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Conditions d’incarcération

Conditions de détention à Toulon et Loos-les-Lille

Mise en ligne : 6 septembre 2005

Dernière modification : 28 décembre 2010

Texte de l'article :

CONDITIONS DE DÉTENTION
Deux prisons aux conditions de détention « inhumaines » vont être réaménagées.
En réponse au rapport accablant du Conseil de l’Europe qui dénonçait des conditions de détention « inhumaines » dans les prisons françaises, le ministre de la justice prévoit de « remplacer » deux établissements. (Le Monde, mars 2004)

Le ministère de la Justice envisage de réduire la surpopulation carcérale dans les prisons de Toulon (Var) et de Loos-lès-Lille (Nord), a fait savoir, jeudi 2 février, le cabinet de Dominique Perben. Le Conseil de l’Europe avait dénoncé les conditions de détention « inhumaines » dans ces établissements.

Les observations du Comité européen pour prévention de la torture (CPT) étaient sévères. Cet organe du Conseil de l’Europe a visité trois prisons françaises en juin 2003 (Loos, Toulon, Clairvaux) en raison d’informations sur le nombre de suicides en détention, passé de 104 à 122 entre 2001 et 2002. Le CPT avait estimé qu’elles relevaient de « traitements inhumains et
dégradants ». Dominique Perben, le ministre de la Justice, a répondu point par point aux remarques du CPT et conteste la plupart de ses analyses.

« J’ai indiqué au Conseil de l’Europe que les deux établissements vont être remplacés en juin prochain pour Toulon et mai de l’année prochaine pour Loos », a affirmé le ministre lors d’une conférence de presse. Son cabinet, interrogé sur le sens du terme « remplacés », a précisé que la prison de Loos serait soulagée d’une partie de ses détenus en mai 2005 avec l’ouverture du nouveau centre pénitentiaire de Sequedin. Il en sera de même pour Toulon en juin, avec l’entrée en activité du centre de La Farlède, dans la banlieue de la ville.

« Traitements inhumains »
A Loos, 1 103 détenus s’entassaient pour 461 places, soit un taux d’occupation de 239% et à Toulon, le taux était de 240%, avec 348 détenus pour 140 places, soulignait le rapport. Les détenus étaient enfermés à « trois dans des cellules de 9m2 et certains étaient contraints de dormir sur des matelas étendus sur le sol ». Les femmes, quant à elles, étaient parquées à « quatre, voire même cinq dans des cellules de 12m2 ».
Le rapport dénonçait des locaux « vétustes, mal entretenus, voire [...] insalubres » et évoquait des WC « dégradés [...] partiellement en cloisonnés. » A Loos, des « containers débordant d’immondices malodorantes » étaient laissés « plusieurs heures durant à l’entrée des sections, par là-même où étaient acheminés les chariots de repas. » Par ailleurs, dans les deux maisons d’arrêt, « la grande majorité des personnes détenues passaient le plus clair des journées dans une très grande oisiveté ».

De son côté, l’Union fédérale autonome pénitentiaire (UFAP), principal syndicat de surveillants de prison, avait attesté, le 28 janvier, de « la véracité des constats effectués » par le CPT.

En conclusion, le CPT avait demandé aux autorités françaises d’améliorer une réalité qui relève des « traitements inhumains ou dégradants » prohibés par l’article 3 de la Convention européenne des droits de l’homme. Évoquant le programme de construction de 13 000 nouvelles places à l’horizon 2007 lancé par le gouvernement, le CPT avait écrit que « l’augmentation de la capacité d’accueil du parc pénitentiaire ne doit pas être la première et principale réponse » aux problèmes soulevés. Pour le comité, la surpopulation est liée « à une politique pénale répressive ».

En février, le nombre de détenus a repassé la barre des 60 000, en hausse de 2,8% par rapport au mois dernier et de 7,3% par rapport à février 2003, a annoncé le 10 février l’administration pénitentiaire qui pointe un taux moyen d’occupation des établissements de 124,5 %.

Avec la création de nouveaux délits (racolage passif, occupation de hall d’immeuble, mendicité agressive...) et la nouvelle loi sur la grande criminalité de Dominique Perben, le gouvernement « encourage le recours à la prison », avait observé fin janvier Pierre Tournier, président de l’Association française de criminologie (AFC).

Source : Jéricho n°188, mars 2004, ANVP