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  • Communiqué

Drôle d’anniversaire

Communiqué de presse Ban Public

Mise en ligne : 19 novembre 2009

Dernière modification : 6 novembre 2013

L’association Ban Public est injustement accusée de diffamation par le centre de détention de Melun pour avoir relayé, au printemps dernier, sur son site internet, les propos d’un ancien prisonnier, François Korber, qui dénonce les conditions, réelles et avérées, d’achat et de location de téléviseurs et réfrigérateurs en prison. Une situation parfaitement scandaleuse, également exposée dans la presse, notamment dans un long article de La Croix du 29 juillet dernier.

Pour la première fois, en 10 années d’existence, l’association qui a pour but de favoriser la communication sur les problèmes liés à l’incarcération et à la détention, et d’aider à la réinsertion des personnes incarcérées, est accusée de diffamation. Et elle l’est injustement.

Drôle d’anniversaire, pour nous qui défendons le droit d’expression. Qui nous battons contre les difficultés croissantes à communiquer sur l’univers pénitentiaire… Qui n’existons que par la générosité de quelques bénévoles s’obstinant à montrer la prison telle qu’ils la connaissent - telle qu’elle est…

Nous ne nous laisserons pas impressionner par les accusations absurdes et infondées du centre de détention de Melun. Nous défendons la nullité de la citation à comparaître, et espérons que Ban Public sera largement soutenue, en vue de l’audience du 26 novembre, à 14 heures, au tribunal de grande instance de Melun, Palais de Justice, 2 avenue du Général Leclerc, 77010 MELUN (à deux minutes de la station « Melun », RER D).

Tous les appuis seront les bienvenus : nous nous exposons à une lourde amende, notre survie est en jeu.

Pour ses 10 ans, l’association Ban Public est injustement citée à comparaître pour diffamation. Nous dénonçons cette situation et défendons plus que jamais notre droit à communiquer sur la prison.

Texte de l'article :

Communiqué de Presse du 19/11/2009


L’affaire

Le 6 juillet dernier, nous avons eu la désagréable surprise d’apprendre – par voie de citation directe – que l’association Ban Public était poursuivie en diffamation et citée à comparaître au tribunal de grande instance de Melun, par une fonctionnaire du centre de détention de Melun, à propos d’écrits de François Korber publiés sur notre site Internet depuis le 6 avril 2009.
 
François Korber mène plusieurs actions en justice pour dénoncer l’impossibilité pour les personnes incarcérées d’acheter une télévision, et l’obligation pour elles de la louer à des tarifs dispendieux. Nous avons mis en ligne l’intégralité de ses plaintes et requêtes sur le site internet de Ban Public : www.banpublic.org

Les affirmations de cet ancien prisonnier sont exactes, et vérifiées. Pour preuve, le sous-directeur chargé de la sécurité au sein de l’administration pénitentiaire, Séphane Scotto, interrogé sur le combat de François Korber, affirme dans La Croix du 29 juillet 2009 : « Nous ne méconnaissons pas ce sujet ; le 1er janvier 2010, une trentaine d’établissements vont plafonner la location à 18 euros par mois »…

En droit français, la diffamation est l’allégation ou l’imputation d’un fait qui porte atteinte à l’honneur ou à la considération de la personne à laquelle le fait est imputé (article 29, loi 29 juillet 1881). La diffamation peut être publique ou privée : dans le cas présent, c’est le caractère public des propos qui est reproché à l’association. Nous sommes poursuivis à titre principal puisque nous avons rendu ces propos publics via le site Internet de l’association. François Korber est poursuivi en qualité de complice car il est l’auteur de ces propos (loi sur la presse du 29 juillet 1881, qui protège notamment la liberté d’expression des journalistes).

La diffamation est une infraction pénale. L’association encourt une forte peine d’amende, et si elle n’est pas en mesure de l’honorer, elle pourra être liquidée. Le cas échéant, c’est son président qui se trouvera personnellement engagé.

Nous exigeons la fin du système révoltant dénoncé par François Korber, et dénonçons à l’occasion de cette affaire les abus de l’administration pénitentiaire.

D’une prison à l’autre, les écarts de prix vont de 5% à 138% pour les frais de cantine ou de télévision. Les budgets peuvent atteindre plus de 38€ par mois (Maison d’arrêt de Montmédy), alors que 35% des personnes incarcérées vivent avec moins de 45 €. L’inégalité règne entre les établissements, les conditions réglementaires et les prix pratiqués n’étant pas les mêmes pour tous.

L’absence totale d’autonomie de la personne incarcérée dans la gestion de son argent est insupportable, et les libertés illégitimes parfois prises par l’administration pénitentiaire sont inacceptables  : liberté d’anticiper le prélèvement de l’abonnement mensuel à la télévision (ou au réfrigérateur) ; liberté de pratiquer, dans une cellule de 3 personnes, un prix multiplié par 3 pour un seul téléviseur ; liberté de déplacer un prisonnier sans lui remettre sa télévision, dont la location a été payée, sous prétexte qu’il a changé de cellule… Cette situation est d’autant plus intolérable qu’elle concerne des personnes en situation de faiblesse, puisque incarcérées, et qui, de surcroît, ont pour la plupart de très faibles ressources.

En conclusion

Au delà de cette poursuite en diffamation, que nous déplorons, nous tenons à confirmer et développer notre position. Nous exigeons  :

> Une totale transparence sur les contrats passés entre les prisons, les associations dites « socioculturelles », et les personnes physiques ou morales. Car ce sont ces associations qui se chargent de la location.

Le scandale est d’autant plus grand que les associations socioculturelles et sportives des établissements pénitentiaires sont exonérées de redevance audiovisuelle. Constituées auprès des établissements pénitentiaires, elles ont pour objet de favoriser la réinsertion sociale des personnes incarcérées (code de procédure pénale, art. D.442). Il s’agit de personnes morales de droit privé relevant de la loi de 1901. Elles sont exonérées de redevance audiovisuelle au titre des téléviseurs qu’elles détiennent et qu’elles mettent à la disposition des personnes incarcérées. Cette exonération s’applique aux redevances établies à compter de 2009 ainsi qu’aux contentieux en cours et à venir, concernant les années antérieures.
 
> La communication des tarifs, prison par prison, de location des téléviseurs et réfrigérateurs.

> La signature par chaque personne louant ou achetant un téléviseur ou un réfrigérateur d’un contrat de vente ou de location en bonne et due forme, avec les garanties du droit commun.

> L’intégration des personnes incarcérées dans les conseils d’administration des associations socioculturelles, afin qu’elles puissent cogérer ces structures.

> La diffusion des rapports d’activité des associations, après quitus des personnes incarcérées appartenant aux conseils d’administration.

> La possibilité d’achat et/ou de location des téléviseurs et réfrigérateurs par les personnes incarcérées dans tous les établissements, comme semble le promettre Stéphane Scotto à échéance du 1er janvier prochain (cf. entretien avec La Croix du 29/07/09).

> L’application immédiate du plafonnement des tarifs de location des téléviseurs et réfrigérateurs à tous les établissements pénitentiaires, sans exception.

Contact Presse Ban Public :

redaction@banpublic.org


Créée en 1999, BAN PUBLIC est une association loi de 1901, areligieuse, adogmatique et apolitique, qui a pour but de favoriser la communication sur les problèmes liés à l’incarcération et à la détention, et d’aider à la réinsertion des personnes incarcérées. Elle est composée d’ancien(ne)s prisonnier(e)s, d’avocat(e)s, de journalistes, d’universitaires, d’artistes, d’associations… de femmes et d’hommes éprit de justice.
BAN PUBLIC développe son action sur le site Internet www.banpublic.org