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Réponse de la Companie à Reda Sadki, Survivre au Sida

Mise en ligne : 8 février 2004

Texte de l'article :

Les accusations intempestives (1) et les insultes proférées et répandues sur le net (2) par monsieur Reda Sadki (3) (Survivre au sida) envers le film de Alain Moreau, envers les invités (Sandrine Musso et Kemal Cherabi) et l’équipe de la compagnie, m’obligent à dire ici quelques mots sur ce film, sur la raison de son choix assumé.

Il faut d’abord rappeler que Alain Moreau a animé pendant des années un atelier vidéo à l’intérieur de la prison de la Santé (4) : il a notemment proposé sous le nom de « télérencontres » une série de lettres vidéo entre l’intérieur et l’extérieur, entre les détenus et des personnes qui sont en dehors de la prison, rendant ainsi possible une communication malgré la clôture de l’espace. Ce travail a été partout salué pour son audace, pour la qualité des relations humaines et des propositions esthétiques où des détenus ont pu prendre la parole, s’approprier le médium vidéo pour exprimer les conditions de leur vie. Dans la compilation des télérencontres, une vidéolettre a été plus particulièrement remarquée, celle de Quentin qui témoigne sur sa séropositivité. Le risque de discrimination auquel Quentin s’expose en prenant la parole en tant que détenu séropositif est analysé par celui qui parle de telle façon que quelque chose est dépassé : la parole a été rendu possible par une approche qui préserve la fragilité de l’autre, qui ne lui porte pas atteinte, et qui donne en même temps tout son sens politique à la prise de parole en tant qu’elle expose, qu’elle engage ceux à qui elle s’adresse dans l’espace public de la vidéo. Cette vidéo est un témoignage d’une force rare et courageuse. Cette vidéo sera montrée le 13 février à la compagnie (5).

Le film Sida sauf votre respect financé par le ministère de la Santé est venu répondre à une absence d’outils de prévention et de sensibilisation en direction des personnes issues de l’immigration maghrébine (6). Le dispositif du film repose sur un montage subtil (7) de divers témoignages en français et en arabe qui se répondent, se complètent : sur dix témoignages, quatre émanent de détenus.

Monsieur Reda Sadki accuse Alain Moreau d’exploiter les détenus, de profiter de leur condition pour les obliger à parler du sida (8). D’abord c’est ignorer que seulement quatre personnes sur les dix étaient détenues (9). Ensuite, Monsieur Reda Sadki prétend que Alain Moreau cherche à occulter la dimension de l’épidémie en prison (10). N’est-ce pas injuste de la part de Reda Sadki de demander à un film qui s’adresse à la "communauté" maghrébine de se centrer sur le problème du sida en prison (11) ?

Comment Reda Sadki peut-il dire qu’Alain Moreau occulte le problème du sida en prison alors qu’Alain Moreau, dans le cadre des « télérencontres » a traité le sujet en lui donnant une visibilité publique (12) ?

Il y a une façon de contourner, de détourner les propos et les orientations de l’autre qui n’est pas loyale et qui sème une confusion qui nous paraît improductive (13). Je demande aussi à ceux qui n’aurait pas vu le film de Alain Moreau de ne pas le juger sans l’avoir vu (copie disponible dans tous les CRIPS) (14).

J’invite ensuite les diverses personnes ayant été interpellées par Réda Sadki à notre propos, à consulter attentivement son site où figurent de nombreuses mises en accusations que nous jugeons à caractère homophobe et raciste (15).

La non-crédibilité de Reda Sadki apparaîtra d’elle-même (16).

Paul-Emmanuel Odin

vendredi 6 février, à 19h SEANCE 4 : Les enjeux de l’épidémie en Afrique et plus particulièrement dans le Maghreb. Sandrine Musso, anthropologue, Institut de médecine et d’épidémiologie africaine, et Kémal Chérabi, médecin, Institut de médecine et d’épidémiologie africaine.

Alain MOREAU Sida sauf votre respect 1995 - vidéo - couleur - 25’ - français et arabe Une dizaine de personnes maghrébines, de la première et de la seconde génération, d’usage et de milieux différents, vivant en France, parlent du sida et des problèmes de communication qui entourent la maladie et sa prévention.

Commentaires de Survivre au Sida

(1) Il y a eu un premier communiqué, lorsque nous avons pris contact avec la compagnie pour les informer, et un deuxième communiqué suite à sa décision de maintenir la programmation et de soutenir le discours tenu par Le sida... sauf votre respect.

(2) Paul-Emmanuel Odin m’impute des « insultes » sans en apporter la preuve. Cela s’appelle de la diffamation.

(3) En m’attaquant personnellement, M. Odin méprise le fait que le travail de Survivre au sida est un travail collectif, qui associe des gens malades, des familles confrontées au sida, des médecins, des journalistes, etc.

(4) Le site survivreausida.net a publié un long entretien, enregistré en 1996, avec le réalisateur Alain Moreau. Nous avons tenu à rendre compte de son travail dans le milieu carcéral. Lire Public captif : entretien avec Alain Moreau, réalisateur de la vidéo Le sida... sauf votre respect.

(5) Je ne sais pas si cette programmation était prévue initialement, ou bien si elle a été ajoutée pour mieux justifier du choix de montrer Le sida... sauf votre respect, alors qu’Isa Massu de la compagnie avait reconnue qu’elle n’avait même pas vu ce film ( !)

(6) Il est étonnant que des artistes contemporains n’ait pas un regard plus critique sur ce fait.

(7) La subtilité du montage est une question d’appréciation, voir notre lecture dans notre Sida en prison : réponse à Paul-Emmanuel Odin.

(8) Cette accusation ne figure nulle part dans les textes publiés sur le site, M. Odin interprète à sa façon des mises en cause fondés sur les faits, lire notre Marseille : appel pour dénoncer un film qui est une insulte à la mémoire des disparus et des oubliés du sida.

(9) Le nombre de détenus ne change rien aux faits.

(10) Ce n’est pas exact. L’émission Survivre au sida dénonce le fait que le film, son réalisateur, son commanditaire et la compagnie ait choisi de passer sous silence le fait que des détenus ont participé au film.

(11) Une telle demande n’a jamais été formulée.

(12) S’il l’a fait avec La vidéolettre de Quentin, cela rend d’autant moins justifiable son choix assumé d’expurger la prison de Le sida... sauf votre respect, surout qu’il a déclaré que ce choix était d’abord motivé par le fait que cela ne faisait pas partie de la commande ministèrielle.

(13) Ce n’est qu’une déclaration gratuite et sans fondement, qui ressemble aux attaques portées contre le travail indépendant de Survivre au sida par Kémal Chérabi et Sandrine Musso.

(14) Cette déclaration est ironique : à la compagnie, Issa Massu a reconnu qu’elle n’avait visionné le film, alors qu’il était déjà programmé !

(15) Cette dernière déclaration est de la pure diffamation. Elle fera l’objet d’une plainte déposée par l’émission Survivre au sida.

(16) Cette mise en cause de notre crédibilité est totalement déplacée. Si Reda Sadki n’est pas crédible, M. Odin n’avait qu’à ignorer notre appel. Sa réponse est une forme de reconnaissance que ce que nous disons est légitime, même si la forme qu’il a choisi ne lui fait pas honneur.