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Le casier judiciaire

Publication originale : 1er mai 2002

Texte de l'article :

Véritable peine après la peine et boulet pour la réinsertion, le casier judiciaire est notamment prévu dans le but de sanctionner plus sévèrement d’éventuels récidivistes et d’accorder plus de clémence aux prévenus « primaires ». Cette mémoire des parcours individuels matérialisée par le casier judiciaire peut s’effacer avec le temps ou, à certaines conditions, sur requête de l’intéressé.

 689-Qu’est-ce qu’un casier judiciaire ?
Le casier judiciaire est un registre national automatisé des condamnations pénales de certaines décisions judiciaires. Les informations ainsi centralisées font l’objet des trois bulletins (B1, B2, B3). Elles doivent être communiquées à certaines personnes mais leur contenu varie en fonction de la qualité de leurs destinataires.

Le bulletin n°1 (B1) comprend toutes les fiches, c’est-à-dire les mentions des condamnations prononcées (accompagnées ou non d’interdictions et d’incapacités), les sanctions disciplinaires, administratives ou judiciaires (par exemple, la révocation de fonctionnaire), les déchéances de l’autorité parentale, les faillites ou règlements judiciaires des commerçants et les arrêtés d’expulsion. Le B1 est exclusivement destiné aux autorités judiciaires. Mais l’intéressé peut demander au procureur de la République d’en prendre connaissance. Cette communication se fera par oral.
Le bulletin n°2 (B2) est une version allégée du casier judiciaire qui ne comporte qu’un nombre limité de décisions judiciaires. Il est destiné à certaines administrations.
Le bulletin n°3 (B3) est encore plus allégé. Il ne comporte que les interdictions, déchéances ou incapacités sans sursis. Seule la personne concernée peut se procurer le B3 (gratuitement). C’est également ce bulletin qui peut être demandé par certains employeur pour juger de la « moralité » d’un candidat à l’embauche. Pourtant, la chambre sociale de la Cour de cassation a très clairement décidé dans un arrêt du 25 avril 1990 que le salarié « n’avait pas l’obligation de faire mention de ses antécédents judiciaires ».
Articles 768 et suivants du Code de procédure pénale

690-Dans quelles conditions les condamnations peuvent-elles être effacées du casier judiciaire ?
Sont notamment retirées du casier judiciaire les fiches correspondant à des condamnations amnistiées. Il en est de même des condamnations réhabilitées, de celles vieilles de 40 ans (hormis les faits imprescriptibles) si elles n’ont pas été suivies d’autres condamnations. Les condamnations de mineurs à des peines inférieurs ou égales à deux mois d’emprisonnement sont également retirées du casier judiciaire lorsque l’ex-condamné a atteint ses 18 ans. Les condamnations visant des mineures à des peines comprenant un délai d’épreuve (sursis avec mise à l’épreuve, par exemple) sont également effacées du casier judiciaire à l’issue de ce délai.
Articles 769 et 769-2 du Code de procédure pénale

691-Qu’est-ce que le relèvement ?
Le relèvement a pour objet de priver d’effet les interdictions, déchéances et incapacité induites par la condamnation, ou prononcées à titre de peine complémentaire. Il ne « nettoie » donc pas le casier judiciaire : les condamnations y demeurent, seules les interdictions sont neutralisées.
La procédure de relèvement diffère suivant que l’interdiction, la déchéance ou l’incapacité sont comprises dans la condamnation ou résultent d’une peine complémentaire. Dans le premier cas, le relèvement peut être demandé par l’avocat lors du jugement. Dans le second cas, la demande ne peut intervenir qu’après un délai de six mois. Dans les deux cas, les demandes peuvent être renouvelées tous les six mois. Elles sont adressées au procureur de la République qui les transmet à la juridiction de condamnation. Le procureur, le condamné ou son avocat doivent être entendus. La juridiction doit, pour se prononcer, tenir compte de la conduite de l’intéressé et de sa dangerosité.
Le condamné à une peine de suivi- socio-judiciaire doit adresser sa demande de relèvement au juge d’application des peines. Cette demande ne peut pas intervenir dans l’année qui suit la condamnation. Par la suite, elle ne peut être renouvelée qu’une seule fois par an.
En matière e droit des étrangers, seules les personnes dont l’interdiction du territoire français constitue une peine complémentaire à la peine d’emprisonnement peuvent faire une requête en relèvement. Pour faire cette requête, il faut obligatoirement se trouver dans l’une des situations suivantes : être assigné à résidence par décision du ministère de l’Intérieur ; être en détention ; être hors du territoire français. Toute requête présentée moins de six mois après la condamnation est irrecevable.Articles 132-21 du nouveau code pénal, 702-1, 703 et 763-6 du Code de procédure pénale, 28 bis de l’ordonnance du 2 novembre 1945

692-Qu’est-ce qu’une dispense d’inscription des condamnations auxB2 et B3 ?
La juridiction peut, soit dans le jugement de condamnation, soit sur requête ultérieure du condamné, accorder une dispense d’inscription de la condamnation aux bulletins n°2 et 3. Si plusieurs condamnations ont été prononcées, la juridiction compétente est la dernière ayant statué. La dispense d’inscription entraîne le relèvement des incapacités, interdictions et déchéances comprises de plein droit dans la condamnation. Elle est donc sans effet sur les incapacités, interdictions et déchéances prononcées par la juridiction en complément de la peine principale.
Articles 702-1, 703, 775-1 et 777-1 du Code de procédure pénale, chambre criminelle de la Cour de cassation, arrêt du 5 février 1990

693-Qu’est-ce que la réhabilitation ?
La réhabilitation entraîne l’effacement de la peine prononcée. Il en existe deux : la réhabilitation de plein droit et la réhabilitation judiciaire. La réhabilitation de plein droit est automatique. La réhabilitation judiciaire doit être demandée à la chambre de l’instruction (ou d’accusation) de la Cour d’appel. Leurs effets sont identiques.
Articles 133-12 et suivants du nouveau Code pénal, 782 et suivants du Code de procédure pénale

694-Quand peut-on bénéficier d’une réhabilitation de plein droit (ou réhabilitation légale) ?
Une personne qui a été condamnée à une peine d’amende sera automatiquement réhabilitée trois ans après le paiement de l’amende ou à expiration de la contrainte par corps. Une personne qui a fait l’objet d’une seule condamnation inférieure à un an d’emprisonnement sera réhabilitée cinq ans après l’exécution de sa peine, ou de sa prescription. Une personne qui a été condamnée à une peine inférieure à dix ans ou à plusieurs peines dont le total est inférieur à cinq ans sera réhabilitée dix ans après l’exclusion de ses peines, ou l’accomplissement de la prescription.
Les peines dont la confusion a été accordée sont considérées comme constituant une peine unique en ce qui concerne la réhabilitation. La peine de prison est considérée comme exécutée à compter de leur libération, définitive ou conditionnelle. De plus, il est bien évidemment nécessaire de ne pas avoir été à nouveau condamné à une peine criminelle ou correctionnelle durant ces délais. Enfin, pour les personnes condamnées à une peine de suivi socio-judiciaire, la réhabilitation ne produit ses effets qu’à la fin de cette mesure.
Lorsque la peine est assortie de sursis, la condamnation est automatiquement retirée du casier judiciaire dans les délais identiques calculés à compter du jour où le délai d’épreuve prend fin.
Articles 133-13 et 133-16 du nouveau Code pénal, 769 du Code de procédure pénale

695-Quand peut-on solliciter une réhabilitation judiciaire ?
Les délais pour formuler la demande varient selon la nature de la peine prononcée, la situation du condamné du point de vue de la récidive, la prescription ou l’exécution de la peine. Lorsque la peine a été exécutée, la demande de réhabilitation ne peut intervenir qu’après un délai d’un an pour une contravention ; de trois ans pour un délit ; de cinq ans pour un crime ; de six ans pour les récidivistes qui n’ont subi aucune peine criminelle et les condamnés qui, après avoir été réhabilités, ont encouru une peine délictuelle ; de dix ans pour les récidivistes qui ont exécuté une peine criminelle, et les réhabilités qui ont encouru une peine criminelle.
Ce délai se compte à partir du jour où la peine privative de liberté a pris fin ou du jour de libération conditionnelle lorsque celle-ci n’a pas été révoquée. Le condamné doit justifier du paiement des amendes ou dommages et intérêts.
Articles 769, 786, 789 et 789 du Code de procédure pénale

696-A qui doit-on adresser une demande de réhabilitation ?
Le condamné doit adresser sa demande au procureur de la République de son lieu de résidence. La demande doit préciser la date de la condamnation et les lieux où le condamné a résidé depuis sa libération. Elle doit par ailleurs porter sur l’ensemble des condamnations prononcées qui n’ont pas déjà fait l’objet d’une réhabilitation.
Articles 785 et 790 du Code de procédure pénale

697-Qui instruit le dossier de demande de réhabilitation ?
Le procureur de la République instruit le dossier. Il demande l’avis du juge de l’application des peines et peut s’entourer de tous renseignements utiles aux différents endroits où le condamné a pu séjourner. Il se fait par ailleurs délivrer un extrait du registre des lieux de détention où la peine a été subie faisant mention de la conduite du condamné. Ensuite, il transmet le dossier avec son propre avis au Procureur général. Ce dernier saisit la chambre de l’instruction (ou d’accusation) qui doit statuer dans les deux mois.
Le requérant peut aussi adresser directement à la Cour tous les éléments qu’il juge utiles. Son avocat ou lui-même doivent être entendus. La chambre de l’instruction a l’obligation de motiver sa décision sur la conduite du condamné pendant le délai d’épreuve. Elle peut cependant rejeter comme prématurée une demande de réhabilitation en se fondant sur la gravité des faits qui ont motivé la condamnation. Le seul recours possible contre l’arrêt de la chambre de l’instruction est un pourvoi en cassation.
Articles 791, 792 à 795 du Code de procédure pénale

698-Peut-on faire une nouvelle demande après un rejet ?
Il est possible de faire une nouvelle demande après un rejet mais il faut attendre un délai de deux ans. Il n’existe qu’une seule exception à cette règle : lorsque la chambre de l’instruction (ou d’accusation) a motivé son rejet sur le fait que la première demande a été introduite avant l’expiration du délai d’épreuve. Le condamné peut alors déposer une nouvelle requête dès l’expiration de ce délai.
Article 797 du Code de procédure pénale

699-Quels ont les effets de la réhabilitation ?
Elle efface du casier judiciaire les condamnations prononcées ainsi que les toutes les incapacités et déchéances qui résultent de la condamnation. En outre, il est interdit à toute personne qui pourrait prendre connaissance du passé pénal de l’intéressé à l’occasion de ses fonctions d’en faire état.
Articles 133-16, 133-10, 133-11 du nouveau Code pénal.