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La Vie en prison... vue de "dedans" - Paul Denis

(2006) Blog 14 Anniversaire

Mise en ligne : 9 octobre 2006

Texte de l'article :

Anniversaire

1019 Jours de détention... en Maison d’Arrêt
Extrait de la correspondance adressée à ma fille, pour lui présenter mes conditions de détention et mon « nouveau » cadre de vie 

Un an déjà, ou, douze mois seulement...

Tous les anniversaires sont-ils à souhaiter ?

En tous cas, pour mon premier anniversaire en prison, je tiens à te faire un petit bilan, ne serait ce que pour t’expliquer et te faire comprendre que dans chaque situation difficile, on peut y trouver le bien que l’on veut y mettre.

En ce jour anniversaire, j’ai envie de faire un petit point sur ma situation actuelle.
Si ma situation était exceptionnelle, je pourrais me révolter, mais crois-moi, je constate et j’ai connaissance de situations vraiment plus critiques et irréalistes que la mienne, que la nôtre.
Néanmoins, il est bien clair que mon souhait le plus cher (fort) et le plus réel est de sortir d’ici, au plus tôt afin qu’il me soit possible de rejoindre les miens et nos amis, et je fais et ferai tout ce qui est en mon pouvoir pour réduire ce temps de « captivité ».
Comme tu le comprends facilement, l’essentiel, ici, est de savoir « occuper » son temps.
Pour ma part, j’ai, à ce jour, eu un parcours sans faute : au début, la vie collective (à 3), pour s’adapter et prendre le temps de faire le point sur soi-même et sur mon affaire.
Après 4 mois et alors que l’inutilité de mon temps, l’ennui et le désœuvrement commençaient à se faire sentir, cet emploi d’écrivain m’est proposé avec d’autres conditions intellectuelles et matérielles de vie.
Au niveau « travail », bien sûr, aucune difficulté particulière, mais, à chaque instant, l’impression d’être utile et de rendre service.

Souvent, après coup, la satisfaction d’avoir été, d’être celui qui a permis à tel de mes co-détenus, de mieux se sentir et de répondre à ses attentes. Il est vrai que je ne fais aucun effort pour m’impliquer d’une manière ou d’une autre dans leur « affaire ». J’aide, je m’investis, je retranscris leurs souhaits et m’efforce (sans mal) à ne pas mémoriser le cas de chacun. Ainsi, je peux ne pas me sentir « complice » ou « participant », l’être rendrait ma vie mentale « insupportable », je le crains.
Comme tu le vois, j’essaie de passer au mieux cette épreuve, en faisant en sorte que ma présence n’y soit pas entièrement négative.

Si je devais analyser ma situation, je ne te dirais pas que mes nouvelles conditions matérielles de vie sont bonnes, mais pour le moins, au risque de choquer certains, je dirais qu’elles sont supportables.
Au niveau « matériel », le fait d’être seul, en cellule, m’a permis de m’isoler quelque peu et d’organiser un semblant de vie personnelle, et à aucun moment, je ne souffre de la solitude, ce qui ne m’empêche pas de m’ennuyer parfois...

Comme je le pense et il me plait de le dire maintenant : Ici, « la journée passe vite, mais les jours ne passent pas... ».

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