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Prisons de France : les 6 priorités de Pierre Tournier

Publication originale : 24 septembre 2005

Dernière modification : 16 août 2010

Texte de l'article :

Paris, le 24 septembre 2005.

Communiqué de presse

de Pierre V. Tournier, directeur de recherches au CNRS, Université Paris 1. Panthéon Sorbonne, animateur du Club social-démocrate « DES MAINTENANT en Europe ».

Prisons de France : les 6 priorités

Libération conditionnelle de Lucien Léger annoncée, après 41 ans de détention, proposition de loi sur le traitement de la récidive de nouveau en débat à l’Assemblée nationale, élaboration des programmes des partis politiques en vue des échéances de 2007 . L’heure doit être à la réflexion et à la définition des priorités sur la question pénitentiaire.

Pour nous, ces priorités sont au nombre de 6, toutes plus ou moins liées les unes aux autres.

1ère priorité. Mettre en place un contrôle extérieur des prisons confié à la Commission nationale de déontologie de la sécurité (CNDS). Ses compétences seront donc élargies et les moyens de son fonctionnement assurés.

2. Lutter contre l’oisiveté en détention. Chaque personne détenue pourra bénéficier d’une, au moins, des solutions suivantes : a. emploi, b. formation générale et/ou professionnelle, c. activité culturelle et/ou de formation à la citoyenneté. Pour chacune de ces activités les personnes détenues (prévenues ou condamnées) recevront une rémunération et/ou un revenu minimun de préparation à la sortie (RMPS). 

3. Créer les conditions d’une véritable participation des détenus à l’organisation de la vie en détention, en s’inspirant de ce qui se fait chez nos partenaires européens.

4. Pour résoudre rapidement le problème de la surpopulation des prisons, lutter contre l’inflation carcérale dans une approche globale. Il faut appliquer la recommandation du 30 septembre 1999 du Conseil de l’Europe . Cela signifie développer les alternatives à la détention des 3 types : a. alternatives réduisant les entrées en détention, b. alternatives réduisant les durées de détention (sous écrou), c. alternatives réduisant le temps passé derrière les murs avec maintien sous écrou (permissions de sortir, semi-liberté, placement à l’extérieur, placement sous surveillance électronique fixe...) .

5. Redéfinir une procédure de « libération conditionnelle » (créée, en France, en 1885), adaptée à notre époque, sur la base de la recommandation du 24 septembre 2003 du Conseil de l’Europe (système dit « mixte ») . La libération conditionnelle - redéfinie - sera au coeur des procédures d’aménagement des peines. Il faut donc tout revoir sur le sujet. 

6. Mettre en place un système de contrôle strict de non dépassement des capacités de placements sous main de Justice (milieu fermé et milieu ouvert) . Ce qui nécessite de procéder à une évaluation rigoureuse des capacités actuelles du milieu fermé comme du milieu ouvert (question de locaux et de personnels) en distinguant bien les différentes situations juridiquement possibles. Cet état des lieux devrait « faire consensus » et permettre de définir, dans le même esprit, le « parc » nécessaire et ... suffisant pour le présent et pour l’avenir, en milieu fermé comme en milieu ouvert. Ce n’est pas une question de divination, mais d’évaluations rigoureuses et de choix politique.

Remarque 1. Bien des questions ne sont pas explicitement abordées dans ces six points, mais le fait d’avancer autour de ces priorités permettra d’aborder les problèmes plus spécifiques dans de meilleures conditions. 
 
Remarque 2. La réalisation d‘un tel programme transformera, de fond en comble, les conditions de travail de l’ensemble des personnels pénitentiaires, en milieu fermé comme en milieu ouvert. Compte tenu des améliorations attendues, il devrait être soutenu par l’ensemble des syndicats.

Remarque 3. : Ces priorités n’ont rien à voir avec « l’utopie ». S’appuyant sur les orientations les plus récentes du Conseil de l’Europe et sur les « bonnes pratiques » de certains de nos partenaires, ce sont les priorités d’une lutte efficace contre la récidive des infractions pénales. La défense des victimes, individuelles ou collectives, des délits et des crimes commis et des victimes potentielles est au cœur de ce programme. L’ensemble des partis politiques républicains devrait logiquement le soutenir et travailler à sa réalisation.

 Contact : Tél. 01 42 63 45 04, pierre-victor.tournier@wanadoo.fr