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> Edito

Point de vue sur les états généraux de la condition pénitentiaire

Mise en ligne : 18 novembre 2006

Dernière modification : 17 décembre 2007

Mardi 14 novembre, les organisations membres des états généraux ont présenté "un document d’orientation visant à une transformation d’envergure de la condition carcérale"...

Texte de l'article :

Souvent, quand une démarche est entreprise on est plus attentif au fond qu’à la forme et c’est bien légitime. Quoi de plus important que la richesse d’un propos, la pertinence d’un raisonnement, la finesse d’une analyse ? La forme ? Sûrement pas, même si indéniablement elle joue un rôle puisqu’elle est un vecteur de l’information. Dans le cas des Etats généraux de la condition pénitentiaire, comment ne pas être déçu ? L’annonce d’une consultation massive des personnes incarcérées avait quelque chose de très prometteur ; le principe d’un questionnaire, qui ne peut certes être exclusivement qualifié d’élément de forme, laissait augurer un résultat ambitieux ; il y avait tout lieu d’être enthousiaste. Au final : une déclaration solennelle, un cahier de doléances et un manifeste. Pour le coup, on est en plein dans la surenchère en matière de forme ; mais au juste qu’importe, si le contenu est réellement riche en propositions innovantes ? C’est précisément là que les choses sont un peu décevantes. Quatre axes de réflexion sont proposés dans la perspective d’une réforme : "le respect des droits de l’Homme dans la prison - le contenu donné au temps passé en prison - la question des soins apportés aux personnes détenues malades - la préparation à la sortie de prison". Quoi de plus que l’on ne savait déjà ? Bien sûr il est prétentieux d’affirmer cela, mais tout de même... Combien de recommandations internationales, combien de recommandations nationales, combien de rapports, combien d’études ont déjà mis en exergue ces axes d’amélioration, comme étant des conditions sine qua non à la cohérence d’un système dont l’objectif est la réintégration des personnes dans la communauté ? A cela deux réflexions s’imposent : l’une, concerne la consultation elle-même des personnes détenues. C’est une forme d’imposture de demander aux personnes privées de liberté comment améliorer leurs conditions de vie (de survie plutôt). Une prison, fût-elle dorée, reste une prison. Demander aux personnes incarcérées de se prononcer sur l’amélioration du système qui les prend en charge (ou plutôt qui est la cause d’une réelle souffrance pour elles) c’est légitimer l’existence même de ce système. Ce qui ne veut pas dire qu’il ne faut pas améliorer les conditions de détention et rendre moins inutile le temps passé en prison, en vue de la réintégration dans la société. Pour autant, il ne faut pas éluder la question du sens même de la peine privative de liberté (ou de son non-sens) ; c’est précisément l’objet de la seconde réflexion. Travailler à l’amélioration d’un système, c’est postuler a priori que ce système est certes perfectible mais globalement fiable. N’y a-t-il pas là matière à prolonger la réflexion ?

La rédaction

Ban Public

(Novembre 2006)