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A. Sortir la prison de l’exception juridique

Mise en ligne : 30 mars 2004

Texte de l'article :

A. Sortir la prison de l’exception juridique

Dans sa résolution du 17 décembre 1998, le Parlement européen a invité tous les Etats membres à élaborer une " loi fondamentale sur les établissements pénitentiaires qui définisse un cadre réglementant à la fois le régime juridique, le droit de réclamation ainsi que les obligations des détenus et prévoie un organe de contrôle indépendant auquel les détenus puissent s’adresser en cas de violation de leurs droits ". Plus largement, tant les " Règles minima " des Nations Unies que les recommandations du Conseil de l’Europe (dont les Règles pénitentiaires) ou du Parlement européen incitent depuis plusieurs années les Etats à réviser leur législation pénitentiaire en ce qui concerne les conditions générales de détention mais aussi pour ce qui est des statuts de la personne détenue comme du personnel.
Quant aux organes de la Convention européenne des droits de l’homme (dont le Comité de prévention de la torture), ils souhaitent que le droit commun vienne à s’appliquer dans les établissements pénitentiaires.
Le respect de l’Etat de droit implique la restauration de la hiérarchie des normes qui encadrent l’intervention de la puissance publique. L’adage classique selon lequel " le législateur fixe les peines, le juge les prononce, l’administration les exécute ", entendu comme laissant au pouvoir exécutif le soin de déterminer les règles applicables à la prison, n’est pas conforme à notre droit. Il est indispensable que le législateur fixe un cadre précis et cohérent à l’intervention de l’administration pénitentiaire. La Constitution de 1958 réserve une compétence exclusive au législateur pour définir " les règles concernant les droits civiques et les garanties fondamentales accordées aux citoyens pour l’exercice des libertés publiques ". Cette compétence concerne également " la procédure pénale ". La Constitution est parfaitement explicite : seule la loi peut fixer le cadre juridique organisant l’usage des libertés. La portée de cette prescription ne saurait varier selon le service public concerné.
Actuellement, trop de dispositions affectant les droits fondamentaux des personnes incarcérées sont réglementées par des normes subordonnées (décrets, circulaires, notes de services, règlements intérieurs des établissements). En particulier, la détermination par voie d’instructions de service de règles en matière d’exécution des peines, alors même que ces dispositions sont dépourvues d’autorité à l’égard des juridictions compétentes, doit être prohibée. Au plan matériel, trop nombreuses sont les dispositions édictées par l’administration qui méconnaissent les principes fondamentaux.

2. Partant de ce constat, la CNCDH préconise la rédaction, dans les plus brefs délais, d’un ensemble de règles cohérent. Ces dispositions législatives devront être énoncées en des termes suffisamment clairs et précis et ne pas renvoyer à l’administration le soin de fixer les règles applicables aux personnes détenues, dans des matières relevant du domaine de compétence du Parlement, comme c’est le cas aujourd’hui.
Le principe de sécurité juridique nécessite que les normes présentent des caractéristiques d’accessibilité et d’intelligibilité suffisantes. A cet égard, l’élaboration d’un Code de l’exécution des peines apparaît aux yeux de la CNCDH comme la solution la plus adaptée pour garantir la cohérence du corpus des règles applicables à la prison et un accès au droit effectif aux justiciables.
Il paraît important que trois lignes directrices guident le législateur dans cette entreprise de refonte du droit, applicable à la période de privation de liberté :
- l’application du droit commun à l’administration pénitentiaire, pour assurer un meilleur équilibre entre les impératifs de sécurité et la protection des droits et libertés.
- l’affirmation de la mission de restauration du lien social et de préparation des condamnés à un retour à la liberté comme fonction essentielle du service public pénitentiaire.
- l’instauration d’un dispositif de contrôle indépendant et permanent, capable de garantir efficacement le respect des droits fondamentaux de la personne.

1. L’application du droit commun durant la période de détention
Depuis quelques années, le législateur procède à l’élaboration progressive d’un droit commun des services publics avec la volonté affirmée de renforcer les droits des citoyens. L’émergence d’un statut commun à l’ensemble des citoyens dans leurs relations avec les services publics administratifs montre qu’il est parfaitement possible de définir un droit applicable au public quelles que soient les raisons pour lesquelles il est en relation avec l’administration. En unifiant les règles applicables à l’ensemble des services publics administratifs, le législateur renforce la place des droits fondamentaux de l’individu. Conformément à la jurisprudence constitutionnelle, il affirme clairement que ces derniers ne peuvent être minorés par le pouvoir réglementaire. Un mouvement analogue de respect du droit commun à la fois procédural et conventionnel s’est manifesté en droit de l’application des peines, d’abord avec la loi du 15 juin 2000 dite " présomption d’innocence ", puis dans le cadre des débats parlementaires précédant le vote de la loi portant adaptation de la Justice aux évolutions de la criminalité.

3. La CNCDH recommande qu’une hiérarchisation des priorités soit respectée dans la définition du statut juridique de la personne privée de liberté.
Une personne incarcérée est, et demeure, une " personne humaine " à part entière dont les droits fondamentaux ne peuvent être méconnus. Par conséquent, l’Etat est soumis à diverses obligations pour garantir, en toutes circonstances, le respect des libertés individuelles.
A un deuxième niveau, une personne incarcérée demeure un " citoyen ". Cette qualification propre au droit interne permet de rappeler que les motifs de l’incarcération ne peuvent en aucun cas justifier une mise à l’écart du reste de la société. La prison ne doit plus être conçue seulement comme une éviction.
A un troisième niveau, une personne incarcérée demeure un " justiciable " bénéficiant des droits procéduraux (principe du contradictoire, droit au recours juridictionnel) normalement prévus dans les matières considérées. Le droit de la prison, en effet, traite de questions de nature juridique mixte, concernant simultanément le droit administratif, le droit pénal, le droit civil ou le droit du travail.
Les garanties organisées dans ces disciplines doivent trouver à s’appliquer à l’égard des détenus.
A un quatrième niveau, une personne incarcérée doit être considérée comme un " usager " étant en relation, certes obligée, avec un service public administratif. Il en résulte que les détenus peuvent se prévaloir d’un droit à un fonctionnement normal du service à leur égard et à la mise en oeuvre des missions assignées par la loi à la puissance publique.
Ces quatre degrés dans la qualification du rapport à l’Etat ne doivent en aucune façon être inversés. Jusqu’à présent, l’élaboration de la norme applicable durant la détention se faisait selon une logique inverse à celle préconisée dans la présente étude. Trop souvent, l’administration pénitentiaire fait prévaloir ses nécessités propres lorsqu’elle est amenée à édicter des règles. Dans ces conditions, le droit applicable à la prison ne prend pas suffisamment en compte les impératifs essentiels de protection des libertés fondamentales de l’individu. La personne privée de sa liberté d’aller et de venir se trouve presque toujours dépourvue de droits effectifs faute d’effets contraignants de la " norme " pour les services de l’Etat.
Le cas du droit à l’intimité en est une illustration caractéristique. L’article D 58 du Code de procédure pénale envisage les " hypothèses où il est dérogé au principe de l’encellulement individuel ". Il prévoit que " dans les maisons d’arrêt où par suite de la distribution des locaux ou de leur encombrement temporaire, le régime de l’emprisonnement individuel ne peut être appliqué à tous les prévenus, ceux à l’égard desquels l’autorité judiciaire aura prescrit l’interdiction de communiquer ou la mise à l’isolement doivent être placés par priorité en cellule individuelle ". Compte tenu de la surpopulation chronique, le principe de l’emprisonnement individuel des prévenus ne peut plus être considéré comme un droit, mais comme une faveur exceptionnellement accordée. La possibilité offerte à l’administration de déroger à un principe essentiel de la vie en détention, en invoquant un fait aussi peu exceptionnel que la surpopulation traduit bien le caractère peu contraignant de la norme en prison.
Le respect des libertés fondamentales ne peut être subordonné aux moyens dont dispose l’administration pénitentiaire. La décision d’incarcération est un acte grave dont l’Etat doit assumer toutes les conséquences. Les aménagements liés aux nécessités du service ne peuvent être qu’exceptionnels et proportionnellement justifiés.
Pour parvenir à une application du droit commun en détention, il est donc indispensable que le service public pénitentiaire ne soit plus présenté comme jouissant d’une position d’exception au regard d’autres secteurs ou activités de l’Etat.
Il est nécessaire de définir strictement les missions du service public pénitentiaire en évitant absolument l’énoncé d’objectifs antinomiques.

2. Une nouvelle formulation des missions du service public pénitentiaire
L’indétermination des objectifs assignés par la société à la prison conduit
l’administration pénitentiaire à établir elle-même des priorités dans ses interventions.
La mise en oeuvre des dispositions de la loi du 22 juin 1987 démontre l’urgence d’une définition rigoureuse des missions du service public pénitentiaire. L’article 1er de la loi énonce que " Le service public pénitentiaire participe à l’exécution des décisions et sentences pénales et au maintien de la sécurité publique. Il favorise la réinsertion sociale des personnes qui lui sont confiées par l’autorité judiciaire. Il est organisé de manière à assurer l’individualisation des peines ".
Le sens de l’exécution de la peine n’est pas explicité dans notre législation.
L’absolue primauté de la mission dite de sécurité observée dans la pratique, qui s’explique par des raisons historiques et sociologiques, aboutit à ce que la fonction de réinsertion est globalement perçue comme secondaire au sein de l’institution carcérale. Le Code de procédure pénale incite ainsi le personnel pénitentiaire à se préoccuper des risques d’évasion plus que toute autre considération. L’article D 265 rend le chef d’établissement " disciplinairement responsable des incidents ou des évasions imputables à sa négligence ou à l’inobservation des règlements, indépendamment des procédures disciplinaires susceptibles d’être engagées contre d’autres membres du personnel ". Quant à l’article D 268, il enjoint au chef d’établissement de prendre toutes dispositions " en vue de prévenir les évasions ". A défaut d’être affirmée avec suffisamment de force, la mission de préparation à la sortie de prison s’exerce dans le champ résiduel concédé par les impératifs de sécurité. En conséquence, les moyens matériels, humains et juridiques affectés aux agents en ce domaine sont très nettement insuffisants.

4. La CNCDH recommande de revenir sur de telles formulations. En prenant exemple sur certains droits étrangers, il convient de renforcer l’importance de la mission de resocialisation dans tous les domaines de l’activité carcérale. Outre qu’il est commandé par l’intérêt général, un tel renversement des perspectives devrait permettre d’atténuer les rapports de confrontation entre détenus et surveillants, et bénéficierait tant aux premiers qu’aux seconds.

a. La restauration du lien social, fonction essentielle du service pénitentiaire
Certains Etats ont pris le parti de considérer la mission de resocialisation comme primordiale. Pour la loi allemande, l’exécution de la peine privative de liberté doit permettre à l’individu incarcéré d’acquérir la capacité de mener dans le futur une vie socialement responsable, exempte d’actes délictueux. La Cour constitutionnelle fédérale a précisé cette notion de réinsertion (ou de resocialisation) en considérant que le détenu doit acquérir la capacité et la volonté de mener une vie responsable, de s’affirmer dans une société libre à l’avenir sans commettre de délit, de profiter de ses chances et de tenir compte de ses risques. Elle affirme clairement que la sécurité publique ne saurait être un objectif de l’exécution de la peine, tout au plus doit-elle être prise en compte dans la mise en oeuvre du traitement pénitentiaire.
Cette voie doit être suivie par le législateur, faute de quoi la protection des droits sera reléguée au second plan. L’essentiel de la mission du service pénitentiaire doit consister en la préparation d’une sortie de prison du condamné dans des conditions adéquates. Au demeurant, en minorant cet impératif, la société perd de vue tout objectif de protection de la sécurité publique à moyen et long termes. Dans son rapport, la Commission Canivet relève d’ailleurs une " évidente contradiction entre ordre et réinsertion " qui semble être un obstacle d’importance à la réalisation du second objectif. Les députés ont ainsi pu écrire, dans le rapport de la Commission d’enquête de juin 2000, que la prison est " un monde où le détenu est totalement déresponsabilisé et infantilisé ; poursuivre une mission d’insertion dans ce cadre-là relève du défi dans la mesure où aucune démarche volontaire n’est demandée et rien, si ce n’est l’obéissance aux règles, n’est imposé ". En France, l’objectif de resocialisation peut tout au plus être considéré comme un standard. La protection des droits fondamentaux impose d’aller au-delà de cette qualification en prévoyant diverses obligations concrètes à la charge de la puissance publique. Le droit allemand a déjà franchi cette étape.
Avant l’arrivée en prison, une majorité de détenus est déjà en situation de précarité ou de grande pauvreté et d’exclusion, en termes de revenus, de santé, de logement, de formation, de travail, de vie familiale, de participation à la vie sociale et culturelle.
Il est important d’en tenir compte pour mieux appréhender l’objectif de l’insertion.
Comme le prévoit l’article 151 de la loi d’orientation contre les exclusions, les personnels de l’administration pénitentiaire et les intervenants extérieurs doivent être formés à cette connaissance, à l’écoute et au dialogue avec les plus démunis. La période d’incarcération ne doit plus aboutir à l’aggravation des situations de précarité ou de grande pauvreté non seulement des détenus mais de leurs familles.
Les missions de l’administration pénitentiaire doivent être redéfinies pour faire de la période d’incarcération un moment organisé autour de la restauration du lien social, en prévision de la sortie de prison. La restauration du lien social passe par la présence d’un référent pour le détenu dont le rôle soit clairement défini et orienté vers l’insertion : travailleurs sociaux ou conseillers d’insertion et de probation. La période d’incarcération ne doit plus être envisagée comme une exclusion au nom
d’une sécurité à court terme.

b. L’encadrement juridique de la mission dite de sécurité
Il convient de déterminer précisément les contours des notions d’ordre et de sécurité, pour éviter que toute difficulté de fonctionnement ne soit en pratique l’occasion d’une limitation des droits des personnes détenues. La notion extensible d’ordre interne des établissements pénitentiaires, tout comme celle de sécurité, sont souvent mises en avant pour justifier le recours à des mesures de contrainte. A cet égard, la situation de détenus manifestant des comportements réfractaires vis-à-vis de l’autorité est caractéristique de la marge de manoeuvre trop importante laissée à l’administration pénitentiaire. Le contenu de leur séjour en prison se résume fréquemment à une succession de mesures coercitives (transferts successifs, placements au quartier disciplinaire, etc.). La CNCDH ne mésestime pas les difficultés rencontrées quotidiennement par les personnels pénitentiaires dans leur travail, en particulier en période de surencombrement des prisons, comme c’est le cas actuellement. Toutefois, de telles pratiques créent un climat délétère dans les établissements et portent préjudice en définitive à l’ensemble des acteurs du monde carcéral. Elles empêchent par ailleurs le retour à la société libre dans de bonnes conditions.
De la même manière, l’application des peines privatives de liberté souffre de l’absence de définition claire des critères d’octroi des aménagements de peine. Alors que la loi du 15 juin 2000 est venue clarifier ceux devant présider à l’admission à la libération conditionnelle, il reste à définir ceux de l’ensemble des autres aménagements de peine. Les critères comme la dangerosité, le risque de récidive, le trouble possible à l’ordre public, doivent être définis par des normes et ne sauraient l’emporter systématiquement sur ceux de resocialisation et d’indemnisation des
victimes.
Dès lors, il apparaît nécessaire que soit réaffirmé le principe selon lequel les limitations aux droits et libertés doivent être strictement proportionnées au but légitime poursuivi. Le chef d’établissement ne doit en aucun cas pouvoir durcir les conditions de détention prévues par le législateur. La marge de manoeuvre qui lui est accordée ne doit lui permettre que d’assouplir des mesures inadaptées à la population détenue dans l’établissement. La situation inverse conduit à créer une insécurité juridique parfaitement contraire au respect des droits fondamentaux de l’individu.
De par sa formulation très générale, l’article D. 242 du Code de procédure pénale illustre bien la question. Il dispose que " l’ordre et la discipline doivent être maintenus avec fermeté, mais sans apporter plus de contraintes qu’il n’est nécessaire pour le maintien de la sécurité et d’une bonne organisation de la vie en collectivité ". Le terme de fermeté est indéterminé. L’article ne mentionne en aucune manière les droits de l’individu incarcéré, il n’envisage que le fonctionnement interne du service.
Une pareille rédaction est à l’origine de confusion juridique autour des notions d’ordre interne et d’ordre public, ou de sécurité de l’établissement et de sécurité publique. Les difficultés d’interprétation de la loi du 12 avril 2000 au sein des établissements pénitentiaires sont une preuve supplémentaire de l’urgence d’encadrer de telles notions qui nuisent à l’application du droit commun en prison.

c. L’accès au droit
Le principe de l’accès au droit suppose des textes clairs, facilement consultables, à jour, capables de garantir l’égalité de traitement des individus. La loi du 12 avril 2000 en fait une nouvelle mission de service public. A cet égard, la situation du service pénitentiaire est tout à fait en retrait par rapport aux principes applicables en la matière.
Il existe aujourd’hui une profusion d’instructions de services qui régissent tous les aspects de la vie en détention. Cette juxtaposition de textes rend illusoire une mise en oeuvre uniforme de la règle de droit en prison. La détermination des dispositions applicables s’avère très délicate, y compris pour les agents pénitentiaires. Quant aux détenus, ils n’ont pas physiquement accès aux circulaires dont les dispositions leur sont pourtant quotidiennement opposées. Le seul document qui leur est normalement remis est un " guide du détenu arrivant " intitulé " Je suis en prison ".
Enfin, le défaut de publicité d’une part importante des normes édictées par l’administration centrale contribue à tenir les différents intervenants extérieurs, y compris les avocats, à l’écart de l’univers carcéral. Cette opacité du droit applicable favorise le développement de pratiques éloignées des prescriptions textuelles et l’émergence de logiques de " favoritisme ".
L’article 83 de la loi contre les exclusions énonce : " les personnes condamnées à une peine d’emprisonnement ont droit, pendant l’exécution de leur peine, à une information sur leurs droits sociaux de nature à faciliter leur insertion ". Ce droit doit être rendu effectif.
La mise en place d’un code de l’exécution des peines doit permettre la clarification des tâches du personnel pénitentiaire, une réduction des risques d’arbitraire et une participation des avocats et de la société civile à la phase post-sentencielle du procès pénal.
L’accès au droit en milieu carcéral doit également s’apprécier de manière plus large.
En effet, l’accès au droit peut être défini comme " une information générale des personnes sur les droits et obligations ainsi que leur orientation vers les organismes chargés de la mise en oeuvre de ces droits ", " l’aide dans l’accomplissement de toute démarche en vue de l’exercice d’un droit ou de l’exécution d’une obligation de nature juridique et l’assistance au cours des procédures ", " l’assistance à la rédaction et à la conclusion des actes juridiques " (article 9 de la loi n°98-1163 du 18 décembre 1998 relative à l’accès au droit et à la résolution amiable des conflits modifiant l’article 53 de la loi n°91-647 de la loi du 10 juillet 1991).
Le détenu se trouve souvent dans l’incapacité physique et matérielle, du fait de son isolement, d’avoir accès au droit ou de s’adresser à un conseil indépendant.
La possibilité pour un détenu d’obtenir une information juridique effective et l’accès à un conseil sur des affaires du droit commun pendant son incarcération, doit être favorisée par l’administration pénitentiaire au titre de sa mission de réinsertion.
L’on ne peut que regretter l’absence de généralisation de dispositifs d’accès au droit dans la majeure partie des établissements pénitentiaires ; mission qui en principe est confiée aux services pénitentiaires d’insertion et de probation depuis 1999 (Décret n°99-276 modifiant le Code de procédure pénale et portant création des services pénitentiaires d’insertion et de probation).

3. La garantie d’un contrôle efficace de l’activité pénitentiaire
Reconnue pour la première fois par un garde des Sceaux le 8 juillet 1999, " l’insuffisance des mécanismes de contrôle existants au regard des réalités
pénitentiaires " a débouché sur la mise en place d’une commission chargée de réfléchir à l’amélioration du contrôle extérieur des établissements pénitentiaires. Au terme de ses travaux en mars 2000, le groupe d’experts animé par le Premier Président de la Cour de cassation a considéré " qu’il convenait d’instaurer dans un cadre juridique rénové, un contrôle extérieur qui permette de vérifier les conditions de détention, notamment en ce qui concerne l’état des locaux, et l’application effective du statut du détenu, d’examiner les requêtes de celui-ci et d’assurer la transparence recherchée, sans pour autant supprimer les contrôles techniques spéciaux existants, qui doivent même être renforcés. "
Au demeurant, un important protocole additionnel à la Convention contre la torture des Nations unies, de 2002, a prévu l’instauration d’instances nationales de contrôle en la matière
.
5. La CNCDH est favorable à la mise en oeuvre d’un contrôle extérieur tel que préconisé par la commission Canivet. Elle insiste particulièrement sur le caractère cumulatif des trois types d’organes proposés :
Au niveau national, un contrôleur général des prisons indépendant en charge de la fonction de " vérification " (" s’assurer du respect du droit dans la prison et de la réalisation par l’administration des objectifs de ses politiques, nationale et locale ").
Au niveau régional un corps de médiateurs des prisons en charge de la fonction de " médiation " (" apporter une solution aux différends de toute nature entre le détenu et l’Administration " et " préciser les points de réglementation présentant des difficultés d’interprétation ").
Au niveau local, des délégués du médiateur des prisons en charge d’une fonction d’ "observation " (" introduire dans l’établissement pénitentiaire un " regard extérieur " qui permette un contrôle quotidien identique à celui que pratique le citoyen dans la société libre, afin de parvenir à la transparence nécessaire au bon fonctionnement de l’institution ").
- En tout état de cause, le Protocole additionnel à la Convention contre la torture des Nations unies exige la mise en place d’un contrôle national central pour servir d’interface avec le niveau international.
Appliqué dans son intégralité, le dispositif ajoute à la " concrétisation des droits " des personnes détenues, " la garantie d’une pratique professionnelle dégagée des tensions et l’assurance d’une référence incontestable " pour les membres du personnel. En ce sens, il constitue bien la protection attendue pour tous ceux qui vivent quotidiennement au sein de l’institution carcérale.
D’autre part, des voies procédurales d’urgence spécifiques doivent être aménagées, afin que les détenus puissent obtenir dans les plus brefs délais la suspension de l’exécution de décisions administratives qui leur sont gravement préjudiciables. Les modalités de l’intervention de l’autorité judiciaire doivent par ailleurs être précisées dans la loi, en vue d’assurer une protection efficace de la liberté individuelle. A cet égard, il est urgent que toutes les mesures utiles soient édictées pour empêcher la survenance de situations de détention arbitraire, comme c’est parfois le cas actuellement. Un Etat de droit comme le nôtre ne saurait tolérer une telle violation des droits essentiels.