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Lettre 161 Prison de Turi, 9 janvier 1933

Mise en ligne : 2 mai 2005

Texte de l'article :

Prison de Turi, 9 janvier 1933

Très chère Tania,

J’ai reçu ta carte du 2 et le mandat du 3. Je te remercie de tout cœur. J’espère moi aussi ce mois-ci dépenser moins en médicaments parce que le me sens un peu mieux. Dans le mois de décembre, les dépenses que j’ai faites ont été exactement de 122 lires 05, à savoir : pour les médicaments, 60 lires 70, presque la moitié ; pour la poste, 8 lires 80 ; pour des affaires diverses, 52 lires 55, dont 15,08 pour le tabac, 1 lire pour les allumettes et 0,88 pour du papier à lettres ; pour la nourriture, j’ai dépensé exactement 37 lires 47. Comme tu le vois, j’ai déjà réussi à limiter beaucoup la consommation du tabac proprement dit ; je crois que si l’on considère la quantité de tabac, j’en consomme seulement aujourd’hui 1/15 de ce que je consommais en liberté et si l’on considère la dépense, je dépense aujourd’hui de 1/10 à 1/11 de ce que je dépensais alors. C’est encore trop, selon moi, mais crois bien qu’il est très difficile d’extirper complètement une habitude aussi invétérée et aussi enracinée. Mes conditions de santé se sont un peu améliorées bien que j’aie l’impression d’avoir encore perdu un peu de poids. En effet, j’ai réussi à diminuer encore l’enflure du ventre et Par conséquent à digérer un peu mieux, mais je ne peux manger que peu et les troubles n’ont en rien disparu. Je dors quelques heures chaque nuit, mais pas plus de trois heures et demie et parce que je prends des comprimés de Sedarmit Roche, c’est pourquoi je ne suis jamais reposé et très souvent il me semble être comme suspendu en l’air, sans équilibre physique, dans les conditions où l’on est lorsqu’on éprouve du vertige ou que la tête tourne ou quand on est ivre. Cependant je me sens mieux et j’ai beaucoup moins mal à la tête. Je souffre plus du froid et, chose normale, j’ai eu des engelures aux oreilles alors que, dans le passé, je n’ai jamais souffert, des engelures, même étant enfant, à la différence de mes frères qui, je m’en souviens bien, avaient, certains jours, les pieds et les mains gercés jusqu’au sang. Voilà des nouvelles plus complètes sur ma santé.

Je t’embrasse tendrement.

ANTOINE