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03/11/03 Conclusions : le principe de légalité

Mise en ligne : 1er février 2004

Texte de l'article :

Relevé de conclusion
Thème : le principe de légalité

Introduction de M. Péchillon

Le principe de légalité nécessite des règles, qui peuvent avoir des conséquences juridiques défavorables pour le détenu. Des recours peuvent être mis en place contre le détenu pour non-respect du règlement, du chef d’établissement ou aux injonctions du personnel pénitentiaire.

Le groupe de travail doit en outre s’interroger sur le règlement intérieur, son rôle et son contenu, ainsi que les obligations à charge de l’administration pénitentiaire. Le chef d’établissement a en général une grande marge de manœuvre dans la rédaction du règlement intérieur. Il faut aussi soulever le problème de l’accès au droit et aux informations.
Il devrait être obligatoire que le chef d’établissement fournisse le règlement intérieur et en diffuse des extraits (par voie d’affichage par exemple). La loi du 12 avril 2000 confie une nouvelle mission au Service Public : l’accès au droit et l’élaboration de règles de droit accessibles à l’ensemble de la population. Comment l’administration pénitentiaire peut-elle fournir cette information ? Comment garantir une mise à jour de ces textes ?
Les décisions des chefs d’établissement ne devraient pas durcir les règles établies au niveau national ; elles ne devraient permettre qu’un assouplissement des normes nationales au niveau local, en vue de la mission de resocialisation.

En ce qui concerne les mesures disciplinaires, il a été remarqué que la notion d’urgence a tendance à durer, et l’administration pénitentiaire revient rarement sur les mesures prises.

Les sanctions quasi-disciplinaires nécessitent un plus grand encadrement : mesures de transfert et d’isolement, changements d’affectation, retraits de permis de visite…

 - le principe de légalité concernant les greffes
L’OIP a posé le problème des détentions arbitraires.
Les greffes pénitentiaires ne sont pas assez contrôlés, et leur formation est insuffisante. Le caractère parfois arbitraire des peines a été constaté. L’administration pénitentiaire a changé récemment le problème de la computation des peines (remises de peines, grâces…) et refuse la communication des fiches pénales (ensemble d’éléments qui affectent l’exécution de la peine). Il est nécessaire de réduire au maximum la détention arbitraire, cette lutte étant constitutive de la première des libertés fondamentales. Plusieurs exemples concrets de détention arbitraire ont été cités.
L’administration pénitentiaire, consciente du problème, travaille notamment à la création d’outils méthodologiques pour faciliter la tâche des greffes, à partir d’un recensement des principales difficultés rencontrées.
Certains membres du groupe de travail se sont demandés pourquoi l’administration procède par voie d’instruction de service. Le greffe est-il le 1er acte administratif ou le dernier acte judiciaire ?

 - le règlement intérieur

- la possibilité de mettre en place un intranet avec une borne interactive a été envisagée : cela obligerait l’administration centrale à une mise à jour régulière des informations, pour éviter qu’elles ne deviennent obsolètes. Des traductions doivent être effectuées pour ceux qui ne parlent pas la langue (le problème de l’illettrisme n’est cependant pas résolu).
Les délégués du médiateur pourraient jouer un rôle primordial, et devraient intervenir.

Il faut cependant déterminer qui fera le choix de mettre les informations sur l’intranet. Pourquoi ne pas instaurer le principe de l’accès à Légifrance : les détenus doivent avoir accès aux informations de base, mais ils doivent aussi pouvoir aller plus loin. Car si l’on veut appliquer le droit commun, il faut donc un accès au Code du travail, de la santé, au Code civil…Chaque détenu devrait posséder un Code de procédure pénale.
Pourquoi ce système ne pourrait-il pas être mis en place, excepté pour des raisons techniques ? Il faudrait envisager la possibilité de plusieurs ordinateurs ou de relier les informations directement sur la télévision.

- pourquoi ne pas mettre en place un régime uniforme selon les types d’établissements ? Le règlement intérieur ne doit faire apparaître que les spécificités locales (horaires visites, repas, activités…).Les réglementations des fouilles n’ont pas leur place dans le règlement intérieur. Les détenus doivent comprendre qu’il y a des règles différentes selon les établissements.

- qui va élaborer le règlement spécifique ? Qui va le contrôler ?
Les circulaires doivent être contrôlées et publiées.

-quelle est la part du pouvoir discrétionnaire du chef d’établissement pour porter atteinte aux droits fondamentaux ?

 - la commission de surveillance
En général, elle se réunit une fois par an. Il est nécessaire d’élire un bureau permanent de contrôle, qui pourrait éventuellement vérifier le contrôle des règlements. Il faut lui donner une effectivité réelle et plus régulière. Pour cela, les familles et les détenus doivent être représentés. Il faut éviter le transfert des détenus susceptibles d’être élus en tant que représentants.
En outre, les rapports des commissions de surveillance doivent être rendus publics.

 - les sanctions disciplinaires
Elles ne sont pas neutres et impliquent des conséquences pour le détenu, car le Juge d’application des peines en tiendra compte. Le cumul des peines et des sanctions est inacceptable. En réalité, le détenu n’est pas sanctionné 2 fois pour le même fait, mais 2 fois pour la violation de 2 règles différentes : il est donc jugé à la fois pour un délit et une faute disciplinaire.
Si la sanction appliquée est le quartier disciplinaire, le détenu perd son emploi, son parloir et sa remise de peine. Des cas ont été cités où le détenu se trouve au mitard pendant le week-end et travaille la semaine.

 - la motivation des décisions

- la transparence administrative est primordiale. Tous les actes doivent être contrôlés.
Il a été envisagé de mettre en place une instance, qui ferait partie de l’organigramme de l’établissement, mais qui serait composée de personnes détachées de l’administration pénitentiaire et de l’établissement.

- la discipline pénitentiaire bénéficie-t-elle de l’article 6 de la CEDH ?
Le chef d’établissement est à la fois juge et partie : c’est lui qui sanctionne le détenu, après l’observation des faits, ce qui a une incidence sur le déroulement et la durée de la détention. La durée maximale des sanctions doit être abaissée (c’est actuellement une des plus importantes d’Europe). Une modification des statuts de la commission de discipline est nécessaire (autorité extérieure au chef d’établissement en matière arbitraire, qui aurait un pouvoir de contrôle sur les sanctions en aval). Pour contester la décision disciplinaire, un recours administratif préalable est nécessaire, avant de saisir le juge.
Le taux de suicide dans les quartiers disciplinaires est 7 fois plus élevé que dans le reste de la détention.

L’usage du quartier disciplinaire dépend beaucoup de la personnalité du chef d’établissement. Si celui-ci a une vocation pédagogique, la sanction du quartier disciplinaire est très peu utilisée, ce qui permet une diminution de la violence.

 - l’isolement administratif
Un détenu devrait pouvoir solliciter son placement à l’isolement, mais le placement imposé n’est pas admissible. Il faut tenir compte de la personnalité de chacun et éviter l’isolement de longue durée.
Le parallèle a été fait avec l’isolement psychiatrique. Si le placement s’impose pour certains détenus, ce n’est pas à l’administration pénitentiaire d’en décider. Il est obligatoire de prévenir tout de suite l’autorité extérieure et l’autorité judiciaire. Il est en outre nécessaire que le détenu consulte un médecin extérieur au SMPR pour vérifier son aptitude à supporter cette mesure (expert). La mesure d’isolement et le placement d’office doivent rester des sanctions à caractère exceptionnel. Le placement à l’isolement ne doit plus être une décision administrative, mais doit relever de l’extérieur. L’intervention de psychologues est essentielle.

 - le transfert
Il doit être contrôlé par les juges, car il y a des répercussions très importantes sur la vie familiale, et la préparation de la défense quand le détenu est prévenu. Qui décide du transfert d’un détenu ? Quelles en sont les raisons ? La raison la plus souvent invoquée est une sanction disciplinaire, pour maintien de l’ordre et de la sécurité.