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D04 Les transfèrements internationaux

Mise en ligne : 12 mai 2005

Dernière modification : 6 avril 2008

Constatant que les difficultés de communication et l’absence de contact avec la famille peuvent nuire à la réinsertion des détenus étrangers, la Convention de Strasbourg sur le transfèrement des personnes condamnées permet aux condamnés détenus dans un pays étranger d’être transférés dans leur pays afin d’y purger leur peine. A côté de cette convention qui lie les Etats du Conseil de l’Europe, des traités ayant le même objet ont été conclus entre la France et de nombreux pays. Les règles applicables varient donc en fonction des pays concernés. Il ne sera fait état ici que de celles prévues par la Convention du Conseil de l’Europe.

Texte de l'article :

458 Qui peut demander le transfèrement dans son pays d’origine ?
Un transfèrement international peut être demandé par le condamné, par l’Etat dans lequel la condamnation a été prononcée (Etat de condamnation) ou par l’Etat dont le condamné est ressortissant (Etat d’exécution). En toute hypothèse, le transfèrement est subordonné au consentement de ces deux Etats, comme de celui du condamné. Lorsque le condamné a exprimé le souhait d’être transféré, l’Etat de condamnation doit en informer l’Etat d’exécution le plus tôt possible après que le jugement est devenu définitif. Il doit alors lui communiquer certaines informations : nom, date, lieu de naissance du condamné, exposé des faits ayant entraîné la condamnation, nature, durée et date du début de la condamnation, copie certifiée conforme du jugement et des dispositions légales appliquées, déclaration de consentement du condamné au transfèrement, rapports médicaux ou sociaux sur le condamné. Les demandes de transfèrement doivent être formulées par écrit et doivent être adressées par le ministère de la Justice de l’Etat requérant au ministère de la Justice de l’Etat requis. Les réponses sont communiquées par les mêmes voies. L’Etat requis doit informer l’Etat requérant dans les plus brefs délais de sa décision d’accepter ou de refuser le transfèrement demandé.
Articles 2, 4, 5 et 6 de la Convention sur le transfèrement des personnes condamnées du 21 mars 1983

459 Quelles sont les conditions pour un transfèrement dans le pays d’origine ?
En premier lieu, le condamné doit être ressortissant du pays où il purgera sa peine. Le jugement prononcé doit être définitif, et la durée de la peine restant à subir doit être au moins de six mois à la date de réception de la demande de transfèrement (sauf cas exceptionnels), ou bien indéterminée. Par ailleurs, le condamné ou son représentant doit consentir au transfèrement. L’infraction ayant donné lieu à la condamnation doit constituer une infraction pénale au regard du droit de l’Etat dont le condamné est ressortissant. Enfin, l’Etat de condamnation et l’Etat d’exécution doivent s’être mis d’accord sur ce transfèrement.
Article 3 de la Convention sur le transfèrement des personnes condamnées du 21 mars 1983

460 Quelle sera la peine à purger après le transfèrement ?
L’Etat d’exécution a l’obligation de donner effet à la décision de condamnation. Il a le choix entre reprendre l’exécution de la condamnation, ou convertir la condamnation en une décision nationale. En cas de poursuite de l’exécution de la condamnation, la durée maximale de la peine à subir après le transfèrement correspondra à la durée de la peine initiale restant à purger, les réductions de peine accordées par l’Etat de condamnation étant acquises pour le détenu. Toutefois, si la nature ou la durée de cette sanction sont incompatibles avec la législation de l’Etat d’exécution, celui-ci peut l’adapter à la peine ou à la mesure prévue par sa propre loi pour des infractions de même nature, la peine résultante ne pouvant toutefois être ni plus longue ni plus sévère que la peine initiale. L’autorité compétente pour convertir la condamnation ne pourra pas revenir su la constatation des faits figurant dans le jugement prononcé dans l’Etat de condamnation. Elle ne pourra pas non plus convertir une sanction privative de liberté en une sanction pécuniaire. Elle déduira obligatoirement la période de privation de liberté déjà subie par le condamné. Enfin, elle n’aggravera pas la situation pénale du condamné et sera liée par la sanction minimale éventuelle prévue par la législation de l’Etat d’exécution pour l’infraction commise.
Articles 9 à 11 de la Convention sur le transfèrement des personnes condamnées du 21 mars 1983

461 A quelle procédure le transfert de français détenus à l’étranger est-il soumis ?
Le ressortissant français détenu à l’étranger doit former une demande en vue de son transfèrement. S’il présente sa requête auprès de l’Etat de condamnation, il lui est recommandé d’en informer simultanément le ministre français de la Justice, afin d’accélérer le traitement de sa demande. Dès son arrivée sur le sol français, le condamné est présenté au procureur de la République du lieu d’arrivée. Celui-ci procède à son contrôle d’identité et dresse un procès-verbal. Si l’interrogatoire ne peut être immédiat, le condamné est conduit à la maison d’arrêt la plus proche où il ne peut être détenu plus de 24 heures. A l’expiration de ce délai, il est conduit d’office devant le procureur de la République par les soins du chef d’établissement. Au vu des pièces constatant l’accord des Etats sur le transfèrement et le consentement du détenu, ainsi que du jugement étranger de condamnation, le procureur requiert l’incarcération immédiate du condamné.
Article 728-3 du Code de procédure pénale

462 Comment les autorités françaises déterminent-elles la peine restant à purger ?
Il appartient au procureur de la République du lieu d’arrivée de déterminer la peine restant à subir, pour en prescrire l’exécution. Le principe est que la peine prononcée à l’étranger est directement et immédiatement exécutoire sur le territoire français pour la partie qui restait à subir à l’étranger, les délais de transfèrements étant intégralement pris en compte. Toutefois, lorsque la peine prononcée est, par sa nature ou sa durée, plus rigoureuse que celle prévue par la loi française pour les mêmes faits, le procureur de la République ou le condamné peuvent saisir le tribunal correctionnel du lieu de détention. Le tribunal correctionnel statue en audience publique, après avoir entendu le ministère public, le condamné et, le cas échéant, son avocat. Si la peine prononcée à l’étrangler est incompatible avec le droit français, le tribunal lui substitue la peine la plus proche au regard de la législation interne ou réduit cette peine au maximum légalement applicable. Ainsi, lorsque la peine prononcée à l’étranger est de cinq ans de réclusion criminelle, alors que la peine maximale encourue en droit français pour les mêmes faits est de trois ans d’emprisonnement, cette dernière peine est substituée à la première. En aucun cas, le tribunal ne peut aggraver la situation du condamné. La durée de la peine ramenée à exécution ne peut donc excéder la durée de la peine qui restait à subir avant adaptation. En outre, le tribunal ne peut aggraver la peine en retenant un état de récidive, pas plus que l’assortir d’une période de sécurité. En revanche, si la peine prononcée à l’étranger réprimait des faits multiples, le tribunal doit procéder à une réduction de sa durée au maximum prévu pour l’infraction la plus sévèrement réprimée dans le Code pénal français. Par la suite, les modalités d’application de la peine seront régies par la loi française, le condamné pouvant bénéficié des mesures d’aménagement de peine de droit commun. Aucune poursuite pénale ne peut être engagée et aucune sentence ne peut être exécutée pour les mêmes faits contre un condamné qui exécute en France une peine privative de liberté prononcée par une juridiction étrangère.
Articles 728-2, 728-4 à 728-9 du Code de procédure pénale, circulaire CRIM 85-20 du 15 octobre 1985

463 Quelle est la procédure en cas de demande de transfèrement international formée par un détenu étranger incarcéré en France ?
Le chef d’établissement doit informer les condamnés susceptibles de bénéficier des dispositions d’une convention de transfèrement. Le détenu peut adresser une demande de transfèrement auprès des autorités - notamment diplomatiques ou consulaires - de son pays, ou présenter sa requête auprès du chef d’établissement. Il lui est recommandé d’effectuer sa demande auprès du greffe de l’établissement et d’en informer parallèlement les autorités de l’Etat dont il est ressortissant. En tout état de cause, le chef d’établissement se doit également d’informer le consulat concerné et de faciliter la venue des agents consulaires qui souhaiteraient rencontre le détenu. Il doit par ailleurs constituer un dossier concernant la requête du détenu, paraphée par le juge de l’application des peines, une copie de la fiche pénale, du réquisitoire et de la décision de condamnation. Le dossier doit également contenir toutes les informations relatives aux condamnations pécuniaires infligées au détenu. La demande est ensuite instruite par le bureau de l’entraide pénale internationale au sein de la Direction des affaires criminelles et des grâces du ministère de la Justice. Le non-paiement d’une condamnation pécuniaire peut influer défavorablement dans l’appréciation portée par l’administration française sur le bien-fondé de la demande. Le refus opposé par le ministre français de la Justice peut faire l’objet d’un recours devant le tribunal administratif.
Circulaire AP 86-10-GI1 du 24 février 1986, Cour administrative d’appel de Paris (arrêt Belin), 16 février 1999

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