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Lettre publique au Garde des sceaux du Président du Conseil National des Barreaux

Mise en ligne : 23 juillet 2002

Dernière modification : 16 août 2010

Texte de l'article :

Lundi 22 juillet 2002

Justice

Projet de loi d’orientation et de programmation pour la justice :
Lettre publique au Garde des sceaux du Président du Conseil National des Barreaux


M. le Bâtonnier Jean-René Farthouat, Président du CNB, a rendu publique la lettre qu’il a adressée, au nom du CNB, au Garde des sceaux sur le projet de loi d’orientation et de programmation sur la justice. Cette lettre rappelle, tout d’abord, un certain nombre de « principes » : nécessaire sérénité de la justice, collégialité, respect des personnes en cas d’incarcération. S’agissant de l’incarcération des mineurs, la lettre du CNB affirme qu’elle « ne peut être qu’exceptionnelle et doit aussi répondre à des buts éducatifs et de réinsertion ». Le CNB souligne que les projets du Gouvernement « ne sauraient être envisagés que s’ils sont assortis des moyens nécessaires à leur mise en œuvre ».

Il formule, ensuite les positions suivantes :

  • Comparution immédiate : son extension « n’est envisageable que si elle est entourée d’un certain nombre de garanties ».

  • Instauration du « référé-détention » : elle « aboutit à ce que l’appel du Parquet contre une ordonnance de mise en liberté puisse constituer un titre de détention. Or, le Parquet n’a pas et ne peut avoir au regard des principes constitutionnels et de la Convention EDH un tel pouvoir ».

  • Comparution personnelle devant la chambre d’instruction : « Les limites apportées » à ce droit appellent les mêmes critiques ».

  • Recours au témoin anonyme : il « est toléré par la Cour de Strasbourg dans des circonstances exceptionnelles. Sa généralisation serait très certainement contraire aux dispositions de la Convention EDH ».

  • Présomption d’innocence : « il n’est pas admissible qu’elle puisse aller en s’amenuisant du fait de condamnations successives non définitives, alors que le principe qui gouverne la présomption d’innocence est qu’elle bénéficie à la personne poursuivie jusqu’à sa condamnation définitive. ». « Les dispositions contenues dans le projet, allant dans ce sens paraissent critiquables ». « Il en va particulièrement ainsi des nouveaux délais donnés à la Cour pour statuer qui reviennent notamment pour les courtes peines, à priver le droit d’appel de toute efficacité ». « Le retour à la notion de trouble à l’Ordre public comme critère de mise en détention paraît être une régression regrettable ».

  • Juge de proximité : « il apparaît indispensable que le texte lui donne des garanties statuaires sans lesquelles un juge ne peut être indépendant. Il paraît donc souhaitable que les juges de proximité soient soumis aux mêmes règles de protection que l’ensemble des magistrats du siège ».

    Le CNB, enfin, appelle l’attention du Garde des sceaux « sur l’opportunité de saisir le dépôt de ce projet de loi pour revenir sur les dispositions de l’article 143-1, alinéa 4, du Code de procédure pénale, tel que modifié par la loi du 4 mars 2002, qui crée un nouveau cas de mise en détention dans l’hypothèse où la personne poursuivie a déjà fait l’objet d’une simple poursuite pénale non assortie d’une condamnation ».

    Source
    Conseil National des Barreaux, communiqué du 8 juillet 2002
    JCP G 2002, act. n°30
    © Editions du Juris-Classeur