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Recommandations du 30 juin 2010 relatives au Centre de Rétention Administrative de Pamandzi (Mayotte)

Mise en ligne : 5 août 2010

Dernière modification : 14 août 2010

Texte de l'article :

Contrôleur général des lieux de privation de liberté

Recommandations du 30 juin 2010 relatives au centre de rétention administrative de Pamandzi (Mayotte) NOR : CPLX1019692X

Le centre de rétention administrative de Pamandzi (Mayotte) a été visité par quatre contrôleurs du contrôle général des lieux de privation de liberté les 26, 27, 28, 30 mai et le 4 juin 2009.

Les observations factuelles recueillies au cours du contrôle ont été communiquées. Un projet de rapport a été adressé au directeur de la police aux frontières de Mayotte le 24 septembre 2009.

En réponse, des observations datées du 14 octobre 2009 sont parvenues au Contrôleur général le 6 novembre 2009.

Le rapport complet de la visite a été communiqué pour observations au ministre de l’immigration, de l’intégration, de l’identité nationale et du développement solidaire, le 10 février 2010.

Le ministre a répondu le 27 mai 2010.

A la suite de cette procédure, et conformément à la loi no 2007-1545 du 30 octobre 2007, le Contrôleur général des lieux de privation de liberté a décidé de rendre publiques les recommandations suivantes :

1. La capacité du CRA est aujourd’hui fixée par les autorités locales à soixante places. Celle-ci devrait être établie sur des critères objectifs et strictement respectée.

2. Un arrêté préfectoral doit, conformément à la réglementation, désigner le service de police chargé de la garde du CRA et nommer le chef du CRA.

3. Les étrangers retenus doivent pouvoir comprendre, au moment de leur arrivée, la procédure qui leur est appliquée. Les fonctionnaires en charge de ces procédures doivent veiller à la bonne compréhension par le retenu de sa situation administrative et des droits afférents.

4. Les retenus doivent pouvoir être informés pour exercer leurs droits : le règlement intérieur doit être affiché et leur être remis. Une information concernant une ou des associations chargées d’informer et d’assister les retenus sur leurs droits doit être portée à leur connaissance. Le tableau de l’ordre des avocats doit être affiché.

5. La possibilité de demander l’asile est un droit fondamental. S’agissant de la formulation éventuelle d’une demande d’asile par des retenus lors de leur passage au centre de rétention de Pamandzi, les conditions d’un exercice effectif de ce droit, relatives notamment à l’information et l’assistance des demandeurs, doivent être remplies. Elles ne le sont pas aujourd’hui.

6. Du fait de la rétention des parents, 2 901 mineurs ont été admis au CRA en 2008 et 2 711 ont été reconduits sans que soient toujours vérifiés avec certitude leur âge et leurs attaches familiales. Cette situation ne peut perdurer ; l’identification des personnes aux fins de placement en rétention et de reconduite exige une attention rigoureuse à l’identification des personnes, quelles que soient les difficultés propres à la situation locale. En cas d’impossibilité d’établir l’absence de liens familiaux, l’éloignement doit être proscrit.

7. La situation particulière des enfants abandonnés sur le territoire de Mayotte après la reconduite de leurs parents est préoccupante. Afin d’assurer leur hébergement et leur suivi éducatif, il est urgent de mettre en oeuvre une organisation opérationnelle qui associe le service de l’aide sociale à l’enfance de la collectivité départementale et les services de l’Etat.

8. Les conditions d’hébergement sont indignes ; le jour de la visite, 140 personnes, adultes et enfants, se trouvaient dans les deux salles de rétention dont la surface cumulée est de 137 m2 :

– les personnes retenues vivent dans une grande promiscuité et sans la moindre intimité ;

– le centre n’est pas équipé de lit et chaque personne ne dispose pas de sa propre natte de couchage. Les personnes sont assises ou allongées par terre. Les enfants en bas âge sont dans les bras de leur mère et n’ont pas davantage de lit ;

– les hommes ne peuvent se rendre librement aux toilettes et aux points d’eau ;

– les toilettes à la turque et les cabines de douche sont en nombre insuffisant et dans un état dégradé ; elles donnent directement dans le hall et sont fermées par un simple volet de séparation d’un mètre de hauteur et à cinquante centimètres du sol ;

– le carrelage mural est maculé de taches de sang séché provenant apparemment de moustiques écrasés. Il convient de remédier, sans attendre la construction d’un nouveau centre, à de telles situations.

9. Les conditions d’hygiène doivent être totalement réexaminées pour permettre aux retenus de vivre dans des conditions décentes :

– l’occupation quasi permanente des salles d’hébergement ne permet pas, de fait, leur entretien quotidien.

– bien que prévue par le règlement intérieur, aucune distribution de produits d’hygiène (brosse à dents, dentifrice, rasoir ou shampoing) n’est effectuée à l’arrivée ;

– après la douche, la personne retenue ne dispose ni de serviette, ni de vêtement ou sous-vêtement propre.

10. La confidentialité des entretiens doit être garantie :

– l’unique poste téléphonique mis à disposition des personnes retenues ne permet pas que soit respectée la confidentialité des conversations du fait de son positionnement au milieu du hall et en face du bureau du chef de poste ;

– l’association TAMA d’aide aux retenus effectue ses entretiens dans de mauvaises conditions, ne disposant ni de bureau ni de ligne téléphonique dédiés.

11. Le centre de rétention administrative ne doit pas accueillir des personnes placées en garde à vue : il y existe une cellule dite de garde à vue qui n’a pas de raison d’être.

12. Les exigences de la traçabilité doivent être rappelées aux fonctionnaires :

– le registre de fouille et celui dit d’APRF (arrêté préfectoral de reconduite à la frontière) révèlent des omissions. Ils doivent être tenus avec une plus grande rigueur ;

– la mise à l’écart des personnes dans le centre, en cas de trouble à l’ordre public ou de menace à la sécurité des autres étrangers retenus, n’est consignée dans aucun registre. Sa mise en oeuvre doit relever d’une procédure formalisée ;

– les demandes de consultations médicales sont sélectionnées sans critère objectif par les fonctionnaires préposés à la garde. L’absence de tout enregistrement consignant les demandes de soins ne permet pas de connaître les suites qui y sont apportées.

13. L’accueil des familles doit être prévu dans le centre. Les proches peuvent attendre aujourd’hui plusieurs heures, assis à même le sol, couverts de poussière à chaque entrée de véhicule dans le centre. Des bancs et des parasols doivent être mis à leur disposition et un muret de protection contre les projections de la route édifié. J.-M. DELARUE