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La Vie en prison... vue de "dedans" - Paul Denis

(2006) Blog 42 " La discipline... "

Mise en ligne : 6 novembre 2006

Texte de l'article :

La discipline...

1019 Jours de détention... en Centre de détention
Extrait de la correspondance adressée à ma fille, pour lui présenter mes conditions de détention et mon « nouveau » cadre de vie
 

Droits et Obligations (à connaître), (suite) extraites du Code de Procédure Pénale (CPP), rédaction inspirée de celle du « Guide du Prisonnier » (O.I.P.)

DISCIPLINE

Toute vie en collectivité est régie par des règles à respecter parce qu’elles sont indispensables au bon fonctionnement de l’établissement.
Tout non-respect d’une instruction reçue fait l’objet d’un « compte-rendu d’incident » (rapport) qui peut être suivi, si le chef d’établissement le décide, de poursuites disciplinaires.

Sanctions disciplinaires

Donnent lieu à sanction les fautes mentionnées dans le Code de Procédure Pénale et les manquements au Règlement intérieur de l’établissement.
Elles ont pour but de faire respecter l’ordre, et surtout le respect d’autrui et du matériel.
Et ceci passe, par aucune discrimination de quelle que nature que ce soit, par la propreté de soi-même et de sa cellule, par le respect du matériel, mis à notre disposition.
De plus, aucun échange ou don entre détenus, ne peut avoir lieu s’il n’a pas été, au préalable, autorisé par le chef de l’établissement.
Il est interdit de se trouver dans un bâtiment ou une unité autre que celui ou celle d’affectation.

Le règlement prévoit une liste non limitative des fautes disciplinaires (voir ci-dessous, un résumé).
Les fautes disciplinaires sont réparties en 3 catégories (degrés)...
Les sanctions (fermes ou avec sursis) sont diverses et adaptées à la faute.

Elles peuvent faire l’objet de placement en quartier disciplinaire, pour une durée cumulée ne pouvant dépasser 45 jours.

Les fautes disciplinaires du 1er degré (les plus graves) :
. toute violence physique à l’encontre d’un membre du personnel ou d’un visiteur
. toute action collective de nature à compromettre la sécurité de l’établissement
. détention ou trafic de stupéfiants, d’objets ou de substances dangereuses
. toute menace de violences ou contraintes
. toute participation ou tentative d’évasion
. tous graves dommages aux locaux ou matériel
. mise en danger de la sécurité d’autrui.

Les fautes disciplinaires du 2ème degré :
. toutes insultes ou menaces à l’égard d’un membre du personnel ou d’un visiteur
. toute action collective de nature à perturber l’ordre
. tout vol (ou tentative)
. tout acte obscène ou susceptible d’offenser la pudeur
. tout refus de se soumettre à une mesure de sécurité
. tout trafic ou échange non autorisé
. tout tapage de nature à troubler l’ordre de l’établissement
. tout acte pouvant mettre en danger la sécurité d’autrui par une imprudence ou une négligence.

Les fautes disciplinaires du 3ème degré :
. outrages et menaces, par lettre, adressée aux autorités administratives et judiciaires
. formuler des menaces, des injures contre personne ayant autorité
. proférer des insultes ou des menaces à l’encontre d’un co-détenu
. refus d’obtempérer aux injonctions du personnel
. ne pas respecter le règlement intérieur de l’établissement
. négliger l’entretien de sa cellule
. entraver les activités de l’établissement (travail, formation, activités culturelles et de loisirs)
. jeter des détritus ou tout autre objet par les fenêtres
. faire un usage abusif ou nuisible d’objets autorisés.

Peuvent être prononcées, les sanctions disciplinaires suivantes :
. avertissement
. interdiction de recevoir des subsides (argent) de l’extérieur (pendant une période maximum de 2 mois)
. privation de cantiner (pendant une période maximum de 2 mois) autre que l’achat de produit d’hygiène, de correspondance, de tabac
. confinement en cellule ordinaire (isolement)
. mise en cellule disciplinaire (pour une durée variable)
. mais aussi, si la faute est commise au cours de..., à cause de... ou à l’occasion de... :
. mise à pied d’un emploi (pendant une durée maximale de 8 jours)
. déclassement d’un emploi (auxi ou atelier) ou d’une formation
. privation de tout appareil acheté ou loué (pendant une durée maximale d’un mois)
. suppression de l’accès au parloir sans dispositif de séparation (pendant une durée maximale de 4 mois)
. exécution d’un travail de nettoyage des locaux ou extérieurs (pendant une durée maximale de 40 heures)
. privation d’activités sportives, culturelles, de formation (pendant une durée maximale d’un mois)
. exécution de travaux de remise en état.

La Commission de Discipline

Le détenu est prévenu deux jours, au minimum, avant la date de la commission de discipline qui examinera son cas.
Il est informé du déroulement de la procédure, de la faculté que lui offre la loi d’être assisté par un avocat (choisi ou commis d’office), de la date de comparution, la copie du dossier lui est remise, pour consultation.

En cas d’incidents graves, le détenu peut être placé en quartier disciplinaire ou à l’isolement, sur le champ. Il sera informé de ses droits dans les 48 heures.

Toute sanction peut être « contestée » dans un délai de 15 jours, auprès de la Direction Régionale de l’Administration Pénitentiaire (DR). Tout autre recours ne peut avoir lieu qu’après le rejet par le DR (l’absence de réponse dans le délai d’un mois, vaut décision de rejet).

Quartier disciplinaire

. le détenu a à sa disposition : matelas en mousse, avec housse, traversin, couvertures et draps,
. il peut effectuer, isolément, une promenade d’au moins une heure, par jour,
. il doit être conduit à la douche trois fois par semaine,
. il doit maintenir la propreté de sa cellule, des produits et du matériel lui sont remis à cet effet,
. il doit veiller aux règles d’hygiène personnelle,
. le régime alimentaire est le même que celui de la détention ordinaire,

Privations :

. le détenu ne peut cantiner. Cependant, il est proposé au détenu, un bon spécial « quartier disciplinaire » qui comprend, outre des produits d’hygiène, du tabac, feuilles et allumettes, du matériel de correspondance, des produits de premières nécessités comme Ricoré (« l’ami du petit prisonnier »), sucre, confiture, lait.
La semaine précédant sa sortie du quartier disciplinaire, le détenu peut cantiner afin de bénéficier de ces produits dès son retour en détention ordinaire,
. le détenu est aussi privé d’éducation physique et sportive, d’activités culturelles et de loisirs, de tout matériel audio-vidéo, informatique et jeux électroniques,
. il n’a pas droit au parloir (seul le premier parloir peut avoir lieu, si la famille n’a pas pu être prévenue de sa mise en quartier disciplinaire). Il peut recevoir et envoyer du courrier. Il ne peut pas téléphoner,
. il a accès à une bibliothèque. Il pourra se faire remettre des ouvrages lui appartenant, des articles d’enseignement ou de formation,
. il reçoit la visite du médecin au moins deux fois par semaine et aussi souvent que le médecin l’estime utile, le psychologue peut, également, le visiter,
. toute communication des détenus qui y sont placés avec d’autres détenus est interdite.

L’exécution d’une sanction disciplinaire peut être différée, assortie pour tout ou partie d’un sursis. Elle peut être suspendue, fractionnée ou dispensée pour raisons médicales, pour bonne conduite, pour permettre de suivre une formation.

Le placement au quartier disciplinaire, à titre préventif, peut être décidé si les faits constituent une faute du 1er ou 2ème degré ou s’il apparaît que celui-ci est nécessaire pour préserver l’ordre intérieur de l’établissement.

En milieu carcéral, il existe une réelle psychose de « l’évasion » qui serait considérée comme le signe d’une défaillance extrême de l’établissement.
Aussi, cet état provoque toute une série de contraintes au nom de la sécurité qui brise le principe de la loi qui limite la détention à la privation de la « liberté d’aller et venir ».
Elle explique la politique du « porte-clefs » (ouverture, fermeture continuelle), la violation de l’intimité du détenu, elle provoque et justifie le recours à des moyens de contrôle et de contrainte souvent humiliants.
Certes, il y a eu des évolutions et le régime d’il y a 20 ans, n’est pas celui d’aujourd’hui. Les fautes et sanctions disciplinaires ont été clairement définies en 1996, puis 2000, par le droit de se faire assister par un avocat.
Tout cela est régi par le Code de Procédure Pénale (CPP) et le règlement intérieur de l’établissement.
En fait, l’administration pénitentiaire concentre toute son énergie sur sa mission de « garde », au risque de négliger sa mission de « réinsertion des condamnés » et de la « présomption d’innocence » des prévenus.
Ceci peut s’expliquer par le fait que le chef d’établissement et son personnel peuvent être « disciplinairement » responsables des incidents, accident, évasions, imputables à leur négligence et/ou à l’inobservation des règlements.

A suivre sur le blog

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