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La condamnation

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Date : 8-09-2016

Résumé du Rapport Cotte déposé en Décembre 2015

Pour une refonte du droit des peines

Publication originale : décembre 2015

Texte de l'article :

 La mission :

La lettre de mission de la garde des sceaux d’alors, Christiane Taubira, faisait état des multiples réformes qui sont peu à peu venues fragiliser le droit des peines, notamment à l’occasion de tragiques faits divers, ayant pour effet que celui-ci manque désormais de cohérence. Elle invitait donc la commission à venir apporter cette vue d’ensemble.

Après avoir détaillé sa manière de travailler (contributions écrites privilégiées à de nouvelles auditions, création de sous-commissions) et le champ d’application de sa mission (exclusion de l’exécution des peines prononcées contre les mineurs ainsi que de l’organisation et du fonctionnement de l’administration pénitentiaire), la commission a fait part de ses idées.

 La création d’un code pénitentiaire :

L’idée principale de la commission est celle de la codification des textes. Mais attention, l’idée ne serait pas de créer un code de l’exécution ou de l’application des peines, mais plutôt un code pénitentiaire composé d’un article préliminaire sur les grands principes puis de quatre livres concernant respectivement, la prise en charge des personnes détenues, le service public pénitentiaire, les contrôles exercés sur les établissements pénitentiaires pour finir par les dispositions relatives à l’Outre-Mer. Pour la commission, la création d’un tel code aurait le mérite « de consacrer les droits des personnes détenues dans un document à valeur législative ».

La création de ce code impliquerait en pratique des ajustements, des transferts du code pénal et de procédure pénale vers ce troisième code.

 La création d’une échelle de peines principales :

Outre un code, la commission Cotte propose que soit créée une échelle de peines pouvant être utilisées. En matière criminelle, faisant fi du fait que la prison est censée être la peine de dernier ressort, la commission la classe comme étant LA peine principale et suggère que toute autre peine ne soit regardée que comme peine complémentaire.

En matière correctionnelle, l’échelle des peines proposées est somme toute plus large même si au sommet, on retrouve là encore, la peine d’emprisonnement. Le rapport justifie cela par la gravité et la fréquence à laquelle cette peine est encourue, soit pour la quasi-totalité des délits prévus par le code pénal.

La nouveauté vient ici de ce que le rapport préconise de faire du Placement sous Surveillance Electronique (PSE) une peine autonome, alors qu’il n’est actuellement qu’une modalité d’exécution d’une peine privative de liberté, un aménagement de peine. Le rapport estime que le PSE « permet dans un contexte de surpopulation carcérale, de soumettre une personne à la fois à une mesure privative de liberté qui n’a pas l’effet désocialisant de l’incarcération et à des mesures de suivi qui sont propres au milieu ouvert.  » Il indique qu’il a pour avantage d’exclure tout enfermement dans un établissement pénitentiaire (contrairement à la semi-liberté par exemple) sans s’analyser comme un complet retour à la liberté.

 Les peines alternatives :

A la sous-utilisation de certaines peines alternatives, la commission chercher des raisons et indique qu’en pratique, certaines peines sont d’application difficile ou bien qu’elles font redite avec d’autres peines qui leur sont privilégiées.

Après avoir fait la part belle aux stages, la commission a accordé toute une section à la promotion de peines qui permettraient de cantonner l’emprisonnement. Outre le PSE, déjà détaillé plus haut, la commission propose d’élargir le champ d’application de la contrainte pénale avant le 1er janvier 2017. Actuellement uniquement prononcée pour des peines d’emprisonnement d’une durée inférieure ou égale à 5 ans, la commission propose la suppression dès maintenant de cette limitation.

En plus de proposer une utilisation plus importante de certaines peines qui pourraient limiter le recours à l’enfermement, la commission propose également dans ce but d’en supprimer. C’est le cas de la rétention de sûreté, peine permettant sous conditions de maintenir, au terme de l’exécution de leur peine, des individus dans des centres fermés pour un temps indéfiniment renouvelable du fait de leur particulière « dangerosité », de leur grave trouble de la personnalité ainsi que de la probabilité élevée de récidive. Expliquant qu’il est actuellement impossible d’en mesurer encore vraiment l’impact (le dispositif ayant été instauré en février 2008, pour des personnes condamnées, à compter de cette date et sans rétroactivité possible, à des peines d’emprisonnement au moins égales à 15 ans, les périodes de sûreté ne commenceront donc au minimum que dans les années 2020), la commission allègue toutefois déjà de l’existence d’autres mesures, qui si elles possédaient un spectre d’application plus large, pourraient tout aussi bien faire l’affaire.

Ainsi, la commission préconise de permettre le suivi-socio-judiciaire (possibilité de soumettre le condamné, après sa peine, à des mesures de contrôles et des obligations telles des injonctions de soins) pour tous les crimes et délits, indistinctement.

Fondée comme la rétention de sûreté sur la notion complexe et discutée de dangerosité, la surveillance de sûreté, est elle aussi sur la sellette pour la commission, qui estime que le suivi socio-judiciaire peut tout à fait faire son travail. De ce point de vue, la commission rejoint l’avis du Contrôleur Général des Lieux de Privation de Liberté, s’interrogeant sur ces « peines supplémentaires  » qui n’impliquent pas de nouvelle faute et suppriment ainsi le lien entre culpabilité et responsabilité, entre infraction et sanction.

 Permettre davantage d’aménagements de peine :

La Commission effectue plusieurs propositions ayant pour but de faciliter les aménagements de peine. Ainsi, si elle trouve logique qu’une personne déclarée coupable de faits commis en récidive encoure des sanctions aggravées par rapport à une personne dépourvue de tout antécédent judiciaire, elle estime qu’il ne se justifie selon elle pas de pénaliser à nouveau un récidiviste au stade de l’exécution et de l’éventuel aménagement de peine. Dès lors, elle propose de ne plus prendre en compte la récidive au stade post-sentenciel.

Par ailleurs, expliquant que lorsque l’appel porte sur un rejet d’aménagement de peine ab initio, puisque rien ne l’empêche, la peine d’incarcération est souvent mise à exécution, sans égard à l’existence de l’appel qui compte-tenu des trop longs délais d’audiencement, prive cette voie de recours d’effet, la Commission a proposé dans pareil cas que la chambre d’application des peines soit tenue de statuer dans un délai de deux mois…n’allant ainsi pas assez loin dans son raisonnement et se refusant à préconiser une mise à exécution différée de la peine jusqu’à la décision de Cour d’Appel.

 Les permissions de sortir :

La Commission propose que l’octroi de la toute première permission donne lieu à l’explication pour le condamné, du régime exact des permissions, ses droits et ses obligations. Ainsi, si sa demande venait à être refusée, des objectifs à atteindre pour que la permission puisse être accordée pourraient à ce moment être définis, permettant au condamné de comprendre les raisons du refus et d’anticiper sur l’avenir.

De plus, la commission considère qu’aucun délai ne devrait être exigé pour pouvoir bénéficier d’une permission de sortir, pour les condamnations égales ou inférieures à deux ans d’emprisonnement. De même, le rapport préconise d’envisager des permissions de sortir à compter d’1/3 d’exécution de la peine, contre la moitié voire les 2/3 en cas de récidive, aujourd’hui.

En outre, serait expressément prévue la possibilité d’octroyer une fois par an une permission de dix jours.

La commission suggère par ailleurs d’harmoniser les conditions d’octroi qui ne sont actuellement pas les mêmes que l’on soit en Maison d’Arrêt ou en Centre de Détention.

Enfin, il est suggéré de créer un conseil d’évaluation annuel des SPIP, à l’instar de ce qui existe depuis la loi pénitentiaire de 2009 pour les établissements pénitentiaires.

 Les conversions et confusions de peine :

Autre méthode proposée afin de faire baisser le taux d’enfermement, la Commission propose la possibilité de convertir une peine d’emprisonnement de moins de six mois en contrainte pénale ou en suivi socio-judiciaire probatoire, alors que la conversion de ces six mois n’est pour le moment permise qu’en peine de sursis avec obligation d’effectuer un TIG ou une peine de jours-amende.

Enfin, la Commission propose d’élargir les possibilités de confusion de peine, notamment avec des peines étrangères déjà exécutées à l’étranger ou dont l’exécution a été transférée à la France.

La Commission conclut en expliquant l’importance de l’individualisation de la peine tout au long du processus de jugement puis d’exécution de la peine.