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1ère partie : Données générales

Mise en ligne : 17 mai 2007

Texte de l'article :

PREMIERE PARTIE DONNEES GENERALES

CHAPITRE 1 MODIFICATION DES TEXTES NORMATIFS RELATIFS A LA DETENTION PROVISOIRE

On a pu déplorer, et cela a été évoqué dans les deux premiers rapports de la Commission de suivi de la détention provisoire, une inflation de textes tant en matière pénale que de procédure pénale nuisant à une lisibilité certaine des règles applicables.

Cette multiplication de textes, établis parfois en fonction de l’actualité du moment, sans cohérence, a pour conséquence une certaine insécurité juridique non seulement pour les justiciables mais encore pour l’institution judiciaire elle-même. En effet, une erreur formelle dans l’application de la loi peut entraîner la nullité de la procédure, par conséquent des poursuites intentées, avec les conséquences que cela peut avoir. On doit admettre que la mise en liberté d’une personne placée en détention motivée uniquement par un vice de forme, même si « la forme est la garante des libertés » et que l’on ne saurait s’en affranchir, doit être évitée. De plus, ces nombreuses modifications créent une surcharge de travail, source d’erreurs, alors que la pénurie de moyens est patente, obligeant en outre à privilégier l’analyse de la forme plutôt que du fond.

On doit constater toutefois, et cela est un bien, que depuis la loi n° 2004-204 du 9 mars 2004 portant adaptation de la justice aux évolutions de la criminalité dite « PERBEN II », peu de textes législatifs ou réglementaires sont intervenus ayant une incidence sur la détention provisoire.

Deux méritent de retenir l’attention.
En premier lieu, le décret n° 2004-243 du 17 mars 2004, relatif au placement sous surveillance électronique, a été pris en application du dernier alinéa de l’article 138 du code de procédure pénale tel qu’issu de la loi n° 2002-1138 du 9 septembre 2002 article 49 (dite loi PERBEN I).

Cet article 49 de la loi permet que l’obligation du contrôle judiciaire (article 138 2° du code de procédure pénale de « ne s’absenter de son domicile ou de la résidence fixée par le juge d’instruction (rajout de la loi du 9 mars 2004) ou le juge des libertés et de la détention qu’aux conditions et pour les motifs déterminés par ce magistrat » soit effectuée sous le régime du placement sous surveillance électronique. L’avant dernier alinéa de l’article 138 dispose désormais, et à la suite de la loi du 9 septembre 2002 que « l’obligation prévue au 2° peut être exécutée avec l’accord de l’intéressé et recueilli en présence de son avocat sous le régime du placement sous surveillance électronique à l’aide du procédé prévu par l’article 723-8. Les articles 723-9 et 723-12 sont applicables, le juge d’instruction exerçant les compétences attribuées au juge de l’application des peines ».

Ce décret du 17 mars a créé les articles R.57-31 à R.57-35 du code de procédure pénale qui précise les modalités de placement sous surveillance électronique des personnes placées sous contrôle judiciaire, emportant l’obligation de ne pas s’absenter de son domicile ou de sa résidence.
En second lieu, le décret n° 2004-1364 du 13 décembre 2004, modifiant le code de procédure pénale relatif à l’application des peines qui précise dans les articles D.49-54 à D.49-63 du code de procédure pénale, les missions des services du secteur public de la protection judiciaire de la jeunesse.
Cette pause dans la production de textes est bienvenue. Cependant, des ajustements en matière de détention provisoire seront nécessaires, afin que les textes et les pratiques professionnelles soient plus efficaces dans le contrôle de la détention provisoire et des éventuels errements constatés.
Le constat doit être fait que notre législation interne, certes perfectible (cela a été dit dans les deux précédents rapports) est protectrice des libertés individuelles et a institué des garanties importantes au profit des mis en cause, même si les modifications intervenues postérieurement à la loi du 15 juin 2000 ont pu en réduire certaines.
La comparaison avec les législations du Royaume-Uni, de l’Allemagne, de l’Italie et de l’Espagne permet de conforter ce constat. Ces législations qui différent profondément les unes des autres (les systèmes juridiques étant eux mêmes très différents) ont chacune des avantages et des inconvénients. Globalement, et actuellement, elles sont assez protectrices des libertés individuelles et de la présomption d’innocence, conformément aux règles posées par la Convention européenne des droits de l’homme, appliquées sous le contrôle de la Cour européenne des droits de l’homme.
En d’autres termes, le placement en détention fait l’objet incontestablement de garanties textuelles importantes. Cependant, les conditions d’application et la mise en oeuvre de ces différents textes rendent quelquefois illusoires les principes posés, même si de nombreux organes de contrôle existent.

CHAPITRE 2 L’EVOLUTION STATISTIQUE DU RECOURS A LA DETENTION PROVISOIRE

Lorsqu’on analyse l’ensemble des données relatives à la détention provisoire depuis l’arrestation d’auteurs d’infractions pénales jusqu’à leur éventuelle condamnation, il s’avère que la période qui débute à la fin de 2001 montre une transformation forte du régime de fonctionnement de la justice pénale. L’année 2003 est marquée par la hausse de certains indicateurs (personnes mises en cause par les services de police et de gendarmerie, condamnations à de l’emprisonnement ferme, incarcérations). Mais de forts déplacements internes sont observés : nouvelle baisse des affaires orientées par les parquets vers les juges d’instruction, hausse corollaire des comparutions immédiates, augmentation de la part des condamnés parmi les personnes incarcérées. Chacun de ces points doit être précisé. L’année 2004, pour ce qu’on en connaît, est encore marquée par la hausse de certains de ces indicateurs, mais le tableau pour cette année est loin d’être complet. La situation actuelle, marquée par une population pénitentiaire encore en augmentation, ne peut donc être évaluée complètement en ce qui concerne l’usage de la détention provisoire. Enfin, on relèvera sur certains points les lacunes du dispositif statistique.
Cela n’est pas vraiment nouveau, mais la situation ne va pas en s’améliorant, en particulier pour les données relatives au mode d’achèvement de la détention provisoire.
L’information statistique concernant la détention provisoire est rendue disponible avec des délais qui varient beaucoup selon les sources. Les premières données disponibles sont les données pénitentiaires qui sont établies peu de temps après la période décrite et les résultats annuels de la statistique dite de police sont maintenant également diffusés rapidement avec le détail souhaitable. Les statistiques annuelles du parquet ne sont en revanche établies de façon définitive qu’après douze mois environ [1] et les données issues du casier judiciaire sont diffusées sous forme d’estimation seulement au début de l’année n+2. Ce n’est donc que pour l’année 2003 qu’un bilan d’ensemble peut être établi (les principales données relatives à la détention provisoire issues des différentes sources statistiques figurent à l’annexe 1). Les données issues du casier judiciaire (statistiques de condamnations) pour 2002 étaient rendues inappropriées en raison de l’amnistie qui a suivi l’élection présidentielle. L’année 2003 ne subit plus cet effet. Cependant le niveau des condamnations reste bas par rapport à 2000, année non touchée par l’effet de l’amnistie [2]. Ceci ne peut guère être expliqué que par l’essor des alternatives aux poursuites et en particulier des compositions pénales qui, en 2003, ne sont pas enregistrées encore au casier judiciaire [3]. Cette considération peut sembler hors sujet : elle concerne bien cependant l’évaluation du recours à la détention provisoire dans la mesure où, dans cette période de mutations pénales profondes, c’est l’indicateur de référence de l’ensemble des poursuites pénales qui change de signification. Il est devenu d’usage courant d’apprécier la politique pénale des parquets en fonction de la « réponse pénale » et non plus des seules poursuites traditionnelles. Mais le dispositif statistique n’a pas été adapté en conséquence, aucune source ne permettant actuellement de connaître le nombre d’auteurs d’infractions concernés par ces réponses pénales, ni les sanctions imposées à côté des peines prononcées par les juridictions pénales [4].
La forte augmentation de la population pénitentiaire observée depuis la fin de l’été 2001 a d’abord concerné aussi bien, et même peut-être plus, les détenus prévenus que les détenus condamnés. Le recours accru à la détention provisoire à partir de l’automne 2001 efface en moins d’un an la baisse qui avait probablement anticipé la mise en application de la loi du 15 juin 2000 [5]. Ce mouvement s’est poursuivi en 2003 et les analyses qui suivent vont s’attacher à préciser comment ce retournement de tendance s’est produit. Il peut avoir en effet plusieurs sources qui se combinent ou se contrarient : évolution du nombre de personnes mises en cause par les services de police et de gendarmerie, évolution du nombre et de la proportion d’affaires poursuivies par le parquet selon les voies de poursuite (instruction, comparution immédiate, citation directe), évolution de la proportion de personnes placées en détention provisoire par les juges des libertés et de la détention ou incarcérées dans le cadre d’une comparution immédiate avec le statut de prévenus, durées des périodes de détention provisoire. En 2004, la hausse des incarcérations a continué mais, comme on le verra, celle-ci provient surtout de l’incarcération de personnes condamnées. Il faudra disposer de l’ensemble des données pour cette année pour savoir si le poids de la détention provisoire est à nouveau substantiellement modifié.
Au bout du compte, les conséquences en termes de surpopulation carcérale demeurent, comme le rapport précédent le soulignait [6]. Cette surpopulation affecte principalement les maisons et quartiers de maisons d’arrêt qui enregistraient encore au 1er mai 2005 un taux d’occupation moyen de 129,7 %. Près de la moitié (71) des 146 maisons et quartiers de maisons d’arrêt avaient encore à cette date un taux d’occupation supérieur ou égal à 140 détenus pour 100 places, et 50 ont un taux supérieur à 150 (soit 3 détenus pour 2 places). Ceci représente une légère amélioration par rapport à la situation de 2004 (plus de la moitié des maisons et quartiers de maison d’arrêt avaient un taux d’occupation supérieur à 150 au 1er avril 2004). Mais cette amélioration profite surtout aux condamnés qui sont mieux répartis dans les établissements pour peines dont le taux d’occupation a légèrement augmenté. Elle est aussi en partie due aux effets des grâces de l’été 2004 qui n’ont qu’un effet temporaire sur la croissance de l’effectif carcéral.
Les données commentées sont présentées de la même façon que dans les rapports 2003 et 2004. Le lecteur est invité à s’y reporter pour la présentation générale des sources et les précautions méthodologiques qui s’imposent [7].

1 - Résultats des enquêtes policières et emploi de la garde à vue
Depuis 2002 la croissance du nombre de personnes mises en cause au stade de la police judiciaire se poursuit. L’augmentation sensible des majeurs mis en cause entraîne, toutes choses égales par ailleurs, une augmentation du nombre de personnes placées en garde à vue et du nombre de personnes écrouées après leur défèrement à l’autorité judiciaire [8]. Mais les choses ne sont pas tout à fait égales par ailleurs et il se surajoute à cet effet de volume un effet d’intensité puisque les proportions de personnes placées en garde à vue et de personnes écrouées augmentent plus rapidement que ce qui résulte de la seule augmentation des majeurs mis en cause [9]. En 2004, la hausse du nombre de majeurs mis en cause se poursuit mais pas l’intensification du placement sous écrou. La garde à vue a été en revanche encore un peu plus fréquente. Finalement sur trois ans, de 2001 à 2004, le nombre de personnes mises en cause augmente de 22 %, le nombre de majeurs mis en cause augmente de 27 %, le nombre de mesures de garde à vue de 40 % et le nombre de personnes écrouées de 32 %. Les deux facteurs volume et intensité se combinent donc. Si le premier effet (augmentation en volume des mis en cause) semble plus important au niveau global, la prise en considération de l’évolution différentielle par types d’infractions indique que l’effet d’intensité joue presque autant.
Si les taux d’écrou par types d’infractions étaient restés à leur niveau de 2001, le nombre de personnes écrouées aurait augmenté de 17 % seulement, ceci parce que les postes qui augmentent le plus rapidement présentent des taux d’écrou faibles (usage de stupéfiants, dégradations de biens, port d’armes, étrangers en situation irrégulière notamment).

voir les tableaux dans le sommaire - dossier intégral

2 - Orientations des affaires au parquet
Le nombre d’affaires dites « poursuivables », c’est-à-dire d’affaires pour lesquelles le parquet estime qu’une infraction est juridiquement constituée et pour lesquelles un ou des suspects peuvent être impliqués, augmente fortement depuis 2001. Les affaires poursuivies connaissent le même mouvement mais de façon moins rapide avec le développement des alternatives aux poursuites. La stagnation du nombre de saisines du juge des enfants correspond en bonne part aux indications de la statistique policière et là encore les alternatives décidées par les parquets gagnent en proportion. Ce sont donc les poursuites correctionnelles de majeurs qui sont surtout orientées à la hausse, mais de façon différenciée selon les voies de poursuite.

Tableau 1 : Evolution des poursuites décidées par le parquet [10]

La hausse des affaires mises à l’instruction observée en 2002, n’a été que
passagère. Ce sont surtout les comparutions immédiates qui connaissent un accroissement de 32,6 % entre 2001 et 2003 alors que les poursuites
correctionnelles directes dans leur ensemble croissent de 10,2 %.
Le mouvement de substitution des comparutions immédiates aux affaires
transmises aux juges d’instruction est une tendance de long terme visible dans le tableau 1. Depuis la fin des années 1990, c’est un principe affiché de la politique pénale des parquets. Cependant, de façon un peu plus précise, on observe qu’entre 1994 et 2001, l’addition des affaires soumises à l’instruction et des comparutions immédiates représentait un ensemble en baisse relative parmi les poursuites et en baisse en chiffres absolus. En 2002 ce mouvement s’est inversé et en 2003, au moins en chiffres absolus, l’ensemble est en hausse. Ceci signifie que l’ensemble des poursuites pouvant donner lieu à une détention provisoire est en hausse sensible depuis 2001 (13,3 %).

3 - Activité des juges d’instruction
Pour l’année 2002, une légère croissance de l’ouverture d’informations (+2,9 %) a été accompagnée d’une augmentation plus substantielle du nombre de personnes mises en examen (+11 %). On pouvait donc s’attendre « mécaniquement » à une augmentation de celui des mandats de dépôt. Mais celleci est allée encore au-delà : +21,8 %. Pour l’année 2003, les résultats sont plus complexes : alors que le nombre d’affaires transmises aux juges d’instruction diminue un peu, le nombre de personnes mises en examen augmente. Du coup, alors que le nombre de mandats de dépôt augmente légèrement en chiffres absolus, la proportion de personnes placées sous mandat de dépôt après leur mise en examen diminue, sans que toutefois la forte hausse de 2002 soit annulée.

Tableau 2 : Mesures provisoires décidées au cours de l’instruction [11]

Plusieurs modes de calcul peuvent d’ailleurs être envisagés pour évaluer cette
fréquence du recours à la détention provisoire. Tout d’abord, il faut rappeler que le
cadre juridique a changé en 2001 avec l’application de la loi du 15 juin 2000. En
suivant à la lettre ce nouveau cadre le nombre de mandats de dépôt est rapporté au
nombre de mis en examen, ce qui exclut du dénominateur les témoins assistés. Le
résultat obtenu est donné dans le tableau 2 et atteint 49 % en 2002, donc un taux qui
n’avait jamais été observé depuis que ce calcul peut être fait (soit 1982). Le
maximum avait auparavant été détenu par l’année 1984, à la veille de réformes
restreignant le recours à la détention provisoire. Ou alors, on étend les cas auxquels
pourrait s’appliquer la détention provisoire aux témoins assistés en supposant que
ceux-ci auraient été mis en examen avant la loi du 15 juin 2000, et l’on obtient de
cette façon un taux de mandats de dépôt de 40 % en 2001, 45,2 % en 2002 et
43,4 % en 2003. Même ainsi, le résultat reste donc sensiblement supérieur en 2002
et 2003 aux taux observés depuis le début des années 1990.
Une autre approche est aussi possible en rapprochant le nombre de mandats
de dépôt du nombre d’affaires reçues par les juges d’instruction. Le nombre de
personnes concernées semble plus pertinent, mais à certaines périodes, il est
probable que la nature des affaires ou les pratiques policières ont fait augmenter le
nombre moyen de personnes mises en examen par affaire : celui-ci oscille entre 1,8
en 1994 à 1,5 en 2000. Il n’est que de 1,2 en 2001 avec l’exclusion des témoins
assistés du calcul (1,3 sinon) pour remonter ensuite à 1,5. Au cours des années
1990, l’importance des instructions pour trafic de stupéfiants pouvait conduire à des
affaires impliquant de très nombreuses personnes parfois mises en examen
seulement pour usage de stupéfiants. Une telle hausse du nombre de personnes
mises en cause pour infractions à la législation des stupéfiants10 a pu reproduire le
même phénomène en 2002 et 2003. Ceci montre bien l’intérêt qu’auraient des
données ventilées par types d’infractions au niveau de l’instruction. Mais, en tout état
de cause, si l’on rapporte le nombre de mandats de dépôt aux nombre d’affaires, les
années 2002 et 2003 se trouvent très nettement au dessus des années précédentes.
Malgré les difficultés d’évaluation statistique rencontrées, il semble donc avéré
qu’en intensité, le recours à la détention provisoire au niveau de l’instruction est
revenu en 2002 et 2003 à un niveau sensiblement supérieur à celui de la décennie
1990.
Pour partie, ce résultat peut-il provenir de la concentration plus forte d’affaires
« graves et complexes » selon les critères de la politique pénale pour lesquelles
serait réservée la voie de l’instruction ? Là encore, les données détaillées par types
d’infraction font défaut. Dans le rapport précédent11, il était relevé que les statistiques
de police semblaient indiquer que l’accroissement des poursuites en comparution
immédiate trouvait plutôt son origine dans le renforcement de la répression
d’infractions ne suscitant généralement pas l’ouverture d’une information et que, de
plus, les affaires soumises à l’instruction ne baissaient pas. La seule source donnant
une indication en termes d’infractions pour les affaires instruites est le répertoire de
l’instruction. L’exploitation statistique concerne les affaires terminées (tableau 3),
d’où un décalage avec le mouvement des affaires transmises aux juges d’instruction
que dénombrent les cadres des parquets (tableau 2). Elle donne la répartition des
10 Cette hausse est observée au niveau des statistiques de police.
11 Rapport 2004, page 24
17
affaires selon que le réquisitoire introductif visait des crimes, des délits ou des
contraventions. Les résultats de 2003 confirment que depuis 2001, la proportion et le
nombre absolu d’informations ouvertes avec une qualification criminelle
s’accroissent. Mais ceci ne portant que sur une différence d’environ un millier
d’affaires (de 6 900 à 7 900), il est difficile de trouver ici la seule base d’un
accroissement net de plus de 4 000 mandats de dépôts dans le même temps (de
19 500 à 24 000). L’explication par la gravité relative croissante des affaires n’est pas
suffisante à elle seule. Néanmoins, il conviendra de se rappeler de ce facteur lors de
l’examen des durées de détention provisoire.
18
Tableau 3 : Qualification de l’infraction au moment du réquisitoire introductif [12]

Plusieurs modes de calcul peuvent d’ailleurs être envisagés pour évaluer cette fréquence du recours à la détention provisoire. Tout d’abord, il faut rappeler que le cadre juridique a changé en 2001 avec l’application de la loi du 15 juin 2000. En suivant à la lettre ce nouveau cadre le nombre de mandats de dépôt est rapporté au nombre de mis en examen, ce qui exclut du dénominateur les témoins assistés. Le résultat obtenu est donné dans le tableau 2 et atteint 49 % en 2002, donc un taux qui n’avait jamais été observé depuis que ce calcul peut être fait (soit 1982). Le maximum avait auparavant été détenu par l’année 1984, à la veille de réformes restreignant le recours à la détention provisoire. Ou alors, on étend les cas auxquels pourrait s’appliquer la détention provisoire aux témoins assistés en supposant que ceux-ci auraient été mis en examen avant la loi du 15 juin 2000, et l’on obtient de cette façon un taux de mandats de dépôt de 40 % en 2001, 45,2 % en 2002 et 43,4 % en 2003. Même ainsi, le résultat reste donc sensiblement supérieur en 2002 et 2003 aux taux observés depuis le début des années 1990.
Une autre approche est aussi possible en rapprochant le nombre de mandats de dépôt du nombre d’affaires reçues par les juges d’instruction. Le nombre de personnes concernées semble plus pertinent, mais à certaines périodes, il est probable que la nature des affaires ou les pratiques policières ont fait augmenter le nombre moyen de personnes mises en examen par affaire : celui-ci oscille entre 1,8 en 1994 à 1,5 en 2000. Il n’est que de 1,2 en 2001 avec l’exclusion des témoins assistés du calcul (1,3 sinon) pour remonter ensuite à 1,5. Au cours des années 1990, l’importance des instructions pour trafic de stupéfiants pouvait conduire à des affaires impliquant de très nombreuses personnes parfois mises en examen seulement pour usage de stupéfiants. Une telle hausse du nombre de personnes mises en cause pour infractions à la législation des stupéfiants [13] a pu reproduire le même phénomène en 2002 et 2003. Ceci montre bien l’intérêt qu’auraient des données ventilées par types d’infractions au niveau de l’instruction. Mais, en tout état de cause, si l’on rapporte le nombre de mandats de dépôt aux nombre d’affaires, les années 2002 et 2003 se trouvent très nettement au dessus des années précédentes.
Malgré les difficultés d’évaluation statistique rencontrées, il semble donc avéré qu’en intensité, le recours à la détention provisoire au niveau de l’instruction est revenu en 2002 et 2003 à un niveau sensiblement supérieur à celui de la décennie 1990.
Pour partie, ce résultat peut-il provenir de la concentration plus forte d’affaires « graves et complexes » selon les critères de la politique pénale pour lesquelles serait réservée la voie de l’instruction ? Là encore, les données détaillées par types d’infraction font défaut. Dans le rapport précédent [14], il était relevé que les statistiques de police semblaient indiquer que l’accroissement des poursuites en comparution immédiate trouvait plutôt son origine dans le renforcement de la répression d’infractions ne suscitant généralement pas l’ouverture d’une information et que, de plus, les affaires soumises à l’instruction ne baissaient pas. La seule source donnant une indication en termes d’infractions pour les affaires instruites est le répertoire de l’instruction. L’exploitation statistique concerne les affaires terminées (tableau 3), d’où un décalage avec le mouvement des affaires transmises aux juges d’instruction que dénombrent les cadres des parquets (tableau 2). Elle donne la répartition des affaires selon que le réquisitoire introductif visait des crimes, des délits ou des contraventions. Les résultats de 2003 confirment que depuis 2001, la proportion et le nombre absolu d’informations ouvertes avec une qualification criminelle s’accroissent. Mais ceci ne portant que sur une différence d’environ un millier d’affaires (de 6 900 à 7 900), il est difficile de trouver ici la seule base d’un accroissement net de plus de 4 000 mandats de dépôts dans le même temps (de 19 500 à 24 000). L’explication par la gravité relative croissante des affaires n’est pas suffisante à elle seule. Néanmoins, il conviendra de se rappeler de ce facteur lors de l’examen des durées de détention provisoire.

Tableau 3 : Qualification de l’infraction au moment du réquisitoire introductif [15]

L’augmentation du taux de placement sous mandat de dépôt se fait sans
modification notoire du résultat du débat contradictoire (tableau 4). Tandis que le nombre de débats contradictoires organisés augmente sensiblement en 2002 et dans une moindre mesure en 2003, le résultat se maintient au même niveau en valeur relative en termes de pourcentage de mandats de dépôt décernés.

Tableau 4 : Résultats du débat contradictoire [16]

Dans le rapport 2003, le résultat atypique de 2000 avait été souligné
(augmentation sensible du nombre de débats contradictoires, baisse des mandats de dépôt décernés). Il pouvait être interprété comme une divergence accrue entre les réquisitions du parquet et les décisions des juges d’instruction. Après les ajustements liés à l’application de la loi du 15 juin 2000, la mise en place des juges des libertés et de la détention et la mise en oeuvre de nouvelles orientations de politique pénale, le résultat des débats contradictoires est aussi prévisible qu’il l’était à la fin des années 1990. La seule évolution qui mérite mention est celle du débat contradictoire différé.
Cette possibilité concerne un nombre décroissant de cas : 3,5 % des débats contradictoires en 2003 contre 6 à 7 % entre 1994 et 1998. Les chances de ne pas être placé sous mandat de dépôt à l’issue d’un débat contradictoire différé augmentent quant à elles régulièrement. Alors que le résultat était en gros identique au début des années 1990 ou même plus défavorable à la personne mise en examen pour le débat différé, il est maintenant nettement plus favorable. Mais la baisse des débats différés peut signifier que les reports ne sont plus demandés que pour les cas où des éléments sont réellement susceptibles d’être apportés par la défense pour éviter le mandat de dépôt. Il serait intéressant de disposer d’évaluations plus précises sur ce point évoqué par les praticiens comme une voie possible de recours accru aux alternatives à la détention provisoire, en accordant plus de temps au recueil d’informations vérifiées sur la situation de la personne mise en examen.
L’évolution du contrôle judiciaire a fait l’objet d’analyses détaillées dans le rapport 2004. On observait alors que le recours accru à la détention en 2002 n’avait pas fait diminuer d’autant le recours au contrôle judiciaire ab initio. On relèvera que pour 2003, l’augmentation des placements sous contrôle judiciaire ab initio compense en proportion la légère baisse des mandats de dépôt. L’épisode de 2002 se traduit finalement par le maintien de la proportion de personnes mises en examen pour qui une restriction de liberté, mandat de dépôt ou contrôle judiciaire, est décidée : en additionnant les deux mesures (mandat de dépôt, contrôle judiciaire) [17], il apparaît que d’un point de vue statistique, la règle est d’accompagner la mise en examen d’une restriction de liberté puisque c’est ce qui se passe maintenant dans plus de 85 % des cas. Ce recours accru au contrôle judiciaire se développe suivant la tendance relevée les années précédentes : la croissance la plus forte concerne les mesures de contrôle judiciaire sans autorité de contrôle désignée ou confiées à un service ou une personne physique, donc les mesures autres que celles qui sont confiées à des associations de contrôle judiciaire ou au SPIP (graphique 3). Le contrôle judiciaire avec placement sous surveillance électronique fait son apparition dans la nomenclature statistique en 2003. Ce dispositif a été appliqué dans 316 cas, ce qui représente 1 % des mesures de contrôle judiciaire (et 1,3 cas pour 100 mandats de dépôt instruction).

Tableau 5 : Répartition des mesures de contrôle judiciaire selon le mode de prise en charge

Graphique 3 Contrôle judiciaire instruction selon la prise en charge [18]

La solution de la mise en liberté sous contrôle judiciaire est curieusement
encore en baisse en 2003 (colonne 6 du tableau 2) alors que l’ensemble des mises en liberté connaît une augmentation absolue et relative qui rompt avec une décroissance de plusieurs années. Mais, l’analyse est ici rendue délicate par des effets combinés de calendrier et de variations importantes des chiffres absolus dans le temps (les mises en liberté de 2003 peuvent correspondre à des mandats de dépôt de 2002 qui étaient en forte augmentation). En examinant les parts respectives des détentions provisoires selon leur mode de sortie de l’instruction, c’est-à-dire la situation dans laquelle se trouvent à la fin de l’instruction les personnes mises en examen et placées à un moment ou à un autre sous mandat de dépôt, il semble plutôt que les années 2002 et 2003 se caractérisent par une proportion accrue de mis en examen renvoyés devant une juridiction de jugement avec maintien en détention. Alors que cette proportion diminuait d’environ 50 % au milieu des années 1990 pour arriver à 30 % en 2001, on observe des proportions de 35 % et 34 % en 2002 et 2003 respectivement.
Mais on rencontre ici une des principales lacunes du dispositif statistique en matière de détention provisoire : si diverses sources (pas forcément concordantes comme le montre l’annexe 1) décomptent les placements et entrées en détention provisoire, ce qu’il advient ensuite n’est que très partiellement connu.

4 - Incarcérations
La hausse des incarcérations en nombres annuels persiste depuis 2002. Les entrées en prison ont progressé pour cette année de 22 % par rapport à 2001.
L’année 2003 reste à peu près au même niveau avec environ 78 000 entrées pour les établissements pénitentiaires de la métropole, puis en 2004, une nouvelle hausse de 4 % porte ce nombre à près de 81 000 (graphique 4). Cette augmentation de 26 % en trois ans (2001-2004) fait revenir le régime de la démographie carcérale à une situation où l’augmentation de la population pénitentiaire est en partie due à une augmentation des flux d’entrées.

Graphique 4 Incarcérations en France métropolitaine : nombre annuel d’entrées [19]

Il existe quelques incertitudes sur les sources statistiques, même pour un indicateur en apparence aussi simple. Depuis 1993, la statistique dite semestrielle de l’administration pénitentiaire (utilisée pour le graphique 4) peut être confrontée à une autre source dite du fichier national des détenus (FND). Ce dernier était supposé décrire avec plus de précision les catégories juridiques des mouvements d’entrées et de libérations. Mais il apparaissait au fil du temps un sous enregistrement des entrées dans les statistiques qui en étaient issues. De plus, à l’occasion d’un changement dans l’application informatique de gestion, certains problèmes de codage sont apparus et certains renseignements n’ont pu être produits par cette source. Celle-ci ne donne pas non plus exactement le même calendrier pour l’augmentation des entrées : l’accroissement semble plus régulier mais il est finalement probablement du même ordre si l’on suppose que la nouvelle version du FND est plus exhaustive. Face à ces difficultés techniques, il semble raisonnable de continuer pour le moment à se baser sur les séries issues de la statistique semestrielle, même si la ventilation des entrées par catégories juridiques reste assez frustre.
Les trois principaux postes de cette ventilation concernent les entrées enregistrées dans le cadre d’une instruction (donc avant jugement), les entrées enregistrées dans le cadre d’une comparution immédiate (donc avant ou après un premier jugement) et les entrées de condamnés (donc après un premier jugement, sinon après un jugement définitif). La dernière catégorie concerne les contraintes par corps qui sont très peu nombreuses (10 en 2004 après une régulière diminution). Les séries reconstituées pour la métropole depuis 1969 sont reproduites en annexe.

Graphique 5 Entrées en prison par catégories pénales [20]

Le graphique 5 représente en chiffres absolus les trois principales catégories. La diminution des entrées sur la période qui va de 1984 à 2001 (graphique 4) est directement liée à la baisse des incarcérations dans le cadre d’une instruction, elle-même principalement liée à la baisse du nombre de personnes mise en examen et d’affaires soumises à cette voie de poursuite [21]. Un déplacement a lieu vers les comparutions immédiates et, dans une moindre mesure, les condamnations jusqu’au début des années 1990. A partir de l’année 2000, les mouvements de hausse vont apparaître dans les trois sous-séries mais de façon décalée.
Les entrées correspondant à des mandats de dépôt « instruction » connaissent leur point le plus bas en 2001. Ceci correspond bien aux données évoquées à propos des juges d’instruction puis des juges des libertés et de la détention. La hausse de 2002 annule la baisse de 2001, mais en 2003 et 2004 on observe une légère diminution.
Les entrées correspondant à des comparutions immédiates (condamnés non définitifs ou mandats de dépôt en attente de jugement) connaissent en revanche une augmentation qui se poursuit en 2003. En 2004, on observe une stabilisation et la courbe d’évolution semble avoir quitté le niveau auquel elle s’était maintenue de 1993 à 2001 pour s’établir à un niveau plus élevé. Une telle « marche d’escalier » était déjà apparue entre 1990 et 1993, marquant probablement le transfert de détentions provisoires « instruction » vers des incarcérations dans le cadre d’une comparution immédiate.
Les données du FND indiquaient avant 2003 la répartition de ces entrées
dans le cadre d’une comparution immédiate : en ordre de grandeur, elles se répartissaient en deux parts équivalentes pour les entrées avant le jugement de première instance et pour les entrées après ce jugement. Il n’est pour le moment pas possible d’affirmer que cette répartition s’est maintenue avec l’accroissement des entrées en comparution immédiate [22].
Les entrées en prison après une condamnation autre qu’en comparution
immédiate qui ont connu un point bas en 2000, augmentent à partir de 2001 et la croissance se poursuit encore en 2004. Pour cette année 2004, la croissance des entrées en prison vient entièrement des entrées de ces condamnés qui ne sont pas nécessairement des condamnés définitifs [23].
Ce calendrier d’évolution ne correspond pas aux données issues du casier
judiciaire selon lesquelles c’est en 2001 que les condamnations à de
l’emprisonnement ferme sont au plus bas [24]. Ceci pourrait indiquer alors que les peines d’emprisonnement ferme prononcées contre des condamnés libres au moment du jugement ont été plus fréquemment mises à exécution dès 2001.
Ensuite, les condamnations à de l’emprisonnement ferme inscrites au casier judiciaire augmentent nettement mais finalement entre 2000 et 2003, l’accroissement est de 5,7 % (ce qui inclut les condamnations à de l’emprisonnement ferme en comparution immédiate, elles-mêmes probablement en augmentation plus rapide), tandis que la série pénitentiaire des entrées de condamnés (hors comparution immédiate) fait état d’un accroissement de plus de 25 % dans le même temps [25]. En l’absence de statistiques régulières sur la mise à exécution des peines, on peut donc considérer cependant que le taux de mise à exécution des peines d’emprisonnement ferme prononcées pour des prévenus jugés libres a augmenté. Mais parmi ces prévenus, certains auront pu être placés en détention provisoire pendant une période d’instruction, remis en liberté avant leur jugement et de nouveau incarcérés après condamnation. Les catégories de la statistique pénitentiaire trimestrielle ne sont donc pas assez précises en termes de catégories juridiques (au moment de l’incarcération) et de parcours pénitentiaire.
L’absence de données régulières et fiables sur le suivi des personnes placées en détention provisoire se fait à nouveau sentir. Il est souvent affirmé que les juges se contentent de « couvrir » la période de détention provisoire lorsque comparaissent des prévenus remis en liberté avant leur jugement. Ceci ne correspond pas aux quelques informations disponibles à ce propos. La période de détention provisoire est inscrite au casier judiciaire pour des raisons de gestion de la peine. La condamnation prise en compte est la condamnation définitive. En 2003, selon l’évaluation fournie dans l’Annuaire statistique de la Justice [26], 35 447 condamnations ont été précédées d’une période de détention provisoire (mineurs inclus). Dans 3 890 cas, la condamnation n’a emporté aucune peine ferme privative de liberté. La détention provisoire n’a pas été « couverte ». Dans 2 392 cas, la période de détention provisoire a été plus longue que la peine ferme prononcée (environ la moitié de ces cas présente un différentiel de quinze jours au plus). Enfin, dans les autres cas (29 165) la détention provisoire a bien été couverte : ce qui représente 80 % des condamnations après détention provisoire. Mais l’annuaire n’indique pas dans quelle proportion ces condamnés étaient libres ou détenus au moment du jugement. Rappelons qu’en 2003, selon les statistiques des parquets concernant l’instruction, environ 14 000 détentions provisoires instruction prennent fin au plus tard à la clôture de l’instruction. En laissant de côté la question des délais de jugement, à supposer que tous les condamnés dont la détention provisoire n’a pas été couverte (environ 6300) ont bénéficié d’une remise en liberté avant jugement, en supposant qu’il en va de même pour quelques centaines de détenus provisoires qui bénéficieront d’un non lieu ou d’un acquittement, il reste, en ordre de grandeur, au moins 7 000 anciens détenus provisoires condamnés ensuite à une peine supérieure ou égale à la période d’incarcération déjà subie. Pour comprendre correctement l’évolution du recours à la détention provisoire, il serait tout à fait nécessaire de savoir de quel poids ils pèsent parmi les quelques 22 000 cas d’incarcération de condamnés recensés par la statistique pénitentiaire.

5 - Durée des détentions provisoires
Diverses sources permettent d’avoir une idée de l’évolution de la durée moyenne de la détention provisoire : il s’agit de l’évaluation fournie par le casier judiciaire (qui ne porte donc que sur les condamnations) et de celle que l’on peut faire à partir des données de flux et de stock issues de la statistique pénitentiaire trimestrielle [27]. En 2000, la durée moyenne de détention provisoire (quelle que soit son issue) avait diminué. En 2002, cette diminution s’est poursuivie ce qui confirme le retour d’une forte croissance des courtes détentions, probablement surtout liées aux comparutions immédiates. Mais en 2003, la durée moyenne de détention provisoire augmente à nouveau. Comme le suggère la ventilation des durées entre les condamnations pour crimes et les condamnations pour délits issue du casier judiciaire, le résultat moyen dépend autant de la proportion relative de détentions provisoires selon leur nature (détention provisoire « instruction » criminelle ou délictuelle, détention provisoire liée à la comparution immédiate). En 2002, la forte augmentation des comparutions immédiates a sans doute contribué à la baisse de la durée moyenne de la détention provisoire. A ce moment les détentions précédant des condamnations criminelles ont cependant une durée moyenne croissante. En 2003, le phénomène inverse joue peut-être.

Graphique 6 Durée moyenne de détention avant jugement définitif

Tableau 6 Estimation de la durée moyenne de la détention provisoire [28]

L’achèvement de la détention provisoire peut venir avec une condamnation devenant définitive : le détenu passe alors du statut de prévenu au statut de condamné. L’estimation calculée à partir des séries pénitentiaires inclut donc dans la durée moyenne de détention provisoire le délai qui s’écoule entre le jugement et le moment où la condamnation devient définitive. Si la moyenne obtenue est plus faible que celle qui découle du casier judiciaire, laquelle prend comme base de calcul le temps écoulé entre le mandat de dépôt et la condamnation [29], c’est peut-être parce qu’échappent alors les cas de détention provisoire qui ne sont pas suivis d’une condamnation.
Les deux sources précédentes (statistique de condamnations et statistique pénitentiaire) ne permettent pas d’évaluer la durée des détentions provisoires « instruction ». Pour celles-ci on dispose d’indications issues du répertoire de l’instruction, mais les durées calculées ne concernent que la période de l’instruction : c’est le délai écoulé entre la date du mandat de dépôt et la date de l’ordonnance de clôture en cas de maintien en détention ou la date de la mise en liberté sinon. Pour l’année 2003, la durée moyenne globale est de 7,1 mois, ce qui représente une augmentation sensible par rapport à 2002 (6,4 mois) alors que cette durée moyenne était plutôt décroissante auparavant (6,6 mois en 1999). Cette durée moyenne est bien sûr inégale selon les types de procédure : 6,2 mois pour les cas se terminant par un renvoi devant le tribunal correctionnel et 15,2 mois pour les cas renvoyés devant une cour d’assises. Pour cette dernière catégorie, par comparaison avec le délai calculé au moment du jugement (environ deux ans), on remarque l’importance du délai d’attente du jugement.
Le même rapprochement ne peut être fait pour les jugements correctionnels car le calcul basé sur le casier judiciaire inclut les comparutions immédiates.
L’estimation fournie par l’Annuaire statistique de la Justice n’est pas correcte : elle est basée sur l’hypothèse que les condamnations avec détention provisoire avant jugement qui surviennent plus de deux mois après la date de l’infraction correspondent à des affaires passées par l’instruction, ce qui ignore le cas des condamnations en comparution immédiate et suivies d’un appel. S’il est donc impossible pour le moment de calculer une durée moyenne totale de détention provisoire pour les condamnés correctionnels après instruction, on relève cependant un nombre important de ces condamnés ayant été placés en détention provisoire pendant une longue période. En 2003, 5 658 de ces condamnés ont passé au moins huit mois en détention provisoire, dont 2 800 plus d’un an. Ce dernier chiffre peut être rapproché des quelques 2 000 condamnés criminels ayant aussi subi une détention provisoire de plus d’un an même si dans ce cas les très longues détentions provisoires - plus de deux ans - sont plus nombreuses (1 170 contre 283 pour les condamnés correctionnels). Ce résultat peut venir du phénomène dit de correctionnalisation des poursuites : les données générales du répertoire de l’instruction montrent qu’un nombre appréciable d’instructions ouvertes sur la base d’une qualification criminelle débouchent sur des poursuites correctionnelles. En 2002, environ 7 400 affaires terminées à l’instruction avaient reçu une qualification criminelle dans le réquisitoire introductif alors qu’en 2003, les cours d’assises ne jugeaient qu’environ 2 700 affaires. Ces affaires correctionnalisées, dont le nombre augmente vraisemblablement, donnent lieu peut-être à des détentions provisoires plus longues que les autres affaires correctionnelles.

CHAPITRE 3 LA REPARATION DE LA DETENTION PROVISOIRE INJUSTIFIEE EN 2004
Contrastant quelque peu avec le traitement proposé en 2004 par le ministère de la Justice du volet réparation de l’affaire dite « des acquittés d’Outreau » (dont six sur sept ont subi une détention provisoire injustifiée de durée variable) où les propositions directes d’indemnisation éludant les règles procédurales applicables viennent finalement d’aboutir à l’automne 2005 [30] à une réparation effective, l’activité de la Commission nationale de réparation des détentions - dont la Commission de suivi de la détention provisoire peut seule rendre compte dans son intégralité [31]- a été placée cette même année sous le signe de l’approfondissement du travail précédemment accompli [32].
Le respect de légalité procédurale (1) y apparaît le gage de la réparation au fond (2).

1 - Le respect de la légalité procédurale
Pour la Commission nationale de réparation des détentions, dès lors que le formalisme informatif édicté par les textes au profit du demandeur en réparation a bien été observé (1.1), la méconnaissance des différentes formalités et délais imposés par la procédure doit conduire au prononcé d’une irrecevabilité sans que cette sanction apparaisse disproportionnée (1.2).

1.1 - Le formalisme informatif
A plusieurs reprises la procédure régissant la réparation à raison d’une
détention est venue édicter un formalisme destiné à informer le demandeur de la teneur des démarches à accomplir et des délais impartis pour ce faire. Ainsi, selon l’article R.26 dernier alinéa du code de procédure pénale, le délai de six mois prévu pour saisir le premier président de la cour d’appel d’une requête en réparation ne court à compter de la décision de non-lieu, de relaxe ou d’acquittement devenue définitive que si, lors de la notification de cette décision, la personne a été avisée de son droit de demander une réparation ainsi que des dispositions des articles 149-1, 149-2 et 149-3 (premier alinéa). Dans le même sens, l’article R.38 alinéa 2 prévoit que la notification de la décision rendue par le premier président doit, à son tour, indiquer que celle-ci peut faire l’objet d’un recours devant la commission nationale de réparation des détentions dans un délai de dix jours.
La première vérification à opérer pour cette dernière porte donc sur le respect de ce formalisme informatif. On peut en prendre deux illustrations à propos du dépôt par le demandeur au premier degré de la requête en réparation et au second degré des conclusions au soutien de son recours.
Une décision du 11 octobre 2004 [33] prend position sur la charge de la preuve de l’observation (ou de la non observation) de ce formalisme informatif à propos de la notification d’une décision d’acquittement. A l’argumentation de l’agent judiciaire du Trésor soutenant qu’il appartient au demandeur en réparation de produire le procès-verbal des débats prévu à l’article 378 du code de procédure pénale pour démontrer que l’information sur son droit de demander réparation ne lui a pas été donnée, la Commission nationale répond qu’il importe peu de connaître les mentions du procès-verbal des débats de la cour d’assises que le demandeur n’a d’ailleurs pas en sa possession. Dès lors que la notification ne comporte pas la mention de l’information prévue, le délai de six mois n’a pas couru et la requête est recevable.
Devant la Commission nationale, l’article R.40-8 du code de procédure pénale prévoit que le secrétaire de cette dernière doit demander à l’auteur du recours [34] de lui adresser ses conclusions dans le délai d’un mois. Dans une décision du 5 mars 2004 [35], le demandeur auteur du recours avait bien reçu la notification, mais son avocat faisait valoir que ce délai ne lui était pas opposable, n’ayant été lui-même destinataire d’aucune notification du secrétariat de la commission alors qu’il avait formé le recours au nom du demandeur ; argument auquel accède la commission : à défaut de la notification prévue par l’article R.40-8 du code de procédure pénale à l’avocat constitué pour le demandeur auteur du recours, ses conclusions, même déposées après l’expiration du délai imparti, sont recevables.
En revanche à quelque stade que ce soit de la procédure, dès lors que la notification prévue est correctement intervenue, l’irrespect du délai qu’elle impartit ne peut qu’être sanctionné.

1.2 - L’irrecevabilité
Devant la Commission nationale, il peut y avoir irrecevabilité du recours, des demandes formulées en l’absence de recours personnel, comme des conclusions.
S’agissant, en premier lieu du recours, un certain nombre de demandeurs en réparation continuent à le former par lettre recommandée avec accusé de réception voire lettre simple [36] en méconnaissance de l’article R.40-4 du code de procédure pénale qui prévoit que la déclaration de recours est remise au greffe de la cour d’appel en quatre exemplaires [37]. La Commission nationale ne peut alors que constater que : « bien que précisément informé, par la notification de la décision critiquée, des formes et modalités du recours...le requérant n’ayant pas respecté les formalités prescrites par l’article R.40-4 du code de procédure pénale ..., le recours est irrecevable » [38].
Aucune régularisation du recours n’est possible après l’expiration du délai fixé pour son exercice [39]. Et la Commission nationale affirme que l’instauration de telles formalités à accomplir pour l’exercice du recours devant elle « ne constitue pas une entrave disproportionnée au droit d’accès à un tribunal, même pour une personne détenue qui a, d’une part, la faculté de s’adresser au greffe de l’établissement pénitentiaire pour s’informer et y formaliser son recours, d’autre part de solliciter l’assistance d’un avocat au titre de l’aide juridictionnelle » [40].
Une déclaration orale, enregistrée et datée par le greffier, signée par l’auteur du recours [41] voire par le greffier [42] équivaut toutefois à une déclaration écrite au sens de l’article R.40-8.
Un certain nombre de décisions continuent également, en deuxième lieu, de prononcer l’irrecevabilité des demandes formulées devant la Commission nationale en l’absence de recours personnel [43]. La solution a été qualifiée de « pour le moins regrettable » [44] dans l’hypothèse où l’absence de recours personnel de l’agent judiciaire du Trésor l’empêchait d’obtenir la réduction de la somme allouée par le premier président en réparation d’un préjudice psychologique ensuite reconnu inexistant par expertise [45]. Une décision du 5 mars 2004 [46] illustre qu’elle joue à l’identique à l’encontre du demandeur en réparation dont l’absence de recours personnel l’empêche d’obtenir l’augmentation de la réparation allouée en première instance qu’aurait pu lui accorder la Commission nationale. En l’espèce, le premier président avait alloué au demandeur 25 916 euros en réparation de son préjudice moral. La Commission nationale, saisie par recours de l’agent judiciaire du trésor pris comme élément du préjudice matériel [47] puis constate qu’en l’absence de recours formé par le demandeur, l’indemnité à laquelle il peut prétendre ne peut excéder celle accordée par le premier président, de sorte que l’indemnité réparant son préjudice moral ne peut qu’être fixée à la somme de 2 916 euros (soit la différence).
S’agissant, enfin, du dépôt des conclusions devant la commission nationale, l’article R.40-8 du code de procédure pénale ne fait pas obstacle à ce que l’auteur du recours fasse parvenir ses conclusions avant l’envoi par le greffe de la lettre recommandée ou sa réception par le requérant et à ce que celui-ci reprenne en s’y référant celles déposées devant le premier président [48].
En sens inverse, dès lors que le formalisme informatif a bien été observé auprès du demandeur et de son avocat, le premier éclairé par les conseils du second, ne saurait prétendre n’avoir pas compris le sens et la portée de l’avis qui lui a été adressé. Les conclusions tardives doivent alors être écartées des débats ce qui conduit au rejet du recours, la commission n’ayant été régulièrement saisie d’aucun moyen de contestation de la décision à son soutien. Pour la Commission nationale, une telle sanction est justifiée tant par les dispositions de l’article R.40-8 que par le respect du principe de la contradiction et « n’est pas hors de proportion avec l’objet de ces dispositions visant à assurer la loyauté et la rapidité de l’instruction du recours » [49].

Conclusion : le nombre et l’issue des recours devant la Commission
nationale de réparation des détentions
 
Sur 65 décisions rendues au cours de neuf audiences par la Commission nationale en 2004 [50], ont été pris en considération 83 recours formés contre des décisions de premiers présidents en l’état dans un certain nombre d’affaires de recours conjoints : 1 émanant d’un procureur général et de l’agent judiciaire du Trésor et 17 du demandeur en réparation et de l’agent judiciaire du Trésor.

Tableau n° 1 : nombre des recours [51]

Se confirment donc le caractère toujours plus exceptionnel au fil des trois
dernières années du recours émanant du procureur général près une cour d’appel (4% en 2002, 3% en 2003, +/- 1% en 2004) et une saisine de la Commission nationale intervenant toujours sur recours du demandeur en réparation ou/et de l’agent judiciaire du Trésor, avec une initiative largement majoritaire des détenus provisoires.
Cette dernière tendance peut être encouragée par celle de l’issue réservée aux recours nettement plus favorable, ainsi que cela avait déjà été constaté dans le précédent rapport [52], dans le cas du demandeur en réparation (accueil : 79,49% ; rejet : 20,51%) que dans celui de l’agent judiciaire du Trésor (accueil : 38,71% ; rejet : 61,29%).

Tableau n° 2 : issue des recours [53]

2 - L’effectivité de la réparation
La Commission nationale de réparation des détentions est venue apporter en 2004 de nouvelles précisions sur les conditions (2.1) comme l’étendue (2.2) du droit à réparation.

2.1 - Les conditions du droit à réparation
Le droit à réparation est en effet subordonné à l’absence de condamnation du requérant (2.1.1) comme de cas d’exclusion de l’indemnisation (2.1.2).

2.1.1 - L’absence de condamnation du requérant
L’existence d’une condamnation exclut en général toute possibilité de demande en réparation au titre de la détention provisoire subie qui n’apparaît plus injustifiée, sous réserve du cas particulier du condamné ultérieurement reconnu innocent [54].
Deux décisions du 11 juin 2004 confirment la jurisprudence antérieure quant à l’hypothèse d’une condamnation partielle du requérant du chef de certaines infractions [55]. Si peu importe que l’intéressé n’ait « finalement été condamné qu’à une peine d’emprisonnement avec sursis » [56], encore faut-il que l’infraction pour laquelle il a été condamné ne soit « pas incompatible avec un placement et un maintien en détention pour la durée subie » [57]. Cette incompatibilité n’existe pas dans le cas d’un requérant acquitté du crime de viol mais condamné à six mois d’emprisonnement avec sursis pour délit d’agression sexuelle aggravée après avoir effectué trois ans trois mois et trois jours de détention provisoire dans la mesure où le délai maximum de deux ans de détention provisoire prévu en matière correctionnelle par l’article 145 du code de procédure pénale, dans sa version alors applicable, pour un délit passible d’une peine de dix ans n’a pas été dépassé ; le juge d’instruction ayant ordonné la prolongation de la détention une seule fois, avant de rendre son ordonnance de transmission de pièces moins de deux ans après le mandat de dépôt initial.
L’irrecevabilité de la requête peut encore tenir à l’un des cinq cas d’exclusion de la réparation.

2.1.2 - L’absence de cas d’exclusion de la réparation
La Commission nationale rappelle le caractère limitatif des cas d’exclusion de la réparation [58] (2.1.2.1) que la loi dite « Perben II » est toutefois venue porter de trois à cinq, ce qui l’a conduite à se prononcer en 2004 sur l’application dans le temps des nouveaux cas introduits (2.1.2.2).

2.1.2.1 - L’énumération limitative des cas d’exclusion
A l’argumentation de l’agent judiciaire du Trésor prétendant exclure de la durée ouvrant droit à réparation une seconde période de détention provisoire motivée par le non-respect par le requérant des obligations de son contrôle judiciaire, la Commission nationale oppose dans une décision du 15 juillet 2004 [59] le caractère limitatif de la prévision des cas d’exclusion : « les dispositions de l’article 149 du code de procédure pénale instituent, pour les détentions subies, un principe de réparation intégrale, assorti de certaines exceptions au rang desquelles ne figure pas la violation des obligations d’un contrôle judiciaire ». Elle observe :
- en amont, que ce texte n’opère aucune distinction entre la mesure de détention provisoire ordonnée en application de l’article 144 dudit code et celle prononcée en application de l’article 141-2 comme sanction de la soustraction volontaire aux obligations du contrôle judiciaire [60] ;
- en aval, que cette dernière ne peut être regardée comme une faute de nature à influer sur le principe et le montant du droit à réparation dès lors que la procédure s’est terminée par une décision de non-lieu, de relaxe ou d’acquittement devenue définitive.
Hors l’ajout à l’avenir d’un nouveau et sixième cas d’exclusion dont le bienfondé apparaît à la Commission de suivi de la détention provisoire sujet à discussion et qui entamerait la généralité du droit à réparation intégrale instauré en 2000, il n’y a pas lieu de distinguer, en l’état, en fonction de l’origine de la mesure de détention provisoire : prononcé ab initio ou sanction de la violation du contrôle judiciaire.
Cette même décision définit surtout le régime d’application dans le temps du premier des deux nouveaux cas d’exclusion ajoutés par l’article 103 de la loi du 9 mars 2004.

2.1.2.2 - L’application dans le temps des nouveaux cas d’exclusion introduits par la loi « Perben II »
Il s’agit [61] de la prescription de l’action publique intervenue depuis la libération de la personne (2.1.2.2.1) et de la détention pour autre cause (2.1.2.2.2).

2.1.2.2.1 - La prescription de l’action publique
En l’espèce, le bénéficiaire d’une décision de non-lieu fondée exclusivement sur la prescription de l’action publique, avait formé une demande le 9 septembre 2002 et obtenu en première instance en 2003 réparation de la détention provisoire injustifiée subie.
Devant la Commission nationale, juridiction du second degré, en 2004, l’agent judiciaire du Trésor soutenait que l’article 103 de la loi « Perben II » s’appliquant immédiatement aux instances en cours, le requérant n’était pas recevable à exercer un droit à indemnisation. Ce qui revenait à analyser le nouveau texte comme une disposition de procédure pénale applicable, à ce titre, immédiatement aux instances en cours [62].
Mais l’instance en réparation à raison d’une détention devant le premier président de la cour d’appel et la Commission nationale qui, aux termes de l’article 149-4 du code de procédure pénale, « statuent en tant que juridictions civiles », n’est pas une procédure pénale.
La Commission nationale rejette donc la fin de non-recevoir dirigée contre la demande en réparation : « Mais attendu que, selon l’article 2 du Code civil, la loi ne dispose que pour l’avenir et n’a point d’effet rétroactif ; qu’il en est ainsi d’une disposition civile qui a pour effet de restreindre l’exercice d’un droit ;
Et attendu que l’article 103 de la loi précitée, dès lors qu’il ajoute la prescription de l’action publique aux exceptions limitativement énumérées à l’article 149 du code de procédure pénale faisant obstacle à l’action en réparation, a pour objet de restreindre le droit à réparation ouvert aux personnes ayant subi une détention provisoire injustifiée ;
Qu’il s’ensuit que cette disposition législative nouvelle n’est pas applicable à la demande de M. X, formée antérieurement à la date de sa publication sur le fondement d’un droit à réparation reconnu par la loi alors en vigueur ».
Le raisonnement ainsi tenu en l’absence de dispositions transitoires expresses par la Commission nationale devrait logiquement valoir, à l’identique, pour le second nouveau cas d’exclusion ajouté par l’article 103 de la loi du 9 mars 2004 - la détention pour autre cause - qui restreint pareillement le droit à réparation de la détention provisoire. Il semble pourtant, au vu des décisions rendues, que tel ne soit pas le cas.

2.1.2.2.2 - La détention pour autre cause
Trois décisions, une du 5 avril [63] et deux du 12 novembre [64] 2004, font en effet référence à des hypothèses de détention pour autre cause du requérant dans le même temps que la période de détention provisoire injustifiée sans qu’aucune n’envisage cette fois un problème d’application dans le temps de ce nouveau cas d’exclusion.
Dans la première espèce, la Commission nationale affirme que tenant compte de deux condamnations antérieures à des peines d’emprisonnement exécutées par le requérant durant le temps de la détention provisoire (de quatre ans, neuf mois et onze jours), le premier président (de la cour d’appel d’Aix-en-Provence dans une décision du 24 juin 2003) a exactement décidé que la durée d’incarcération justifiant l’indemnisation réclamée était de trois ans, dix mois et vingt-cinq jours.
Dans la deuxième espèce, l’intéressé placé en détention provisoire le 21 février 2000 du chef de meurtre, a été l’objet le lendemain d’un mandat d’arrêt délivré par le tribunal correctionnel de Paris assortissant un jugement le condamnant par défaut à une peine d’emprisonnement pour des poursuites distinctes d’escroquerie et recel de vol ; ce mandat ayant été exécuté le 14 mars suivant, dans le cadre de l’opposition par lui formée, ses effets ont été maintenus par jugement du 21 mars 2000 ; ayant ensuite renoncé à son opposition, désistement constaté par jugement du 23 mai 2000 avec maintien en détention, il a commencé à purger sa peine d’emprisonnement à compter du 14 mars 2000.
La Commission nationale estime que la détention provisoire lui ouvrant droit à réparation a duré vingt et un jours, et non pas un mois et vingt-trois jours, comme l’a retenu le premier président (de la cour d’appel d’Amiens dans une décision du 20 avril 2004).
Dans la troisième espèce, après une première période de détention provisoire ayant pris fin le 28 juin 2000, le requérant a été incarcéré pour les mêmes faits, une seconde fois, par décision du tribunal correctionnel en date du 25 septembre 2001 et remis en liberté le 28 décembre 2001. Concurremment, il a effectué une période de détention du 22 juin 2001 au 15 décembre 2001 dans des poursuites pour des faits distincts à raison desquels il a été condamné le 4 décembre 2001.
La Commission nationale constate que « pour fixer la période de détention susceptible d’être indemnisée, le premier président de la cour d’appel (d’Aix-en-Provence dans une décision du 24 février 2004) a exclu celle pendant laquelle il était concurremment détenu pour autre cause » et l’en approuve : « tenant compte de la détention provisoire à laquelle le requérant était déjà soumis, pour des faits ayant donné lieu à condamnation le 4 décembre 2001, lorsqu’il a fait l’objet d’un second mandat de dépôt le 25 septembre 2001, le premier président a exactement décidé que la durée de l’incarcération relevant d’une réparation était de douze mois et vingt et un jours ».
Ces décisions appellent deux observations.
On est bien en présence, chaque fois, d’une détention partielle dans le même temps pour autre cause, dans le cadre d’une affaire distincte et en vertu d’un titre de détention différent : exécution d’une condamnation à une peine d’emprisonnement prononcée dans une autre affaire dans les deux premiers cas, autre détention provisoire pour des faits distincts suivie de condamnation dans le troisième cas.
La difficulté paraît être ailleurs et elle se dédouble.
Les décisions des premiers présidents de cour d’appel remontent respectivement aux 24 juin 2003, 28 février et 20 avril 2004. Elles ont donc également tenu compte de la détention pour autre cause de l’intéressé après (pour la troisième) comme avant (pour les deux premières) l’entrée en vigueur de la loi du 9 mars 2004 ayant ajouté le nouveau cas d’exclusion et ce dans le cadre de demandes en réparation nécessairement antérieures.
Si la décision du 20 avril 2004 peut - à tort ou à raison - reposer sur l’application du nouvel article 103 de la loi « Perben II », il n’en va pas de même, à l’évidence, des deux autres.
La Commission nationale de réparation des détentions ne s’attarde pas à cette différence.
On aurait pu le comprendre s’il s’était agi de transposer à la détention pour autre cause le raisonnement précédemment tenu pour la prescription à savoir la non rétroactivité du nouveau cas d’exclusion et sa non application aux instances en cours portant sur des demandes en réparation formées antérieurement à l’entrée en vigueur de la loi nouvelle.
Mais tel n’est pas le cas, la Commission approuvant chaque fois l’absence de réparation de la période partielle de détention pour autre cause.
La jurisprudence de la Commission nationale aboutit donc à un régime d’application dans le temps non uniforme pour les deux nouveaux cas d’exclusion introduits par le même texte et restreignant à l’identique le droit à réparation des personnes ayant fait l’objet d’une détention provisoire injustifiée :
- non rétroactivité pour la prescription de l’action publique, premier des nouveaux cas d’exclusion qui ne sera donc applicable qu’aux demandes en réparation formées à compter de l’entrée en vigueur de la loi « Perben II » sur ce point soit le 11 mars 2004 ;
- application immédiate aux instances en cours et demandes en réparation formées antérieurement pour la détention pour autre cause, second des nouveaux cas d’exclusion.
De facto, cette différence ne s’explique que par le fait qu’avant même la modification de l’article 149 du code de procédure pénale par la loi « Perben II » les premiers présidents avaient déjà tendance à exclure de la période ouvrant droit à réparation celle de détention pour autre cause sans que la Commission nationale y trouve à redire à la différence d’une absence de réparation qui aurait été fondée sur la prescription de l’action publique [65]. Mais alors de deux choses l’une : soit ils n’étaient pas fondés à le faire au regard du texte initialement applicable et il appartenait à la Commission nationale de le dire, soit une telle déduction de la période de détention pour autre cause était déjà possible et l’on ne comprend pas alors très bien pourquoi la loi du 9 mars 2004 est venue faire de cette dernière un nouveau cas d’exclusion de la réparation.

2.2 - L’étendue du droit à réparation
Si l’immense majorité des décisions illustrent l’étendue de la réparation de la détention provisoire injustifiée en application de l’article 149 du code de procédure pénale (2.2.1), celle-ci couvre, au-delà, les conséquences mêmes de la condamnation dans le cas particulier du condamné reconnu innocent visé par l’article 626 du même code (2.2.2).

2.2.1 - Cas général de la demande en réparation à raison d’une détention
Plusieurs décisions rendues en 2004 continuent de rappeler que le préjudice réparable est nécessairement un préjudice personnel à la personne qui a fait l’objet de la détention provisoire, seule visée par l’article 149 du code de procédure pénale [66] qu’ils soient d’ordre matériel (frais de déplacement de la famille du détenu dans un établissement pénitentiaire éloigné du domicile familial [67], soutien financier [68] sous la forme de mandats en détention [69]...) ou moral (traumatisme subi par la famille [70]...).
On signalera, toutefois, qu’une décision a approuvé un premier président d’avoir tenu compte des certificats médicaux faisant état des répercussions de la détention du requérant sur l’état de santé de ses proches (mère et épouse), dès lors que c’était seulement pour en apprécier le retentissement sur le préjudice moral du demandeur [71].
S’agissant des préjudices matériel (2.2.1.1) et moral (2.2.1.2) causés par la détention [72] à ce dernier, la Commission nationale de réparation de la détention a poursuivi en 2004 son entreprise d’objectivation des éléments d’évaluation et des critères de réparation [73], notamment dans des cas de figure moins habituels que ceux traditionnellement rencontrés dans ce contentieux.

2.2.1.1 - Réparation du préjudice matériel
Au cours de l’année 2004, la Commission nationale de réparation a précisé les règles de réparation de deux types de pertes économiques particulières (2.2.1.1.1), et du préjudice corporel (2.2.1.1.2).

2.2.1.1.1 - La prise en considération de pertes économiques particulières
Il s’agit des pertes économiques consécutives à la cessation d’activité ou liquidation d’entreprise et à la vente d’un bien immobilier.
 ? Cessation d’activité ou liquidation d’entreprise
Le principal écueil porte sur l’établissement du lien de causalité entre la détention provisoire et les difficultés de l’entreprise du requérant.
Ce lien de causalité ne peut être établi dès lors que l’activité de la société s’est poursuivie pendant plusieurs mois et a fortiori plusieurs années après la libération du demandeur en réparation [74] ; ce dernier ne pouvant y suppléer en sollicitant une expertise, sans produire aucun élément ou pièces justifiant ses allégations et par voie de conséquence l’utilité d’une telle mesure [75].
La cessation d’activité de la société apparaît, en revanche, en relation de causalité avec la détention de son gérant lorsque, alors qu’elle n’avait pas de difficulté particulière avant l’incarcération, son principal client (qui représentait 80% du chiffre d’affaires de l’entreprise) a rompu le contrat qui les liait au cours de la détention en excipant de la démobilisation des équipes sur le terrain et de l’absence d’interlocuteur décisionnaire [76]. Il en va de même lorsque la date de cessation des paiements de l’entreprise correspond au placement simultané en détention provisoire des deux époux qui l’animait ; si bien que le préjudice économique de l’épouse, gérante et unique associé, peut - après expertise- être évalué à la perte de
l’équivalent de trois années de bénéfices (par projection des bilans antérieurs et des contrats en cours) [77] tandis que la liquidation de la société a privé le mari, qui n’était ni dirigeant ni salarié ni associé, d’une chance de percevoir, à l’avenir, un revenu équivalent à celui que, dans un contexte matrimonial, lui procurait l’entreprise construite et exploitée avec son épouse [78].
 ? Vente d’un bien immobilier
De la même façon, le demandeur en réparation doit établir le lien de causalité entre la détention provisoire et la vente volontaire [79] ou sur adjudication [80] d’un bien immobilier.
La vente d’un appartement dont deux époux étaient copropriétaires apparaît ainsi comme la conséquence de leur placement en détention provisoire et de la perte de revenus qui en est résultée lorsque, co-emprunteurs des sommes nécessaires à son acquisition qu’ils remboursaient en commun, ils n’ont pu honorer les échéances de remboursement du prêt à compter de leur incarcération [81].
De façon plus marginale, font encore partie du préjudice matériel comme étant directement et exclusivement imputables à la détention, les frais de déplacement qu’un notaire, chargé de la rédaction d’un acte de vente d’un bien immobilier, a exposés pour faire signer une procuration au requérant sur son lieu d’incarcération [82].

2.2.1.1.2 - Le préjudice corporel
Il résulte nettement de la jurisprudence rendue en 2004 par la Commission nationale de réparation des détentions que le préjudice corporel peut, selon sa forme relever de la réparation du préjudice matériel ou du préjudice moral.
« Le préjudice corporel est un des éléments du préjudice matériel lorsqu’il est constitué par des dommages physiques ou des troubles psychiques et il doit être évalué, à ce titre, dans les conditions du droit commun, en sus du préjudice économique résultant de la perte de revenus et indépendamment de l’indemnité destinée à réparer le préjudice moral causé par la détention » [83]. Il en va ainsi lorsque l’état séquellaire persistant présenté par l’intéressé résultant de son incarcération est caractérisé par un taux d’incapacité permanente partielle [84].
En revanche, lorsque l’aggravation de la maladie invalidante dont est atteint le demandeur ne peut être imputée à l’incarcération mais que ce dernier a ressenti une augmentation certaine de la souffrance liée à la privation de liberté du fait de l’aggravation de sa maladie au cours de son incarcération, le préjudice résultant des troubles ainsi endurés est de nature morale. Il convient alors, non de le réparer de manière distincte, en tant que préjudice matériel, mais de prendre en considération cette circonstance particulière dans l’évaluation globale du préjudice moral
réparable [85].

2.2.1.2 - Réparation du préjudice moral
Conformément à la présentation adoptée dans le précédent rapport [86], si certains facteurs s’avèrent indifférents en termes de réparation du préjudice moral, d’autres oeuvrent dans le sens de la minoration ou de la majoration de ce dernier.
Plusieurs décisions continuent de rappeler que ce qui est parfois qualifié de « préjudice médiatique » [87] n’est pas un préjudice réparable parce que, suivant la motivation type déjà connue de la jurisprudence antérieure « n’entrent pas dans le champ des dispositions spéciales des articles 149 et suivants du code de procédure pénale les dommages résultant de la publication d’articles de presse mettant en cause le requérant, même s’ils relatent son arrestation, sa mise en examen et son incarcération et s’ils portent atteinte à la présomption d’innocence dont il bénéficie » [88] ; ce qui conduit parfois encore en 2004 à l’infirmation de la décision du premier président sur ce point [89].
Si l’existence de nombreux antécédents judiciaires assortis pour certains de peines d’emprisonnement ferme constitue par excellence le facteur de nature à minorer la souffrance morale directement causée par l’incarcération [90], ni a fortiori d’« une condamnation postérieure de plus de six ans à la période de détention provisoire injustifiée » [91].
D’autres facteurs viennent, en sens inverse aggraver la souffrance psychique liée à la détention dont, ainsi que le souligne la Cour de cassation dans son rapport annuel, la Commission nationale a poursuivi en 2004 le travail déjà engagé tendant à en mesurer l’intensité.
Une première série de facteurs tient à la rupture, temporaire ou définitive, du fait de la détention provisoire de liens familiaux ou plus largement de liens affectifs.
En relèvent la séparation d’avec ses enfants [92], notamment d’un nouveau-né [93], l’impossibilité d’assister à la naissance de l’un d’eux [94] comme celle de revoir son père avant son décès et d’assister sa mère gravement malade [95]. De façon plus générale, la Commission nationale, écartant la prétention du requérant tendant à une évaluation distincte et autonome, est venue affirmer dans une décision du 11 juin 2004 [96] que le préjudice affectif et sexuel provoqué par la détention est un des éléments du préjudice moral.
Ce dernier peut encore, et le cas échéant concurremment, être aggravé par une seconde série de facteurs tenant aux conditions de détention. C’est alors le caractère particulièrement « pénible » [97], « préjudiciable » [98], « éprouvant » [99] des conditions de détention du requérant - dont il doit rapporter la preuve [100] - qui, en générant des « souffrances particulières » [101], apparaît source de majoration du dommage subi et de sa réparation. De telles conditions peuvent avoir été subies tant en prison, française comme étrangère, que lors des transfèrement d’un établissement à un autre [102]. La première hypothèse, plus fréquemment invoquée, peut tenir à la détention dans un établissement éloigné du domicile [103] ou, à l’intérieur de la prison, au placement en quartier d’isolement. Il en est ainsi, du placement du requérant « au secret » durant onze jours puis, jusqu’à sa libération, dans le quartier réservé aux détenus nécessitant une protection spéciale s’agissant d’un magistrat de l’ordre judiciaire, cette circonstance ayant contribué à un choc psychologique carcéral qualifié d’important et un préjudice moral d’une gravité particulière [104].
L’intervention d’un tel placement n’est toutefois pas systématiquement prise en compte comme facteur de majoration du préjudice moral. C’est ce qu’il résulte d’une décision du 5 avril 2004 approuvant un premier président tout à la fois d’avoir pris en compte le placement du requérant en quartier d’isolement, fût-ce à sa demande, pour être éloigné d’autres détenus mais écarté celui prononcé à titre de sanction disciplinaire en raison de son comportement en milieu carcéral [105]. La décision peut doublement surprendre. On pourrait tout d’abord s’étonner que le requérant puisse ainsi invoquer avec succès au titre de son préjudice moral une mesure d’isolement intervenue à sa demande. En réalité, lorsque - comme semble-til en l’espèce- la mesure avait pour objectif de séparer le requérant d’autres détenus en le soustrayant à un risque de menaces ou de violences et donc à un préjudice moral et peut-être physique encore plus grand [106], peu importe qu’elle soit intervenue à l’initiative de l’administration pénitentiaire ou à la demande de l’intéressé. On peut ensuite se demander si le comportement du requérant, que la jurisprudence refuse de prendre en compte pendant l’instruction au stade du prononcé de la détention provisoire [107], doit entrer en ligne de compte au stade ultérieur de l’exécution de privation de liberté.
En sens inverse, une bonne adaptation au milieu carcéral, attestée par des rapports et expertises réalisés pendant la détention, n’exclut pas la prise en considération d’un préjudice moral consistant en la persistance de troubles psychiatriques s’expliquant par le choc ressenti par un adolescent de dix-sept ans du fait de sa mise en détention et de la durée de son incarcération, vécue dans une situation de très grand isolement, qui s’est trouvé exposé à des difficultés de compréhension de l’environnement social et judiciaire [108].

2.2.2 - Cas particulier de la demande en révision
Une décision de la Commission nationale du 11 juin 2004 [109] est venue préciser, ce qui est assez exceptionnel, l’étendue de la réparation consécutive à une demande de révision d’une condamnation pénale définitive.
L’article 626 du code de procédure pénale (tel que modifié par la loi du 30 décembre 2000) prévoit en effet que le condamné reconnu innocent a droit à la réparation intégrale du préjudice matériel et moral que lui a causé la condamnation ; cette réparation pouvant être accordée par le premier président de la cour d’appel dans le ressort de laquelle réside l’intéressé suivant la procédure d’indemnisation des personnes ayant fait l’objet d’une détention provisoire injustifiée des articles 149-2 à 149-4.
Si la procédure est identique, l’étendue de la réparation est alors plus vaste, ce qu’illustre parfaitement la décision en affirmant que « le préjudice moral subi par un condamné reconnu innocent à la suite d’une révision comprend non seulement les répercussions de la détention mais également celles de la condamnation » et en allouant en conséquence deux sommes distinctes : 17 000 euros au titre de la réparation de la détention provisoire injustifiée (d’une durée de cinq mois et vingt jours), et 10 000 euros au titre du préjudice moral causé par la condamnation définitive estimant que la publicité - prévue par l’article 626 alinéa 6 du code de procédure pénale - donnée à la décision de la Cour de cassation constatant finalement l’innocence n’en efface pas totalement les effets.

Conclusion : réparation du préjudice moral et durée de la détention
provisoire

Elle oscille en 2004 entre les bornes minimale et maximale suivantes :

Tableau n° 3 : au regard de la durée de la détention provisoire
Tableau n° 4 : au regard du ratio réparation allouée par jour de détention [110]

CONCLUSION GENERALE :
Pour conclure, on reviendra sur la lacune importante dans le dispositif statistique liée à l’absence de suivi des détentions provisoires. Lorsque l’issue est une condamnation, le casier judiciaire donne quelques indications minimales. En revanche, les détentions provisoires qui sont suivies d’un acquittement ou une relaxe ne sont pas comptabilisées systématiquement. On connaît le nombre de cas où l’arrêt des poursuites met fin à la détention provisoire. Pour 2003, le fichier national des détenus indique 495 libérations de détenus prévenus résultant d’un acquittement ou d’une relaxe (champ France entière) ; la statistique pénitentiaire indique 428 libérations liées au même motif pour la métropole. Mais on ne connaît pas le nombre d’accusés ou de prévenus qui, après une période de détention provisoire, sont acquittés ou relaxés après une mise en liberté avant jugement.
Les mêmes sources indiquent les sorties qui sont liées à des ordonnances de non-lieu (le fichier national des détenus indique 83 cas en 2003) et la même difficulté se présenterait si le répertoire de l’instruction ne donnait pas un renseignement plus complet. En effet, cette source indique que pour 2003, la décision de clôture a été un non lieu pour 552 mis en examen placés en détention provisoire à un moment quelconque de l’instruction.
L’Annuaire Statistique de la Justice édition 2005 [111] donne comme résultats pour les acquittements et relaxes après détention provisoire des chiffres qui correspondent aux libérations à l’occasion d’une telle décision et en les ventilant selon une estimation qui sur-représente les acquittements (cours d’assises) de façon assez arbitraire [112]. L’exemple du non lieu montre l’écart qu’il peut y avoir entre les libérations résultant d’un arrêt des poursuites et l’ensemble des détentions provisoires suivies d’un tel arrêt.
Face à l’enjeu que représentent les détentions provisoires injustifiées, il devient urgent d’introduire dans le dispositif statistique un décompte précis de ces cas.

Tableau : Détentions provisoires injustifiées et demandes de réparation [113]

Notes:

[1Comme en 2004 a été rendue publique début 2005 une estimation de l’activité des parquets pour 2004 fondée sur les résultats des neuf premiers mois de l’année. Cependant les données diffusées à cette occasion n’entrent pas dans le niveau de détail requis pour l’étude de la détention provisoire

[2En raison des délais d’inscription au casier judiciaire, cet effet peut se faire sentir même sur l’année qui précède l’amnistie

[3L’inscription des compositions pénales au casier judiciaire a été introduite par la loi du 9 mars 2004

[4Les comptages issus des cadres du parquet (incluant les alternatives aux poursuites et les compositions pénales) sont effectués par affaire et ne distinguent pas les types d’infractions. Seules les condamnations inscrites au casier judiciaire permettent cette approche

[5Voir à propos de cette possible anticipation le rapport 2003, page 53 in fine et page 54

[6Rapport 2004, page 19

[7On trouvera dans l’annexe 1 du présent rapport l’ensemble des données relatives à la détention provisoire pour l’année 2003. Les indications méthodologiques détaillées se trouvent dans l’annexe 2 du rapport 2003

[8Pour le ressort de Paris la statistique policière compte comme écrouées les personnes conduites au dépôt

[9Le nombre de mineurs mis en cause augmentant beaucoup moins, la proportion de majeurs mis en cause augmente, ce qui en soi produit une augmentation apparente du recours à l’écrou puisque les majeurs sont plus souvent l’objet de cette mesure que les mineurs. Il en va probablement de même pour la garde à vue

[10voir les tableaux dans le sommaire - dossier intégral

[11voir les tableaux dans le sommaire - dossier intégral

[12Plusieurs modes de calcul peuvent d’ailleurs être envisagés pour évaluer cette
fréquence du recours à la détention provisoire. Tout d’abord, il faut rappeler que le
cadre juridique a changé en 2001 avec l’application de la loi du 15 juin 2000. En
suivant à la lettre ce nouveau cadre le nombre de mandats de dépôt est rapporté au
nombre de mis en examen, ce qui exclut du dénominateur les témoins assistés. Le
résultat obtenu est donné dans le tableau 2 et atteint 49 % en 2002, donc un taux qui
n’avait jamais été observé depuis que ce calcul peut être fait (soit 1982). Le
maximum avait auparavant été détenu par l’année 1984, à la veille de réformes
restreignant le recours à la détention provisoire. Ou alors, on étend les cas auxquels
pourrait s’appliquer la détention provisoire aux témoins assistés en supposant que
ceux-ci auraient été mis en examen avant la loi du 15 juin 2000, et l’on obtient de
cette façon un taux de mandats de dépôt de 40 % en 2001, 45,2 % en 2002 et
43,4 % en 2003. Même ainsi, le résultat reste donc sensiblement supérieur en 2002
et 2003 aux taux observés depuis le début des années 1990.
Une autre approche est aussi possible en rapprochant le nombre de mandats
de dépôt du nombre d’affaires reçues par les juges d’instruction. Le nombre de
personnes concernées semble plus pertinent, mais à certaines périodes, il est
probable que la nature des affaires ou les pratiques policières ont fait augmenter le
nombre moyen de personnes mises en examen par affaire : celui-ci oscille entre 1,8
en 1994 à 1,5 en 2000. Il n’est que de 1,2 en 2001 avec l’exclusion des témoins
assistés du calcul (1,3 sinon) pour remonter ensuite à 1,5. Au cours des années
1990, l’importance des instructions pour trafic de stupéfiants pouvait conduire à des
affaires impliquant de très nombreuses personnes parfois mises en examen
seulement pour usage de stupéfiants. Une telle hausse du nombre de personnes
mises en cause pour infractions à la législation des stupéfiants10 a pu reproduire le
même phénomène en 2002 et 2003. Ceci montre bien l’intérêt qu’auraient des
données ventilées par types d’infractions au niveau de l’instruction. Mais, en tout état
de cause, si l’on rapporte le nombre de mandats de dépôt aux nombre d’affaires, les
années 2002 et 2003 se trouvent très nettement au dessus des années précédentes.
Malgré les difficultés d’évaluation statistique rencontrées, il semble donc avéré
qu’en intensité, le recours à la détention provisoire au niveau de l’instruction est
revenu en 2002 et 2003 à un niveau sensiblement supérieur à celui de la décennie
1990.
Pour partie, ce résultat peut-il provenir de la concentration plus forte d’affaires
« graves et complexes » selon les critères de la politique pénale pour lesquelles
serait réservée la voie de l’instruction ? Là encore, les données détaillées par types
d’infraction font défaut. Dans le rapport précédent11, il était relevé que les statistiques
de police semblaient indiquer que l’accroissement des poursuites en comparution
immédiate trouvait plutôt son origine dans le renforcement de la répression
d’infractions ne suscitant généralement pas l’ouverture d’une information et que, de
plus, les affaires soumises à l’instruction ne baissaient pas. La seule source donnant
une indication en termes d’infractions pour les affaires instruites est le répertoire de
l’instruction. L’exploitation statistique concerne les affaires terminées (tableau 3),
d’où un décalage avec le mouvement des affaires transmises aux juges d’instruction
que dénombrent les cadres des parquets (tableau 2). Elle donne la répartition des
10 Cette hausse est observée au niveau des statistiques de police.
11 Rapport 2004, page 24
17
affaires selon que le réquisitoire introductif visait des crimes, des délits ou des
contraventions. Les résultats de 2003 confirment que depuis 2001, la proportion et le
nombre absolu d’informations ouvertes avec une qualification criminelle
s’accroissent. Mais ceci ne portant que sur une différence d’environ un millier
d’affaires (de 6 900 à 7 900), il est difficile de trouver ici la seule base d’un
accroissement net de plus de 4 000 mandats de dépôts dans le même temps (de
19 500 à 24 000). L’explication par la gravité relative croissante des affaires n’est pas
suffisante à elle seule. Néanmoins, il conviendra de se rappeler de ce facteur lors de
l’examen des durées de détention provisoire.
18
Tableau 3 : Qualification de l’infraction au moment du réquisitoire introductif [[Plusieurs modes de calcul peuvent d’ailleurs être envisagés pour évaluer cette
fréquence du recours à la détention provisoire. Tout d’abord, il faut rappeler que le
cadre juridique a changé en 2001 avec l’application de la loi du 15 juin 2000. En
suivant à la lettre ce nouveau cadre le nombre de mandats de dépôt est rapporté au
nombre de mis en examen, ce qui exclut du dénominateur les témoins assistés. Le
résultat obtenu est donné dans le tableau 2 et atteint 49 % en 2002, donc un taux qui
n’avait jamais été observé depuis que ce calcul peut être fait (soit 1982). Le
maximum avait auparavant été détenu par l’année 1984, à la veille de réformes
restreignant le recours à la détention provisoire. Ou alors, on étend les cas auxquels
pourrait s’appliquer la détention provisoire aux témoins assistés en supposant que
ceux-ci auraient été mis en examen avant la loi du 15 juin 2000, et l’on obtient de
cette façon un taux de mandats de dépôt de 40 % en 2001, 45,2 % en 2002 et
43,4 % en 2003. Même ainsi, le résultat reste donc sensiblement supérieur en 2002
et 2003 aux taux observés depuis le début des années 1990.
Une autre approche est aussi possible en rapprochant le nombre de mandats
de dépôt du nombre d’affaires reçues par les juges d’instruction. Le nombre de
personnes concernées semble plus pertinent, mais à certaines périodes, il est
probable que la nature des affaires ou les pratiques policières ont fait augmenter le
nombre moyen de personnes mises en examen par affaire : celui-ci oscille entre 1,8
en 1994 à 1,5 en 2000. Il n’est que de 1,2 en 2001 avec l’exclusion des témoins
assistés du calcul (1,3 sinon) pour remonter ensuite à 1,5. Au cours des années
1990, l’importance des instructions pour trafic de stupéfiants pouvait conduire à des
affaires impliquant de très nombreuses personnes parfois mises en examen
seulement pour usage de stupéfiants. Une telle hausse du nombre de personnes
mises en cause pour infractions à la législation des stupéfiants10 a pu reproduire le
même phénomène en 2002 et 2003. Ceci montre bien l’intérêt qu’auraient des
données ventilées par types d’infractions au niveau de l’instruction. Mais, en tout état
de cause, si l’on rapporte le nombre de mandats de dépôt aux nombre d’affaires, les
années 2002 et 2003 se trouvent très nettement au dessus des années précédentes.
Malgré les difficultés d’évaluation statistique rencontrées, il semble donc avéré
qu’en intensité, le recours à la détention provisoire au niveau de l’instruction est
revenu en 2002 et 2003 à un niveau sensiblement supérieur à celui de la décennie
1990.
Pour partie, ce résultat peut-il provenir de la concentration plus forte d’affaires
« graves et complexes » selon les critères de la politique pénale pour lesquelles
serait réservée la voie de l’instruction ? Là encore, les données détaillées par types
d’infraction font défaut. Dans le rapport précédent11, il était relevé que les statistiques
de police semblaient indiquer que l’accroissement des poursuites en comparution
immédiate trouvait plutôt son origine dans le renforcement de la répression
d’infractions ne suscitant généralement pas l’ouverture d’une information et que, de
plus, les affaires soumises à l’instruction ne baissaient pas. La seule source donnant
une indication en termes d’infractions pour les affaires instruites est le répertoire de
l’instruction. L’exploitation statistique concerne les affaires terminées (tableau 3),
d’où un décalage avec le mouvement des affaires transmises aux juges d’instruction
que dénombrent les cadres des parquets (tableau 2). Elle donne la répartition des
10 Cette hausse est observée au niveau des statistiques de police.
11 Rapport 2004, page 24
17
affaires selon que le réquisitoire introductif visait des crimes, des délits ou des
contraventions. Les résultats de 2003 confirment que depuis 2001, la proportion et le
nombre absolu d’informations ouvertes avec une qualification criminelle
s’accroissent. Mais ceci ne portant que sur une différence d’environ un millier
d’affaires (de 6 900 à 7 900), il est difficile de trouver ici la seule base d’un
accroissement net de plus de 4 000 mandats de dépôts dans le même temps (de
19 500 à 24 000). L’explication par la gravité relative croissante des affaires n’est pas
suffisante à elle seule. Néanmoins, il conviendra de se rappeler de ce facteur lors de
l’examen des durées de détention provisoire.
18
Tableau 3 : Qualification de l’infraction au moment du réquisitoire introductif [[voir les tableaux dans le sommaire - dossier intégral

[13Cette hausse est observée au niveau des statistiques de police

[14Rapport 2004, page 24

[15voir les tableaux dans le sommaire - dossier intégral

[16voir les tableaux dans le sommaire - dossier intégral

[17En toute rigueur, on ne peut procéder ainsi car certaines mesures de contrôle judiciaire ab initio sont suivies d’un mandat de dépôt. Mais l’ordre de grandeur obtenu au niveau national est bien celui que donne ce calcul

[18voir les tableaux dans le sommaire - dossier intégral

[19voir les tableaux dans le sommaire - dossier intégral

[20voir les tableaux dans le sommaire - dossier intégral

[21Cf. supra tableau 1 et 2

[22Les chiffres publiés dans l’Annuaire statistique de la Justice (édition 2005, page 209) à partir du FND font d’ailleurs état d’une baisse en nombres absolus des incarcérations dans le cadre d’une comparution immédiate en 2003 et 2004 alors que le total des entrées comptabilisées est en augmentation. Comme le détail de cette ventilation est réputé non disponible, on peut penser que ces chiffres ne sont pas plus fiables

[23Pour l’année 2002 par exemple, le FND comptabilisait environ un millier d’incarcérations sur mandat d’une juridiction de jugement mais avec le statut de prévenu : il s’agit alors de condamnés en délai d’appel ou de pourvoi

[24L’amnistie de 2002 peut avoir un effet sur la fin de la collecte de l’année 2001 mais, en tout état de cause, si les peines correspondantes sont amnistiées, s’agissant de condamnations enregistrées tardivement, elles n’ont pas été mises à exécution

[25On peut penser à un décalage temporel dans la mise à exécution des peines d’emprisonnement concernant des condamnés jugés libres. La variation positive est aussi de 25 % si l’on prend 2001 et 2004 comme termes de comparaison

[26Édition 2005, page 123

[27Cette estimation (rapport des stocks aux flux exprimé en mois) est fragile lorsque des ruptures importantes apparaissent dans le renouvellement et l’évolution de la population pénitentiaire, ce qui est le cas entre 2001 et 2002. Mais comme on le voit, les deux estimations utilisées évoluent dans le même sens

[28voir les tableaux dans le sommaire - dossier intégral

[29Il s’agit d’une condamnation définitive, mais la date prise en compte est la date de condamnation et non la date où cette condamnation devient définitive, la différence étant due aux délais de pourvoi

[30Le Monde 3 novembre 2005 qui fait état de l’octroi de 4000 euros par mois de détention provisoire subi (outre une somme variable selon les cas au titre du préjudice économique) soit une réparation nettement supérieure à celle accordée en moyenne dans le cadre de la procédure prévue par les articles 149 et s. du code de procédure pénale : cf. infra p.43 et 154

[31Cf. en annexe 3 p. 153 et s. les tableaux et graphiques sur la réparation en 2004 dans les ressorts des cours d’appel d’Aix-en-Provence et Paris

[32Cf. Rapport Cour de cassation 2004

[3304 CRD 011

[34Dans un délai de quinze jours à compter de la réception du dossier et par lettre recommandée avec demande d’avis de réception

[3503 CRD 001

[36Cf. Commission de suivi de la détention provisoire, Rapport 2004, p. 48-49

[37La remise étant constatée par le greffe qui en mentionne la date sur chaque exemplaire, dont l’un est immédiatement restitué

[386 février 2004 : 03 CRD 040 et 03 CRD 041 ; 11 octobre 2004 : 04 CRD 005

[3917 décembre 2004 : 04 CRD 025

[406 février 2004 : 03 CRD 022

[415 mars 2004 : 03 CRD 052

[4211 juin 2004 : 03 CRD 071

[436 février 2004 : 03 CRD 046 et 03 CRD 053 ; 10 mai 2004 : 03 CRD 062 ; 11 juin 2004 : 03 CRD 070 ; 15 juillet 2004 : 03 CRD 068 ; 11 octobre 2004 : 04 CRD 004 ; 17 décembre 2004 : 04 CRD 017

[44Guillaume Gillet et Marc Thuillier « La mise en oeuvre de la loi du 15 juin 2000 par la commission nationale de réparation des détentions », Le courrier juridique des finances et de l’industrie n° 30 novembre et décembre 2004, p.18

[45Cf. 15 juillet 2003 : 01 CRD 010. Commission de suivi de la détention provisoire, Rapport 2004, p.49

[4603 CRD 034

[47Sur la question cf. infra 1.2.1.1

[485 mars 2004 : 03 CRD 052

[495 avril 2004 : 03 CRD 056 et 03 CRD 060

[50Audience du 19 décembre 2003, prononcé au 6 février 2004 : 7 décisions ; audience du 12 janvier 2004, prononcé au 5 mars 2004 : 8 décisions ; audience du 6 février 2004, prononcé au 5 avril 2004 : 5 décisions ; audience du 5 avril 2004, prononcé au 10 mai 2004 : 8 décisions ; audience du 10 mai 2004, prononcé au 11 juin 2004 : 9 décisions ; audience du 11 juin 2004, prononcé au 15 juillet 2004 : 6 décisions ; audience du 17 septembre 2004, prononcé au 11 octobre 2004 : 5 décisions ; audience du 11 octobre 2004, prononcé au 12
novembre 2004 : 7 décisions ; audience du 19 novembre 2004, prononcé au 17 décembre 2004 : 9 décisions

[51voir les tableaux dans le sommaire - dossier intégral

[52Commission de suivi de la détention provisoire, Rapport 2004, p.35

[53voir les tableaux dans le sommaire - dossier intégral

[54Cf. infra 2.2.2

[55Cf. Commission de suivi de la détention provisoire, Rapport 2004, p. 38-39

[5603 CRD 071

[5704 CRD 001

[58Cf. Commission de suivi de la détention provisoire, Rapport 2003, p.77

[5903 CRD 068

[60Cf. Commission de suivi de la détention provisoire, Rapport 2004, p.37

[61Cf. Commission de suivi de la détention provisoire, Rapport 2004, p.39-40

[62Cf. Rapport Cour de cassation 2004. On rappellera, qu’aux termes de l’article 112-2 du code pénal (tel que modifié par l’article 72-III de la loi du 9 mars 2004), sont notamment applicables immédiatement à la répression des infractions commises avant leur entrée en vigueur d’une part les lois fixant les modalités des poursuites et le formes de la procédure, d’autre part, lorsque les prescriptions ne sont pas acquises, les lois relatives à la prescription de l’action publique et à la prescription des peines

[6303 CRD 056

[6404 CRD 022 et 04 CRD 012

[654 avril 2003 : 02 CRD 083 P. Commission de suivi de la détention provisoire, Rapport 2004, p.40

[66Commission de suivi de la détention provisoire, Rapport 2004, p.42]. Si bien que - faute d’une modification du texte en leur faveur pour rejoindre les principes gouvernant la réparation du préjudice dans le cadre de la responsabilité civile sur laquelle il y a lieu de s’interroger - d’autres personnes, victimes par ricochet au premier rang desquelles les membres de sa famille, ne peuvent obtenir réparation de différents chefs de préjudice qui leur sont propres « même s’ils sont en relation avec la détention »[[5 avril 2004 : 03 CRD 045

[676 février 2004 : 03 CRD 046

[685 avril 2004 : 03 CRD 045

[695 avril 2004 : 03 CRD 055

[7015 juillet 2004 : 03 CRD 073 ; 11 octobre 2004 : 04 CRD 002

[716 février 2004 : 03 CRD 024

[72Tel n’est pas le cas, par exemple de la perte des intérêts d’une somme saisie au début de la procédure d’instruction qualifiée de sans lien de cause à effet avec la détention par une décision du 11 octobre 2004 : 04 CRD 011

[73Commission de suivi de la détention provisoire, Rapport 2004, p.34

[7410 mai 2004 : 03 CRD 058 et 03 CRD 061, 15 juillet 2004 : 03 CRD 039

[755 mars 2004 : 03 CRD 001

[7610 mai 2004 : 03 CRD 059

[7715 juillet 2004 : 02 CRD 078

[78Perte de chance évaluée à 30 000 euros, 15 juillet 2004 : 02 CRD 077

[79Défaut d’établissement de la moins-value alléguée : 5 mars 2004 : 03 CRD 051

[80Défaut de production de l’acte constitutif d’une SCI et de la répartition de son capital : 15 juillet 2004 : 02 CRD 077

[8115 juillet 2004 : 02 CRD 077 et 02 CRD 078

[8215 juillet 2004 : 03 CRD 073

[835 mars 2004 : 03 CRD 034

[84Ibidem et 12 novembre 2004 : 02 CRD 001

[8515 juillet 2004 : 03 CRD 002. Cf. également 5 avril 2004 : 03 CRD 045 parlant de « l’extrême médiatisation du procès invoqué par le requérant pour l’évaluation de son préjudice moral »

[86Commission de suivi de la détention provisoire, Rapport 2004, p. 44 et s.

[876 février 2004 :03 CRD 024

[8810 mai 2004 : 03 CRD 058

[895 avril 2004 : 03 CRD 057

[905 avril 2004 : 03 CRD 045], il ne saurait en aller de même des seuls « risques sur sa situation personnelle que le requérant aurait pris en raison de la nature des relations qu’il avait nouées avec des personnes impliquées dans des comportements délictueux et l’incompatibilité de son mode de vie avec les devoirs de son état de magistrat, dès lors qu’il a été relaxé des chefs de corruption active et passive et d’entrave à l’exercice de la justice »[[5 avril 2004 : 03 CRD 057

[9117 décembre 2004 : 04 CRD 018

[9211 juin 2004 : 03 CRD 069 et 17 décembre 2004 : 04 CRD 021

[9317 décembre 2004 : 04 CRD 014

[945 avril 2004 : 03 CRD 045 et 10 mai 2004 : 03 CRD 061

[9517 décembre 2004 : 04 CRD 021

[9603 CRD 064

[9711 juin 2004 : 03 CRD 065

[9811 juin 2004 : 03 CRD 066

[9917 décembre 2004 : 04 CRD 017

[10011 juin 2004 : 03 CRD 066

[10111 juin 2004 : 03 CRD 064

[10217 décembre 2004 : 04 CRD 017

[10311 juin 2004 : 03 CRD 072

[1045 avril 2004 : 03 CRD 057

[10503 CRD 056

[106Cf. supra p.39-40

[107Cf. infra p.68-69

[10811 juin 2004 : 03 CRD 070

[10903 CRD 075

[110voir les tableaux dans le sommaire - dossier intégral

[111page 122

[112L’estimation semble supposer que les accusés acquittés ont connu la détention provisoire dans la même proportion que les accusés condamnés. Cette hypothèse conduit, par différence, à un nombre relativement très faible de prévenus relaxés par les tribunaux correctionnels après avoir été placés en détention provisoire

[113voir les tableaux dans le sommaire - dossier intégral