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lundi, 8 décembre 2003

Mise en ligne : 22 mai 2004

Texte de l'article :

lundi, 8 décembre 2003

Maintenant il faut que j’écrive à Olivia. Ca fait plaisir d’avoir enfin des occupations ! je me sens presque débordé avec mes deux lettres à écrire.

Je m’assied, fait un peu de place sur ce bureau. Au fond ça me fait plaisir qu’il y ai un peu de bazar, ça me donne l’impression de faire des choses, donc je laisse ce désordre comme il est, je prends mon stylo et réflechi à la forme de ma lettre. Par où commencer ?..

L’œillet bascule, un maton entre.

« 
- Soz, Parloir avocat. Annonce le surveillant d’un ton robotisé.
- Pardon ?
- Parloir avocat.
- Heu d’accord. »

Je le suis sans avoir réellement compris ce qu’il me voulait. Avant de sortir de la cellule, je fourre dans ma poche trois cigarettes et des allumettes.

« Donc c’est pas compliqué, tu vas jusqu’au bâtiment A. Ensuite tu descends et tu arrives dans le couloir vert là tu prends le passage de la porte 10 et au bout tu t’annonces et attends que l’on t’appelles. »

Sur ces belles paroles, il me laisse, seul dans cette prison. Déjà, lors de mes virées en scooter je ne retrouvais jamais mon chemin. Là je dois trouver mon chemin au milieu d’une prison que je ne connais pas ( je n’en connais pas d’autre d’ailleurs ). J’avance jusqu’au bout du couloir, je fais un signe à la caméra, la porte s’ouvre. Donc déjà je dois aller au Batiment A.
Je marche en direction de ce batiment à l’aide des indications peintes sur les murs. Je viens de comprendre que ‘ Parloir avocat ‘ doit surement signifier que mon avocat est ici et qu’il souhaite s’entretenir avec moi. J’ai un peu honte de moi de ne pas avoir compris tout de suite, mais mon cerveau est tellement bousculé en ce moment que je n’agis pas aussi bien qu’avant. Sur le chemin, je croise d’autres détenus, souvent bien plus agés que moi. Je me fais taxer une, puis deux cigarettes. Je cache la troisième au fond de ma poche trouée de mon blouson en cuir et réponds que je n’en ai pas lorsque l’on m’en demande une. Après 10 minutes de marche dans ces souterrains, j’arrive enfin devant la salle d’attente du parloir des avocats. Je m’annonce et présente ma « carte d’identité intérieure ». La salle d’attente dans laquelle nous sommes enfermées est rempli de barreaux, les bancs sont en pierre, et l’odeur n’est pas agréable. C’est là que je réalise qu’en prison, il n’est pas possible de se cacher constamment des autres détenus. Quoi qu’il en soit tu sors de ta cellule et tu te retrouves confrontés à tes collocataires. Actuellement nous sommes une quinzaine dans cette salle, un groupe de 10 détenus qui ont l’air de bien se connaître sont en train de quémander une cigarette à un jeune d’une vingtaine d’année qui fait la distribution général sans en avoir réellement le choix. Il ne faut jamais sortir un paquet de cigarette remplis en prison. Bon, les racailles s’attaquent aux sans-défense, aux victimes, mais moins directement entres eux. Il faut que durant tout mon séjour, je passe pour une racaille afin de pouvoir m’intégrer. Quand il veut cet avocat pour venir me sortir de cette salle d’attente malsaine. Je serais mieux dans ma cellule. Je sais que si ce groupe vient vers moi me taquiner, je montrerai des signes de peurs, ils le ressentiront et en rajouteront. La solution : c’est à moi d’aller vers eux. Si je vais vers eux ils penseront que je n’ai pas peur et me prendront presque pour un des leurs. Je me lève et arrive devant le groupe. Essayons de paraître naturel : « 
- Salut quelqu’un a une garro ?
Garro signifie « cigarette en arabe, je ne sais ni comment le prononcer ni comment l’ecrire. Pas de réponse, ils me dévisagent tous. Celui qui paraît être plus ou moins le chef s’approche de moi.
- Ouais ouais, attends. »
Il sort un paquet remplis et m’en tend une. Je la prends et retourne m’asseoir sans les regarder et sans baisser les yeux non plus. Je sors mes allumettes
Je suis maladroit, la cigarette que j’avais caché dans mon blouson tombe par terre. Ils la voient. Je viens de les taxer alors que j’avais une cigarette en poche. Je suis très géné.
Ils me fixent tous, que doit ils penser ? que je me suis foutu de leur gueule ? que je leur ai manqué de respect pour les avoir taxé alors que j’avais déjà une cigarette ? A ce moment un surveillant arrive et m’appelle. Mon avocat est là. Cet avocat a directement essayé d’empêcher le juge de me mettre en prison. Il a échoué. Cet avocat à indirectement réussi à éviter de me faire tabasser en prison. C’est la moindre des choses, pour le prix qu’il doit coûter à mes parents ! Je m’empresse de sortir de cette salle d’attente. Le chef de cette bande de racaille me regarde en me mimant des coups de poings et en me disant des « toi t’es mort ». Je fais semblant de ne pas comprendre et suis ce surveillant qui m’emmène dans une petite salle où se trouve Maître Serveg. Quand je retournerais dans ma cellule, je me ferais un petit carnet où je noterais mes amis et ennemis pour mieux m’y retrouver. Je noterai ce chef de bande.