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Nous en avons le potentiel : ayons en la volonté.

Mise en ligne : 6 décembre 2009

Dernière modification : 6 décembre 2009

Texte de l'article :

En revenant du parloir, je repense à ce livre, écrit s’il m’en souvient par un ancien détenu, qui à propos des prisons titrait "la guillotine du sexe"...
En vérité n’est-il pas affligeant de constater qu’alors que plusieurs pays européens - Hollande, Danemark et si je ne m’abuse l’Espagne - ont doté la totalité de leurs prisons d’UVF (unités de vie familiale), la France reste pour sa part tristement à la traine : les UVF n’y étant guère plus qu’une exception ?
N’est-il pas tout aussi affligeant d’apprendre que même dans certaines prisons où la construction d’UVF avait débuté, elle dut être abandonnée suite à des protestations et des sabotages de la part du personnel surveillant  ?

Comment notre beau pays, qui s’ennorgueillit d’être la patrie des droits de l’homme, peut-il, en ce 21eme siecle, se satisfaire d’un système carcéral datant, pour l’essentiel, du 19eme siecle ?! (et les UVF ne sont qu’un aspect : les activités autorisées sont une autre facette, dont l’importance ne saurait être négligée.)

En ces temps d’unification européenne, des particuliers se voient contraints, pour répondre aux exigences des directives de Bruxelles, d’entreprendre à leurs frais des travaux souvent fort onéreux pour mettre leur logement ancien en conformité sanitaire ; pourquoi l’Etat lui-même ne réalise t’il pas une rénovation complète - et Ô combien nécessaire - de ses lieux de privation de liberté ?

L’Europe devrait être, pour tous les pays membres, une formidable opportunité pour s’aligner, dans chaque domaine significatif, sur le mieux. Faisant, en matière de détention, le Danemark et surtout la Hollande nous apportent la preuve que l’on peut concilier humanité et impératifs sociaux : suivons ces exemples, ils fonctionnent très bien (cf : taux de récidive, taux de suicide...)

Fi de l’inertie, de l’hypocrisie et des faux prétextes : le manque de budget ? la crise ? La solution est pourtant à portée de main, presque sous notre nez : ne dit-on pas que "quand le bâtiment va tout va !" ? Alors, messieurs les Enarques, vous avez longtemps moissonné à votre gré et engrangé plus que votre comptant, il est maintenant urgent de semer à nouveau, de garde que le champ ne se meurre : relancez l’industrie du bâtiment en modernisant massivement les prisons - sur le modèle néerlandais - supprimez les charges patronales pour encourager l’embauche et la hausse des salaires, diminuez les impots et la TVA (5% c’est déjà beaucoup : même la Californie n’est qu’à 8,25% ! ) pour relancer la consommation, ramenez l’Etat à une taille compatible avec la capacité de financement réelle du pays, en le désengageant de certains programmes aussi inutiles que dispandieux - le prestige est un luxe dont la sagesse doit parfois se passer.

Certes, pour salutaire qu’il soit, un sérieux allègement de la fiscalité, combiné avec le financement par l’Etat (i.e collectif) de programmes immobiliers ambitieux, entrainera un accroissement significatif de la dette publique : mais il suffira de "faire tourner" la planche à billets, c’est à cela qu’elle sert.

Quid de l’inflation résultante ? Nul besoin d’être Alan Greenspan pour savoir qu’une dose d’inflation mesurée facilite la croissance économique.

Et que le cours de l’euro redescende, en conséquence, aux alentour de 0.80$ USD n’en améliorera que d’autant notre capacité à l’export [1]. Le pétrole nous coûtera plus cher avec un euro plus faible ? raison deplus pour mettre le paquet sur les énergies renouvelables - avec autant de créations d’emplois et de nouvelles activités à la clé - et puis n’oublions pas que le prix de l’essence, c’est plus de 80% de taxes, et que les groupes pétroliers se portent fort bien, même avec un euro à 0.80$ USD...
Bref, il est temps que le pays des Droits de l’Homme brille à nouveau par son progressisme et son humanité.

Faire adopter la nouvelle loi pénitentiaire/pénale est un bon début, mais nous ne pourrons décement nous ériger en donneurs de leçons sur la scène internationale qu’à condition de montrer par des actions concrètes, ici chez vous, l’exemple que nous voudrions voir le monde suivre.

Nous en avons le potentiel : ayons en la volonté.

Et exigeons de nos dirigeants qu’ils implémentent cette volonté, pour le bien de tous et au nom des valeurs pour lesquelles se sont battus nos ainés.

Enfin, remarquons que la modernisation et - surtout - l’humanisation de nos prisons, pour urgentes et nécessaires qu’elles soient, ne sont pas les seuls aspects de notre système judiciaire/pénal à mériter une profonde et sérieuse révision : nombreux en effet sont les détenus dont la juste place n’est pas en prison, soit qu’ils relèvent de la psychiatrie, soit qu’ayant passé quelques années déjà en détention ils sont de fait prêts à être réinsérés sans riques sans qu’il soit utile qu’ils demeurent incarcérés jusqu’à la fin "théorique" de leur peine.

La privation de liberté est la punition la plus cruelle qui soit : elle doit être justifiée et ne durer que le temps strictement nécessaire ; ce qui nécessite que soient déployés les méthodes et moyens permettant une prise en compte réelle du profil psychologique de chaque détenu et de son évolution, afin de substituer à la tyrannie aveugle du calendrier une lucidité éclairée d’humanisme constructif.

Ni les philosophes ni les sociologues ne contrediront cela.

Ivan Delouvée
détenu longue peine

Notes:

[1qui d’ailleurs compensera le coût du baril