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4 mars 2010. Les huit ans de la loi Kouchner...

Mise en ligne : 4 mars 2010

Dernière modification : 4 mars 2010

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Texte de l'article :
Nous devions, avec toutes les associations formant le pôle suspension de peine, faire une conférence de presse le 4 mars prochain à science Po Paris, mais celle-ci n’aura malheureusement jamais lieu !
 
En effet, certains membres influents du pôle ont décidé lâchement de capituler, de saboter cet événement et une fois de plus, comme ils le font depuis 2006, d’abandonner à leur triste sort les prisonniers malades.
 
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C’est dommage, car le huitième anniversaire de la loi Kouchner aurait pu être une occasion rêvée de parler de sa si mauvaise application, et de dire combien cette loi est trop rarement utilisée à cause de son durcissement progressif. Désormais, ce ne sont que les prisonniers en phase terminale qui en bénéficient principalement et pas simplement pour des raisons humanitaires, mais seulement pour éviter qu’ils ne décèdent entre quatre murs, faisant baisser ainsi les statistiques de mortalité en prison.
 
Pourtant cette loi, à l’origine, avait aussi été créée pour faire sortir les malades dont l’état était durablement incompatible avec la détention. Seuls Papon et quelques « privilégiés » ont profité de cet aspect complètement négligé de l’article 720-1-1 du CPP. Les lois de la république ne sont visiblement pas les mêmes pour tout le monde.
Le 28 Janvier 2010, vu l’urgence de la situation nous nous sommes donc réunis dans les locaux d’Act Up-Paris pour essayer de préparer une conférence de presse le jour anniversaire de la loi et ainsi dénoncer médiatiquement ses dysfonctionnements.
 
J’allais enfin pouvoir comprendre comment fonctionne ce genre de réunion remplie, comme l’enfer, de bonnes intentions. Ce jour là, autour de la table étaient réunis le S.M (Syndicat de la magistrature), Etienne Noël (l’avocat spécialiste de la suspension de peine), des représentants du GENEPI, Act Up-Paris, Antoine Lazarus psychiatre responsable du GMP, l’ARAPEJ, Ban Public, la LDH, diverses associations d’hébergements (Secours Catholique, Croix Rouge, cité le village etc....). Bien sûr, si je participe à cette réunion c’est uniquement à cause de ma lourde expérience carcérale et de mon parcours, qui me permettent, mieux que quiconque autour de la table, de représenter les intérêts de tous ces prisonniers dont on parle tant, mais qu’on n’entend pas et qu’on ne voit pas.
 
Au bout de 2 heures de discussions nous avons décidé d’une autre réunion pour le 8 février, cette fois dans les locaux du GENEPI, afin de mettre au point l’organisation de la conférence de presse.
 
Lors de cette deuxième réunion, j’ai commencé à voir et à comprendre à qui j’avais à faire et pourquoi ce pôle de suspension de peine était en totale déshérence depuis 2006. Au fond, dans toutes ces réunions d’« assos » il y a beaucoup de « blabla » mais pas beaucoup d’action et quand il s’agit d’agir et de taper du poing sur la table, de dénoncer haut et fort, comme je le fais, le scandale des taulards qui meurent au fond des prisons, il n’y a plus personne.
Ils sont tous beaucoup trop tièdes, beaucoup trop complaisants pour être véritablement efficaces face à l’urgence de la situation sanitaire désespérée du monde carcéral. Je crois même qu’ils sont à des années-lumière de la réalité pénitentiaire et cette ignorance, cette lâcheté assassine est la principale cause de l’abandon de ces hommes et femmes privés de liberté.
 
Le S.M (Syndicat de la magistrature) lors de cette deuxième réunion, du haut de sa misérable condescendance, a tout tenté pour saboter la préparation de cette conférence de presse, sachant que j’allais y participer et que je n’aurai pas ma langue dans ma poche. Ce qui, je dois bien l’avouer, m’a mis en colère, chose que je n’ai pas cachée d’ailleurs. C’est à cause de ces gens-là que rien n’avance et qu’on étouffe, d’un silence assourdissant, l’horreur de la peine de mort carcérale, celle que l’on dissimule à tout prix aux yeux des citoyens parce que l’incompétence institutionnelle est une honte et qu’il faut la mettre sous tapis pour ne pas salir l’image proprette d’un pays qui se prétend être celui des droits de l’homme.
 
A quelques jours de cette conférence de presse, où je devais intervenir avec le professeur Sicard, l’avocat Noël et le psychiatre Lazarus, les différentes associations, sans aucun doute influencées par le S.M (les Super Mou) qui furent les premiers à renoncer, ont décidé tout bonnement de saborder eux-mêmes la conférence de presse prévue, en n’y participant pas et en trouvant des prétextes fallacieux pour se dédouaner.
 
Mais comment peuvent-ils capituler et abandonner ainsi les indigents du droit, tous ces détenus qui ne peuvent se défendre et par la même aggraver l’agonie d’une loi déjà moribonde. Leurs démissions et leurs inactions durant cette année supplémentaire sont déjà un crime à mes yeux, puisque durant cette période des prisonniers vont être sacrifiés sur l’autel de l’indifférence.
 
Seuls Act Up-Paris, Ban public, les génépistes et Mr Lazarus ont exprimé leur déception face à ce renoncement et je les en remercie.
 
Malgré cet échec, sachez que personnellement je ne renoncerai pas et que je ne laisserai jamais mes frères « crever » au fond du trou sans rien faire. Il y a là non- assistance à personne en danger !
 
C’est pour fêter à ma manière le huitième anniversaire de la loi que j’écris ce texte sur le BLOG et que j’essaierai d’intervenir sur le sujet à chaque fois qu’on me le demandera. Mon discours est et sera sans concession car pour moi, le sort des prisonniers malades est une question de vie ou de mort, de dignité et d’honneur. Cela mérite vraiment qu’on se lève, qu’on manifeste, qu’on se batte, et même qu’on fasse des coups de gueule pour qu’enfin ces hommes et femmes soient traités avec toute l’humanité qu’ils méritent.
 
Je vous laisse donc avec le communiqué de presse que l’on avait rédigé pour cette occasion, désormais manquée. (Ainsi que le dessin et la lettre à Kouchner qui l’accompagnaient).
 
Je les mets en ligne sur le Net en hommage à ceux qui, cette année encore, vont périr parce que ceux qui prétendent publiquement les défendre sont les premiers à les trahir, à les abandonner.
 
Que toutes ces associations médiocres et soumises continuent de parler pour ne rien dire, à brasser de l’air et faire semblant d’exister en percevant leurs subventions de l’Etat. Mais surtout qu’elles ne la ramènent pas trop devant moi parce qu’elles vont être reçues ! J’ai vu leur vrai visage, leur lâcheté et leur petitesse, lorsqu’elles étaient au pied du mur et qu’il fallait agir... Ne vous inquiétez pas, ces personnes et associations se reconnaîtront en brillant par leur absence au soir du 4 mars.
 
Le combat ne fait que commencer et il va être très dur, je le sais, mais ne vous inquiétez pas, de cela j’en fais mon affaire. Je n’ai pas combattu durant 25 années de détention dans des prisons pourries pour que, une fois dehors, je fasse partie des vendus, de ceux qui, par leur silence, se sont couchés, sont devenus complices et ont accepté l’hécatombe carcérale.
 
En comptant les suicides, les morts naturelles, les décès de malades, les homicides et autres décès suspects, on estime qu’il y a actuellement plus d’un mort par jour dans les prisons françaises !
 
Vive la démocratie, vive Sarkozy, vive le pays des droit de l’Homme !...

A bientôt sur le BLOG pour la suite... 

Laurent JACQUA
 
 
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