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Date : 30-10-2004

2004 05 Prévention : l’eau de Javel

Mise en ligne : 12 décembre 2004

Texte de l'article :

English
Romana

 

L’expérience montre que de la drogue, des aiguilles et des seringues traversent même les murs de prisons les plus surveillés. Tout en poursuivant, voire en intensifiant, les efforts liés à l’interdiction de consommer de la drogue, des systèmes carcéraux dans le monde adoptent donc des mesures pour atténuer le risque de propagation du VIH et d’autres infections par le partage de matériel d’injection de drogue. Ces moyens comprennent la fourniture d’eau de Javel pour stériliser les seringues et aiguilles, la fourniture de matériel d’injection neuf (feuillet 6) et le traitement d’entretien à la méthadone (feuillet 7).

Fourniture d’eau de Javel
L’Organisation mondiale de la santé rapporte que 16 des 52 systèmes carcéraux observés mettaient de l’eau de Javel à la disposition des détenus dès la fin de 1991 - notamment les systèmes carcéraux de l’Allemagne, de la France et de l’Australie, certaines prisons de l’Espagne, de la Suisse, de la Belgique, du Luxembourg et des Pays-Bas, ainsi que certains systèmes carcéraux de l’Afrique et au moins un en Amérique centrale.

À noter, aucun des systèmes carcéraux qui a adopté une politique de disponibilité d’eau de Javel en prison n’a modifié cette politique par la suite et le nombre de systèmes à adopter cette politique continue de croître. Par exemple, dans plusieurs sondages européens, la proportion de systèmes carcéraux déclarant mettre de l’eau de Javel à la disposition des détenus est passée de 28% en 1992 à 50% en 1997 (11 des 23 systèmes carcéraux observés). Parmi les répondants où elle ne l’était pas, trois ont déclaré qu’on devrait la rendre disponible et cinq ont déclaré qu’on devrait donner accès aux détenus à de l’eau de Javel et à du matériel d’injection neuf.

Prisons fédérales canadiennes
Dans son rapport de 1994, le Comité d’experts sur le sida et les prisons (CESP) a recommandé que de l’eau de Javel soit mise à la disposition des détenus. Le CESP a souligné que cela « n’équivaut en rien à fermer les yeux sur la consommation de drogues, mais fait plutôt ressortir que, dans les établissements correctionnels comme ailleurs, la principale préoccupation de tout effort visant à faire face à la consommation de drogues doit être la santé des personnes en cause et de l’ensemble de la collectivité ».

Au départ, le Service correctionnel du Canada (SCC) a rejeté la recommandation du CESP et n’a accepté que de mener un projet pilote dans un établissement. Cependant, au printemps 1995, le commissaire du SCC a donné au Service la directive d’amorcer la distribution d’eau de Javel dans tous ses établissements. L’eau de Javel est donc devenue disponible dans les prisons fédérales à l’automne 1996.

Prisons provinciales au Canada
L’eau de Javel est aussi devenue disponible dans quelques systèmes provinciaux de détention, ou a simplement continué d’être disponible. Il subsiste cependant des exceptions.

Un modèle à imiter
En 1992, le système de la Colombie-Britannique a adopté une politique de fournir de l’eau de Javel aux détenus.Cette politique n’a donné lieu à « aucun incident d’usage mal avisé ... et à aucun rapport indiquant une augmentation de l’injection de drogue ». En avril 1995, on a adopté une politique révisée nécessitant que l’eau de Javel soit librement et facilement accessible, et distribuée d’une manière qui assure l’anonymat et diminue les risques de blessure ».

La non-disponibilité d’eau de Javel
Le refus de fournir de l’eau de Javel va à l’encontre de toutes les recommandations canadiennes et internationales, à l’effet que l’on mette à la disposition des détenus de l’eau de Javel non diluée et accompagnée d’information sur la désinfection des seringues et aiguilles.

Recommandation
Les détenus de tous les établissements devraient avoir un accès facile et discret à de l’eau de Javel pure, ainsi qu’à des instructions pour désinfecter les aiguilles et seringues.
 

Limites
L’accès à de l’eau de Javel est important mais insuffisant :

 

des conclusions d’études indiquent que la stérilisation à l’eau de Javel ne devrait être envisagée pour réduire le risque de transmission du VIH découlant du partage d’aiguilles et de seringues seulement lorsque aucune autre méthode plus sûre n’est disponible. Des aiguilles et des seringues neuves et stériles sont plus sûres que celles déjà utilisées. Quant à l’hépatite C, une nouvelle étude porte à croire que l’eau de Javel pourrait en réduire la propagation, mais ses auteurs soulignent qu’elle « ne remplace pas des aiguilles et seringues neuves pour chaque injection » [trad.] ;
des recherches ont montré que, même hors des prisons, plusieurs utilisateurs de drogue par injection (la moitié, voire plus, dans certaines études) ne connaissent ou n’appliquent pas la méthode adéquate de désinfection des aiguilles et seringues avec de l’eau de Javel ; en prison, la probabilité de désinfection efficace du matériel d’injection avec de l’eau de Javel est encore moindre. L’injection de drogue est interdite. Puisque les détenus peuvent être accostés n’importe quand par le personnel carcéral, l’injection et la désinfection sont des choses qu’il faut faire vite. Des études ont montré que la désinfection du matériel avec de l’eau de Javel nécessite plus de temps que ce que les détenus ont le loisir d’y consacrer.

Lectures complémentaires
De l’information sur la fourniture d’eau de Javel dans chacun des systèmes de prisons du Canada - R. Lines, La lutte au VIH/sida dans nos prisons : trop peu, trop tard - Un rapport d’étape, Montréal, Réseau juridique canadien VIH/sida, 2002. (Accessible via www.aidslaw.ca/francais/Contenu/themes/prisons.htm )

Rapport d’évaluation (1998) de la réduction des méfaits dans les prisons fédérales - Service correctionnel du Canada, Évaluation des mesures de réduction des méfaits causés par le VIH/sida au Service correctionnel du Canada, Ottawa, SCC, 1999.

Les premières évaluations indépendantes de la distribution d’eau de Javel en prison - K. Dolan et coll., Bleach Availability and Risk Behaviours in New South Wales, Technical Report No 22, Sydney, NDARC, 1994 ; et K. Dolan et coll., Bleach Easier to Obtain But Inmates Still at Risk of Infection in New South Wales Prisons, Technical Report, Sydney, NDARC, 1996.

Une conclusion d’étude incitant à « [c]esser de prétendre que des solutions faibles d’eau de Javel peuvent être efficaces contre quoi que ce soit. » - P.M. Ford et coll., « Séroprévalence du VIH, du VHC et de comportements à risque dans une prison fédérale », Bulletin canadien VIH/sida et droit, 1999, 4(2-3) : 60-62.
www.aidslaw.ca/francais/Contenu/docautres/bulletincanadien/printemps99/f-prisons.htm

Explications des possibilités de non-utilisation et de non-efficacité de l’eau de Javel en prison - A. Taylor, D. Goldberg, « Détails sur la vague d’infection à VIH dans une prison d’Écosse », Bulletin canadien VIH/sida et droit, 1996, 2(3) : 16-17. www.aidslaw.ca/francais/Contenu/docautres/bulletincanadien/Avril1996/14AVRILF.htm

Affirmation que « la stérilisation au moyen d’eau de Javel devrait être envisagée seulement lorsque aucune autre méthode plus sûre n’est disponible » - US Department of Health and Human Services, Public Health Service, CDC, HIV/AIDS Prevention Bulletin, 19 avril 1993.

L’étude indiquant que la désinfection du matériel d’injection à l’eau de Javel peut offrir une certaine protection contre le VHC - F. Kapadia et coll., « Does bleach disinfection of syringes protect against hepatitis C infection among young adult injection drug users ? », Epidemiology, 2002, 13(6) : 738-741.

Troisième version révisée et mise à jour, 2004. On peut télécharger ce feuillet à partir du site Web du Réseau juridique <http://www.aidslaw.ca/francais/Contenu/themes/prisons.htm> ou le commander auprès du Centre canadien d’information sur le VIH/sida (courriel : aidssida@cpha.ca). Il est permis de faire et de distribuer (mais non de vendre) des copies de ce feuillet, en indiquant que l’information provient du Réseau juridique canadien VIH/sida. Pour information, veuillez contacter le Réseau juridique (tél. : (514) 397-6828, téléc. : (514) 397-8570, courriel : info@aidslaw.ca). This info sheet is also available in English.

Financé par Santé Canada dans le cadre de la Stratégie canadienne sur le VIH/sida. Les constats, interprétations et points de vue exprimés dans cette publication sont ceux de l’auteur et ne reflètent pas nécessairement les positions ou politiques officielles de Santé Canada.

Site source Réseau juridique canadien VIH/sida, 2004