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4 Les possibilités pour se voir restituer ses droits civiques

Mise en ligne : 7 mai 2012

Dernière modification : 8 mai 2012

Texte de l'article :

4 Les possibilités pour se voir restituer ses droits civiques

Il existe différentes possibilités pour recouvrer ses droits civiques : par demande de relèvement, ou par réhabilitation (de plein droit, judiciaire ou sur simple requête).

Il existe une particularité pour les personnes condamnées avant 1994 :

Une personne condamnée, avant le 1er mars 1994, à une peine criminelle, perdait ses droits civiques, civils et de famille, ainsi que ses droits commerciaux, à vie. Cette personne ne peut en général pas bénéficier des dispositions plus douces entrées en vigueur ultérieurement, en vertu de l’article 112-1 du CP qui stipule que :
"Les dispositions nouvelles s’appliquent aux infractions commises avant leur entrée en vigueur et n’ayant pas donné lieu à une condamnation passée en force de chose jugée lorsqu’elles sont moins sévères que les dispositions anciennes".
L’immense majorité des personnes condamnées avant 1994 ont vu leur condamnation passée en force de chose jugée et les nouvelles dispositions, plus douces, ne leur sont pas applicables.

Dans tous les autres cas, et quelle que soit la procédure engagée (demande de relèvement ou réhabilitation), pour ensuite s’inscrire sur les listes électorales, il faudra se conformer à l’article R2 du code électoral qui stipule que :
"Les personnes qui, frappées d’incapacité électorale à la suite d’une condamnation, bénéficient d’une réhabilitation ou font l’objet d’une mesure d’amnistie, doivent solliciter leur inscription à compter de la date de cessation de leur incapacité."

4.1 La demande de relèvement

Les articles 702-1 et 703 du code de procédure pénale (CPP) fixent les conditions dans lesquelles une personne peut formuler une demande de relèvement d’une déchéance :
Article 702-1 : "Toute personne frappée d’une interdiction, déchéance ou incapacité ou d’une mesure de publication quelconque résultant de plein droit d’une condamnation pénale ou prononcée dans le jugement de condamnation à titre de peine complémentaire peut demander à la juridiction qui a prononcé la condamnation ou, en cas de pluralité de condamnations, à la dernière juridiction qui a statué, de la relever, en tout ou partie, y compris en ce qui concerne la durée, de cette interdiction, déchéance ou incapacité. Si la condamnation a été prononcée par une cour d’assises, la juridiction compétente pour statuer sur la demande est la chambre de l’instruction dans le ressort de laquelle la cour d’assises a son siège."

Article 703 :
"Toute demande présentée par un condamné en vue d’être relevé d’une interdiction, d’une déchéance, d’une incapacité ou d’une mesure de publication, formée en application des dispositions du premier alinéa de l’article 702-1 précise la date de la condamnation ainsi que les lieux où a résidé le requérant depuis sa condamnation ou sa libération.
Elle est adressée, selon le cas, au procureur de la République ou au procureur général qui s’entoure de tous les renseignements utiles, prend, s’il y a lieu, l’avis du juge de l’application des peines et saisit la juridiction compétente.
La juridiction saisie statue en chambre du conseil sur les conclusions du ministère public, le requérant ou son conseil entendus ou dûment convoqués. S’il paraît nécessaire d’entendre un condamné qui se trouve détenu, il peut être procédé conformément aux dispositions de l’article 712 du présent code.
La décision est signifiée à la requête du ministère public lorsqu’elle est rendue hors de la présence du requérant ou de son conseil. Elle peut être, selon le cas, frappée d’appel ou déférée à la Cour de cassation.
Mention de la décision par laquelle un condamné est relevé totalement ou partiellement d’une interdiction, déchéance, incapacité ou d’une mesure de publication est faite en marge du jugement ou de l’arrêt de condamnation et au casier judiciaire."

4.2 La réhabilitation

Outre la demande de relèvement, et surtout si celle-ci n’aboutit pas, il existe des moyens pour effacer les condamnations du casier judiciaire ; ce sont les mêmes pour n’importe quelle peine privative de liberté. Seuls les délais diffèrent suivant la durée d’une telle peine : les peines supérieures à un an jusqu’à perpétuité et les peines inférieures à dix ans.

4.2.1 Les peines supérieures à 1 an et jusqu’à perpétuité

Trois possibilités s’offrent pour effacer le casier judiciaire : automatiquement, sur simple requête, ou par une réhabilitation judiciaire.

4.2.1.1 Le droit à l’oubli

Si la personne n’effectue aucune démarche pour effacer son casier judiciaire, celui-ci s’efface au bout de 40 ans, après le prononcé de la peine (article 769 du CPP).

4.2.1.2 La simple Requête

L’effacement peut avoir lieu au bout de 20 ans après la libération définitive ou conditionnelle non révoquée (article 775-2, 702-1 et 703 du CPP).
L’objet de cette demande est simple : la personne demande la rectification de son casier judiciaire. La demande est adressée au procureur de la République du tribunal de grande instance du domicile. La demande peut comporter seulement la date de la condamnation et les lieux de résidences depuis sa libération.

4.2.1.3 La réhabilitation judiciaire

Elle est fondée sur l’appréciation de la part du tribunal de la réussite de l’intégration sociale du demandeur (articles 785 et suivants du CPP).
Elle peut être accordée après un délai de cinq ans ( ) pour les personnes condamnées à une peine criminelle, de trois ans pour celles condamnées à une peine correctionnelle et d’un an pour celles condamnées à une peine conventionnelle (article 786 du CPP).
Ce délai part du jour de la libération définitive, ou du jour de la libération conditionnelle, lorsque celle-ci n’a pas été suivie de révocation (article 786 du CPP). La personne adresse la demande en réhabilitation au procureur de la République de sa résidence actuelle ou, en cas de résidence à l’étranger, au procureur de la République de la dernière résidence en France ou, à défaut, à celui du lieu de condamnation (article 790 du CPP).
La demande doit préciser la date de la condamnation et les lieux où la personne a résidé depuis sa libération. Dans la pratique, elle doit comporter des documents attestant des efforts faits pour la réintégration et pour le dédommagement des victimes.

Le procureur instruit le dossier et saisit ensuite la Chambre d’instruction qui doit statuer dans un délai de 2 mois. La personne est entendue par la Chambre. Il existe un recours en Cassation contre le rejet d’une telle demande.

 

Les seuls critères d’une "réintégration sociale réussie" ne suffisent pas pour voir aboutir une demande de réhabilitation judiciaire. 

Condamné à 5 ans de prison, dont 4 avec sursis, A. a bénéficié d’une libération conditionnelle en octobre 1998, après 7 mois d’incarcération. Il a adressé, le 1er octobre 2003 une demande de réhabilitation.

La cour d’appel a exprimé son refus d’accorder une réhabilitation judiciaire au motif que la nature des faits reprochés à A. justifie de ne pas prématurément les occulter.

Pour autant, le cour d’appel note que :

A. a réglé les dommages et intérêts et a bénéficié d’une libération conditionnelle qui s’est déroulée sans incident.

 

4.2.2 Les peines inférieures à 10 ans, la réhabilitation de droit

Les personnes qui sont condamnées à une peine privative de liberté inférieure à dix ans disposent d’un autre moyen pour effacer leur casier judiciaire : la réhabilitation de plein droit (réhabilitation légale) (article 769 et article 133-13-3° du CPP ( )).
Elle peut être acquise après un délai de trois ans, de cinq ans ou de dix ans. Cela dépend de la nature et de la gravité de la condamnation. Ce délai commence soit après l’exécution de la peine, soit après la prescription accomplie.
Précisément, elle peut être acquise :
- après un délai de cinq ans pour la condamnation unique à un emprisonnement n’excédant pas un an ou à une peine autre que la réclusion criminelle, la détention criminelle, l’emprisonnement, l’amende ou le jour-amende
- après un délai de dix ans pour la condamnation unique à un emprisonnement n’excédant pas dix ans ou pour les condamnations multiples à l’emprisonnement dont l’ensemble ne dépasse pas cinq ans.
Ce délai commence à compter soit de l’expiration de la peine subie, soit de la prescription accomplie.