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Date : 6-11-2010

Le suicide en prison (publication)

Mise en ligne : 7 novembre 2010

Journée d’étude internationale - Le suicide en prison : mesure, dispositifs de prévention, évaluation - Direction de l’administration pénitentiaire

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Texte de l'article :

Voici les actes d’une journée d’étude internationale organisée par la Direction de l’administration pénitentiaire sur la prévention du suicide en prison organisée à l’École nationale de la magistrature à Paris le 22 janvier 2010. (Télécharger en haut à gauche les actes du colloque « Le suicide en prison : mesure, dispositifs de prévention, évaluation ».)

Les personnes détenues se suicident 6 fois plus que les personnes non-détenues. Les tentatives de suicides et les actes d’auto-mutilation sont en augmentation selon un « plan d’actions stratégiques pour la prise en charge sanitaire des personnes détenues 2010-2014 » présenté le 28 octobre par les ministres de la Santé et de la Justice, commenté notamment par ’’Libération’’ le 28 octobre 2010 et ’’L’Humanité’’ le 4 novembre 2010.

 

’’Libération’’ : http://www.liberation.fr/societe/01012298939-la-prison-sommee-de-se-refaire-une-sante

 La prison sommée de se refaire une santé

Soins . « Libération » s’est procuré le texte du plan gouvernemental sur la médecine en détention.

S’assurer que les préservatifs soient accessibles aux détenus, permettre le dépistage des cancers du sein ou du col de l’utérus pour les femmes incarcérées, rendre automatique un examen bucco-dentaire dès l’arrivée en prison… et faire en sorte qu’un principe plusieurs fois répété soit enfin effectif : les détenus doivent bénéficier de la même qualité de soin que ceux du dehors. Libération s’est procuré le « plan d’actions stratégiques pour la prise en charge sanitaire des personnes détenues 2010-2014 » que doivent présenter cet après-midi les ministres de la Santé et de la Justice.

D’abord, un constat sans appel : on est davantage malade en prison. Les prévalences des infections par le VIH et l’hépatite C sont plus élevées chez les personnes détenues (1,04% pour le VIH et 4,2% pour l’hépatite) que dans la population générale (0,23% et 0,84 %). « L’incidence de la tuberculose y est 8 à 10 fois supérieure », lit-on aussi dans le préambule. Et les auteurs reconnaissent : « Le choc carcéral et l’épreuve de l’enfermement sont susceptibles d’avoir un impact sur la santé. »

Suicides. Tranchant avec l’ergotage de l’administration pénitentiaire, le texte assène : « Les personnes détenues se suicident 6 fois plus que les hommes libres âgés de 15 à 59 ans. Les données récentes montrent une augmentation des actes auto-agressifs dans les établissements pénitentiaires : 2 599 tentatives de suicides et 2 426 automutilations ont été comptabilisées en 2009 (contre 1 699 et 2 187 en 2008). » Le texte prévoit des études épidémiologiques, l’amélioration des données sur le phénomène suicidaire et, en 2012, un plan pluriannuel de mise en conformité des prisons avec la réglementation en matière d’hygiène, de sécurité et de salubrité.

« Le ministère de la Santé va enfin mettre son nez dans les conditions de vie des détenus. Il aurait pu aller encore plus loin et ne pas "cogérer" avec l’administration pénitentiaire les questions de santé en prison, notamment la prévention du suicide : il ne réaffirme pas l’importance du secret médical en prison », commente François Bès, de l’Observatoire international des prisons. « Depuis une réforme de 1994, l’hôpital est arrivé dans la prison. Mais des blocages sont vite apparus, rendant l’accès aux soins souvent théorique, explique-t-il. L’hygiène des locaux, le manque de soins dentaires, la problématique de la mise aux normes des lieux de soins somatiques… tout est enfin mis noir sur blanc avec ce plan, qui donne un programme précis pour y remédier d’ici 2014. L’éventail des thèmes abordés est large : de l’intimité de la vie sexuelle à l’immatriculation à la sécurité sociale. » Bémol, toutefois : « Le plan laisse aux UHSA [unités hospitalières spécialement aménagées, ndlr], ces nouveaux hôpitaux-prisons, le soin de s’occuper des malades psychiatriques. On ne sort pas du principe d’enfermement. »

Seringues. Ce plan reprend une expertise de l’Inserm qui recommandait de « pallier les carences constatées en France : distribution d’eau de Javel [pour désinfecter les seringues], accès aux préservatifs, aux matériels stériles liés à la toxicomanie ». Sans donner de méthode et de calendrier précis. « Alors que le plan est très précis sur les mesures pour éviter la contamination lors des tatouages, il ne dit rien sur les échanges de seringues : ça dérange. C’est pourtant ce qui a réussi à diminuer les contaminations, dehors, dans les années 90 ! s’agace Laura Petersell, d’Act Up. Pour le reste, ce plan est une mascarade, il ne fait que dire : "Il faut appliquer le droit en prison."On oublie juste de rappeler que la prison n’est pas un lieu de soin et qu’il faut appliquer les suspensions de peines prévues pour les malades. »

Par SONYA FAURE

 

’’L’Humanité’’ : http://www.humanite.fr/04_11_2010-comment-pr%C3%A9venir-les-suicides-en-prison-457107

Comment prévenir les suicides en prison ? 


Le gouvernement vient de présenter un plan sanitaire des personnes détenues. Une initiative qui interroge la déontologie des thérapeutes intervenant en milieu carcéral.

À dix-sept ans, Tony s’est pendu avec ses draps dans sa cellule de la maison d’arrêt de Rouen, le 10 octobre dernier. Son tragique destin rappelle que les détenus se suicident six fois plus que les hommes libres. Un constat que les pouvoirs publics ne peuvent plus faire mine d’ignorer. L’augmentation des suicides de 109 en 2008 à 115 en 2009 a été qualifiée de «  dramatique  » par la ministre de la Justice, Michèle Alliot-Marie, lors de la présentation, la semaine dernière, du plan sanitaire des personnes détenues (voir encadré). Un texte qui confirme les mesures du plan de prévention contre le suicide, lancé en août 2009, et plutôt bien accueilli.

Afin de repérer les risques, le personnel pénitentiaire doit être formé et les thérapeutes participeront dans les commissions pluridisciplinaires uniques (CPU) en charge d’examiner la situation individuelle des détenus. Les «  cellules de protection d’urgence  » avec des «  kits antisuicide  » comprenant «  deux couvertures indéchirables, un pyjama à usage unique  », et des vidéosurveillances renforcées sont mises en place, comme le détaille une note d’un directeur pénitentiaire. Des «  codétenus de soutien  » auront pour mission de veiller sur leur compagnon de cellule présentant une souffrance psychique. Cela explique, pour la ministre, qu’il y ait eu «  90 suicides à ce jour contre 104 l’an dernier à la même époque  ».

Anne Henry, responsable d’un service médico-psychiatrique régional, salue ces bonnes intentions. Mais cette psychiatre craint que «  le repérage des personnes à risque prenne le pas sur la thérapeutique ou sur la prévention sociale  ». Au travers des commissions pluridisciplinaires, les personnes incarcérées ne sont plus appréhendées individuellement, mais «  de manière globale, voire totalisante  ». Le secret médical y devient «  un secret partagé  » avec l’administration pénitentiaire, ce qui est contraire à la déontologie. Une «  surveillance adaptée  » pour des détenus à risque est peu éloignée des surveillances «  spéciales  » des détenus risquant de s’évader. Et le réveil toutes les deux heures d’un individu pour s’assurer qu’il est toujours en vie aggrave sa fragilité psychique. «  Repérer les risques est important, mais ne peut en aucun cas remplacer l’amélioration des conditions de détention  », rappelle 
Anne Henry.

Pierre Duquesne