missions des différentes filières de l’administration pénitentiaire, déclinées tant en terme de sécurité que d’insertion.

8) Dimensionnement à donner aux missions de réinsertion de l’administration pénitentiaire

L’administration pénitentiaire doit manifester avec force son engagement dans la conduite de ses missions de réinsertion dont l’extension du périmètre, à court et moyen terme, doit être anticipée.

a) Une mesure symbolique immédiatement envisageable : l’attribution explicite à une sous- direction de l’administration pénitentiaire de la mise en œuvre et de la coordination des missions de réinsertion et de probation

Cette disposition sans conséquence organisationnelle démesurée ne manquerait pas d’être perçue comme un engagement dépassant la simple symbolique.

b) Poursuite de l’effort de re-paramétrage des services pénitentiaires départementaux d’insertion et de probation et réaffirmation de leurs missions

L’effort conséquent engagé depuis plusieurs exercices budgétaires en vue de doter les services pénitentiaires d’insertion et de probation des ressources humaines indispensables à la conduite de leurs missions doit être poursuivi et intensifié.

 L’aménagement de peine ne peut recevoir l’adhésion et, par là même, prospérer que dans la mesure où sa crédibilité est insusceptible d’être mise en doute. Démonstration doit donc être faite que l’administration pénitentiaire se dote des moyens propres à assurer un contrôle étroit et fréquent de l’exécution des mesures d’aménagement de peine et des sanctions pénales en milieu ouvert, accompagné en tant que de besoin des prises en charge sociales qui doivent l’accompagner.

Il importe, dans le même temps, que les services pénitentiaires d’insertion et de probation s’approprient pleinement, dans sa plénitude, la mission qui est la leur, se définissant comme « la mise en œuvre et le suivi des mesures d’individualisation et d’aménagement des peines privatives de liberté, ainsi que des sanctions pénales en milieu ouvert ».

9) Possibilité pour certaines associations habilitées de mettre en œuvre certaines peines de travail d’intérêt général ou d’assurer le suivi de certaines obligations assortissant le sursis avec mise à l’épreuve

Tout en réaffirmant que les missions conférées aux services pénitentiaires d’insertion et de probation ne sauraient être déléguées, possibilité doit être donnée à ceux-ci de donner mandat spécial à une association de contrôle judiciaire habilitée pour assurer le suivi d’une mesure en milieu ouvert.

Certaines associations habilitées par le ministère de la Justice assurent déjà des prestations de qualité en matière de contrôle judiciaire, dans le domaine du pré-sententiel, comme encore en matière d’enquêtes de personnalité. Dans certains ressorts, des juges de l’application des peines, en dehors de tout texte, désignent déjà des associations habilitées pour la mise en œuvre et le contrôle d’obligations d’indemnisation des victimes, assortissant un sursis probatoire.

La possibilité de confier à une association habilitée le suivi de certaines peines de travail d’intérêt général (notamment celles de courte durée) ou d’assurer le suivi des obligations assortissant certains sursis probatoires, permettrait aux SPIP de se concentrer sur la conduite des dossiers les plus lourds.

Il va de soi que le mandat donné par le SPIP, avec l’aval du juge de l’application des peines, à une association habilitée, à tout instant révocable, ne saurait être général. Il serait mis à exécution sous son contrôle et selon les modalités définies par lui

II) Promouvoir des synergies nouvelles

La mise en œuvre d’une politique ambitieuse d’exécution de la peine servant tout à la fois ses deux finalités de sanction et de réinsertion ne peut être envisagée dans une conception d’isolement fonctionnel de ses acteurs multiples. L’indispensable complémentarité de leurs actions doit non seulement être affirmée mais concrètement favorisée.

1- Création d’un conseil consultatif d’établissement

La nécessité de créer des synergies nouvelles entre, d’une part, les diverses individualités
(personnels pénitentiaires, de la santé publique, de l’éducation nationale, représentant d’associations, etc) intervenant dans chaque établissement pénitentiaire et, d’autre part, les instances ou organes directement en lien institutionnel avec lui impose la mise en place d’une structure spécifique.

Ce rôle ne peut être tenu par les actuelles commissions de surveillance dont la réunion, une fois l’an, se réduit souvent à la lecture d’un rapport d’activités par le chef d’établissement ne donnant lieu qu’à quelques demandes de précisions ou d’informations complémentaires ne débouchant qu’exceptionnellement sur de réels débats de fond.

Supprimer cette commission de surveillance aboutirait à priver les collectivités locales, les services de police et de gendarmerie ou telle autre administration de l’Etat, dont la représentation est prévue par l’article D 180 du code de procédure pénale, à posséder une information minimum, annuellement réactualisée, sur la situation intérieure des structures pénitentiaires de leur département, de leur évolution et de leurs projets.

Est donc proposée la création d’un conseil consultatif d’établissement regroupant :

Le chef de l’établissement, ses adjoints et chefs de service
Les responsables dans l’établissement : de la santé, du travail, de l’enseignement, des autres activités de formation et des cultes
Les responsables des associations intervenant régulièrement dans l’établissement (accueil des familles, visiteurs etc)
Le directeur départemental du service pénitentiaire d’insertion et de probation (ou son représentant)
Le directeur interrégional des services pénitentiaires (ou son représentant)
Le premier président de la cour d’appel, le président de la chambre de l’instruction et le procureur général (ou leur représentant)
Le président du tribunal de grande instance et le procureur de la république du lieu d’implantation de l’établissement (ou leurs représentants)
Les juges d’application des peines (et éventuellement les juges des enfants) intervenant dans l’établissement
Un représentant du Barreau

Cette structure de concertation pourrait se réunir quadrimestriellement et débattre des retours d’expérience, projets en cours d’élaboration, difficultés rencontrées etc en s’attachant notamment aux problèmes liés aux taux d’occupation de l’établissement et à la détention provisoire. Elle pourrait être activée à tout moment, en cas de besoin, par le chef d’établissement, notamment au vu d’une progression inquiétante de la surpopulation pénale.

Autorités pénitentiaires et judiciaires, comme acteurs extérieurs, pourraient ainsi mettre en place de véritables stratégies d’actions coordonnées et complémentaires, dans le respect des responsabilités et prérogatives de chaque acteur, ainsi que du secret professionnel vis-à-vis des situations individuelles.

2- Création d’un conseil départemental d’insertion des personnes placées sous main de justice

La nécessité de rompre d’autres isolements fonctionnels trop souvent déplorés et de coordonner dans chaque département (comportant parfois plusieurs établissements pénitentiaires et tribunaux de grande instance) l’accompagnement social et l’insertion des personnes sous main de justice impose la mise en place d’une structure réunissant l’ensemble des acteurs : Justice, Travail, Logement, Santé, Education Nationale, Conseil Général, collectivités locales et associations impliquées etc.

Est préconisée la mise en place dans chaque département d’un conseil d’insertion des personnes placées sous main de justice présidé par le préfet (ou son représentant) et co-présidé par les chefs de la cour d’appel (ou leurs représentants) et comprenant :

Les chefs de juridiction des tribunaux de grande instance du département
Les juges de l’application des tribunaux de grande instance du département
Le directeur interrégional des services pénitentiaires
Le directeur départemental du service pénitentiaire d’insertion et de probation
Les chefs des établissements pénitentiaires du département
Le président du conseil général (ou son représentant)
Les directeurs des services régionaux ou départementaux du travail, de la santé, du logement
Le recteur d’académie (ou son représentant)
Les représentants des communes et des associations choisies à raison de leur implication dans la réinsertion sociale des personnes placées sous main de justice

Se réunissant chaque semestre, ce conseil examinerait les difficultés pratiques rencontrées par les acteurs de terrain, notamment en matière de financement et étudierait la mise en œuvre de projets visant tant à promouvoir de nouvelles mesures qu’à assurer la continuité et la complémentarité de l’accompagnement social et de l’insertion des personnes placées sous main de justice, détenues ou non.
 
Ce conseil départemental pourrait préluder à la mise en place d’un véritable service public départemental de l’insertion des personnes placées sous main de justice.

3- Création d’une délégation interministérielle à la promotion de l’application des peines

Une telle création (sur le mode de la délégation à la sécurité routière) présenterait de multiples avantages : meilleure communication externe permettant de promouvoir l’intérêt et la finalité sociale de l’aménagement de peine, efficacité accrue dans la mobilisation des collectivités locales, etc. Cette création permettrait d’afficher clairement que l’insertion ou la réinsertion des condamnés est une mission impliquant plusieurs ministères, bien au-delà du seul ministère de la Justice.

Le délégué interministériel à l’application des peines, directement rattaché au premier ministre, pourrait rendre un rapport public annuel sur les conditions de la mise en œuvre de l’ensemble des dispositifs d’application des peines.

Préconisations

Pour un grand service public pénitentiaire

104) Donner une définition claire des missions du service public pénitentiaire

105) Réaffirmer le rattachement du service public pénitentiaire au ministère de la Justice

106) Réaffirmer l’impossibilité de délégation des fonctions de direction, de greffe, de surveillance et de contrôle

107) Exprimer fortement et symboliquement, par l’instauration d’une prestation de serment à l’entrée en fonctions, l’intégration du service public pénitentiaire dans le service public de la Justice ainsi qu’une exigence éthique

108) Elaborer un code de déontologie du service public pénitentiaire

109) Reconnaître un droit d’expression et de manifestation aux personnels de l’administration pénitentiaire

110) Limiter à l’interdiction de cessation concertée du service, les dispositions du statut spécial des fonctionnaires des services déconcentrés de l’administration pénitentiaire

111) Aligner les garanties disciplinaires des fonctionnaires de l’administration pénitentiaire sur celles des autres personnels de la fonction publique de statut équivalent

112) Intensifier et diversifier la formation des personnels pénitentiaires

113) Attribuer explicitement à une sous-direction de l’administration pénitentiaire la mise en œuvre et la coordination des missions de réinsertion et de probation

114) Poursuivre l’effort de re-paramétrage des services pénitentiaires départementaux d’insertion et de probation et réaffirmer leurs missions

115) Donner la possibilité à certaines associations habilitées de mettre en œuvre certaines peines de travail d’intérêt général ou d’assurer le suivi de certaines obligations assortissant le sursis avec mise à l’épreuve, dans le cadre d’un mandat ad hoc donné par le service pénitentiaire d’insertion et de probation, avec l’aval du juge de l’application des peines

Promouvoir des synergies nouvelles

116) Créer dans chaque établissement un conseil consultatif d’établissement

117) Créer un conseil départemental d’insertion des personnes placées sous main de justice

118) Créer une délégation interministérielle à la promotion de l’application des peines

Conclusion 

- Vers la rédaction d’un code de l’exécution des sanctions pénales

L’exécution des sanctions pénales recouvre tout à la fois l’exécution des peines au sens strict et des diverses mesures et sanctions éducatives applicables aux mineurs ainsi que l’ensemble des obligations accompagnant un sursis avec mise à l’épreuve ou une peine complémentaire, comme encore diverses mesures de sûreté (surveillance judiciaire, placement sous bracelet électronique).

Ces diverses peines et mesures font l’objet de nombreux textes dont l’éparpillement et l’accumulation nuisent à leur lisibilité et rendent leur accès malaisé, à l’heure où le droit de l’exécution des sanctions pénales connaît un essor générateur d’un contentieux croissant (judiciaire, administratif et européen).

Il convient donc de rendre le droit de l’exécution des peines plus lisible et plus accessible, à la fois pour les personnels concernés et pour l’ensemble des personnes placées sous main de justice. D’où la proposition de mise en chantier d’un code de l’exécution des sanctions pénales où la peine d’emprisonnement serait traitée parmi d’autres, avec l’ensemble de ses dispositifs d’individualisation et d’aménagement.

Ce code devrait comprendre une partie législative et une partie réglementaire et reprendre l’ensemble des dispositions de fond et de forme relatives à :

- la mise à exécution de la sanction
- les missions du service public pénitentiaire
- le rôle des divers acteurs intervenant dans l’exécution des sanctions pénales
- les diverses procédures d’aménagement des peines
- les mesures relevant des juridictions de l’application des peines
- les droits et devoirs des détenus
- les conditions de détention et les divers régimes de détention
- le relèvement des peines complémentaires
- la réhabilitation, la grâce et l’amnistie
- le casier judiciaire
- Vers une pérennisation d’une instance d’avis et de préconisations placée auprès du directeur de l’administration pénitentiaire

Les mutations profondes que ne manqueront pas de connaître les régimes d’exécution des peines tant en milieu fermé qu’en milieu ouvert, compte tenu notamment de l’incidence des normes européennes et de la jurisprudence de la cour européenne des droits de l’Homme conjuguée avec une prise de conscience accrue par l’opinion publique nationale, de la « grande cause » que constitue désormais la condition pénitentiaire en France, conduit à formuler une proposition complémentaire.

Cette proposition tend à voir créer, indépendamment du conseil supérieur de l’administration pénitentiaire, instance officielle, essentiellement institutionnelle au demeurant peu activée, une structure pluridisciplinaire de réflexion et de propositions réunissant - à l’instar du présent comité d’orientation des personnalités et représentants de personnes morales de toutes sensibilités et positionnements professionnels ne tirant leur légitimité que de leur implication présente ou passée dans les problématiques liées à l’exécution des sanctions pénales.

Celle-ci mettrait ainsi à la disposition du Ministre de la Justice un « laboratoire d’idées » propre à lui offrir des analyses et propositions formulées par des acteurs ou observateurs avertis, tant extérieurs qu’intérieurs à son administration.

Préconisations :

119) Mettre en chantier un code de l’exécution des sanctions pénales

120) Instituer une instance permanente d’avis et préconisations

Récapitulatif des préconisations

Faire de la peine privative de liberté l’ultime recours

1) Adjoindre à l’article 132-24 du code pénal un troisième paragraphe énonçant que « la privation de liberté doit être considérée comme une sanction de dernier recours, lorsque la gravité de l’infraction et la personnalité de son auteur rendent toute autre sanction manifestement inadéquate »

2) Créer une nouvelle peine alternative à l’emprisonnement : l’assignation à résidence (dite aussi arrêt domiciliaire) sous placement sous surveillance électronique

3) Rendre possible le prononcé des peines de travail d’intérêt général, dans une fourchette de 20 à 400 heures

4) Créer pour les communes et communautés de communes importantes, les départements, les régions et les établissements publics une obligation de mise à disposition de postes de travail d’intérêt général

5) Etendre le champ d’application des dispositions de l’article 394 du code de procédure pénale sur le contrôle judiciaire aux procédures initiées par citation directe, convocation par officier ou agent de police judiciaire ou par greffier (art. 390-1 du CPP)

 Donner un sens à l’exécution de la peine privative de liberté

6) Mettre en place dans chaque établissement une structure d’accueil des nouveaux arrivants, en vue de la réalisation d’un bilan complet de personnalité

7) Contractualiser avec le détenu un « parcours de mobilisation » (ou parcours d’exécution de peines) à échéance annuelle, renouvelable

8) Constituer au sein de chaque établissement une équipe pluridisciplinaire incluant le personnel de surveillance, en charge du suivi du parcours de chaque détenu

Rendre le détenu acteur de son temps d’enfermement et accompagner son parcours d’exécution de peine

9) Instaurer un contrat de travail aménagé (ou contrat d’engagement professionnel) signé entre le détenu et l’administration pénitentiaire, avec contreseing de l’entreprise concessionnaire.

10) Mettre en place une allocation d’insertion pour les détenus ne percevant pas le RMI, en contrepartie du suivi d’un enseignement, d’une formation professionnelle ou de toute autre activité concourant à un projet individualisé d’insertion.

11) Expérimenter un transfert aux régions du financement des actions de formation en faveur des personnes détenues

12) Permettre l’élection de domicile du détenu à l’établissement pénitentiaire ou au centre d’action sociale de la commune où il est implanté

13) Systématiser le règlement d’avance sur droits supposés afin de permettre au libéré de percevoir un premier mois d’allocation du RMI, dès sa libération

Diversifier et revisiter les régimes de détention

14) Affirmer et mettre en application le principe général que toute personne incarcérée doit bénéficier du même régime de détention, la restriction de certains droits imposée aux prévenus ne pouvant résulter que d’une décision de l’autorité judiciaire compétente

15) Permettre aux condamnés exécutant leur peine en maison d’arrêt de bénéficier des mêmes droits et des mêmes aménagements de peine que ceux dont bénéficient les condamnés incarcérés dans des établissements pour peine

16) Mettre en œuvre dans le délai le plus rapproché possible les dispositions de l’article 716 du code de procédure pénale sur l’encellulement individuel des mis en examen, prévenus et accusés

17) Affirmer et assurer l’effectivité d’un droit pour tout condamné, détenu en maison d’arrêt, auquel il reste à subir une peine supérieure à deux ans, à bénéficier d’un transfèrement en établissement d’exécution de peine dans un délai maximum de 6 mois, à compter du jour où sa condamnation est devenue définitive

18) Autoriser, sur la base du volontariat, l’organisation d’activités communes entre détenus des deux sexes, si un encadrement suffisant le permet

19) Objectiver les critères d’affectation de certains condamnés dans des établissements à sécurité renforcée, par référence aux règles pénitentiaires européennes. Réexaminer périodiquement et au moins annuellement la pertinence du maintien du condamné dans ce type d’établissement

20) Réduire l’incidence du critère de la longueur de la peine pour le choix de l’établissement d’exécution et accroître la prise en compte, dans l’affectation géographique, du maintien des liens familiaux

21) Créer, au sein des centres pénitentiaires et des maisons d’arrêt les plus importantes, d’unités regroupant des profils de détenus exigeant une prise en charge différenciée ou une protection particulière (toxicomanes, délinquants sexuels etc)

22) Mettre en place, dans certains établissements, des programmes de prise en charge à finalité thérapeutique ou non, à destination de certains publics, accessibles sur la base du volontariat.

Garantir au détenu les droits ordinaires du citoyen et assurer le respect des devoirs qui en sont le corollaire

Droit au maintien des liens familiaux

23) Rendre possible l’accès contrôlé au téléphone, tant aux condamnés qu’aux prévenus, sous réserve pour ces derniers d’une absence d’opposition de l’autorité judiciaire compétente

24) Assurer l’effectivité d’un parloir au moins hebdomadaire du détenu avec sa famille et ses proches, y compris pour celui subissant un encellulement disciplinaire, sous réserve de l’accord de l’autorité judiciaire compétente en ce qui concerne les prévenus

25) Généraliser les unités de vie familiale et leur égibilité à tous les détenus, y compris aux prévenus au-delà du sixième mois de détention provisoire, sauf opposition motivée de l’autorité judiciaire
Droit à la sécurité 

26) Assurer à chaque détenu une protection effective de son intégrité physique et le prémunir contre toute pression morale, en tous lieux collectifs comme individuels et à toutes heures du jour comme de la nuit.
27) Inscrire au rang des priorités de l’administration pénitentiaire la détection des populations les plus vulnérables et leur prise en charge spécifique. Aménager pour ce faire des quartiers spéciaux ou, à défaut des activités communes propres. Apporter un soin tout particulier au choix du ou des détenus avec lesquels l’individu en situation de vulnérabilité pourra être conduit à co-habiter.

28) Créer une obligation légale pour l’autorité judiciaire de fournir au chef d’établissement, toute information utile sur la personnalité du détenu, la nature de l’infraction reprochée, sa résonance médiatique, dès lors que l’une ou l’autre pourrait être de nature à entraîner des réactions d’hostilité de la part de la population pénale.

29) Permettre à chaque détenu dont la sécurité est mise en danger d’alerter, à toute heure du jour et de la nuit, le personnel pénitentiaire d’astreinte afin de provoquer son intervention sans délai qu’exige cette urgence.

30) Généraliser l’interphonie dans tous les lieux d’encellulement individuels et collectifs, quels que soient la catégorie d’établissement et le régime de détention. 

 Droit à la santé
 
31) Imposer à l’autorité judiciaire qui prescrit l’incarcération d’une personne de s’assurer, en cas de doute, par le recours à un examen médical voire une expertise, de la capacité de son état physique et mental à supporter cette mesure et, en cas d’incarcération, lui faire obligation de communiquer les informations recueillies au responsable du service médical de l’établissement

32) Affirmer l’inopposabilité des contraintes ou dispositions d’organisation pénitentiaires à la nécessité des soins

33) Affirmer le droit pour le détenu à la poursuite des soins dont il faisait l’objet au moment de son incarcération

34) Affirmer le droit pour le détenu à demander le recueil de l’avis de son médecin traitant sur la continuité des soins en cours, à son incarcération ou sur l’opportunité d’un choix thérapeutique majeur

35) Affirmer l’application, en détention, des dispositions légales de droit commun sur l’interruption volontaire de grossesse

36) Informer le détenu de sa faculté de faire appel devant une commission médicale ad hoc du refus d’un soin de confort ou d’esthétique

37) Autoriser les soins dentaires prothétiques ou conservatoires qui relèveraient en milieu libre d’un choix financier, selon les règles et tarifs hospitaliers, sans préjudice des nécessités de service de l’UCSA.

38) Mettre explicitement à la charge du médecin inspecteur de santé publique territorialement compétent, l’examen des réclamations des personnes incarcérées visant le caractère nuisible ou inadapté de leurs conditions de détention, au regard de leur état de santé 

39) Créer une voie de recours relative à la prescription des soins sans consentement

40) Rappeler l’obligation pour l’administration pénitentiaire d’assurer une prise en charge effective du handicap

41) Mettre à la disposition du corps médical intervenant auprès d’un détenu la pièce de justice relatant les faits motivant son incarcération ainsi que l’intégralité des expertises psychiatriques, psychologiques et médico-psychologiques dont il a pu faire l’objet, dans le cadre de la procédure judiciaire

42) Réaffirmer l’assujettissement au secret de l’ensemble des intervenants pouvant être conduits à avoir connaissance d’informations sur le détenu touchant au domaine médical

43) Réaffirmer l’opposabilité du secret médical, mais donner possibilité au médecin traitant en milieu pénitentiaire de communiquer des éléments cliniques à un expert, dès lors qu’ils sont utiles aux droits du détenu ou à la direction de l’établissement, dès lors qu’ils sont indispensables à une adaptation des conditions de sa détention 

44) Donner la possibilité au médecin traitant en milieu pénitentiaire, en cas de danger imminent pour les personnels pénitentiaires ou de nécessité pour ceux-ci de tenir compte dans leur attitude ou dans leur mission de l’état physique ou psychique d’un détenu, de donner à la direction de l’établissement, une information médicale strictement réduite à cette finalité, à charge pour ledit médecin d’en avertir le détenu

 45) Instaurer un examen expertal annuel de l’état physique et mental des détenus de plus de 75 ans, au regard des dispositions de l’article 720-1-1 du code de procédure pénale sur la suspension de peine pour cause médicale

46) Aligner les conditions d’accès et de maintien des détenus en unités hospitalières spécialement aménagées (UHSA) sur celles d’accès et de maintien en unités hospitalières sécurisées interrégionales (UHSI)

47) Poursuivre et améliorer dans chaque établissement l’élaboration d’une politique de prévention du risque suicidaire fondée sur une analyse des causes de chaque survenance de suicide et des nouvelles préconisations qu’elle peut justifier

48) Affecter au sein des unités de consultations et de soins ambulatoires (UCSA) opérant dans les établissements, un ou plusieurs psychologues, en charge d’animer des groupes de paroles à destination des détenus les plus psychologiquement fragiles

49) Mettre en place une évaluation régulière par le ministère de la santé ou par une mission interministérielle de contrôle, des conditions de prise en charge psychiatrique des détenus

Prise en compte de l’indigence

50) Maintenir le versement du RMI durant les six premiers mois de détention et maintenir au profit du conjoint ou de la famille le bénéfice d’ayant droit

51) Assurer au détenu indigent la gratuité d’accès à certains biens ou services

 Droit à la dignité et au respect de l’intimité

52) Limiter le recours aux fouilles corporelles aux seules circonstances imposées par des impératifs de sécurité objectivables et prévues dans le règlement intérieur de l’établissement. Astreindre leur exécution à des prescriptions déontologiques rigoureuses assurant le respect de la dignité et de l’intimité du détenu

53) Imposer la présence d’un tiers lors de toute saisie d’objets ou d’effets personnels du détenu

54) Préciser l’étendue du secret professionnel assujettissant l’ensemble du personnel pénitentiaire pour tout ce qu’il est conduit à connaître ou constater sur le détenu, dans l’exercice ou à l’occasion de l’exercice de ses fonctions

55) Installer dans chaque cellule un casier individuel bénéficiant d’une fermeture destinée à contenir les documents et objets les plus personnels du détenu

Droit à l’information sur les règles applicables à la vie dans l’établissement

56) Elaborer un règlement intérieur -cadre applicable à tous les établissements de même type, chacun de ceux-ci pouvant, à raison de sa spécificité, y adjoindre des dispositions particulières

57) Porter à la connaissance du détenu les dispositions du règlement intérieur le concernant par leur insertion dans un livret d’accueil rendu obligatoire

58) Uniformiser pour l’ensemble des établissements le montant de la redevance d’accès à la télévision et fixer une fourchette des prix des produits et denrées pouvant être acquis en cantine

59) Mettre en place à l’occasion des transferts un inventaire de l’ensemble des objets et effets personnels des détenus

Droit à l’accès au droit

60) Intégrer dans les missions des conseils départementaux d’accès aux droits la mise en place de points d’accès au droit dans chaque établissement

61) Généraliser dans tous les établissements la tenue de permanences de délégués du Médiateur de la République

Droit à la défense

62) Généraliser la prise des rendez-vous par téléphone ou par courrier électronique pour les parloirs avocats

63) Mettre en place les dispositifs nécessaires à l’accès du détenu à son dossier pénal numérisé

64) Mettre à la disposition du détenu ne possédant pas la compréhension de la langue française l’assistance d’un interprète pour l’exercice des droits de la défense (y compris pour les entretiens avec son avocat)

Droit à l’exercice du droit de vote

65) Ouvrir aux condamnés la possibilité d’une inscription sur les listes électorales de la commune du lieu de situation de l’établissement pénitentiaire.

 66) Généraliser l’ouverture d’un bureau de vote dans les établissements comptant plus de deux cents détenus

67) Mettre en place dans chaque établissement, avant chaque scrutin, d’une campagne d’information sur le vote par procuration et l’organisation avec l’autorité compétente d’une procédure destinée à faciliter son exercice

Droit des étrangers

68) Généraliser la traduction des livrets d’accueil dans les principales langues étrangères

69) Mettre à disposition dans tous les établissements un « écrivain public » en charge d’assurer la formulation des demandes ou la lecture de tous documents, au profit des détenus ne possédant pas la compréhension de la langue française

70) Informer le détenu étranger, dès son incarcération, de son droit de prendre contact avec la représentation diplomatique ou consulaire de son pays

71) Informer le détenu étranger des possibilités qui peuvent lui être ouvertes de solliciter son transfert vers un autre pays pour l’exécution de sa peine

Droit à l’accès au culte

72) Informer les personnes détenues, à leur arrivée dans l’établissement, sur les propositions des différents cultes

73) Former l’ensemble des personnels aux principes de la laïcité et aux pratiques cultuelles

74) Faciliter la circulation des aumôniers en détention pour la rencontre avec les personnes détenues

75) Mettre à disposition des locaux à usage cultuel adaptés, y compris pour les besoins spécifiques du culte musulman, pour les entretiens individuels et les rencontres collectives

Droit à l’information et à l’écoute

76) Repenser au sein de chaque établissement, les règles et modalités du dialogue entre population pénale et administration

77) Mettre à disposition un « écrivain public » en charge de l’écriture et de la lecture de tous documents liés à l’exercice des droits à l’information et à l’écoute par le détenu souffrant d’illettrisme ou d’insuffisance intellectuelle

Droit à l’expression collective

78) Donner aux détenus la possibilité de dialoguer collectivement avec les autorités pénitentiaires de questions relatives à leurs conditions générales de détention

Devoirs

79) Systématiser pour tout acte de violence physique, quelles que soient sa nature, sa gravité ou ses conséquences, l’établissement d’un certificat médical de constat ainsi que d’un compte-rendu adressé sans délai au procureur de la république territorialement compétent (avec copie au magistrat instructeur durant l’information judiciaire ou au ministère public près la juridiction de jugement saisie, lorsque la décision au fond n’est pas intervenue ou n’est pas encore définitive).

80) Faire du Fonds de Garantie l’interlocuteur unique pour l’indemnisation des victimes en mettant à sa charge le règlement des dommages intérêts alloués par la juridiction de jugement, faculté lui étant donnée de se retourner vers le condamné pour en obtenir le remboursement

81) Instaurer un état des lieux et du matériel mis à la disposition du détenu, établi contradictoirement, lors de la prise de possession par le détenu de sa cellule et au départ de celle-ci.

82) Etendre les possibilités de recours aux sanctions alternatives à l’encellulement disciplinaire (fusion des articles D251 et D251-1 du code de procédure pénale)

83) Fixer à 7, 14 ou 21 jours la durée maximum de placement en cellule disciplinaire suivant le degré de la faute sanctionnée

84) Maintenir l’exercice du pouvoir disciplinaire à la commission de discipline présidée par le chef d’établissement mais soumettre sa décision à une possibilité de recours hiérarchique devant donner lieu à une décision du directeur interrégional des services pénitentiaires dans un délai de 8 jours, elle-même attaquable devant la juridiction administrative par voie de

Intégrer dans l’exécution de la peine privative de liberté son individualisation et son aménagement

85) Eriger l’aménagement des peines égales ou inférieures à un an d’emprisonnement comme un droit en faveur du condamné libre

86) Aménager la procédure d’aménagement des peines égales ou inférieures à un an, en conférant une attribution nouvelle au Parquet et au service pénitentiaire d’insertion et de probation, sous le contrôle du juge de l’application des peines

87) Examiner dans les deux jours ouvrables la situation de tout détenu condamné en comparution immédiate à une peine d’emprisonnement égale ou inférieure à 6 mois, dans la perspective d’une requête en aménagement de peine

88) Unifier la période d’éligibilité à la libération conditionnelle

89) Examiner systématiquement la situation des condamnés à mi-peine au regard des conditions d’admission à la libération conditionnelle

90) Proposer systématiquement un aménagement des 3 derniers mois d’exécution des peines privatives de liberté égales ou inférieures à 2 ans

91) Procéder, dans le cadre des travaux de la loi pénitentiaire, à une évaluation précise de la nouvelle procédure d’aménagement de peine instituée par la loi du 9 mars 2004 en vue d’opter, en connaissance de cause, pour sa suppression ou son maintien

92) Supprimer l’automaticité de la période de sûreté assortissant la réclusion criminelle à temps

93) Instituer la semi-liberté ou le placement extérieur « aux fins de recherche d’emploi »

 94) Alléger les formalités administratives attachées au placement extérieur pour les très courtes peines d’emprisonnement

95) Favoriser les placements extérieurs par le développement de partenariats locaux avec engagement de co-financement

96) Promouvoir les placements extérieurs et autres mesures d’insertion par la mise en place de dispositifs de prise en charge, notamment par l’extension du périmètre des missions de la veille sociale départementale aux besoins d’hébergement immédiat des personnes placées sous main de justice ou venant de faire l’objet d’une incarcération

97) Donner un caractère suspensif à l’appel du condamné, dans le cadre de la procédure de l’article 723-15 du Code de Procédure Pénale

98) Créer une procédure d’urgence pour statuer sur les appels à caractère suspensif, formé par le ministère public contre les décisions du juge de l’application des peines

99) Supprimer les interdictions ou incapacités professionnelles automatiques

100) Réduire à 6 mois le délai avant lequel le juge de l’application des peines ne peut déclarer non avenue une condamnation à une peine assortie du sursis avec mise à l’épreuve

101) Donner la faculté au juge de l’application des peines de renvoyer en collégialité, au tribunal de l’application des peines, l’examen des dossiers difficiles

102) Transférer la compétence, en matière de surveillance judiciaire, au tribunal de l’application des peines

103) Clarifier les dispositions qui autorisent le juge de l’application des peines à nommer le médecin coordonnateur en détention

104) Instituer un corpus unique d’obligations pouvant assortir les aménagements de peine, laissé au libre choix du juge de l’application des peines

Promouvoir les voies et moyens nécessaires

105) Donner une définition claire des missions du service public pénitentiaire

106) Réaffirmer le rattachement du service public pénitentiaire au ministère de la Justice

107) Réaffirmer l’impossibilité de délégation des fonctions de direction, de greffe, de surveillance et de contrôle

108) Exprimer fortement et symboliquement, par l’instauration d’une prestation de serment à l’entrée en fonctions, l’intégration du service public pénitentiaire dans le service public de la Justice ainsi qu’une exigence éthique

109) Elaborer un code de déontologie du service public pénitentiaire

110) Reconnaître un droit d’expression et de manifestation aux personnels de l’administration pénitentiaire

111) Limiter à l’interdiction de cessation concertée du service, les dispositions du statut spécial des fonctionnaires des services déconcentrés de l’administration pénitentiaire

112) Aligner les garanties disciplinaires des fonctionnaires de l’administration pénitentiaire sur celles des autres personnels de la fonction publique de statut équivalent

113) Intensifier et diversifier la formation des personnels pénitentiaires

114) Attribuer explicitement à une sous- direction de l’administration pénitentiaire la mise en œuvre et la coordination des missions de réinsertion et de probation

115) Poursuivre l’effort de re-paramétrage des services pénitentiaires départementaux d’insertion et de probation et réaffirmer leurs missions

116) Donner la possibilité à certaines associations habilitées de mettre en œuvre certaines peines de travail d’intérêt général ou d’assurer le suivi de certaines obligations assortissant le sursis avec mise à l’épreuve, dans le cadre d’un mandat ad hoc donné par le service pénitentiaire d’insertion et de probation, avec l’aval du juge de l’application des peines

117) Créer dans chaque établissement un conseil consultatif d’établissement

118) Créer un conseil départemental d’insertion des personnes placées sous main de justice

119) Créer une délégation interministérielle à la promotion de l’application des peines

Conclusion 

119) Mettre en chantier un code de l’exécution des sanctions pénales

120) Instituer une instance permanente d’avis et préconisations