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Prévention de la récidive et obligation de soins

Mise en ligne : 17 septembre 2007

Dernière modification : 17 décembre 2007

Texte de l'article :

La loi, votée cet été, sur le renforcement de la lutte contre la récidive des majeurs et des mineurs, a introduit des peines planchers en cas de récidive ; elle a également établi le principe de la non atténuation des peines pour les mineurs de plus de 16 ans, en cas de deuxième récidive pour les crimes ou délits avec violence ou les agressions sexuelles, sauf décision particulièrement motivée du juge. Enfin, cette loi rend obligatoire un suivi judiciaire comportant une injonction de soins psychiatriques ou de suivi psychologique pour les personnes condamnées reconnues par un expert accessibles à un traitement. Les 2 premiers volets ont été les plus mis en avant à la fois lors de la campagne électorale de l’actuel président de la République et dans les critiques formulées par la suite, alors que le Sénat et l’Assemblée nationale votaient ce texte, respectivement le 5 juillet et le 18 juillet. Cependant, le volet concernant la systématisation de l’injonction de soins est loin d’être accessoire.

 Les personnes incarcérées refusant les soins proposés par le juge de l’application des peines ne pourront bénéficier, ni de réductions de peine supplémentaires ni d’une libération conditionnelle. Autrement dit, la systématisation de l’injonction de soins et les conditions de cette injonction représentent une forte contrainte, compte tenu des contreparties mises en jeu. Pourtant, les psychiatres et les psychologues s’accordent pour dire qu’une thérapie n’a de chance d’être efficace que si le patient est lui-même demandeur et s’inscrit de façon librement consentie dans une démarche. Il y a une différence entre "être susceptible de faire l’objet d’un traitement", comme l’indique la loi, et être volontaire dans une démarche de soins.
En outre, la question de l’obligation de soins pour une personne incarcérée ne va pas sans poser des problèmes éthiques. En particulier, l’admission des personnes dans les futures UHSA (unité hospitalière spécialement aménagée) se faisant avec ou sans consentement, le problème est alors posé avec acuité.
Par ailleurs, il ne peut être ignoré que la pénurie d’experts d’une part, pour établir l’accessibilité des personnes à des soins, et de soignants d’autre part, est en décalage criant avec les intentions affichées dans la loi.

 Cette loi est censée renforcer la lutte contre la récidive, comme si l’injonction systématique de soins avait pour but de prévenir la récidive afin de protéger la société. Tout un chacun aspire légitimement à une certaine sécurité et c’est bien à l’Etat qu’est dévolue cette responsabilité. Mais, l’Etat est également le garant des principes éthique et déontologique, de la constitution et les libertés individuelles. Ce n’est pas au travers du prisme de nos peurs qu’il faut analyser le problème de la récidive ; ce n’est pas au travers de fantasmes de sécurité absolue qu’il faut considérer la question des personnes atteintes de maladies mentales.

La rédaction
Ban Public
Septembre 2007