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06/10/03 Conclusions : Droit au travail et à la formation

Mise en ligne : 6 janvier 2004

Texte de l'article :

Relevé des conclusions
Thème : le droit au travail et à la formation

Introduction de M. Péchillon

En 1987, le travail obligatoire des détenus a été aboli.
L’art. 720 du Code de procédure pénale stipule que le contrat de travail n’est pas obligatoire en détention (sauf pour les détenus qui exercent un emploi à l’extérieur de l’établissement pénitencier).
Il existe 4 formes de travail en prison :
- le service général : cuisine, ménage, bibliothèque… ;
- la Régie Industrielle des Etablissements Pénitentiaires ;
- les concessions ; et
- les concessions dans les établissements à gestion mixte

Les problèmes dus à l’absence d’un contrat de travail :
- le droit commun n’est pas appliqué ;
- les rémunérations sont minorées ;
- il n’y a pas de droits sociaux, tels que le chômage, les indemnités journalières ;
- il n’y a pas de reconnaissance de l’expérience professionnelle à la sortie.

Une solution envisagée est de proposer au détenu un contrat avec le fournisseur de travail ou avec l’administration, qui mentionnerait :
- des rémunérations claires ;
- un statut vis-à-vis de la formation professionnelle ;
- des droits sociaux ;
- les relations de travail (et notamment le problème du licenciement) ; et
- les droits collectifs.

Les questions essentielles sur le sujet sont les suivantes :
- Qu’est ce qu’un droit au travail ?
- Le statut du travailleur détenu peut-il être assimilé au droit commun ?
- Peut-il exister un contrat de travail pénitentiaire ?

Comment examiner la question des droits de l’homme en prison sans réfléchir à l’avenir de l’Administration Pénitentiaire au XXIe siècle ?
Quel est son rôle ? Punir ? Une fonction de resocialisation des détenus ?

· Le droit au travail commun
- les droits sociaux et droits du travail communs doivent être appliqués.
- ceux qui refusent de travailler sont stigmatisés par l’Administration Pénitentiaire et les magistrats, alors que le travail n’est pas obligatoire.
- le droit commun du travail doit s’appliquer de manière absolue au détenu, l’objectif de resocialisation doit être la mission première de l’Administration Pénitentiaire.
- le problème des personnes âgées détenues, qui ne sont plus en âge ou en état de travailler doit être pris en compte.
- sur quels critères un détenu travaille-t-il à tel ou tel endroit ?
- qu’en est-il de la liberté de commerce et d’industrie en prison ?
- le travail est un moyen de subsistance pour les détenus, et leur permet d’accéder à des produits de première nécessité.
- le travail est devenu un droit du détenu et non plus un accessoire de la peine.
- la question du détenu provisoire : ce n’est pas toujours facile de lui donner un travail (problème d’inscription dans la durée).
- l’état d’esprit réactionnaire d’une partie des surveillants ne facilite pas les bonnes conditions de travail. Il est nécessaire de réhabiliter le service public pénitentiaire.
- il y a un manque d’offres de travail dans les prisons françaises, en raison de la surpopulation carcérale, et une utilisation abusive. Si un droit au travail commun est instauré en prison, il est nécessaire d’affirmer des principes forts, afin qu’il soit respecté.

· la formation
- le travail et la formation sont des éléments essentiels de la resocialisation (qui est une des missions principales de l’Administration Pénitentiaire).
- La formation et le travail vont de pair. Il devrait exister un statut spécifique pour la formation.
- il ne faut pas obliger le détenu à choisir entre le travail et la formation.
- un revenu minimum devrait être dispensé quand le détenu suit une formation
- actuellement, la formation est obligatoire seulement pour les mineurs. Il devrait en être de même pour les adultes. Pour cela, il faut créer des obligations à la charge de l’Administration Pénitentiaire, telles que : les bourses d’études, les formations adaptées.... Si l’Etat a une obligation de resocialisation, il est nécessaire de se donner les moyens de le faire.
- des expériences positives dans l’enseignement ont été relevées, et notamment au lycée pénitentiaire de Bapaume, avec des professeurs volontaires.
- il y a trop de disparités en ce qui concerne les personnes qui ont accès à cet enseignement (très souvent, il s’agit de ceux qui reçoivent des subsides de leurs familles).
- le problème du financement de la formation.
- le rôle des SPIP dans l’élaboration d’un plan de formation
- il y a en moyenne moins de 2 professeurs par établissements (mandatés par l’éducation nationale). La grande majorité d’entre eux sont des volontaires et des bénévoles (comme l’association GENEPI par exemple…)

· Le contrat de travail
- le contrat de travail est conclu pour la durée de la détention ; les clauses de licenciement doivent être explicites : transfert, isolement, fin de peine/sortie de prison, et versement d’indemnités.
- pour l’Administration Pénitentiaire, la question du contrat de travail pénitentiaire n’est pas à l’ordre du jour. Cependant, le PACTE 2 a été lancé (plan d’amélioration des conditions de travail et d’emploi) :
 > problème de la population pénale,
 > amélioration de la cohérence des dispositifs d’insertion (formation, formation professionnelle, travail),
 > assurer une activité rémunérée et la formation,
 > se rapprocher du droit commun avec des supports d’engagement : tentative de formalisation des relations entre les personnes détenues et l’établissement

· Un revenu minimum
- il a été évoqué de mettre en place un revenu minimum pour les indigents ou une allocation chômage.
- parmi les 30 mesures d’urgence inscrites dans le rapport de la commission d’enquête du Sénat, le versement d’un revenu minimum vital faisait partie des priorités.
- l’Administration Pénitentiaire étudie actuellement une revalorisation des rémunérations des personnes détenues dans les clauses de concessions.
- le SMAP (salaire minimum de l’administration pénitentiaire) est à 30 ou 40% du SMIC, ce qui est insuffisant.
- quand le salaire d’un détenu est trop élevé (parce qu’il produit un grand nombre de pièces), on diminue le prix de la pièce, et le détenu doit alors augmenter son temps de travail pour gagner le même revenu qu’avant.

· Les relations des détenus avec leurs employeurs
- employer des détenus représente un grand intérêt pour les employeurs : la main d’œuvre est bon marché, absence de charges sociales…
- un cahier des charges est rempli lors de la passation du marché avec l’administration / le gestionnaire
- pourquoi les entreprises extérieures choisiraient-elles cette main d’œuvre plutôt qu’une autre ? Comment faire en sorte que les entrepreneurs y trouvent leur compte ?
- il faudrait une possibilité de créer des passerelles, pour que les détenus puissent trouver un autre emploi à leur sortie. Les expériences passées montrent qu’il est très difficile de rattacher la prison à la société.
- l’Etat refuse d’employer dans la fonction publique les personnes sortant de prison. Aujourd’hui, seuls les employeurs privés emploient les anciens détenus.
- employer des détenus représente des contraintes et des pertes de temps énormes pour l’employeur extérieur (attente au parloir, difficulté pour rendre visite au détenu, attente pour le faire sortir de la prison…).

Synthèse de la séance :

- le principe de l’application du droit du travail
- la réaffirmation et l’inscription de la formation
- la mise en place de contrats d’alternance pour varier le travail et la formation
- la mise en place d’un revenu minimum