EXPOSÉ GÉNÉRAL

Mesdames, Messieurs,

Le Sénat est saisi en premier lieu du projet de loi instituant un Contrôleur général des lieux de privation de liberté.

Ce texte répond à une attente forte et unanime.

La privation de la liberté d'aller et de venir ne doit jamais porter atteinte au respect de la dignité de la personne qui est l'une des valeurs essentielles des sociétés démocratiques. Le contrôle extérieur apparaît à cet égard comme une garantie pour prévenir les abus que peut éventuellement favoriser un milieu clos.

Par ailleurs, il est le meilleur moyen de lever la suspicion qui s'attache par principe, aux yeux de l'opinion, aux conditions de traitement des personnes placées dans un lieu d'enfermement. Les administrations responsables de ces lieux et les personnels qui, dans leur immense majorité, accomplissent leur mission avec dévouement dans le respect d'une déontologie rigoureuse attendent beaucoup d'un regard extérieur qu'il permette de dissiper ces doutes et de mettre en lumière les progrès réels accomplis au cours de ces dernières années pour humaniser les modalités de privation de liberté en particulier dans les prisons. Lors de son audition par votre rapporteur, le directeur de l'administration pénitentiaire, M. Claude d'Harcourt, a résumé cet état d'esprit en affirmant qu'il avait « absolument besoin de ce contrôle ».

Notre assemblée a largement contribué à ouvrir la voie d'un contrôle indépendant. Elle a d'abord éclairé le débat en proposant en 2000, à la suite de la commission d'enquête sur les conditions de détention dans les établissements pénitentiaires en France 1 ( * ) , l'instauration d'un contrôle des prisons sous la forme d'un organe externe doté d'importantes prérogatives. Plus encore, elle a posé un an plus tard le premier jalon du processus dont le projet de loi est le point d'aboutissement en adoptant la proposition de loi relative aux conditions de détention dans les établissements pénitentiaires et au contrôle général des prisons 2 ( * ) .

La réflexion a été également nourrie par la contribution éminente de la mission présidée par M. Guy Canivet consacrée à l'amélioration du contrôle extérieur des établissements pénitentiaires 3 ( * ) ainsi que par les travaux de la commission d'enquête de l'Assemblée nationale sur la situation dans les prisons françaises 4 ( * ) .

Depuis lors, le contrôle extérieur n'a plus seulement été une préoccupation largement partagée par les parlementaires et la grande majorité des acteurs du milieu pénitentiaire. Il est devenu une exigence internationale et son champ s'est étendu à l' ensemble des lieux d'enfermement . En effet, la France a signé le protocole facultatif à la convention des Nations unies contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, le 16 septembre 2005. Elle s'est engagée à ratifier ce texte avant la fin du premier semestre 2008. Or le protocole facultatif prévoit la mise en place, dans un délai d'un an suivant la ratification d'un mécanisme national de prévention indépendant chargé d'examiner régulièrement la situation des personnes privées de liberté, de formuler des recommandations à l'intention des autorités compétentes et de présenter des propositions à propos de la législation en vigueur.

Le Gouvernement précédent avait annoncé en octobre 2006 le dépôt d'un projet de loi instituant un contrôle extérieur qui aurait été confié au Médiateur de la République. Cependant, le calendrier parlementaire et les échéances électorales n'ont pas permis de présenter un tel projet. Conformément aux engagements du Président de la République, le nouveau Gouvernement a repris rapidement l'initiative et, soucieux de donner toute son importance à la mission de contrôle, a souhaité la confier à une autorité publique indépendante nouvelle, le Contrôleur général des lieux de privation de liberté.

Votre commission souscrit entièrement à cette démarche et, par les amendements qu'elle vous soumet, propose de conforter le statut et l'indépendance de cette autorité.

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I. UN CONTRÔLE EXTÉRIEUR ACTUELLEMENT DISPERSÉ ET INSUFFISANT

* 1 Prisons : une humiliation pour la République, Jean-Jacques Hyest, président, Guy-Pierre Cabanel, rapporteur, commission d'enquête sur les conditions de détention dans les établissements pénitentiaires en France, rapport n° 449, 1999-2000.

* 2 Proposition de loi n° 40 adoptée par le Sénat relative aux conditions de détention dans les établissements pénitentiaires et au contrôle général des prisons, Assemblée nationale, treizième législature.

* 3 Amélioration du contrôle extérieur des établissements pénitentiaires, commission présidée par Guy Canivet, documentation française, mars 2000.

* 4 La France face à ses prisons, Louis Mermaz, président, Jacques Floch, rapporteur, commission d'enquête sur la situation, dans les prisons françaises, rapport n° 2521, Assemblée nationale, 2000.

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