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Liens familiaux

Le droit à une sexualité choisie

Mise en ligne : 17 juin 2008

Texte de l'article :

A la lecture de nombreux articles, j’ai constaté le flou artistique qui enveloppe la question de l’intimité - et de la sexualité - entre les détenu (e) s et leur compagne / compagnon. Interdite mais pas formellement réprimée et punie sans réelle justification, instrument de pouvoir des surveillants sur les détenu (e) s. On distribue des préservatifs et du lubrifiant pour enrayer la course du HIV, on autorise les femmes détenues depuis 2 ans à cantiner des godemichés... Mais l’intimité du couple reste taboue. Une femme qui vient en jupe au parloir sera plus surveillée et sujette aux railleries des autres visiteuses. Le surveillant cogne dans la porte si l’ambiance devient trop affectueuse, toucher la peau de votre conjoint (e) vous expose à l’humiliation de s’entendre dire « la prochaine fois je fais un rapport », comme si vous étiez des gosses désobéissants. Et si ça va plus loin, alors là... ou vous croyez vous ? Vous êtes en prison. L’amour, la tendresse, l’intimité, ça non, c’est pour les couples du dehors. On en fait une fixation à force. Le sexe est le sujet central en prison et pour le conjoint qui attend dehors. L’administration se fait un devoir de réprimer tout élan. S’il n’y avait que le sexe... car les relations furtives qui ont parfois lieu excluent l’essentiel, ce qui manque vraiment à tous : l’intimité, la douceur dont sont privés les détenus et celles qui les attendent dehors, les caresses. Ceux qui décident de prendre le risque d’être punis pour un rapide échange restent frustrés, se sentent coupables vis-à-vis de leur compagne. Rien de beau dans ces rapports clandestins. Le couple en souffre. Pourquoi tout ça ?
Les UVFs ? Belle révolution. Il était temps. N’empêche... On croirait qu’on nous a jeté un os vieux et sec pour nous faire taire. « Mais si, messieurs dames, nous faisons quelque chose pour régler le problème de la sexualité des détenus ». Mais voilà, les UVFs c’est pour les condamnés. Et encore, pas tous. Les UVFs c’est tous les 3 mois. Et pour les détenus en attente de jugement, présumés innocents ? Rien. On sait que beaucoup d’affaires tardent plus de 2 ans à être jugées. Alors les UVFs ça fait un peu rire jaune. Concrètement, qu’est-ce que ça coûterait, des parloirs intimes d’une heure une fois par mois, pour tous les détenus ? Pas de grands changements, que d’aménager quelques boxes avec une banquette, enfin personne ne réclame une suite 5 étoiles. Juste un moment sans coup d’œil des surveillants. Juste un petit moment à deux, vraiment deux, pour ne pas oublier totalement le corps de l’autre, pour être autorisés à se sentir encore un couple, pour amenuiser un peu le fossé qu’il faudra combler à la sortie, fait de tous les manques endurés.
Etre révoltée contre le système pénitentiaire ne me suffit plus depuis longtemps. Mes mots d’amour sont lus, soit. Mes gestes d’amour sont interdits et espionnés. Je ne comprends pas. A qui ça fait du mal, qu’un détenu aime sa femme ? Il n’en est pas moins enfermé, puni, il fait sa peine comme n’importe quel autre. Quel est le sens de cette interdiction ? L’enfermement ne suffit donc pas ? Il faut ajouter la souffrance à la privation de liberté ? Pourquoi ?

Laetitia