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Que des suicides ? Morts suspectes, l’Omerta

Mise en ligne : 7 mai 2012

Dernière modification : 8 mai 2012

Texte de l'article :

QUE DES SUICIDES ? MORTS SUSPECTES, L’OMERTA...

Tout le monde le sait. Il est des lieux où des personnes incarcérées ont souvent des marques, il est des lieux où l’on meurt plus. Il est des lieux dont l’évocation du nom emplie de terreur les proches et les personnes incarcérées. Il y a des transferts bizarres et des taux de remplissage du quartier disciplinaire extrêmement élevés chez les arrivants en ces lieux. On ne peut que se demander comment et pourquoi des êtres humains se pendent là où il est impossible de le faire, se noient dans leur petit lavabo, meurent de se taper la tête contre les murs. Ceux là, ces ‘’suicidés’’, comment les éviter ?

Un exemple : La maison d’arrêt de Tarbes, le cas d’école
Belgacem SOLTANI arrive à TARBES avec des craintes et de fausses idées sur ce lieu selon le médecin de l’UCSA qui l’aurait vu. TARBES est un ancien QHS. Belgacem est incarcéré pour outrage à agent, alors qu’il est à Toulouse St Michel, son troisième transfert en 2 mois, un courrier passe où il fait par ‘’de menaces de morts de la part de représentant des forces de l’ordre’’. Son lieu de 2ème transfert St Sulpice est le lieu où le directeur de Tarbes avait eu des fonctions précédemment. Il se trouve qu’à St Sulpice Belgacem a été en conflit avec le directeur, condamné pour ce fait par le tribunal qui ne lui a donné que du sursis. D’ailleurs un codétenu témoignera lors de l’instruction dans le cadre du décès de Belgacem que les surveillants se vantaient de lui avoir fait un beau papier pour sa prochaine affectation. C’est dans ce contexte que Belgacem arrive à Tarbes, apeuré visiblement, vu la réputation du lieu dans l’univers carcéral. On est le 23 avril au soir. Il décède le 25 avril au mitard. La famille avertie par un post-it déchiré le lendemain seulement conteste la version officielle du suicide. Elle lutte pied à pied pour obtenir le moindre élément pour constituer un vrai dossier d’instruction, et qu’une enquête digne de ce nom soit menée. Un transport sur les lieux se fait. Il apparait clairement que la pendaison est irréalisable, le seul éventuel point d’attache se situe à plus de 3m50 de hauteur, sans aucune prise pour les pieds ni les mains afin d’y accèder. Le directeur explique qu’effectivement on ne peut atteindre la zone, il indique qu’il lui a fallu chercher une chaise, monter dessus, qu’un surveillant grimpe en équilibre sur ses épaules, et qu’à la troisième tentative, ils réussissent à dépendre Belgacem à l’aide d’un canif. Nous parlons du mitard, lieu où tout est scellé, sans chaise et où on est seul. Néanmoins le juge estimera que cela ne remet pas en cause la thèse du suicide et que seul le transport sur les lieux suffit, il refusera la reconstitution. Tant les photos prisent par la famille que celles avant autopsie et celles prisent lors de l’enquête préliminaire 1 heure après le décès sont sans équivoques sur la nature des violences extrêmes subies par Belgacem, là encore les 2 autopsies parviendront quand même à la conclusion du suicide par pendaison. Après la mort de Belgacem, 3 autres suicides se produiront, plusieurs tentatives de suicides aussi, dont on voudra rendre responsable de par l’écho médiatique de la mort de Belgacem sa famille. Sauf que ces morts ont eu lieu à des moments particuliers, dont un la veille du transport sur les lieux, et que bizarrement dès que la CNDS a été saisie pour ces morts, des mesures de placement d’offices pour tout personne incarcérée suicidaire ont été prises par le personnel médical et l’hôpital, et depuis plus de morts (connus... nous parlerons du problème des chiffres).

Des histoires comme celles de Belgacem SOLTANI, il y en a malheureusement plusieurs et tout le monde les connait.

Proposition 12 Mise en place de procédure de protection de l’enquête en cas de décès en détention

Nous souhaitons que :

- Les procédures policières d’investigations sur les lieux doivent scrupuleusement être respectées.
- Pour l’autopsie, la seule question qui doit être posée sans plus d’indication est celle de la recherche des causes de la mort et de procéder à toutes les analyses nécessaires, on ne doit pas poser une question orientée pour obtenir la réponse demandée.
- Le tribunal compétent devrait être dans une ville différente pour assurer la sérénité du fonctionnement de la justice, car des questions sur le fait d’être partie prenante se posent parfois.
- Un fond spécial doit être créé, que les proches doivent pouvoir solliciter dans le cadre d’une action en justice pour payer les frais, l’aide juridictionnelle ne fonctionne pas toujours et les personnes dépassant le seuil ne peuvent assumer un tel prix, c’est sous la responsabilité de l’état qu’une personne est morte, il a le devoir de donner les moyens à ce que les victimes de ce fait puissent agir pour obtenir réparation.
- L’état français se ferait honneur à ne pas faire appel d’une décision le condamnant.

Pourquoi si vite, pourquoi tant d’obstacles ?

Depuis des années malheureusement nous ne pouvons que constater la rapidité avec laquelle les dossiers sont classés. N’oublions pas tous ces morts à qui on a dénié de savoir au moins quand et comment ils avaient pu mourir. Trop d’embûches jalonnent le parcours des proches, faute de moyens certains ne sauront jamais, faute de l’entêtement de la justice à ne pas entendre que lorsqu’une personne décède en présence d’une autre, elle doit alors être entendue et sa parole scrutée comme tout autre si cela se passait hors les murs de la prison. Obtenir quelque chose éventuellement de la justice en cas de mort d’un proche est en général les fruits de 10 ans d’action.

Nous ne comprenons pas non plus le transfert précipités des codétenus fréquent quand un mort en prison survient et gênant fortement les investigations. Cette attitude soulève de la suspicion, mais surtout crée une situation de grand isolement et de perte du travail fait en vue de la réinsertion, donc on fragilise les gens et on ne fait qu’accentuer le phénomène suicidaire, nous rappelons à nouveau ce problème des transferts. La parole des personnes incarcérées qui témoignent n’est pas entendue mais celle d’éventuels auteurs sont prises comme parole d’évangile. Dans une situation de mort suspecte toute personne qui pourrait être mise en cause doit être soit suspendue le temps de faire certaines vérification, soit mutée ailleurs mais on doit garantir la sécurité de tous.