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(2005) ANVP Yannick Le Corre : visiteur de prison

Mise en ligne : 2 novembre 2006

Forum du 17/11/2005 avec Yannick Le Corre
(visiteur de prison à Bois-d’Arcy, administrateur de l’Association nationale des visiteurs de prison)

Texte de l'article :

question de : Internaute
> Pourquoi un DESS en sciences pénitentiaires quand on est bénévole, visiteur de prison ? Il me semble qu’un visiteur de prison n’est pas un auxiliaire de justice, mais une personne libre qui va à la rencontre de personnes incarcérées pour instaurer un dialogue.
Réponse > Il est exact qu’un visiteur de prison est une personne libre qui va à la rencontre d’une personne en détention pour instaurer un vrai dialogue, une vrai écoute, entre deux, à parité. Ceci étant, quand on arrive pour la 1e fois dans une maison d’arrêt venant de la société civile, on découvre un nouveau monde qui est le domaine de la justice et de la prison. J’estime que pour être un visiteur, il est nécessaire de se former. Ayant découvert par hasard l’existence de ce DESS au service de formation du personnel pénitenciaire de Bois d’Arcy, j’ai senti le besoin de me former en droit pénal et procédure pénale après 18 mois à 2 ans d’expérience de visiteur de prison. Il existe évidemment beaucoup d’autres formations plus légères quand on a moins de temps à y consacrer. Je tiens à rajouter que le visiteur de prison se positionne comme un partenaire associatif de l’administration pénitenciaire et absolument pas comme un auxiliaire de justice. Pour moi, le visiteur de prison est un citoyen libre qui rencontre un citoyen provisoirement en détention suite à une décision de justice, mais la rencontre ne concerne que les deux citoyens. 
 
question de : Internaute 
> Que pensez-vous de la réclusion criminelle à perpétuité ?
Réponse > Premièrement, les personnes que je rencontre sont dans une maison d’arrêt c’est-à-dire en détention préventive ou normalement condamné à des peines courtes. Ce qui n’empêche pas de visiter des personnes détenues déjà condamnées à des peines très lourdes voire à perpétuité. L’emprisonnement, même dans ce cas, doit être considéré comme devant déboucher sur un retour à la liberté. Historiquement, la réclusion criminelle à perpétuité avait été destinée à remplacer la peine de mort. Pour moi, la prison ne doit être qu’un passage. Le plus court possible. Afin de permettre aux personnes de renouer, dès que la justice l’estime possible, avec une vie dans la cité et en pouvant à terme bénéficier de tous les droits d’un homme libre.
Je rajoute qu’en plus de la réclusion criminelle à perpétuité, les condamnés sont extrêmement sensibles à l’ajout à la condamnation d’une mesure de sûreté qui peut aller jusqu’à 22 ans, durée pendant laquelle ils ne pourront bénéficier d’aucune sortie. Cette peine de sûreté est très traumatisante pour les personnes qui en font l’objet car ils ne peuvent rien entreprendre avant cette butée à laquelle ils ont été condamné. Je pense que la détention en prison dégrade la personne humaine et ne facilite pas son retour vers la liberté à l’expiration de la peine. 
 
question de : CYN 
> Quelles sont les conditions requises pour devenir visiteur de prison, et comment est-il possible de le devenir ?

Réponse > Les conditions à remplir sont de 3 sortes : être âgé de plus de 21 ans et de moins de 66 ans au moment de la demande ; ne pas avoir été condamné pour des faits contraires à la probité, aux moeurs et à l’honneur ; rendre l’engagement de respecter les réglements relatifs au fonctionnement des établissements pénitentiaires.
Avant de faire sa demande, je suggère que la personne intéressée essaye de rencontrer des visiteurs en exercice, soit auprès de l’établissement pénitentiaire où ils veulent être visiteur, soit en s’adressant à l’association nationale des visiteurs de prison. Lorsque la décision est prise, il faut adresser une demande au directeur de l’établissement et après enquête de gendarmerie, il y aura des entretiens d’évaluation en particulier avec le service pénitentiaire d’insertion et de probation (SPIP) qui est en charge de gérer les visiteurs de prison et leurs relations avec les détenus volontaires que le SPIP va leur désigner.
 
question de : Internaute 
> les cas de récidive apres un travail d’intérêt général sont-ils importants concernant les jeunes majeurs ?

Réponse > Je n’ai pas de statistique précise en tête. Mais les TIG, lorsqu’ils sont bien encadrés, sont une excellente mesure pour que les jeunes majeurs concernés se rendent compte de la nécessité d’une peine et surtout de l’utilité d’une certaine démarche de réparation via des travaux exécutés pour la collectivité. Cela est certainement très préférable au maintien en détention de ces jeunes majeurs. Les travailleurs sociaux et les éducateurs me paraissent souhaiter une extention de cette mesure de TGI qui n’est pas encore suffisamment utilisée en France. 
 
question de : jeanne (postée le 13/11/2005 à 14h58)
> Pourquoi les banlieues n’intéressent les médias qu’au moment où elles "craquent" ? Il s’y vit pourtant beaucoup de choses dignes d’intérêt dans le quotidien. Le parrallèle avec "le train qui n’arrive pas à l’heure" ne constituant pas à mes yeux une explication satisfaisante.
Réponse > Tout à fait d’accord avec votre remarque. 
 
question de : Internaute (postée le 14/11/2005 à 20h03)
> Casser le bien d’autrui, mettre la vie d’autrui en danger, être si excessif que les plus fragiles en meurent parfois..........Cela ne merite t il pas une obligation de TGI plus importante que "trafficoter" du cannabis ? vous me direz ce n’est pas le même rayon, mais le comportement des casseurs est des plus inadmissibles. Car si vous ne fumez pas, personne ne peut vous atteindre. Fumer de la MJ est un choix personnel et en toute connaissance de cause. Alors pourquoi faire faire plus de prison ou punir les uns et pas les autres ??

Réponse > C’est la justice, au nom du peuple français, qui décide des peines et en particulier des peines de prison. Ces peines sont quantifiées dans le code pénal à partir de lois votées par nos représentants, députés et sénateurs. Le TGI en charge d’une affaire cherche à évaluer en fonction de l’analyse des faits quelle peine est adaptée aux cas présentés au tribunal. 
 
question de : Internaute
> je suis un etudiant Tunisien,comment j’ai peut faire l’inscription à Gronoble

Réponse > De quelle inscription s’agit-il sur la ville de Grenoble ?
Merci de préciser.
 
question de : Internaute
> bonjour, je voulais savoir comment vous envisagez la prison de "demain", sous quelle forme ?Comment peut-on briser l’image extérieure que s’en est faite la société ?La prison ne doit-elle pas être plus "transparente" ?

Réponse > En France, tout le monde a peur de la prison. Et elle est reléguée loin des regards. Une manière de regarder l’amélioration de la prison française c’est d’observer ce qui est pratiqué dans un certain nombre de pays occidentaux. Je pense en particulier aux pays du Nord de l’Europe et au Canada. Pour que des réformes importantes puissent avoir lieu dans le sens d’une meilleure prison de demain, cela passe sans doute aussi par la création d’une loi pénitentiaire refondant la prison qui avait été très fortement réformée en 1945 par la réforme AMOR. Je crois que la prison de demain est une prison où il y a moins de prévenus et moins de condamnés. C’est-à-dire que la peine de prison ne doit pas être la peine principalement infligée aux délits et pas dans de telles quantités pour certain crime.
Le seul président de la République qui a visité des prisons était Giscard d’Estaing en 1974. Il avait à cette occasion indiqué que la peine de prison ne devait être que la privation de la liberté et rien d’autre. Il suffit de mettre dans les faits cette déclaration dans toutes les dimensions de l’incarcération pénale.
Il faut d’abord briser l’image de la prison que chacun d’entre nous avons. Et pour se faire, ne pas hésiter à se renseigner, y compris lors de la prochaine journée nationale des prisons qui aura lieu la semaine prochaine. Je rajoute que très peu d’hommes politiques et de représentants élus s’intéressent en profondeur à la question justice-prison et à faire que la France ne soit pas montré du doigt par le Conseil de l’Europe. 
 
question de : Internaute
> pourquoi quand un jeune de 18 ans restant en préventive pendant 1 an en attendant son jugement ne peut il pas bénéficier d’une formation professionnelle qui lui permettrait de se réinsérer + vite au lieu d’attendre sans rien faire (et donc de perdre son temps ) 

Réponse > C’est une très bonne question. Un effort important est fait dans les maisons d’arrêt pour les mineurs à l’aide d’éducateurs spécialisés et de la PJJ (protection judiciaire de la jeunesse). Lorsqu’il devient majeur à 18 ans, soit il a pu mettre en place avant sa majorité un projet de réinsertion et il continuera à être suivi par les éducateurs. Soit, à un moment donné s’il est considéré comme majeur "complet", il va se retrouver comme beaucoup trop de détenus avec peu de formation professionnelle compte tenu des multiples demandes qui existent.
Il me paraît très important que le temps en détention soit un temps qui puisse devenir utile pour la personne détenue, pour la formation (y compris apprendre à écrire et à lire), pour une activité professionnelle rémunérée dans un travail en atelier par exemple, pour des activités culturelles et sportives, afin de préparer le plus tôt possible la sortie de la détention et le retour à la société civile. La question de la formation est une des questions qui est mal résolue actuellement dans les prisons françaises. 
 
question de : skro
> courage a toutes les familles de detenus

Réponse > Oui courage à tous. Et aux familles, et aux détenus, et à tous ceux qui oeuvrent dans l’administration pénitentiaire et dans les associations pour ensemble traverser cette épreuve et améliorer dans le moyen terme les conditions de la justice et de l’incarcération. 
 
question de : etudiant 
> Comment percoivent ils la venue d’un visiteur externe au cercle familiale ou amicale ?
A quoi consiste votre rôle au sein de la prison en tant que visiteur ?

Réponse > La grande majorité des détenus que je visite n’ont pas de parloir extérieur familial. Lorsqu’ils ont la chance de recevoir la visite régulière de leur famille, ils apprécient également la recontre avec leur visiteur au parloir "avocats" car c’est la rencontre du monde extérieur via le visiteur et de la personne détenue par décision de justice.
Nous, visiteur, ne remplaçons ni la famille ni les amis, mais la régularité de nos visites aide les personnes détenues à faire face aux très nombreux problèmes qu’ils ont à résoudre pendant leur détention.
La mission du visiteur est décrite très précisément dans le code de procédure pénale. Le visiteur de prison apporte bénévolement aide et soutien aux détenus pendant leur incarcération afin de préparer leur réinsertion.
Pour moi mon rôle est la rencontre de deux citoyens, l’un qui a eu de la chance et qui est libre, l’autre qui a souvent eu un parcours très difficile, qui fait l’objet d’une détention provisoire ou d’une condamnation à une peine de prison, mais qui est un citoyen qui aspire à retrouver la liberté lorsqu’il aura "payé sa dette" c’est-à-dire effectué sa condamnation.
Mon rôle consiste à le rencontrer très régulièrement, en principe chaque semaine, pendant un temps significatif (de l’ordre de 45 minutes) et d’échanger à partir de ce qu’il vit ou de ce qu’il souhaite partager. 
 
question de : etudiant (postée le 17/11/2005 à 14h16)
> Quelles ont été vos motivations pour aborder le système pénitentiaire au niveau de vos études et votre implication dans l’association des visiteurs de prisons ?

Réponse > Etant ingénieur de formation et ayant effectué ma vie profesionnelle dans l’enteprise, j’ai considéré souhaitable de mieux comprendre de manière détaillée le système judiciaire et le système pénitentiaire français afin d’être plus apte à comprendre la situation des détenus que je visite. Et également, les difficultés que rencontre parfois l’administration pénitentiaire pour exécuter les décisions de la justice.
Je pense que tout visiteur de prison doit se former en permanence dans le domaine très vaste des très nombreuses disciplines interférant dans la vie en prison : comprendre le système judiciaire et le déroulement d’un procès, décrypter les nouvelles dispositions légales du type Perben II, découvrir les dimensions des maladies psychologiques et psychiatriques dont beaucoup de détenus présentent certains symptômes. De manière plus générale, avoir une vision claire des systèmes mis en place pour arriver à se situer soi-même et par rapport à l’administration pénitentiaire dans ce rôle de visiteur.
La démarche pour devenir visiteur est d’abord une démarche individuelle. Pour mieux décrypter le monde dans lequel on va agir, il est très utile de pouvoir rencontrer d’autres visiteurs afin d’échanger des expériences, se former à plusieurs, participer à des groupes de parole, s’informer par des conférences, etc. C’est le rôle de l’association nationale des visiteurs de prison qui est présente dans tous les établissements pénitentiaires français via des visiteurs adhérents de l’association. En principe, dans chaque établissement pénitentiaire est nommé par l’ANVP un correspondant des visiteurs qui fait l’interface avec la direction de l’établissement pénitentiaire et avec le chef du SPIP (service pénitentiaire d’insertion et de probation). Actuellement, je suis correspondant des visiteurs à la maison d’arrêt de Bois d’Arsy. Egalement membre de la section Yveline Haute Seine de l’ANVP qui organise des conférences et enfin, je participe au Conseil d’administration de l’ANVP dans le cadre d’un mandat de trois ans. L’ANVP cherche à faire connaître les visiteurs de prison et l’association partenaire reconnue par l’administration pénitentiaire et réfléchit en permanence aux actions nationales et locales "en vue d’aider moralement et matériellement les personnes détenues et leurs familles pendant la période de détention, et d’aider les personnes détenues à réussir leur réinsertion sociale lors de leur libération" (art. 1 des statuts de l’ANVP).
 
 question de : etudiant 
> bonjour, nous sommes étudiants en licence info com et dans le cadre d’un travail d’investigation, nous souhaiterions vous rencontrer pour aborder le thème de l’univers carcéral. à travers votre témoignage, connaissance et opinions, nous souhaiterions obtenir des informations pertinentes. "Le systeme carceral entre réussite et échec depuis l’abolition de la peine de mort"( nous avons formuler notre problématique ainsi) nous aborderons le coté législatif, la vie en prison et après la prison, les conditions de détention mais aussi la réinsertion et la récidive. 
> Je suis prêt à vous rencontrer. Merci de m’adresser un courrier ou un mail à l’ANVP. anvpparis@free.fr
 
question de : Internaute )
> Merci de bien vouloir m’indiquer le remède que vous proposez contre la surpopulation dans les prisons françaises

Réponse > Le remède a failli être voté il y a 2 ou 3 ans par les députés français. Lorsqu’il s’agissait de rendre obligatoire l’incarcération dans une cellule individuelle comme cela se pratique dans les centres de détention et les maisons centrales pour les condamnés à des peines de moyenne ou longue durée. Le remède passe par une volonté de tous de faire en sorte que la détention préventive dont la France est un des champions ne puisse être décidée que si les conditions de détention sont aux normes européennes. Ce qui n’est pas le cas aujourd’hui, compte tenu des surpopulations réelles dans toutes les maisons d’arrêt françaises.
Le remède, il est politique. Il faut un bulletin de vote d’abord. Puis la mise en oeuvre d’un programme où le droit doit être respecté dans la lettre et dans l’esprit : il existe de très nombreux rapports à ce sujet, y compris les recommandations faites par les sénateurs et par les députés dans le cadre de leurs deux commissions d’enquête des années 2000.
Je suggère aussi que les juges de siège qui prennent les décisions viennent voir eux-mêmes comment elles se traduisent dans l’espace et dans le temps, et pourquoi pas les juges d’instruction pour des détentions préventives d’une longueur surprenante. Heureusement, les juges d’application des peines sont présents dans les établissements pénitentiaires, mais ils interviennent après.
Un autre remède est de suivre les recommandations du Conseil de l’Europe. 
 
question de : Internaute
> ne pensez vous pas que la prison est partout maintenant dans notre société ? a savoir dans les cités par l’abscence de perspectives d’avenir et de paupérisationde de couches de plus en plus large de notre population ce qui hélas entraîne le passage a l’acte...et va t’on vers un clientélisme de la prison privée comme aux states ou pour une population de 260 milllions d’habitants il y a 2 millions de détenus ?

Réponse > Je fais une différence entre la peine de prison qui est une décision de la justice rendue au nom du peuple français et qui se traduit par une détention derrière des barreaux avec perte de beaucoup de libertés, et les cités des banlieues qui sont souvent décrites comme des ghettos c’est-à-dire des lieux dont on ne peut pas sortir et dont on ne peut pas s’émanciper. C’est une autre perspective d’absence d’avenir. Avec des risques grandissants de passages à l’acte alors que les référentiels de la démocratie républicaine n’ont pas été inculqué ni parfois ne sont pas respectés.
Je ne crois pas que l’augmentation des places de prison en France sont des facteurs de réinsertion. L’outil pénal actuel permet une gamme de peines autre que la prison ferme. La prison en France fabrique de la délinquance et déshumanise et infantilise les personnes détenues.
A mon avis, on ne peut pas faire un parallèle avec ce qui se passe aux USA et ce qui se passe en France ou en Europe. 
 
 question de : Internaute
> En quoi cela consiste-t-il d’être visiteur de prison ?
> Voir plus haut.
 
question de : rechercheinfo
> ya t’il quelque chose qui a retenu votre attention lors de cette visite ?

Réponse > De quelle visite parlez-vous ?
Si vous pensez à la visite périodique et régulière du visiteur et de la personne détenue, il s’agit d’une visite amicale entre deux personnes qui sont contentes de se retrouver. L’une racontant un peu ce qu’elle vit, et l’autre étant attentive aux difficultés qu’il peut vivre. C’est aussi pour le détenu une occasion de parler de ce qui se passe à l’extérieur à partir de la perception qu’il a via son poste de télévision. 
 
question de : Internaute
> Que vous a apporté cette visite, sur le plan humain ?

 Réponse > La rencontre du visiteur et de la personne détenue, toutes deux volontaires, apporte à chacun un enrichissement important, dans le cadre d’un échange en confiance. 
 
question de : Internaute 
> Quelle est l’importance des aumôneries de diverses confessions à la prison de Bois d’Arcy ?

Réponse > A Bois d’Arcy, il y a une aumônerie catholique avec une équipe d’une demi douzaine de personnes dont un prêtre, un diacre et une religieuse. Il y a une aumônerie protestante avec une équipe de 2 ou 3 personnes et un iman a été nommé et est agréé par l’administration pénitentiaire.
La rencontre culturelle hebdomadaire est perçue par certains détenus comme un moment très important, quelque soit les confessions ou les croyances. A titre d’exemple, pour l’instant, c’est le seul moment et endroit collectif où des détenus peuvent chanter ensemble et faire de la musique (guitare, percussions). C’est aussi un endroit où des musulmans vont prier. 
 
question de : Internaute 
> Tout le monde peut il avoir accès à une prison ? Ne pensez vous pas que la prison est perçue comme un système fermé fort marginalisé par la société et notamment par l’image véhiculée par les médias ?
Réponse > Non. Pour avoir accès à une prison, il faut avoir une autorisation de l’administration pénitentiaire dans un but précis : visite des familles, visiteur de prison, enseignement, aumônerie, formation professionnelle, etc.
Les lieux où l’on peut se rendre en prison sont généralement des lieux organisés pour permettre la rencontre de détenus et de tiers extérieurs type parloir famille, parloir avocats, salle de formation. A titre exceptionnel, certaines personnes sont autorisées à aller en détention, en particulier les aumôniers qui peuvent rencontrer les détenus dans leurs cellules.
La prison est effectivement un système fermé fortement marginalisé car il nous fait peur à tous. D’où l’importance d’essayer de s’informer pour sortir de cette image qui ne fait qu’exclure encore plus les personnes condamnées à des peines de prison et leurs familles. 
 
question de : etudiant 
> Vous dites qu’"Historiquement, la réclusion criminelle à perpétuité avait été destinée à remplacer la peine de mort" qu’en pensez vous ?

Réponse > Je crois fermement en l’homme et en tout homme. Donc le but de la société ne doit pas être de condamner à une mort lente par emprisonnement perpétuel. Il faut essayer de redonner sa chance à chacun même si une très petite minorité de gens en prison est considérée comme potentiellement dangeureuse et potentiellement récidiviste. D’où les précautions que prend la justice pour les mesures en fin de peine. 
 
question de : etudiant
> Quelles ont été vos motivations pour aborder le système pénitentiaire au niveau de vos études et votre implication dans l’association des visiteurs de prisons ?
Réponse > Voir plus haut.
 
question de : etudiant
> Ne pensez vous pas que l’on devrait rendre plus accessible la prison aux demandeurs de visite ? 

Réponse > Je comprend qu’il s’agit de demande de visite de la part de familles ou d’amis et non pas de demande de visite d’intervenants, car pour ces derniers la prison est accessible dans le cadre des procédures mises en place.
Ces visites de familles ou d’amis nécessitent la mise en place d’organisations adaptées afin que toute famille puisse mettre en oeuvre son droit de visite. Les associations qui s’occupent de l’accueil des familles soulignent souvent la difficulté d’accès des lieux pénitentiaires par des moyens de transports en commun et les contraintes horaires dues à la durée des visites elles-même. Ces conditions sont précisées pour chaque établissement pénitentiaire et chaque type d’établissement : maison d’arrêt, centre de détention, maison centrale. 
 
question de : Internaute 
> ne trouvez-vous pas normal qu’on ne parle pas des 120 detenus en moyenne suicidee ou morts suspecte chaque annee en prison 
Réponse > Le problème des suicides en prison ou des morts suspectes est un problème majeur auquel les différents acteurs, à commencer par la Justice, l’administration pénitentiaire et les services médicaux et psychiatriques, sont très attentifs. Des dispositions ont été renforcées il y a quelques mois suite à un rapport sur les trop nombreux suicides en prison. On en parle dans les milieux spécialisés. Et tout intervenant en milieu pénitentiaire a le souci d’essayer de détecter d’éventuels symptômes de tendance suicidaire. En tant que visiteur, nous essayons de nous informer et de nous former pour aider à prévenir des situations sensibles. 
 
question de : etudiant (postée le 17/11/2005 à 15h14)
> Comment s’organise cette prison ? cellules/prisonniers---classement
Qui détient le pouvoir en prison ? Ordre hiérarchique
Comment percoivent ils la venue d’un visiteur externe au cercle familiale ou amicale ?
A quoi consiste votre rôle au sein de la prison en tant que visiteur ?
Réponse > La prison où je suis visiteur est la maison d’arrêt de Bois d’Arcy. Une maison d’arrêt est un établissement pénitentiaire pour la détention préventive (avant le procès) ou l’exécution d’une courte peine de prison (en principe moins d’un an). Il existe en général une maison d’arrêt par département. Celle de Bois d’Arcy est celle du département des Yvelines. 
 
 question de : Internaute (postée le 17/11/2005 à 15h18)
> Bonjour et bravo pour votre DESS, à quoi sert-il ce diplôme ? Qule est le programme ? 

Réponse > Les personnes qui s’inscrivent à ce DESS sont pour moitié des fonctionnaires de l’administration pénitentiaire et pour moitié des acteurs professionnels ou associatifs agissant en milieu carcéral : avocats, éducateurs spécialisés, infirmiers, etc.
Ce DESS sert généralement à obtenir une connaissance horizontale assez approfondie des différentes disciplines concourant à la vie pénitentiaire. Il permet de préparer d’autres examens et d’autres concours pour progresser dans l’administration pénitentiaire.
On peut se procurer le programme au centre de formation permanente de l’université Panthéon-Assas Paris 2, rue de Vaugirard.
 
 question de : Internaute 
> Est-ce une sorte de vocation d’être visiteur et choisis t-on ses visites ? Acceptez-vous de rencontrer des violeurs ou pédophiles ? Merci

Réponse > Devenir visiteur de prison est pour moi un choix citoyen permettant de maintenir un lien entre deux mondes. Celui de la liberté et celui de l’enfermement. Le détenu ne choisit pas son visteur et le visiteur ne choisit pas les détenus qu’on lui demande de rencontrer. La procédure est la suivante : le détenu fait une demande écrite au SPIP (service pénitentiaire d’insertion et de probation), le SPIP attribuera cette demande à un visiteur qu’il sélectionnera parmi les visiteurs agréés. J’accepte de rencontrer toutes les peronnes qui me sont indiquées sans aucune exception. Lorsque je les rencontre pour la première fois, je ne connais que leur nom, prénom et numéro de matricule, et ne souhaite rien connaître d’autre avant notre première rencontre puisque le détenu ne connaît que mon nom et mon prénom quand je me présente à lui. Ensuite, on ne pose jamais de question au détenu. C’est à lui de choisir ce dont il souhaite nous parler. 
 
question de : Internaute 
> 4 ans et demie de préventive en maison d’arrêt avant le jugement pour braquage, pui sseulement reconnu coupable du repérage des lieux, 7 ans ferme ... la justice a t’elle pas la main lourde pour les jeunes de banlieue ? pensez-vs que les peines st distribuées pareilles pr nous et les jeunes des quartiers mieux lotis on dira ... ? votre confirme ou infirme t’elle ce sentiment que je partage avec pas mal de gars içi

Réponse > Je suis d’accord avec vous. Je dis très souvent que la prison est faite pour les pauvres et que lorsqu’on est riche, qu’on peut payer un très bon avocat , statistiquement on s’en sortira mieux que si on est seul, sans argent et d’une banlieue difficile. Je constate que la détention préventive en maison d’arrêt avant le procès est une période très difficile et 4 ans et demi de préventive, c’est un scandale pour moi. Je remarque aussi, mais ce n’est pas lié aux banlieues, que les juges sont très sensibles à des actes de récidive car il y a quelques années les juges me paraissent avoir été interpellés par l’opinion publique au sujet des récidivistes.
Dans la période actuelle, ils ont tendance à appliquer plus strictement le code pénal en vigueur.
Je partage avec vous et avec les gens dont vous me parlez votre opinion.
 
question de : Internaute 
> Que pensez vous d’internet dans les prisons ? Ca pourrait exister ? 

Réponse > Je pense que le temps d’incarcération doit être utilisé pour former les personnes détenues à l’usage de l’informatique et de la bureautique. Car ils en auront besoin pour trouver du travail. Le problème d’Internet en prison est le problème de la sûreté informatique et de l’enfermement. Je fais une différence entre Internet et Intranet. J’espère que dans certaines conditions une solution acceptée par l’administration pénitentiaire permettra aux personnes détenues d’avoir accès à une informatique de communication interne et peut-être externe. 
 
question de : Internaute
> bonjour,
aux Etats-Unis, le fait que des femmes aient pu accèder à des postes de surveillantes dans des quartiers masculins a induit l’élaboration de lois censées les protéger mais remettant en question certains besoins fondamentaux (interdiction de magazines erotiques dans certains états) et la dignité des détenus (la fouille des détenus de sexe masculin peut parfois être effectuée par une personne de sexe opposée)
pensez vous que de tels excès menacent les prisons françaises ?
d’avance merci

Réponse > A la maison d’arrêt de Bois d’Arcy, des surveillantes travaillent en détention. L’administration pénitentiaire a adapté ses règles à la présence de personnel féminin, en particulier pour la fouille. Je ne pense pas que les excès que vous mentionnez menacent les prisons françaises. 
 
question de : Internaute
> Vous êtes pour ou contre la réclusion criminelle à perpétuité (votre précédente réponse à ce sujet ne m’a pas satisfaite) ?
Réponse > Je suis contre la vraie peine de réclusion criminelle à perpétuité. Je croyais l’avoir fait comprendre.
 
question de : Internaute
> Etes vous pour ou contre la réclusion à perpétuité ?
Réponse > Voir au-dessus.
 
question de : Internaute
> Bonjour, Pensez vous que le suivi socio-éducatif permette d’insérer dans la société un sortant de prison ? OLIVIER ASSISTANT SOCIAL STAGIAIRE DANS UN SPIP
Réponse > Oui c’est un élément indispensable pour permettre une réinsertion. Parfois il n’est peut-être pas seul suffisant et je pense que dans un avenir proche une collaboration renforcée entre les SPIP en milieu ouvert, les travailleurs sociaux et les associations de réinsertion est indispensable.
 
question de : etudiant 
> comment est choisi le détenu que vous rencontrez lors de vos visites ? en quoi est ce celui ci et pas un autre ...
Réponse > Je ne le choisis pas. Il est choisi par le SPIP.
 
question de : Internaute 
> Acceptez-vous de continuer à rencontrer une personne au sujet de laquelle vous avez le sentiment qu’elle refuse toute démarche de réinsertion ?

Réponse > Oui, j’accepte de la rencontrer pendant toute la durée de sa détention à la maison d’arrêt.
 
question de : Internaute
> Je suis visiteuse de prison. Dans vos réponses vous dites souvent "détenus". En ce qui me concerne, je rencontre des personnes. Ces personnes sont incarcérées, mais ne sont pas réductibles à leurs actes. De même, je ne parle jamais de "pédophiles", mais de personnes ayant commis des actes de pédophilie, c’est certes plus long, mais cela correspond à ma démarche : aller à la rencontre de personnes et dialoguer avec elles. Parler de "détenus" est pour moi une forme d’étiquettage et ne met pas en avant la notion d’égalité dans la relation. Qu’en pensez-vous ?

Réponse > Tout à fait d’accord. Pour moi il n’y a que des personnes. Malheureusement pour des raisons de réponses au clavier j’ai utilisé un raccourci que je n’utilise généralement jamais. 
 
question de : etudiant 
> L’ANVP cherche à faire connaître les visiteurs de prison et l’association partenaire reconnues par l’administration pénitentiaire et réfléchit en permanence aux actions nationales et locales "en vue d’aider moralement et matériellement les personnes détenues et leurs familles pendant la période de détention, et d’aider les détenues à réussir leur réinsertion sociale lors de leur libération"
Cette association a donc de réelles engagements auprès des prisonniers mais arrive t elle réellement à atteindre ces objectifs ? Les détenus ne rencontrent ils pas des difficultés de reinsertion telles que l’association ne soit pas en mesure de remplir ses engagements jusqu"au bout ?

Réponse > Ses objectifs sont des objectifs. Tous les détenus qui sortent rencontrent des difficultés de réinsertion. Et toutes les associations qui s’occupent de la sortie des détenus n’arrivent jamais à faire tout ce qu’elles souhaiteraient faire. 
 
question de : Internaute 
> quand se déroulent exactement les journées nationales de la prison ?merci
Réponse > Voir les différents sites sur le web, en particulier le site de l’ANVP.
 
question de : Internaute 
> bonjour, je suis en train de faire un mémoire sur l’architecture pénitentiaire et son devenir. je voulais savoir si je pouvais vous rencontrer pour en discuter avec vous.merci

Réponse > Eventuellement. Envoyez votre message à l’ANVP.
 
question de : Internaute 
> Il est faut de dire qu’"historiquement, la réclusion criminelle à perpétuité a remplacé la peine de mort". Cf. les écrits de Robert Badinter.

Réponse > Je fais toute confiance à Robert Badinter.
 
question de : Internaute
> Il ne faut pas parler de "détention préventive" mais de "détention provisoire". A quoi cela sert-il d’avoir un DESS en sciences pénitentiaires ?

> Tout à fait d’accord.
Merci à tous ceux qui ont posé des questions. La justice et la prison sont des thèmes importants. Plus je rencontre des personnes détenues et plus je trouve que beaucoup de fonctionnaires et de membres d’associations travaillent pour l’amélioration de la détention. Mais le chemin qui nous reste à faire pour rejoindre les nations évoluées en matière de détention (Canada, Suède) est immense. Il faut que des décisions politiques soient prises et que des moyens complémentaires soient mis en oeuvre. Y compris dans les associations.
Très bon courage à tous. 
 
Source : Nouvel Obs