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La Vie en prison... vue de "dedans" - Paul Denis

(2006) Blog 22 Remises de peines...

Mise en ligne : 17 octobre 2006

Texte de l'article :

Remises de peines...

1019 Jours de détention... en Centre de détention
Extrait de la correspondance adressée à ma fille, pour lui présenter mes conditions de détention et mon « nouveau » cadre de vie 

...
En ce qui concerne le récent repérage de ta cellule que nous avons effectué en repartant lors de notre dernière visite, je trouve ça vraiment bien. C’est à la fois amusant et bizarre de te voir comme ça de si loin, mais en même temps de savoir avec certitude que cette serviette blanche au loin, c’est bien toi et que cette voiture au milieu de la route, c’est bien nous. Je trouve cela vraiment chouette.
Bien, je me permets maintenant de revenir sur tes écrits avant d’achever cette lettre.
Pour ce qui est de tes menus, force m’est de constater qu’au moins, ils ont l’air équilibrés, même sans être formidables.
En plus, tu peux cantiner pour les petits extras, ce qui te permet de te faire un peu plaisir quand le cœur t’en dit.
Mine de rien, il faut voir le côté positif de ton incarcération, à savoir que tu auras, enfin, pu effectuer un « régime » efficace qui te permet de perdre les kilos que tu trouvais superflus...
...

Ma destinée :

Contrairement aux apparences, un « Centre de détention » a pour mission et est un lieu où tout est mis (en théorie) en place, en vue de la « réinsertion », donc le retour à la vie libre.
Même si tu n’oses pas me le demander, ton silence me fait comprendre que tu souhaites être « informés » sur ce qui m’attend et surtout sur ma date de libération...
Mais, en fait, pour moi, la date de ce retour est particulièrement « floue », car, il y a encore plusieurs incertitudes et les démarches entreprises feront changer les données ci-dessous :
donc, voici, « le pire » : j’ai été condamné à 30 mois de prison + 10 + 18 (révocation d’un sursis).
Il est vrai que cette peine de 58 mois est tout à fait théorique. En effet, nous pouvons bénéficier de « grâces » et de « remises de peines » (RP), ce qui d’ailleurs a déjà été mon cas.

En théorie, le décompte de grâce est le suivant : 7 jours par mois, restant à effectuer avec des plafonds : grâce présidentielle : 4 mois pour le 14 juillet, RP : 3 mois par année de présence (faite), RPS : 2 mois par année (maximum), au bout de la 2ème année. Si l’année n’est pas complète, il faut compter par mois : RP : 7 jours/mois, RPS : 2 jours/mois, en sachant que les RP sont « systématiques », en cas de « bonne conduite », les RPS sont un peu à la tête du « client » et dépendent de l’administration pénitentiaire et du JAP (Juge d’Application des Peines).

(Depuis le 1er janvier 2005, (loi Perben II, du 9 mars 2004) ce décompte a changé, de plus, il a lieu dès que la condamnation est connue. Pour vous informer, je vous donne ces changements, en fin de ce paragraphe).

Ainsi, j’ai déjà bénéficié d’une diminution du temps de peines (avec le jeu des grâces et RP et RPS) qui ramène ma fin de peine au 13/10/05.
Mais je peux encore bénéficier de grâces qui peuvent ramener cette date finale « au mieux » au 31/07/04.
Et ce, en admettant qu’aucune des démarches entreprises n’aboutisse.
Voilà la théorie, et cela dans le pire scénario, en sachant, cependant que mon attitude doit être « correcte », pour les RP et RPS.
Là, je t’ai donné le scénario « catastrophe ».

Pour les aménagements de peines, « libération conditionnelle » et « semi-liberté » - ces deux aménagements nécessitent les mêmes conditions : avoir un hébergement et un « travail » - CDI ou CDD pour la période théorique restant à faire. En « semi-liberté », il faut aller dormir en prison, en semaine, et, il ne doit pas rester plus de 12 mois théoriques à faire. Ces mesures sont assujetties à l’accord du JAP et sous son contrôle... - il faut être à mi-peine + mi-grâce, je te passe le calcul assez difficile à déterminer, car il ne faut tenir compte, en théorie, que des grâces « signées » ; mais en pratique, le JAP considère (souvent), la mi-peine, mi-grâce « acquises ». Et pour moi, cette date serait le 14/08/03.
Ce qui veut dire que, toujours en théorie, avec 58 mois « ferme », je pourrais être « dehors » à la mi-août de cette année.
Je dois dire au pire (au mieux) parce que cette date tient compte de 58 mois de condamnation, alors que je pense que nous sommes « en droit » d’obtenir, d’une part, la non-révocation du sursis de 18 mois et/ou, d’autre part, d’une confusion de peines entre ces trois peines, ce qui pourrait donner : minimum 30 mois ou 40 mois ou 48 mois... et tous les calculs seraient à refaire.
Nous avons entrepris ces deux démarches qui devraient aboutir dans un délai de 4 à 6 mois.
Et celles-ci, avec un résultat positif total et partiel, sont cumulables avec les aménagements de peines. Ce qui veut dire qu’en théorie (toujours), je pourrais déjà être « dehors ».
A travers ce raisonnement, j’ai essayé d’être le plus clair possible, tu comprendras que le « flou » évoqué en début de propos n’est pas superflu.
Mais sois certaine que moi-même et mon avocat, faisons le maximum pour que cette fin de « captivité » puisse avoir lieu, le plus tôt possible, et ce, dans les meilleures, les moins contraignantes conditions possibles.

Nota : Depuis le 1er janvier 2005, il est désormais accordé à tout condamné un crédit de réduction de peine : RPO (Remise de peines ordinaires).
Dès la mise à l’écrou (entrée en prison), ou dès la mise à exécution de la peine (après le jugement et tous les recours possibles), pour les personnes déjà détenues, ce crédit est calculé sur la base de la condamnation prononcée (c’est le greffe qui informe le détenu) : soit 3 mois pour la 1ère année de détention, 2 mois pour les années suivantes, 7 jours par mois pour une année incomplète.
RPS (Remise de peines supplémentaires) : elle reste prononcée par le JAP, annuellement : primaire : maxi 3 mois ou 7 jours par mois pour une année incomplète. Détenu en récidive légale : 2 mois par année ou 4 jours par mois pour une année incomplète.

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