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Religieuses à Fleury, une humiliation pour la "République"

Extraits du CIMADE hors série Juillet-Aout 2001

Mise en ligne : 16 août 2002

Texte de l'article :

Extrait 1
Centre de Rétention Paris – Palais de Justice

La Préfecture de Police de Paris dispose de deux centres officiels de rétention administrative : Vincennes et le centre de rétention situé sous le Palais de Justice de Paris, appelé le « dépôt ». Dans ces deux centres, hormis la zone de rétention réservée aux femmes, les conditions de rétentions, du point de vue du respect des droits, se sont peu à peu harmonisées. L’intervention des mêmes services dans ces deux centres et le suivi assuré par le 8° bureau de la Direction de la Police Générale (D.P.G.) ont fait apparaître un certain alignement des pratiques. De ce fait, certains dysfonctionnements signalés dans le rapport sur Vincennes sont illustrés d’exemples relatifs au fonctionnement du « dépôt ».
Le rapport qui suit ne reprend donc pas l’ensemble de ces dysfonctionnements, mais les complète en évoquant les problèmes particuliers à ce lieu et à sa population.

Extrait 2
La partie affectée aux femmes du centre de rétention du Palais de justice de Paris

La partie affectée aux femmes du centre de rétention du Palais de justice de Paris est une situation unique dans les 13 centres de rétention visités par la CIMADE. Dans ce lieu, situé au dépôt du Palis de Justice et complètement distinct du centre de rétention « homme », la gestion hôtelière et la fonction de médiation sont attribuées à un ordre religieux, les Sœurs de Marie Joseph de la Miséricorde. Cet ordre est présent au dépôt du Palis de Justice (ainsi qu’à la maison d’arrêt des Femmes de Fleury-Mérogis) depuis le début du 19°siècle, par convention avec le Ministère de la Justice renouvelée le 6 décembre 1995.
La fonction de ces Sœurs est floue et ne permet pas dans les faits le simple exercice des droits des personnes. Ces religieuses n’ont aucune formation leur permettant de distinguer les statuts différents de la garde à vue et de la rétention administrative, et donc de faciliter l’exercice du droit de recours spécifique à la procédure d’éloignement. Lors de demandes d’information sur une présentation à une audience, un recours ou toute autre information liée au maintien en rétention, la CIMADE est souvent saisie.
Nous estimons anormal que cet ordre religieux assure auprès des femmes en rétention l’accueil et la fonction de médiation dont nous voyons quotidiennement l’importance auprès des retenus hommes. La brièveté des délais de recours et les conditions particulières de la rétention nécessitent la présence permanente d’un personnel spécifiquement formé. Il existe aujourd’hui une inégalité flagrante des conditions d’exercice des droits entre les femmes et les hommes pourtant retenus à quelques dizaines de mètres.

Extrait 3
Attributions

Les intervenants au centre de rétention, pour la partie hommes, sont les mêmes qu’au centre de rétention de Vincennes :
- La garde du Centre ainsi que les escortes, sont assurés par la police Nationale, via une équipe spécifiquement affectée à ces missions.
- Des agents du ministère de la Justice assurent, de la même manière qu’à Vincennes, une action d’hôtellerie et de médiation vis à vis des retenus. Toutefois, leur sous-effectif chronique affecte leur disponibilité et donc la qualité de leur intervention. Outre le gestionnaire, un seul agent d’accueil est en cohabitation avec les retenus, ce qui est insuffisant au regard de l’augmentation de la fréquentation du centre cette année (+150%). Une partie des activités (alimentation, nettoyage, distributeurs) est sous-traitée, comme à Vincennes, à des entreprises privées.
- Le service médical est assuré comme à Vincennes par l’intervention de personnel médical dépendant de l’Hôpital de la Croix St Simon. Un infirmier est présent en permanence, et des médecins assurent des vacations journalières.

Pour la zone de rétention des femmes, le statut flou auquel elle est soumise rend la répartition des responsabilités et attributions très particulière.

- Située dans le dépôt, la partie « femme » est également gardée par la Police Nationale.
- Les agents du ministère de la justice ne sont pas présents dans cette zone, mais fournissent les plateaux-repas et les kits d’hygiène aux femmes retenues.
- Le personnel médical du centre de rétention peut rendre visite aux femmes retenues mais ne dispose d’aucun local pour affecter les soins et procéder aux examens médicaux.
- Enfin, situation unique, la gestion hôtelière et la fonction de médiation est attribuée à un ordre religieux, les Sœurs de Marie Joseph de la Miséricorde. Cet ordre est présent au « dépôt » du Palais de justice (ainsi qu’à ma maison d’arrêt des femmes de Fleury-Mérogis) depuis le début du 19°siècle, par convention avec le Ministère de la Justice renouvelée le 6 décembre 1995.
La fonction de ces Sœurs est floue et ne permet pas dans les faits le simple exercice des droits des personnes. Ces religieuses n’ont aucune formation leur permettant de distinguer les statuts différents de la garde à vue et de la rétention administrative, et par la-même l’exercice de recours spécifiques contre le procédure d’éloignement. En cas de demande d’information sur une présentation à une audience, un recours ou toute autre information liée au maintien en rétention, la CIMADE est souvent saisie.
Nous estimons anormal que cet ordre religieux assure auprès des femmes en rétention l’accueil et la fonction de médiation dont nous voyons quotidiennement l’importance auprès des retenus hommes. La brièveté des délais de recours et les conditions particulières de la rétention nécessitent la présence permanente d’un personnel spécifiquement formé. Il existe aujourd’hui une inégalité flagrante des conditions d’exercice des droits entre les femmes et les hommes pourtant retenus à quelques dizaines de mètres.

Nous renouvelons donc notre demande de normalisation des conditions faites aux femmes retenues, passant par l’accès aux mêmes services et intervenants.