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Non respect des principes régissant la gestion des services de santé

Mise en ligne : 17 juillet 2002

Dernière modification : 29 octobre 2004

Texte de l'article :

Le service correctionnel du Canada ne respecte pas ses propres principes régissant la gestion et la prestation des services de santé

C’est encore au travers de l’histoire d’un patient détenu sidéen et récemment réincarcéré que l’Office des droits des détenu(e)s aimerait vous sensibiliser à l’inadmissible attitude de l’équipe soignante de l’établissement Leclerc.

Monsieur X est sidéen. Il est assigné à résidence dans une ressource communautaire contractuelle du service correctionnel du Canada (SCC), connue sous le nom de maison de transition. Compte-tenu de son état de santé, il consulte à la clinique spécialisée l’Actuel, où l’équipe médicale est connue pour son expertise et son dévouement. Monsieur X bénéficie d’une trithérapie, combinaison pharmacologique qui entraîne une augmentation significative des T4 et renforce le système immunitaire.

Ce patient ex-détenu s’intéresse comme la majorité des sidéens à son état de santé. Il suit à la lettre les conseils de son équipe médicale traitante. Les intervenants de la maison de transition sont également très au fait des modalités et veille au maintient et à l’amélioration de son état de santé.

Monsieur X, pour des raisons qui nous sont inconnues, est retourné au pénitencier vers la fin novembre, début décembre 1996. Les services médicaux de l’établissement Leclerc en la personne du médecin Jean-Guy Harris et de l’infirmière Louise Guérette refusent catégoriquement d’entériner les prescriptions du médecin de la clinique l’Actuel tant et aussi longtemps qu’un spécialiste de la Cité de la santé ne l’ait rencontré. Il n’était plus un patient ex-détenu mais un détenu ex-patient. Connaissant parfaitement les effets néfastes d’un arrêt de traitement même pour quelques heures, monsieur X mobilisa toute son énergie pour rechercher de l’aide et bénéficier de la même qualité de soin qu’à l’extérieur.

C’est dans ce contexte là qu’il eut recours, le 13 décembre 1996, à l’Office des droits des détenu(e)s (ODD) afin de poursuivre son traitement salvateur.

Grâce à de multiples démarche, nous avons donc appris que monsieur X se retrouvait privé en partie de sa médication. L’insistance de monsieur X a fait en sorte que la maison de transition était venu lui porter une posologie suffisante jusqu’à cette journée du 13 décembre. Ce même jour, suite à nos démarches, la maison de transition était prête à faire parvenir de nouveau une posologie pour qu’il n’exista pas une interruption de traitement.

Bien que l’administration régionale de SCC se soit intéressé à la question suite à nos nombreux appels, la haute direction se retranchait derrière le respect d’une décision médicale en nous informant que « le directeur et le médecin étaient très sensibilisés au cas évoqué ».

N’osant pas intervenir en matière médicale, la haute direction tentait de règler le problème en demandant à l’agent de gestion des cas de récupérer les médicaments auprès du coordonateur de la maison de transition, qui lui même serait allé les chercher à la pharmacie de l’hôpital Saint-Luc...

Le lundi suivant, soit le 16 décembre 96, la haute direction était incapable de nous préciser si le détenu avait bien eu son antiretrovirus, prescrit en association avec deux autres médicaments, durant la fin de semaine.

Nous nous interrogeons, au travers de ce cas clinique, sur les normes de services en vigueur au SCC. Est-il convenable qu’un médecin salarié du SCC puisse décider d’arrêter un traitement alors qu’il est de notoriété publique que le dit traitement ne peut être interrompu sans risque considérable ? Autrement dit, qui supervise le travail d’un professionnel même s’il apparaît que son intervention ne corresponde pas à ses obligations déontologiques ?

Est-il convenable qu’un médecin salarié d’un établissement correctionnel rèfére le patient dans un hopital dont il est membre du conseil d’administration ? (selon nos informations, le docteur Harris fait partie du conseil d’administration de la Cité de la santé)

Qui, ose encore, faire un lien entre une attitude professionnelle douteuse et l’histoire personnelle du médecin qui a vu son propre père blessé par un détenu ?

Ne devrait-on pas s’étonner de l’approche d’une équipe soignante qui considère apparamment la population carcérale comme une clientèle à part, qui ne mérite pas la même qualité de soins que la population civile ?

Finalement, qui établit les balises organisationnelles pour que les médecins et les équipes soignantes assurent en tout temps une approche clinique qui permettrait une prolongation souple et aidante des thérapeutiques entamées à l’extérieur ?

On est très loin, dans cette malheureuse histoire, de l’esprit du serment d’Hyppocrate. Et à vouloir considérer les détenus comme du bétail, on pourrait encourager ce bon docteur à se recycler en médecine vétérinaire.

Site source Office des Droits des Détenus